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Algérianité et onomastique. Penser le changement : une question de noms propres ?

Insaniyat N°57-58| 2012 | Algérie 50 ans après l’indépendance (1962-2012) permanences et changements | p.143-159  | Texte intégral 


Algerianism and onomastics.Thinking about change: a question of proper names ?

Abstract: Change cannot give a miss in the heritage aspect of onomastics (or proper names) in the largest country in Africa, the Arab world??? And the Mediterranean basin and a society whose "parentage is established from time immemorial" (Lacheraf.) The field of names and its management has not only a scientific or cultural interest; but also the highest importance for the functioning of a society. It notes, at once, «quantitative» stakes and issues and "qualitative" whether surnames, forenames, telecommunications, security, marital status, banks, mapping, international transport, as works of fiction, account names or passe words. The toponymic and anthroponymic worlds, the result of a long process of historical and linguistic multilingual sedimentation have been so much traumas and deregulation during the colonial and post-colonial period that is important to recall the anthropological springs local de/nominative traditions, the current size of the deficit in this area and the relevance of reading grid duality "civil modernity / repressed history" from the onomastic data.

Keywords : names - civil modernity - colonialism - marital status - parentage - Algeria.


Farid BENRAMDANE: Université d’Ibn Badis, Mostaganem, 27000, Algérie.
Centre de Recherche en Anthropologie Sociale et Culturelle, Oran, 31000, Algérie.


Nous proposons de penser le changement à partir des données onomastiques. L’onomastique est la science des noms propres ; ses domaines de recherche les plus connus restent la toponymie (les noms de lieux) et les anthroponymes (les noms de personnes), auxquels nous pouvons associer les noms de tribus, de peuplement, de cultes, de reliefs, de voies de communication, etc. Parler des noms propres, c’est ressusciter des rapports historiques, réveiller et renaître des ressorts culturels, symboliques, identitaires enfouis et intériorisés dans la mémoire collective. C’est en même temps, attribuer, de manière consciente ou inconsciente, une dimension très socialisée, voire historicisée, à un espace et à une population, forgés du point géographique et événementiel, par de forts re/positionnements historiques, géopolitiques et identitaires, de colonisation/ décolonisation/ recolonisation, donc, d’occupation/ libération/ réoccupation des lieux et des territoires, et par conséquent, de leurs re/dé/nominations.

Nous rattacherons cette thématique à la problématique du changement de la question culturelle dans ses déclinaisons symboliques, institutionnelles et fonctionnelles, aussi bien économiques, administratives, commerciales que sécuritaires, au travers de lectures d’un type de représentations mentales onomastiques façonnées par la praxis historique ainsi que par un mode d’intervention langagier structurant : une société à tradition orale, plurilingue et multilingue du point de vue synchronique et diachronique.

Quel est le degré de pertinence référentielle des institutions nationales par rapport à la continuité spatio-temporelle de l’identité onomastique véhiculée par les noms propres, la connaissance patrimoniale et l’intelligence des principes de réinterprétation des faits de culture, de société et de dé/ nomination, et de leur intégration dans un processus de changement du pays ?

En effet, les champs de l’activité humaine, pour leur simple identification, sont tissés par des millions de noms dits « propres », qu’il s’agisse de patronymes, de prénoms, d’ancêtres éponymes, de télécommunications, de médias étrangers, de sécurité aérienne et maritime, d’état civil, de banques, de renseignements, de cartographie, de transport international, de tourisme, que d’œuvres de fiction, littéraire ou filmique, de sobriquets ou de pseudonymes, de noms de compte ou de mots de passe. Le domaine des noms propres et sa gestion n’ont pas un intérêt uniquement scientifique ou culturel, mais ils relèvent de la plus haute importance pour le fonctionnement et la gestion d’une société. Ils relèvent, à la fois, d’enjeux « quantitatifs » et « qualitatifs »[1], que ce soit, aussi bien, dans la pérennité des faits de société et de culture que dans l’insertion des entités nommées dans le concert mondialisé des hommes et des biens. Les dimensions transfrontalière et transnationale se heurtent, en dépit d’un processus d’anglicisation des dénominations autochtones dans les carrefours de l’information, aux propriétés patrimoniales et identitaires de l’onomastique, et de la toponymie, « reflet et mémoire des sociétés qui l'ont produite et conservée[2] ».

