Sélectionnez votre langue

Les enjeux de l’organisation de l’agglomération oranaise

N°23-24 | 2004  | Oran : Une ville d'Algérie | p. 45-61 | Texte intégral 


Organizational Stakes in the Oran Agglomeration

Abstract : Analyses and empirical reports confirm the impression that Oran is becoming. common place. Being connected to the end of the 70’s, the movement of complexity which characterized urban evolution has slowed down. It has even regressed in fields such as highway classification, and urban services.
This town banality is explained to a great extent by the role confined to the market which produces at the same time a larger choice of products in each place and a decrease in the variety of the global offer, because the same brands are found everywhere.
In the inter town competition to attract investments and skilled workers, the current globalization is unfavourable to towns becoming common place. In effect to adapt to the evolution of use and needs, new spaces new specific differentiating forms contributing to town complexity, must be produced regularly.

Key words : urban form - banality - urban composition - urban function - externality.


Tewfik GUERROUDJ : Architecte urbaniste, a'urba Agence d’urbanisme Bordeaux métropole Aquitaine.


Oran se banalise ?

En arrivant en avion vers Oran, on commence d’abord par apercevoir d’immenses zones périurbaines, sans structure apparente mais constituées de tissus denses à trame géométrique, isolés les uns des autres. Dans les plus éloignés, les anciens villages et douars se distinguent par leur aspect divers, moins géométrique et avec un semblant de structure. Ensuite, on voit les bords de la zone urbaine principale, banlieues constituées d’agrégats différents les uns des autres, juxtaposés en un ensemble incluant des friches. Enfin, on voit la partie la plus ancienne de la ville avec une structure caractéristique et une sky line qui la différencient de toutes les autres villes que l’on a pu survoler.

On est frappé par le contraste suivant : la périphérie et la banlieue sont semblables – à la dimension près – à ce que l’on peut voir non seulement en décollant d’Alger ou en survolant Mostaganem, mais aussi des villes d’autres pays du Sud et de l’Est méditerranéen, ou même beaucoup plus lointains, alors que la partie la plus ancienne de la ville a toujours une structure et une forme caractéristique et différente des autres. On ne retrouve pas non plus cette impression consacrée par la célèbre appellation « Ouahran el bahya » [1] , cette image spécifique et très positive de la ville.

La question qui se pose alors est de savoir si cette « banalisation » est aussi perceptible du sol et, si oui, de l’expliquer : configuration commune des lieux et des quartiers, homogénéisation de la ville, perte de la complexité urbaine ? La question semble d’autant plus pertinente que la littérature de l’urbanisme met en évidence la recherche de la spécificité, de la mixité sociale et fonctionnelle, de la complexité croissante de la structure urbaine et des espaces de villes européennes telles que Bologne, Barcelone, Lyon ou Sheffield.

S’il est vérifié, ce constat conduit à considérer que des facteurs communs doivent expliquer l’évolution récente d’Oran et d’autres villes d’Algérie, évolution convergente avec celle de certaines villes de la Méditerranée et qui, de façon paradoxale, malgré la mondialisation, diverge de celle de villes d’Europe occidentale ou d’autres pays, tel que Shanghai en Chine, qui veulent prendre une place plus favorable dans la répartition mondiale du travail.

Nous pensons qu’une des principales cause tient aux implications, sur la structure urbaine, des modalités de fonctionnement du marché.

Pour répondre à ces questions, nous caractériserons d’abord la forme urbaine d’Oran et son évolution, puis nous essaierons de mettre en relation cette évolution avec les modalités de fonctionnement du marché, enfin nous évoquerons les incidences de l’évolution de la structure urbaine sur le fonctionnement de l’agglomération.

L’évolution combinée des usages et de la composition urbaine

Une lecture de la ville à partir de l’espace public

L’évolution de la forme urbaine, vue à partir du sol, ou plus précisément de la partie de la ville visible depuis l’espace public, sera saisie en utilisant les données d’une enquête exhaustive menée en 1991 pour caractériser la structure urbaine d’Oran [2] , dans le cadre des études préparatoires à l’élaboration d’un nouveau plan directeur d’urbanisme. Cette source sera complétée par les observations empiriques faites à l’occasion de nos déplacements réguliers à Oran.

Les logiques dominantes de création des tissus seront utilisées pour caractériser la forme urbaine. Ce sont ces logiques qui s’expriment dans le règlement d’urbanisme, s’il existe sous forme écrite, ou dans ce qu’on peut considérer comme le règlement implicite, plus ou moins observé tacitement, comme c’est le cas de l’habitat « informel ». La lecture des tissus est équivalente dans les deux cas, ce qui montre que le « pouvoir ordonnateur » des règlements implicites est du même ordre que celui des règlements écrits. Le désordre extrême résulte des situations transitoires ambiguës : application d’un nouveau type de règlement écrit à un tissu existant, mélange de règlements. L’anomie n’est jamais constatée, car la prégnance des types usuels de construction est très forte.

