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Colloque "Corps, Signes et Mimésis" Université de (Paris VIII - 28 juin 1997)

L'ambition de ce colloque procède d'un constat paradoxal : malgré l'importance des bouleversements qui s'y opèrent, le Maghreb souffre d'un déficit chronique en termes de visibilité, plongé qu'il est dans une sorte d'opacité épistémologique qui s'impose d'autant mieux qu'elle peut s'interpréter comme une fatalité inhérente à l'objet lui-même (compte tenu de l'histoire passée et récente). Pourtant le travail d'investigation nous semble d'autant plus nécessaire que l'espace dont il est ici question participe du vaste réseau méditerranéen dans lequel s'inscrivent naturellement les pays riverains.

Pour l'heure, les sociétés maghrébines subissent, plus souvent qu'elles n'assument, des processus socio-culturels d'une ampleur et d'une intensité sans précédent. On les somme en outre de rallier, dans l'urgence, les rivages heureux d'une modernité salvatrice sans les assurer de pouvoir maintenir le lien essentiel avec une histoire particulière et un imaginaire spécifique. Comment rejoindre le fameux "village global" tout en préservant une certaine mémoire de ses racines et "l'honneur de la tribu" ?

Cette problématique cruciale est souvent vécue et interprétée par les Maghrébins eux-mêmes sur le mode fantasmatique d'une douloureuse crispation identitaire dont on retrouve les symptômes dans les pratiques socio-culturelles et les postures ethico-normatives. Jusqu'à oublier que l'appel du large hante toutes les cultures et les nourrit de ses délires et de ses peurs. Jusqu'à méconnaître l'évidence historique de l'échange et du partage.

Pourtant les Maghrébins voyagent beaucoup. De plus en plus. Ils explorent dans leurs corps et leurs esprits d'autres frontières imaginaires, ces marges fertiles où s'élaborent de nouvelles pratiques communautaires, de nouveaux langages de création. Malgré les frontières. Souvent, on ne voit pas ces passeurs de rêves. Ce sont, au mieux des nomades, parfois des clandestins. On ne retient d'eux que leurs replis agressifs, leurs exils hautains, leurs errances hallucinées. Leurs dérives suicidaires...

Cette vision réductrice - trop souvent relayée par les media - ne rend pas compte de l'extraordinaire diversité des stratégies à l'oeuvre dans ces sociétés. De même qu'elle occulte de manière quasi-systématique les étonnantes ressources créatives de leurs acteurs. Ces dernières sont particulièrement évidentes dans les différents domaines artistiques (littérature, théâtre, cinéma, musique, etc.) où les sortilèges somptueux et redoutables de la mimésis sont de plus en plus contestés.

Emergence de nouvelle sensibilités - comme le montre bien le rapport au corps - de nouvelles formes de conscience historique qui place le sujet à la croisée des chemins. Hors de la Tribu d'où s'élève toujours la voix des Ancêtres et face au Divers en tant qu'il établit la Relation, c'est-à-dire le métissage. On méditera à ce propos cette mise au point d'Edouard Glissant (Le discours antillais) :

"Le métissage comme proposition suppose la négation du métissage comme catégorie, en consacrant un métissage de fait que l'imaginaire humain a toujours voulu (dans la tradition occidentale) nier ou déguiser. Les analyses des phénomènes d'acculturation et de déculturation sont donc stériles en tant que telles. Toute société est acculturée. Toute déculturation est à même d'être transformée en motif d'une culture nouvelle. Il importe ici de souligner non pas tant les mécanismes d'acculturation et de déculturation que les dynamiques capables de les figer ou de les dépasser".

C'est bien ce "dépassement" éthique et poétique auquel nous convient de manière plus pressante les cultures maghrébines depuis environ deux décennies. Par les nouvelles configurations qu'elles postulent, elles nous invitent ainsi à accueillir le citoyen virtuel d'un Maghreb véritablement pluriel et authentiquement moderne.

PROGRAMME

Première partie : colloque

1- Voi(x) es du corps

ZANNAD Traki (Université de Tunis) : "Le corps, repère d'une mémoire collective au Maghreb".

SAADI, Noureddine (Université d'Artois) : "Le corps dans le droit".

TEBBAA, Ouidad (Université Cadi Ayyad, Maroc) : "Le corps comme enjeu dans la peinture marocaine".

CHAULET-ACHOUR, Christiane (Université de Caen) : "Le corps des femmes dans la fiction féminine : de la brisure à la clôture du sérail".

2- Eros et passion (s) du corps
YACINE, Tassadit (Paris., E.H.E.S.S.) : "Eros et passion dans la littérature orale kabyle".

KACIMI, Mohamed (Ecrivain) :"L'amour dans la langue".

BOUNFOUR, Abdallah (Université de Bordeaux 3, INALCO) : "Parole et corps sain" YELLES, Mourad (Université de Paris 8) : "D'amour transi : Figures du corps mystique".

Deuxième partie : Table ronde

"Le corps dans l'art et les media: Algérie 1980" : (Slim, Allalou, Aziz Smati, Réda Doumaz, TarikMesli,...)

Troisième partie : Hommage

"La nuit des Généreux (Lejouâd)"

Théâtre : (Montage de textes d'Abdelkader ALLOULA avec BENBAREK Miloud, GUENANECHE Dahmane et MOKHTARI Lakhdar)

Performance (Tarik. Mesli)

Récital poétique (avec ALLOULA Malek, BEKRI Tahar, KACIMI Mohamed, LAABI Abdellatif, TENGOUR Habib)

Concert (avec MAROUF Nadir)

notes

* En hommage au dramaturge et comédien algérien Abdelkader ALLOULA (assassiné à Oran en Mars 1994), manifestation co-organisé par le DEA "texte, imaginaire, société", l'Institut Maghreb - Europe, l'UFR "Arts, Philosophie, Esthétique" (Département, Théâtre), avec le soutien du collège de la recherche de Paris 8, la collaboration de l'A.C.A. et de l'association des amis d'Abdelkader ALLOULA.

** Responsable scientifique du colloque, Université Paris 8.

auteur

Mourad YELLES **

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