Effectivement, si on interroge l’identité algérienne et/ou maghrébine, dans une perspective de changement, à partir des données onomastiques, la question de la formation des noms propres et notamment, celle des noms de famille (ou patronymes), est inévitable, actuellement, eu égard au degré de dysfonctionnements linguistiques, sources de dérèglements généralisés à l’échelle de la société, dont souffrent jusqu’à présent aussi bien les concitoyens que les institutions de ce pays[3]. La numérisation des documents d’identité, à traitement biométrique, donnent une dimension exponentielle à cette problématique. Quant à la toponymie et à sa normalisation internationale, elle relève, depuis une quarantaine d’années, de la négociation entre Etats[4], en raison des enjeux qu’elle renferme sur le plan géopolitique et géostratégique, notamment sur le plan sécuritaire.

Nous soumettons à notre réflexion, dès lors, les enjeux, les actions, les projections liés à la conception de la diversité linguistique et culturelle de l’Algérie et ses implications sur son développement durable, à partir d’un questionnement sur la réalité ou le degré de réalité d’une modalité linguistique précise (la dé/nomination) dans ses dimensions aussi bien anthropologiques qu’institutionnelles au travers de ses déclinaisons les plus fonctionnelles. Quelle est la place et l’importance des ancrages territoriaux et à leurs diversités référentielles culturelles, par rapport aux dis/continuités spatiotemporelles de type identitaire à dominante onomastique dans la conception d’une « modernité autocentrée[5] ». Ce type de précaution méthodologique devient incontournable, dès lors qu’interroge la pertinence de l’objet que nous estimons analyser, et la position du problème que nous tenterons de construire au travers des concepts usités, des ancrages de type linguistique et anthropologique et leur relative temporalité : « il faut donc englober, dans notre problématique, les justifications et les pratiques qui découlent des approches patrimoniales ; on constate, par exemple, que ce souci de défense du patrimoine peut  à la fois justifier une politique libérale qui ignorerait les processus antérieurs d’imposition d’une langue et les politiques de récupération linguistique[6] ». L’objectif de la réflexion sur le changement, dans ce domaine, est la difficulté de restituer à travers notre approche des faits de langue et de dé/nomination, un visée spécifiquement historique, à l’effet de réunir deux domaines, à la fois de connaissance et d’intervention, dans le traitement de l’onomastique locale, « où il n’existe ni données pures, ni données parfaitement objectives. Seul l’examen du cadre épistémologique limite le risque de confusion entre données perceptives et données du problème[7] ».

Modernité onomastique et refoulé historique

Deux types d’entrées sont possibles :

- Celle d’une perception du changement dans une optique institutionnelle, et l’on verra l’Etat civil, à titre d’exemple, comme un simple service administratif,

- Ou celle qui privilégie une approche multidimensionnelle, et on verra cette institution comme étant le dépositaire de la généalogie d’une société, dont « la filiation est établie depuis la plus haute antiquité »[8].

Forcément, l’on évoquera un système de nomination traditionnel au travers des noms de lieux, de tribus, de personnes, de saints, etc., à leurs lignages et à leurs lointaines généalogies, séculaires, voire plusieurs fois millénaire, pour montrer en fin de parcours, la gravité du déficit identitaire contenu dans les noms de famille, conséquences in /conscientes et dévastatrices, opérées par la pense coloniale française. « Il nous semble que, dans une société en crise comme la nôtre, il s’agit moins prioritairement de s’attarder à penser un futur, à (ré) inventer une modernité que de réactualiser des tranches du passé « refoulé ». Question cruciale, périlleuse diront d’autres, néanmoins incontournable si nous imaginons un instant que l’état civil actuel continue la représentation mentale de la filiation coloniale française. Il est même la représentation symbolique de la non-filiation, cristallisée par deux paradigmes de refondation, à la même période, de la personnalité algérienne par l’administration et l’armée françaises coloniales, la Terre et la Personne : le Senatus Consulte et la loi sur l’Etat civil (1882)[9] ».

Deux faits méritent d’être soulignés.

Premièrement, la nomination dans cette région du monde l’Algérie et/ou le Maghreb (l’Algérie est une unité politique, le Maghreb est une unité anthropologique) restitue une totalité irréductible de données de fonds sociologiques, démographiques, symboliques et linguistiques  structurant une société dans la pluralité de son patrimoine historique et de ses parcours identitaires et culturels (libyque, berbère, punique, latine, arabe, espagnole, turque, française etc.), de ses croyances religieuses et mystiques (païenne, juive, chrétienne, musulmane), de ses dimensions africaines aussi.