Les tissus réalisés, d’après une même logique, sont homogènes selon :

- leurs caractéristiques générales : fonction, localisation, surface des lots, COS, trame viaire ;

- leur état : voirie, espace piétonnier, bâti, dynamique, impression de densité, verdure et type de construction [3] .

Les logiques dominantes de création de tissus qui ont été relevées sont, dans l’ordre historique de leur apparition [4] , les logiques classiques, modernes et de dérégulation. En effet, les modifications des tissus antérieurs, médiévaux, ont été suffisamment profondes pour que leurs logiques spécifiques de composition ne soient plus ou pas assez lisibles.

L’enquête a permis de constater, rétrospectivement, que les mutations qui s’effectuent dans différents domaines, fonctionnel, social, bâti…, sont en corrélation. L’évolution des tissus suit donc des trajectoires largement déterminées par leurs caractéristiques, dont principalement la localisation et l’élasticité des tissus (possibilité de transformation et surtout de densification). Ce constat renforce la pertinence de la technique d’analyse [5] .

L’épaisseur historique est peu perceptible

La ville médiévale a été fondée en 903 par des marins andalous. Le site, difficile à défendre, a été probablement choisi parce que c’était le seul site côtier de la région où de l’eau douce était disponible [6] . Oran était constituée, à l’origine, de la médina, organisée selon une logique de composition additive, avec des types de constructions relativement homogènes.

La ville a été occupée à deux reprises par les Espagnols [7] et, à part les monuments et forts, presque entièrement détruite une première fois par le séisme de 1791, qui a largement contribué à mettre fin à l’occupation espagnole.

La première reconstruction a vu la ville sortir de son site par l’installation sur le plateau d’un nouveau type de quartier destiné aux juifs, que le bey voulait attirer pour développer la ville : le Derb, planifié d’un coup et réalisé selon une trame orthogonale au début du XVII° siècle. Cette recherche d’attractivité par la réalisation d’un tissu adapté à un nouveau besoin est une démarche – très actuelle – qui va contribuer à la complexification de la forme urbaine.

Les effets directs et indirects de la conquête française ont abouti à une nouvelle rénovation à large échelle de la ville. Les tissus médiévaux ont été reconstruits (ils apparaissent aujourd’hui comme des alignements).

La ville médiévale a laissé des traces sur cinquante hectares de surface de tissus urbains et de fortifications, casernes et palais. A part les monuments, toutes les constructions ont été rénovées [8] , et le tracé des rues a été en partie rectifié au début de la période coloniale. Ces tissus, devenus marginaux en raison de l’extension de la ville sur le plateau, ont perdu leurs fonctions de centralité et continuent à se dégrader ou à être détruits.

L’épaisseur historique d’Oran, moins perceptible que celle d’Alger ou de Constantine, tend même à avoir une visibilité en diminution, du fait de la transformation des tissus les plus anciens.

La constitution du patrimoine classique 1848-1959

Le développement de la ville durant la période coloniale était la conséquence de nouveaux besoins, qui se sont traduits par l’introduction de nouvelles fonctions urbaines, de nouveaux types de constructions et de tissus urbains. Il en est résulté une complexification régulière de la forme urbaine selon des modalités qui ont évolué et que l’on peut périodiser.

La croissance urbaine s’est faite essentiellement à l’intérieur d’enceintes jusqu’en 1936, date du déclassement du nouveau rempart. De façon dominante, le développement de la ville a été conduit selon une logique « classique » qui a progressivement été supplantée après la deuxième guerre mondiale par une logique « moderne ».

La logique classique procède par composition à base de parcellaire mise en œuvre sous deux formes de composition urbaine : l’alignement et le lotissement.

Dans l’alignement, les constructions sont disposées en ordre continu à l’alignement de l’espace public, dont elle constitue la façade. L’élément principal du règlement d’urbanisme est la définition du rapport entre la hauteur autorisée des constructions et la largeur de la rue.

Dans le lotissement, c’est la relation des constructions à la parcelle qui prime et qui fixe la densité de construction autorisée. L’accroissement de la densité fait passer du lotissement à l’alignement.

La ville « classique » correspond aux premières périodes, 1100 hectares de tissus urbains sont apparus sur les plans édités entre 1932 et 1950, dans de rares cas jusqu’en 1959. La voirie et le parcellaire de ces tissus sont tracés de façon planifiée, et l’occupation est progressive. Dans certains cas, il peut durer plusieurs décennies : par exemple Sidi-el-Kettar (ex-Gambetta), tracé sur les cartes de 1928, n’a fini d’être comblé que vers la fin des années 1980, alors que la densification de certaines parcelles bâties était déjà engagée. En effet, même si les opérations d’équipement des terrains pouvaient concerner de grandes surfaces, les opérations de construction étaient de volume limité, ou relativement réduit.

