Christiane Chaulet-Achour et Yahia Belaskri (Ouvrage collectif sous la direction de), L’Epreuve d’une décennie, Algérie, art et culture, 1992-2002, Editions Paris-Méditerranée, 2004. Publié dans le cadre de l’Année de l’Algérie en France, avec le concours

Au-delà des circonstances motivant l’élaboration de cet ouvrage pour esquisser un bilan de la création culturelle en Algérie durant la décennie noire 1992-2002, l’idée est d’en faire le symbole du partage d’un héritage commun. Globalement et en dépit d’une situation déliquescente de la création artistique en Algérie, l’existence de talents et les nombreuses potentialités qu’elle porte forcent l’espoir d’un mûrissement à partir d’un constat bien amer (Brahim Hadj Slimane).

En matière de production littéraire, le romanesque frappe par son extrême diversité et marque un tournant où se distinguent de nouvelles approches de lenfant, la femme, le couple (Christiane Chaulet-Achour, Bouba Mohammedi-Tabti). L’œuvre poétique est glorifiée par des hommages et témoignages à Tahar Djaout (Corinne Blanchaud-Jansen), Mohamed Sebti et Rachid Mimouni (Christiane Chaulet-Achour).

Le théâtre, pour sa part, est présenté comme une large fresque où les morts et les vivants, dramaturges et comédiens, donnent à cet ensemble une extraordinaire énergie créatrice. Bien que prolifique, il n’en demeure pas moins entaché par les événements de la décennie: son éthique s’en trouve compromise au niveau du résultat et de la gestion qualitative du produit (Ahmed Cheniki, Messaoud Benyoucef, Leïla Hamoutène).

Le cinéma et la musique, bien que peu de place leur soit consacrée, révèlent l’un et l’autre une originalité. Elargissant leurs frontières, ils ont conduit au brassage d’une variété de talents, ceux issus de la diaspora et de la deuxième génération pied-noire. Pour le cinéma, il est noté «… une multiplicité de thèmes et des traitements qui contribuent à réconcilier la culture algérienne avec sa pluralité plongeant au cœur d’une histoire aussi riche que complexe» (Mouloud Mimoun). La musique, comme pour le théâtre, est soumise au même constat: «absence de professionnalisme, inexistence des maisons de production, autant de tares et de difficultés qui ont ramené le raï… aux cabarets, son lieu fétiche d’expression» (Yahia Belaskri).

Au registre des langues, une lecture rétrospective sur leur considération, donne à voir comment les insuffisances d’un système ont conduit à une situation dominée par des luttes d’appareils empêchant leur communion pour une question nationale aussi vitale que la langue (Mohamed Benrabah). En recommandation, il reste à faire une politique linguiste pour un plurilinguisme, à l’instar des nombreux exemples qui existent dans le monde (Abdou Elimam, Dalila Morsly).

Le thème «Peuples et histoire» aborde un sujet où sont dévoilés quelques faits visant à rétablir des vérités sur la période coloniale. Ismaÿl Urbain, injustement relégué aux oubliettes de lhistoire, fut un anti-coloniste de la première heure, lui qui avait consacré toute sa vie à construire une Algérie française, qui fut une Algérie pour tous les Algériens, se retrouva dans le camp des anti-colonialistes (Michel Levallois). Sur un autre plan, pour les Juifs, ce sera une histoire tourmentée à travers les questions dantijudaïsme et d’antisémitisme, qui les mèneront, après plus de deux mille ans de présence en Algérie, à en partir comme une crue dans un oued saharien…(Richard Ayoun). Même lieu, autre départ perçu comme un exil: celui des Pieds-Noirs qui, en 1961 et 1962, rejoignaient une métropole quils navaient pour la plupart jamais vue (Eric Savarèse). Ils laissaient derrière eux l’histoire d’un imbroglio où était plongée ladministration française qui devait, sur le plan statistique, mettre la population indigène dans une catégorie quelle refusait de définir comme algérienne (Kamel Kateb). Pour clore ce chapitre, le récit d’un attachement à Sidi-Ghilès, ex-Novi, le village d’origine, donne aux retrouvailles ce côté indicible lié à lhumus commun dont sont faits Algériens-Algériens, Algériens-Français, Français-Algériens (Paul-Antoine Faizant).

En filigrane, la question des arts plastiques est à peine effleurée. Elle est néanmoins représentée, en couverture, par une toile d’Otmane Mersali.

auteur

Ammara BEKKOUCHE

logo du crasc
insaniyat@ crasc.dz
C.R.A.S.C. B.P. 1955 El-M'Naouer Technopôle de l'USTO Bir El Djir 31000 Oran
+ 213 41 62 06 95
+ 213 41 62 07 03
+ 213 41 62 07 05
+ 213 41 62 07 11
+ 213 41 62 06 98
+ 213 41 62 07 04

Recherche