Deuxièmement, l’observation, sur la très longue durée, de ces faits de culture, au travers de ses noms propres, témoins fidèles et irrécusables, nous apprend à nuancer les certitudes du jargon politique dominant de ce qu’il est convenu de nommer thawabet « les constantes ».

Quant aux noms de lieux, l’analyse des politiques toponymiques à l’échelle du Maghreb restent tributaires, à quelques nuances près, des stratégies de production générées et, profondément surdéterminées par des représentations coloniales et postcoloniales, qu’elle soit, pour cette dernière, à dominante nationale, régionale ou internationale.

De l’indépendance à la normalisation : confusion conceptuelle et dérives idéologiques

Du point de vue historique, nous pouvons considérer que l’Algérie indépendante a connu deux opérations de « normalisation » de sa toponymie locale, celle débutant en 1962 et celle de 1981. Si la première peut être perçue comme une entreprise de réappropriation symbolique et de reconquête politique d’un patrimoine ayant valeur de souveraineté nationale et de son recouvrement ; la deuxième, par contre, est un échec, consommé juridiquement, car confondant « normalisation », « uniformisation » et « standardisation ».

Dès 1963, sont promulgués dans le journal officiel de la République Algérienne (JORA) des décrets portant changement de noms de communes en Algérie. Une étude détaillée des noms contenus dans la nomenclature officielle nous permettra de faire ressortir des lignes de conduite qui ont présidé à l’élaboration de cette liste. Dans son ensemble, cette opération de changement des noms semble réhabiliter les schémas traditionnels de la toponymie locale, sur la base d’un ordre logique de priorités :

- un remplacement systématique des appellations de souche française ;

- une restitution des appellations restées ancrées dans les usages locaux de la région, des appellations aussi bien berbères qu’arabes,

- une attribution de nouveaux noms, inexistants dans la toponymie locale.

Une grande partie de cette nomenclature sont des désignations « systématiques[10] », c’est-à-dire, le fruit d’une décision politique d’un pouvoir conquérant ou dominant, et non un produit de l’imaginaire populaire. Désignations rares, elles font référence, à l’évidence, à des catégories sémantiques en rapport à des dates et à des figures marquantes de l’histoire des deux pays.

En 1981, trois textes officiels ayant un rapport avec l’onomastique algérienne furent promulgués.

Le décret n° 81-26 du 07 mars 1981 portant établissement d’un lexique national des noms de villages, villes et autres lieux[11] fait obligation aux assemblées populaires communales (APC) :

- « d’étudier et d’arrêter, de manière précise, la dénomination de tous les lieux possédant déjà un nom ;

- de revoir certaines dénominations non conformes à nos traditions et de prévoir, le cas échant, une nouvelle dénomination adaptée aux spécificités locales[12] ».

Les assemblées sont en outre tenues de consigner par écrit : « les noms en langue nationale vocalisée. (…) les noms sont transcrits en caractère latins sur la base de la phonétique arabe[13] ».

Cela supposait à la date de la promulgation de ce décret que la toponymie algérienne n’était pas fixée, du moins du point de vue des usages traditionnels : « on pouvait croire le processus achevé, du moins bien structuré… (…), ce qui évidemment pouvait susciter des difficultés, au moins administratif ; que la transcription en langue arabe posait des difficultés de lecture : on imagine que certains noms prêtaient à confusion ou à ambiguïté…[14] ».

En plus, aucune indication n’est donnée sur cette non-conformité aux traditions contenue dans la nomenclature toponymique et qu’il faudrait revoir. Remarquons que dans le texte officiel aucune mention n’est faite à la toponymie berbère ou amazigh (le terme berbère /amazigh n’est mentionné à aucun moment dans le texte officiel).

La démarche qui devait aboutir à une « normalisation » de la toponymie algérienne et de son écriture a tenté d’imposer un usage différent de celui usité par les locuteurs, fruit d’un très long processus historique de sédimentation linguistique : Skikda devient ainsi Soukaykida, Qsentina<Qousentina, In Aménas<AinAmenas<Ain Oumenas, Tiyaret<Tiaret<Tihart<Tihart, Ghilizane<Ighil Izane, Blida<Al Bouleida…

Aussi, il est important de relever que ce décret a été abandonné par les autorités du pays, en raison des très vives réactions qui l’ont accompagné. N’ayant pas été abrogé officiellement, la toponymie algérienne se trouve devant un vide juridique, qui n’est, par ailleurs, nullement l’expression de la dynamique linguistique onomastique dans sa dimension culturelle et historique la plus féconde.