Ces tissus sont implantés dans la première et la deuxième enceinte puis en secteur de couronne au-delà des glacis des deuxièmes remparts, avec quelques implantations extérieures isolées : lotissements suburbains et villages rejoints par l’urbanisation. Le devenir des tissus classiques dépend des localisations et des densités.

Les tissus ou parties des tissus les plus denses, qui ne sont pas valorisés par des fonctions de centralité, sont en cours de dégradation. Un des tissus les plus anciens, La Calère, a même été rasé. Ceux qui sont le long de principaux axes et dans le centre se maintiennent, avec des déficiences d’entretien, qui ont commencé par les ascenseurs et les caves. La fonction de centralité de ces tissus s’est renforcée ou a été conservée, des logements ont été transformés en bureaux.

Les tissus les moins denses ont été densifiés ou sont en cours de densification par adjonction de parties de construction, d’étages, ou même par rénovation des constructions. C’est particulièrement le cas des tissus comprenant des habitations dites « individuelles ». Ce processus, engagé durant la période coloniale, aboutit parfois à un changement de types de construction et de tissus : c’est le cas des quartiers de front de mer, transformés durant les années 1950.

Les tissus d’habitation collectifs sont en général stables. Dans quelques cas, il y a une densification par occupation des espaces de prospect : c’est le cas de la tour Ampère, dont une partie de l’espace de prospect a été attribué pour la construction de villas.

Une des autres caractéristiques essentielles de l’évolution récente est la localisation désordonnée de commerces et d’activités, faisant perdre leur caractère résidentiel à certains tissus.

Une partie de ces tissus classiques est perçue par les Oranais comme un patrimoine contribuant à l’identité de la ville, et les autorités ont conscience de la grande qualité de certains tissus. Aucune politique officielle ou procédure spécifique d’intervention n’a cependant été mise en place.

L’évolution de ces tissus s’explique ainsi :

- les investissements sont plus rentables en périphérie ou sur des terrains ou parties de terrains non bâtis ;

- le secteur public, face à la crise du logement des constructions, a concentré ses investissements sur les projets neufs, l’entretien ne consommant que quelques pour cent de l’activité BTP,

- les techniques de réalisation et d’intervention sur les anciennes constructions ont été délaissées.

Il en résulte une perte de caractère et une homogénéisation de ces tissus.

La complexification de la ville continue avec la modernité 1928-1990

La logique moderne se caractérise par la prédominance des phénomènes du point de vue du bâti ; ils deviennent déterminants au ragard de la ville [9] . L’application de la logique moderne a évolué au fil du temps, d’une façon qui permet une périodisation.

La première période moderne apparaît en 1928, avec les premiers faubourgs. Durant cette période vont apparaître des règles de composition urbaine qui font référence, plus ou moins directement, à la chartre d’Athènes et au style international, le plus souvent de façon biaisée.

La deuxième période moderne est apparue en 1959, au moment où les préoccupations quantitatives dans la production de logements ont prédominé. La ville n’a pratiquement pas été modifiée entre 1962 et le milieu des années 1970, puis le développement a repris selon une variante de cette logique moderne.

La logique moderne a produit des tissus de remplissage, de plans de masse essentiellement durant la première période, puis de densité durant la deuxième.

La ville moderne de l’époque coloniale comprend 820 hectares de tissus tracés ou réalisés entre 1928 et 1962. Son impact sur l’image de la ville est du, dans une large mesure, aux actions menées durant les années 1950 : nouveaux tissus ; des zones d’emprises diverses avec des immeubles d’une vingtaine d’étages, sur les glacis du nouveau rempart et la transformation d’alignements par l’implantation d’autres immeubles d’une vingtaine d’étages. Il en est résulté le sky line particulier de la ville et cette image des années 1960 connotée positivement d’« Oran ville moderne ». La complexification de la forme urbaine a donc continué et a contribué à l’attractivité de la ville.

Dans les tissus réalisés selon une logique de remplissage, l’occupation des terrains est réalisée au fur et à mesure des besoins et des opportunités foncières, sans planification préalable, un peu comme on remplit un puzzle. Elle peut être ordonnée par des tracés préexistant et conduire la densification à l’ordre continu. Historiquement, ces tissus sont d’abord les faubourgs au-delà des glacis, puis les zones d’emprises diverses, en particulier sur l’emprise des glacis et parallèlement l’occupation des pentes à l’ouest de la ville par un ensemble de tissus de bidonvilles devenus « habitat spontané ». Les tissus de remplissage se sont densifiés par occupation des terrains libres, avec une dominante d’équipements et de bureaux pour les zones d’emprises diverses.

Les plans de masse répondent à la logique de l’architecture : concevoir un ensemble de constructions achevé et le produire d’un coup tel que conçu, sans médiation d’un règlement d’urbanisme de détail. Ils répètent un ou quelques types d’immeubles ou de maisons. Les plans de masse sont dispersés en secteur de couronne autour et à l’intérieur des urbanisations préexistantes.