Quant à l’état civil et à l’anthroponymie, Lacheraf, plus incisif, écrira, à ce propos: « C’est un peu ce qui est arrivé à l’état-civil de l’Algérie dans les funestes années 1970 quand des farfelus, eux aussi tard-venus à la langue arabe et au nationalisme, décrétèrent que ce vieux pays devait renouveler les appellations, noms de villes et lieux dits, etc. sans prendre en considération la forme correcte de ces noms, ni le fait pour eux de correspondre à la logique d’une histoire nationale et humaine plusieurs fois millénaire, s’agissant de vieilles cités connues universellement, de lignées de personnes au très long passé d’une double origine berbère et arabe qui avait marqué depuis les temps anciens la terre, les gens, les villes et villages, les hauts-lieux de mémoire et cimetières des aïeux et de fabuleuses légendes inscrites dans le roc de la géographie et vécues, à part égales, comme dans toutes les nations[15] ».

Sur un plan conceptuel, nous pouvons considérer l’opération de 1981 à :

- une action d’uniformisation car une seule langue (la langue arabe) a servi d’unique référence à l’effet de « corriger » le paysage toponymique national ;

- une entreprise de standardisation, car un seul modèle, linguistique, l’arabe « classique », écrit, a servi de norme exclusive dans la restitution aussi bien orale qu’écrite des toponymes: « il semble enfin qu’un souci d’hypercorrection ou de sur norme ait été à la base de certaines transcriptions pour lesquelles on s’est plus soucié de restituer la norme de l’arabe institutionnel classique (…) que la prononciation réelle des Algériens »[16] ;

- une tentative de dérèglement car la manipulation politique des faits de culture et de langue, situés à l’extrême bout de la pratique langagière, c’est-à-dire dialectologique, produit  d’une population sur un pays aux régions aussi vastes que l’Algérie, peut être considérée comme une atteinte, en fin de compte, au caractère patrimonial symbolique pluriel de la toponymie locale: « les noms doivent être transcrits en caractères latins, sur la base de la phonétique arabe » ;

- une volonté politique de type jacobin de rejet, sur un plan synchronique et diachronique, du caractère plurilingue et multilingue de la société algérienne.

Si, à un niveau opérationnel transparaissent quelques éléments de la normalisation toponymique au sens où l’entendent les recommandations de la Conférence des Nations Unies[17], exemple de l’obligation de l’unicité du nom, dans l’orthographe et dans les usages, l'emploi de dénominations identiques au niveau d'une même commune est non-recommandé ; il n’est exagéré de dire, à cet égard, qu’il a eu, à un niveau doctrinal, confusion entre « normalisation » et « arabisation ». Nous avons déjà qualifié cette dernière d’« arabisation idéologique » par opposition à « arabisation linguistique » : « celle qui ne confond pas l'arabisation comme ré/aménagement linguistique et l’arabisation idéologique ; cette dernière, elle, équivaut à une désalgérianisation par une désorganisation des cadres qui peuvent asseoir toute filiation : les langues algériennes, l'histoire (substrat et apports étrangers), les cultures, les religions, les traditions… Entre une présence historique effective, une synthèse mouvementée, pulsionnelle, pétillante à plusieurs dimensions, un imaginaire fécond, nos idéologues et les visions d’appareil encore tenaces, ont opté pour une filiation fantasmagorique; à l’invariance de l’identité lui substituer la contingence d’une idéologie aux angles et à la nature inexorablement conflictuels et dualistes, fussent-ils d’essence linguistique (arabe, berbère ou autre) ou religieuse: occidentale / orientale, arabe / berbère, arabe classique / arabe maghrébin, arabe/ français, français / anglais, juif / musulman etc… Une approche d’une pauvreté et d’une stérilité accablantes, comme le dit Lacheraf « ne tenant aucun compte de la géographie, de l'esthétique, du caractère affectif de la transmission identitaire propre à notre pays depuis la plus haute antiquité " (1998)[18] ».

En définitive, cette opération (1981) ne peut être considérée comme un acte de « normalisation » en raison des faits suivants :

- une opération de restructuration du patrimoine toponymique local, lésant les usages linguistiques traditionnels consacrés (amazigh et arabe algérien, mais aussi ottomans, espagnol, latins, puniques…) ;

- un déni identitaire d’un substrat fondateur de la toponymie locale : la souche amazigh ;

- une des continuations de la représentation mentale onomastique coloniale, en matière d’exclusion et de marginalisation des us et coutumes nominatives et dénominatives des Algériens: « Si la politique de dénomination coloniale avait pour but de maximiser le contrôle sur la tribu en effaçant jusqu'à son nom pour couper toute référence à un passé commun, celle de l'Algérie indépendante qui suivit la même politique, menée par la puissance coloniale d'alors, fut de maximiser l'unité nationale en éliminant toute référence à des noms de groupes ou de tribus qui pourraient être utilisés comme prétexte de division de l'unité nationale[19] ».

Si, depuis les années 1990, des faits marquants vont restructurer le paysage linguistique officiel, avec la création du Haut-Commissariat à l’Amazighité en 1995 et la constitutionnalisation de tamazight comme langue nationale en 2002, la problématique de l’écriture des noms propres algériens de souches aussi bien amazigh qu’arabe reste entière. De manière régulière, la presse nationale et locale rend compte des irrégularités dans l’état civil[20] et dans la transcription des noms propres algériens, aussi bien de lieux que de personnes.

La gestion actuelle de la toponymie et de l’anthroponymie algérienne se caractérise par des dysfonctionnements structurels que nous résumerons comme suit :

- on a reproduit les mêmes représentations mentales onomastiques contenues dans le dispositif mis en place par l’administration coloniale;

- des a priori idéologiques et politiques ont présidé à l’élaboration des textes officiels de 1980 ;

- l’absence d’une base de données toponymiques et anthroponymiques nationales et régionales. Son existence aurait jeté les bases d’une politique sérieuse de normalisation et adoption d’un système de transcription et de translittération des noms algériens aussi bien de langues amazigh qu’arabe algérien et/ou maghrébin.

Incompatibilité de gestion : refoulé historique et modernité civile

La systémique de l’onomastique ne pourrait également se contenter d’une approche éclatée des faits de langue et culture : si l’amazighité, l’arabité, l’islamité sont et restent des composantes de l’identité nationale, l’Algérianité est une centralité, aboutissement d’un très long processus historique de mise en morphologie des langues et des cultures, depuis le libyco-berbère jusqu’à la langue française. Des phénomènes d’hybridation, d’interpénétration intra et inter-linguistiques ont façonné l’univers onomastique algérien, et le sémantisme de certaines formations ne peuvent être élucidé que par la convocation des différentes strates qui les ont constitués et les ont fait évoluer du point de vue phonétique, morphologique et sémantique.

En matière d’anthroponymie, la tradition onomastique algérienne, de souche amazigh ou arabe, était différente du système français, patrilinéaire et matrilinéaire (touareg) pour la première, plus complète et systématique pour la deuxième, sous la forme : ism, alam, kunya, laqab, nisba (exemple : ‘Abd al Rahmân Abou Zayd Walî al Dîn Ibn Khaldoûn al Tûnsî). De nombreuses études, menées par Parxymies, Yermeche, Lapierre, Soufi, Benramdane, Cheriguen, Benkada…[21] considèrent que le système de nomination traditionnel était archaïque, non économique  et que la loi de 1882 (Etat civil) a introduit une certaine rationalité dans le système de nomination par l’imposition du patronyme. Les qualificatifs usités par ces auteurs rendent compte de la nature de l’entreprise de re/restructuration mise en place par l’administration coloniale : « rationalité coloniale », « syndrome nominal » « fracture du nom », « catégorie de la modernité civile », « processus redénominatif[22] »… Il est vrai que l’identification des personnes est beaucoup plus aisée avec le patronyme, dénomination dès lors commune et juridiquement invariable à toute une famille et sa filiation.

C’est, cependant, moins la validité intrinsèque de ce nouveau système de nomination qu’il faut analyser que les conditions historiques et administratives de son imposition[23], unique dans l’histoire ancienne et moderne de l’humanité; le seul à avoir travaillé à un double niveau de la conscience dans un objectif de dislocation identitaire: « fonder ou refonder autoritairement une nation homogène, sur la base d’une langue unique au mépris des populations qui la composent, dont le passé et la culture sont déniés et dont les droits sont bafoués »[24]. En France, le patronyme a connu une évolution historique « naturelle » d’une durée de dix siècles pour s’imposer comme catégorie de nomination. En Algérie, la constitution de l’état civil (était) et (devait) être « une œuvre de dénationalisation[25] », c’est-à-dire «franciser plus résolument les patronymes indigènes pour favoriser les mariages mixtes». Il a été réalisé. « en 13 ans, à peine[26] ».