Les plans de masse collectifs ont été très peu modifiés ; à leur fonction résidentielle se sont ajoutés des commerces et petites activités au rez-de-chaussée, exceptionnellement des adjonctions de volumes pour équipement ou habitat.

Les plans de masse individuels, quant à eux, tendent à être densifiés, avec adjonction de commerces et petites activités.

Le développement de la ville a été piloté par de grandes interventions et, particulièrement, les projets et les tracés des voies primaires qui caractérisent la structure d’Oran. En relation avec la suppression du tramway en 1949 [10] , il s’agissait d’adapter la ville à l’automobile.

La ville de la deuxième période moderne avait vu en 1991 la création de 900 hectares de tissus nouveaux dans les vides de la tâche urbaine et à sa périphérie. Il en est résulté notamment un éclatement de la forme urbaine vers l’est de la ville et de nouveaux rapports centre-périphérie. Le report de croissance en périphérie fait que l’urbanisation réelle à prendre en compte ne peut plus être celle de la commune mais devrait être, depuis les années 1970, celle du bassin d’emploi, qui est beaucoup plus étendu.

Les principales interventions se font dans une logique de densité avec la ZHUN, avatar du plan de masse collectif avec répétition d’immeubles semblables. Le règlement d’urbanisme vise au contrôle quantitatif de l’équilibre fonctionnel logement-équipements-réseaux, et fixe les densités (depuis 1981, à l’exception d’un cas en 1959).

La volonté de maîtriser la croissance urbaine [11] est déclarée mais les outils nécessaires n’étaient pas disponibles. D’une part, le nouveau schéma directeur a confirmé et développé les orientations de l’ancien en matière de structuration urbaine par la voirie ; d’autre part, il a refusé d’anticiper des mouvements inéluctables comme le développement de l’habitat illicite sur les pentes du Murdjadjo et celui des lotissements licites ou non.

L’installation progressive de la crise du logement et la cohabitation qui en a résulté ont conduit à un accroissement de la densité urbaine. Au milieu des années 1980, il y avait 70 m² de terrain urbanisé par habitant à Oran, plus de 80 à Alger, plus de 90 à Constantine, et environ 200 à Tokyo, Londres ou Paris.

Des caractéristiques qui avaient déjà commencé à apparaître se sont confirmées : le creusement d’un hiatus entre la planification globale de la ville et les opérations particulières. Une des conséquences est que les maîtres d’ouvrages, dans une vision sectorielle, se sont restreints aux finalités les plus immédiates de leurs ouvrages, sans prendre en compte leur insertion urbaine. Les opérations planifiées d’habitat se sont repliées sur elles-mêmes, avec des équipements localisés en position centrale, devenant des isolats dans la ville. Elles n’ont ainsi pas pu contribuer à la structuration de la ville et sont, directement ou indirectement, devenues des facteurs de dégradation de la structuration urbaine.

Les tissus existants ont naturellement continué à être modifiés : continuation des anciennes tendances à l’achèvement, à la dégradation, de certaines tissus et aussi de nouvelles tendances (densification plus forte, consolidation de l’habitat informel, création désordonnée de commerces et petites activités).

La banalisation, depuis 1980

La logique de dérégulation a dominé le développement de ces dernières décennies. Nous n’avons pas mesuré la surface urbanisée ainsi produite. Elle est apparue à partir de la fin des années 1970, puis s’est progressivement imposée pour devenir dominante face à une réglementation qui a cédé largement ou totalement. Le développement de cette logique est en relation avec la volonté de libéraliser, qui correspondait en réalité à un ultralibéralisme. Il est aussi en corrélation avec le développement du terrorisme et le fait que la principale préoccupation de l’Etat a été la lutte contre les terroristes au détriment du développement de politiques à long terme et de l’application de la réglementation. Elle se caractérise par l’usage maximal de la parcelle, d’abord en prévoyant les usages les plus rentables possibles, ensuite en implantant la quantité maximale de construction compatible avec des usages, même dégradés.

La première lecture sur plan ou photo aérienne de cette logique, les nouveaux lotissements, date de 1986 [12] . Ces nouveaux lotissements n’apparaissent si tardivement que parce que les plans antérieurs ne permettaient pas de les distinguer et parce qu’ils avaient commencé à se développer en zone périphérique, à l’extérieur du périmètre d’analyse. Les spécificités de ces lotissements sont la production de nouveaux types de maison et d’immeuble, caractérisés notamment par l’évolutivité et l’intégration de locaux à usage professionnel ; une relation spécifique aux espaces publics avec la recherche de l’intimité de la « houmma », qui correspond approximativement au voisinage, et en conséquence le cloisonnement des quartiers ; la très forte densité des tissus. D’anciens tissus sont transformés de façon à acquérir une partie de ces traits.

De nouveaux types sont apparus, notamment la promotion immobilière en collectif à moyenne et grande hauteur et les immeubles tertiaires.

Depuis 1991, avec le développement de la promotion immobilière privée, cette logique a embrayé sur des opérations qui auraient auparavant répondu à une logique moderne. La différence vient de la localisation, dont l’opportunité foncière est quasiment le seul critère, et de la densité qui est excessivement élevée [13] .

La diminution de la complexité

La réduction des différenciations d’Oran aux différentes échelles : interne, par rapport aux autres villes d’Algérie, et par rapport à certaines villes d’autres pays, est confirmée par l’analyse. C’est l’impression dominante, aussi bien face à l’évolution des quartiers anciens que face aux nouvelles extensions depuis une vingtaine d’années.

Les constructions récentes s’inscrivent dans une typologie courante limitée et directement apparente. Le type de construction n’entretient pas de relation particulière avec les lieux et donne l’impression qu’en toute localisation la densité maximum est recherchée. Les transformations des anciennes constructions tendent à les faire ressembler aux nouvelles.

La dimension architecturale [14] est donnée par le « façadisme », ensemble de styles qui se caractérisent par un emprunt simplifié et direct à des références, historiques ou modernes, par une décoration intensive ou en recherchant une singularité qui les différencie du contexte.

Les fonctions de la voirie se brouillent par une implantation systématique de commerces et de services le long des axes les plus fréquentés, même s’ils ont été visiblement aménagés comme des voies rapides. Fonctions de desserte locale et de transit se superposent et d’une façon qui tend à devenir d’autant plus systématique que les axes sont importants [15] . Cette localisation de commerces, services et même de certaines activités, sur les terrains le long des routes, fait qu’il n’y a pas matière à créer des zones spécialisées, ayant leur propre structure et intégrées à la structure urbaine qu’elles contribuent à diversifier. Parallèlement, la ségrégation spatiale s’accentue.

Les transformations d’Oran observées jusqu’à la fin des années 1970 paraissaient globalement de même nature que celles décrites par C. Aymonino parlant de la ville moderne européenne en 1977 (op. cit.) ou par A. Clementi [16] à propos des banlieues italiennes. Ces ressemblances peuvent s’expliquer par les mécanismes traditionnels de transformation, de densification urbaine, liés à la rente foncière et aux processus de valorisation et de dévalorisation qui sont en œuvre. La ville se complexifie régulièrement, bien que de façon moins intense durant la dernière période.

La fin des années 1970 a marqué un tournant : le renoncement de fait à l’organisation d’une cohérence globale et le développement de l’habitat individuel. Cette tendance s’est progressivement confirmée sous forme d’une ouverture du champ de l’organisation urbaine au marché. Son aboutissement est la nouvelle Constitution [17] et, en 1990, la loi 90-29 relative à l’aménagement et à l’urbanisme n’organise aucune procédure d’urbanisme opérationnel. L’idée qui sous-tend ces textes est que l’aménagement doit pouvoir être payé par la revente des terrains au prix du marché.

Ainsi, d’une part, les capacités de conception et d’organisation des opérations d’urbanisme, qui étaient déjà limitées, ont encore été affaiblies. D’autre part, les besoins solvables qui n’étaient pas pris en charge par l’Etat et la planification ont contribué à susciter le développement de l’économie informelle et de son pendant, l’urbanisation dite « spontanée » et ses processus d’auto-organisation. Dans l’esprit de la Constitution et de la loi 90-29, les marchés foncier et immobilier, dont les mises en place spontanées étaient ainsi permises, allaient rapidement jouer leurs rôles régulateurs.

Il en est résulté l’homogénéisation de la ville décrite plus haut, l’arrêt du processus de complexification et même une régression dans des domaines tels que la hiérarchisation de la voirie et le fonctionnement des services urbains. Ces phénomènes traduisent une divergence avec l’évolution des villes européennes, où l’action publique essaie de piloter l’évolution de la ville pour l’adapter aux nouveaux usages et besoins, contribuant ainsi à accroître la complexité de l’organisation urbaine.

La situation étant ainsi caractérisée, deux questions principales se posent : en quoi le marché et la politique qui lui a attribué ce rôle ont-ils une part de responsabilité ? Indépendamment des aspects esthétiques et identitaires, est-ce que cette évolution présente de réels inconvénients du point de vue du fonctionnement urbain ? [18]

L’ultralibéralisme facteur de banalisation

Les marchés régulent de façon efficace les relations entre l’offre et la demande si certaines conditions sont remplies et pour certains biens. Les conditions sont celles qui permettent la concurrence : information des acteurs, nombreux producteurs et garantie de bonne exécution des contrats, notamment par l’existence d’un Etat qui a les moyens de faire respecter lois et règlements et une justice non vénale.

Les biens concernés sont les marchandises fongibles, c’est-à-dire des objets qui se vendent, s’achètent, sont produits et peuvent être remplacés par d’autres de même nature de même qualité et de même quantité : denrées telles que les paquets de lessive ou les chaussures. Si les biens à échanger ne répondent pas à toutes ces conditions, des phénomènes de rente apparaissent et l’efficacité sociale du marché se dégrade. C’est le cas du marché des œuvres d’art qui est soumis à des mouvements spéculatifs et qui n’a souvent pas permis à tous les artistes qui se sont révélés les plus éminents de vivre dans l’aisance et de produire sans problèmes matériels. Les œuvres d’art ne peuvent en effet pas être produites dans des qualités équivalentes. Van Gogh mort, il n’est plus possible de produire des tableaux équivalents.

Le marché est un système d’auto-organisation qui conduit à maximiser les bénéfices de l’ensemble des entrepreneurs, si le marché fonctionne parfaitement, ou d’une partie des entrepreneurs, s’il fonctionne imparfaitement. Les bénéfices maximisés sont financiers et sont produits grâce à des spéculations dont les bénéfices sont évaluables par calcul économique et les taux d’actualisation. Les finalités sont donc les plus restreintes [19] et l’horizon pris en compte est très court, et d’autant plus court que la situation est instable [20] .

La question qui se pose est donc : est-ce qu’on peut compter sur le marché pour réguler la ville, comme le prévoyait implicitement la loi 90-29 ? Quels vont être les effets du marché sur la structure urbaine ?

Tout d’abord, il faut noter que les terrains, urbanisables ou urbanisés, ne sont pas des biens fongibles. Ils ne peuvent pas être produits, même s’ils peuvent être aménagés ou réaménagés, Ils existent pratiquement en quantité finie [21] et ils se différencient tellement les uns des autres par la localisation, l’exposition, l’accessibilité, etc., qu’il n’est pas toujours possible d’en trouver de qualité équivalente. Ceux que l’on peut trouver en qualité équivalente sont ceux qui ont le moins de valeur : urbanisation récente dans des lieux banals.

Tous ces facteurs font que, selon la théorie économique, le marché n’est pas adapté comme système exclusif de régulation du foncier. Dans l’intérêt général, le marché doit être complété et régulé par des opérateurs et des moyens tels que taxes et impôts, procédures particulières d’aménagements et d’urbanisme opérationnel, normalisation…

Les constructions réalisées dans cette optique tendent à être conçues comme des équipements industriels, c’est-à-dire pour une durée de vie en relation avec leur amortissement et l’évolution des usages et/ou des modes, donc très courte. Après cette période, elles sont détruites, rénovées ou laissées en friche selon le rapport entre la valeur intrinsèque du terrain et le coût d’une ré-urbanisation [22] .

Les projets sont localisés en fonction de l’opportunité et conçus en intégrant tout ce qui est nécessaire à leur fonctionnement immédiat. La logique de composition d’un ensemble de projets ainsi conçus est une logique non apparente de juxtaposition d’objets centrés sur eux-mêmes, avec souvent un signal permettant de les localiser : une façade décorée visible d’une voie rapide ou à fort trafic. La logique de juxtaposition n’est pas apparente car, à la vue du projet réalisé, plus rien ne permet de remonter à l’opportunité qui a déterminé sa localisation (présence d’une grande parcelle, héritiers qui veulent vendre, diminution conjoncturelle de taxes, accord particulier…).

Une autre caractéristique du marché, en tant que système d’auto-organisation, est qu’il tend, de façon générale, à homogénéiser les produits. L’implantation de Coca-Cola en Asie du Sud-Est en est un exemple : la capacité publicitaire, d’organisation et de logistique, le poids de l’image de la marque ont écrasé des milliers de marques locales de boissons gazeuses. Ainsi, il peut y avoir à la fois un plus grand choix de produits en chaque lieu et une diminution de la variété de l’offre globale, car les mêmes marques se retrouvent partout. Dans les villes françaises, ce processus se traduit par la conquête progressive des rues les plus animées par les franchises et les chaînes de magasins, avec comme effet fréquent une banalisation des centres-villes.

Le processus d’homogénéisation peut donc s’expliquer dans une assez large mesure par le rôle confié au marché.

Ces caractéristiques sont-elles compatibles avec un bon fonctionnement urbain ? Pour répondre à cette question, il faut examiner ce qui fait la valeur de la ville et du cadre bâti.

L’efficacité par la complexité et la différenciation

La ville en tant qu’écosystème artificiel complexe génère des externalités [23] , c’est-à-dire des avantages pour les entrepreneurs (et aussi pour les citadins), qui ne sont pas des économies d’échelle mais qui proviennent de la multiplicité et de la variété des implantations.

La ville s’est formée sous l’effet de mécanismes d’auto-organisation, dont les règles d’implantation à partir de tracés préexistants, les effets de proximité, les jeux d’une multitude d’acteurs ayant des stratégies particulières, le marché, et aussi d’une volonté d’organisation de parties de ville et/ou de la globalité de l’agglomération, par l’Etat et les collectivités locales. La structure de la ville a donc varié au fil de l’histoire. Les mécanismes d’auto-organisation ainsi que les objectifs de l’organisation ont évolué.

De nouveaux mécanismes d’auto-organisation se mettent en place, en fonction du contexte culturel et institutionnel, tandis que d’anciens peuvent disparaître. La composition additive le long de tracés ruraux préexistants a disparu des zones bien contrôlées institutionnellement. Un autre type de composition additive par auto-organisation est apparu, particulièrement dans les villes françaises, les entrées de ville, ensemble de commerces extensifs et de services localisés de façon visible et facilement accessible en voiture le long de rocades et de pénétrantes.

De nouvelles modalités d’actions institutionnelles surgissent, comme ce fut le cas de la planification au XX° siècle ou actuellement du développement durable, du partenariat public privé [24] et éventuellement de la gouvernance. Les innovations concernent aussi la composition urbaine. Les histoires de l’urbanisme sont en partie celles des innovations en matière de composition urbaine [25] , avec cette particularité que les urbanistes peuvent utiliser tous les modes de composition inventés.

La ville est donc un système au sens d’organisation non aléatoire qui s’est formé sous une pression de l’évolution, donc dans le temps, et dont la complexité va croissante, ce qui lui permet d’assurer des fonctions de plus en plus différenciées tout en relâchant la contrainte de la distance [26] par le développement de moyens de transport, de moyens de transmission et de formes urbaines adaptées.

Un fait nouveau est l’intensité de la mise en compétition, par les formes actuelles de la mondialisation, des villes entre elles pour l’accès aux ressources essentielles que sont l’emploi et les employés qualifiés.

Les équipes en charge du développement urbain positionnent les villes dans cette compétition en mettant en valeur leurs avantages spécifiques : localisation, savoir faire particuliers, qualité du cadre de vie et du cadre bâti, et mettent aussi en œuvre des politiques de différenciation, interne et par rapport aux villes concurrentes, qui visent à accroître ces avantages. Elles adoptent ainsi une stratégie présentant des similitudes avec celle des grandes firmes qui, pour éviter la mise en concurrence directe, essaient de se positionner sur un créneau, une image de marque, qui rend leur offre unique. Ce processus et la recherche d’un meilleur fonctionnement social ont pour effet d’entretenir l’évolution de la structure urbaine et des espaces, publics et privés, vers plus de complexité.

Au regard des tendances lourdes de l’évolution du phénomène urbain, l’évolution récente d’Oran et des agglomérations algériennes apparaît comme une régression [27] . La simplification de la structure urbaine ne permet pas de générer les externalités positives nécessaires pour accompagner le développement économique et l’insertion par l’emploi qu’il permet. A titre d’illustration, la dégradation de la structure hiérarchisée de la voirie accentue les embarras de la circulation et fait perdre un temps considérable aux personnes obligées de se déplacer dans les embouteillages. Il s’agit d’une externalité négative.

La ville est un système complexe et ouvert, qui a une dimension chaotique. Le chaos peut produire de l’ordre, mais pas dans tous les cas. Un des rôles essentiels de la gestion urbaine est de veiller à la production de l’ordre, de plus en plus complexe, qui permet de renforcer les externalités positives. La résorption d’un retard dans cette action nécessite assez rapidement des capacités d’action qui dépassent les possibilités locales et empêchent la ville de remplir une de ses fonctions essentielles : être une d’œuvre d’art collective, qui traduit la culture et la capacité de vivre ensemble.

Les interactions entre forme urbaine, fonctionnement économique et qualité de vie sont telles que, pour que la ville soit attractive et profite des opportunités, il est indispensable que son évolution soit pilotée de façon à contribuer à la production des innovations nécessaires à une satisfaction élargie des nouveaux besoins par le cadre bâti.

 



NOTES

[1] - Que l’on peut traduire par Oran où il fait bon vivre.

[2] - La ville d'Oran, à l’intérieur de ses limites communales, avait en 1991 une surface de 4 300 ha, en excluant les terres cultivées incluses dans la tâche urbaine, la forêt des planteurs et la bande littorale des Genêts. Cette surface comprenait 2870 ha de tissus urbains non spécifiques et 1430 ha de tissus urbains spécifiques : port, jardins publics, cimetières ... et de grandes emprises, de chantiers et de terrains vagues.

[3] - La logique de la construction et la logique de la création du tissu se sont révélées en si forte corrélation qu’un seul paramètre a suffi pour classer et délimiter les tissus : le ou plutôt les types de constructions qui le composent.

[4] - les tissus sont datés en fonction de leur première apparition sur un des plans ou des photographies aériennes que nous avons pu consulter Il s'agit de ceux de 1832, 1848, 1880, 1905, 1928,1959,1962,1972,1981,1986 et 1991.

[5] - Il serait intéressant de comparer entre elles les trajectoires de différents tissus différentes villes en vue d'essayer d'en établir une typologie

[6] - Les sites occupés durant l’antiquité étaient Béthioua et Arzew à l’est, Mers El Kebir à l’ouest.

[7] - De 1 509 à 1 708 puis de 1 732 à 1 791.

[8] - Rénovée veut dire détruites et reconstruites.

[9] - Carlo, Aymonino : Lo studio dei fenomeni urbani, officia edizoni.- Roma 1977 traduit par A Panerai, F. Divorme, et A. Chantelat, UPA 3 Versailles.

[10] - Aux motifs qu’il ralentissait la circulation automobile et que, tout en étant déficitaire il ne satisfaisait pas les usagers. Le service devait être assuré par des autobus.

[11] - La maîtrise de la croissance urbaine n’est théoriquement pas possible et pratiquement jamais réalisée.

[12] - En faisant abstraction des bidonvilles qui correspondent aussi à cette logique mais à cause de la pression du manque presque absolu de moyens.

[13] - C’est à dire qu’il n’y a plus de recherche du type de construction optimum en fonction de la densité prévue. Seule compte la possibilité de rentabiliser (par la location ou la vente) à court terme le bâtiment.

[14] - C’est à dire le fait de donner une dimension culturelle à l’acte de bâtir.

[15] - Au point que ces dernières années des commerces se sont implantés sur les voies rapides d’Alger, les clients se garent sur les bandes d’arrêts d’urgence, parfois élargies en parking.

[16] - Bentivega, V., Clémenti, A. et Spigai, V. : les enjeux du projet urbain.- Cours de post-graduation en urbanisme, EPAU, Alger, ed centro analisi sociale, Roma, 1986.

[17] - Elle protége de façon très stricte la propriété foncière.

[18] - Il s’agit du fonctionnement urbain de façon générale et, de façon particulière, en tenant compte du choix libéral de l’Algérie. Ce choix implique la mise en concurrence de villes, ce qui est une des motivations de la référence aux villes d’Europe occidentale.

[19] - Des entrepreneurs peuvent avoir un discours et des finalités plus large, mais elles sont souvent liées à des considérations de part de marché comme la défense de la marque ou la recherche d’exclusivité qui peuvent créer des situation de rente en se différenciant des offres concurrentes qui cessent ainsi d’être équivalentes.

[20] - Les incidences sur le patrimoine urbain et architectural de cette attitude ont été abordées dans la revue Insaniyat,.n°12, Patrimoine(s) en question.

[21] - Certains pays tel que les Pays Bas, Monaco ou le Japon, et plus récemment certains Etats du Golf, ont gagné du terrain sur la mer. Cette production d’une part est en quantité trop faible pour être significative, d’autre part a un coût qui la réserve à des opérations exceptionnelles pour pays riches.

[22] - Alors que les constructions antérieures pouvaient être réhabilitées à plusieurs reprises, tant que la valeur patrimoniale résultant de leurs qualités justifiait le coût de la réhabilitation nécessaire pour qu’elles retrouvent un nouvel usage.

[23] - Jean Rémy, La ville un système économique.

[24] - Partenariat public privé, PPP, est une nouvelle forme de partage contractuel des risques entre le secteur privé et le secteur public pour de grands projets. L’objectif est d’améliorer le rapport qualité/prix, de faciliter et d’accélérer la réalisation de projets publics, en utilisant le savoir faire et les méthodes du secteur privé. Le PPP est adapté à des projets capitalistiques, complexes, tarifiables, local et dont l’urgence est exclue à cause du délai de négociation du contrat. Source : exposée d’Eric Lutrand, DESS MOPU 2004-2005.

[25] - Cf. en particulier Bruno Fortier, Villes et projets un inventaire contemporain, rapport de recherche DHC-PUCA, décembre 1993 IFA.

[26] - Jean Rémy, La ville vers une nouvelle définition.

[27] - Cette régression est plus particulièrement perceptible dans le cas d’Alger en faisant la comparaison avec d’autres capitales du Maghreb. Si il avait fallu désigner une capitale pour le Maghreb à la fin des années 60’ ou au début des années 70’ Alger se serait imposée par son poids économique, son marché du travail, ses équipements, son animation et aussi sa situation centrale. Aujourd’hui, face à Casablanca ou à Tunis, le seul avantage net qui lui reste est sa localisation centrale.

logo du crasc
insaniyat@ crasc.dz
C.R.A.S.C. B.P. 1955 El-M'Naouer Technopôle de l'USTO Bir El Djir 31000 Oran
+ 213 41 62 06 95
+ 213 41 62 07 03
+ 213 41 62 07 05
+ 213 41 62 07 11
+ 213 41 62 06 98
+ 213 41 62 07 04

Recherche