Si des mesures ont été prises dès l’indépendance avec la suppression de l’innommable SNP (sans nom patronymique), il reste que les types de requêtes de changement des patronymes s’expliquent si on observe le corpus des noms : Tahane, Kelb, Beghal, Ferkh, Khamadj, Zebiba, Chaddy, Rassenadja « Cette permissivité quant à l’attribution d’un nom patronymique par les officiers d’état civil laisse deviner les dérives nominatives auxquelles se sont adonné les officiers d’état civil qui ont attribué des noms sortant des normes de nomination traditionnelle locale : noms onomatopéiques, noms d’animaux ou de choses, d’excrément, obscènes, injurieux et humiliants[27]: Khra, Khakha Khamadj, Zebila/ Zbel, Troum, Zamoum, Tati, Debdabba, Didi, Teztouzi, Dib, Kelb, Dadja, Dik, Fekroun, Chady, Begraa , Raselkelb, Demaalatrous, Debbah, Dar, Guittoune, Guignol / Guignoule, Casemate[28] ».

Mais la partie invisible de l’iceberg reste l’écriture des noms : des centaines de milliers de requêtes sont déposées chaque mois au niveau des daïras et tribunaux algériens. La « francisation coloniale», en touchant à la forme des noms, a atteint le signifié : ainsi Farid devait devenir Alfred, Kaci/ Cassis, Naima/Noémie, Adjemi/Eugene, Lahcen/Lancel, Slimane/Simon, Toumi/Thomas[29]. Il n’est pas étonnant que Belhoussine ait plus de 100 orthographes en Algérie. Avec la numérisation (exemple de l’extrait de naissance 12 S), la mondialisation et son corollaire, la normalisation, en caractères latins, tolérant la circulation des biens et des personnes et interdisant la mobilité orthographique de leurs noms, la problématique a pris une dimension exponentielle. L’onomastique algérienne est l’objet de pratiques allographiques systématiques.

Pratiques allographiques généralisées et « onomaphagie »

La transcription graphique des toponymes et des anthroponymes algériens est loin d’être résolue. Il faut retenir qu’aucun système de transcription ou de translittération n’est parvenu à imposer ses règles. Les procédés de transcription graphique qui caractérisent l’écriture des noms propres algériens sont des systèmes à dominante allographique au sens où l’entendent Dorion et Poirier. Ce type de réalisation se nomme « allographe » ; il se dit de « chacune des deux ou nombreuses formes d’origine commune que peut prendre un nom de lieu. L’on suggère de caractériser d’allomorphes les noms dont à la fois l’écriture et la prononciation diffèrent, lorsque la prononciation diffère, on parle d’allophone ; seule l’écriture diffère, on parle d’allographe[30] ».

On ne peut faire abstraction d’un tel degré de généralisation allographique sans (s’) interroger (sur) les probables et possibles explications d’un mode d’intervention n’établissant en fin de parcours aucune règle dans la procédure de mise en place d’un usage normalisé dans l’écriture des noms propres. « A cette forme naturelle d’extermination par assimilation qu’on appelle glottophagie (Calvet, 1974), s’ajoute une autre, baptisée linguicide, qui relève de l’action volontariste des gouvernements tendant à anéantir les langues minoritaires par la violence régalienne, (…) Ce phénomène de la mise à mort d’une langue par la liquidation de ceux qui la parlent ou par la violence symbolique portée sur le corps même de la langue…[31] ».

Pour quitter cet état d’hypothèses, il s’impose aux institutions et aux chercheurs algériens[32] un type de recherches à base de plusieurs paramètres: traces écrites les plus proches possibles de la création de la forme graphique de ces noms; recoupements d’éléments historiques de nature différente :légale, administrative, technique, linguistique (étymologique, morphologique, orthographique…) ; relectures, à posteriori, forcément post-coloniales et inéluctablement relevant de traitement d’un type précis de pathologies relevant de périodes historiques précises. L’accumulation des matériaux soumis à la description et l’exploitation des données onomastiques depuis une vingtaine d’années par les institutions et les chercheurs algériens au regard au nombre de thèses de magisters et de doctorats soutenus, de projets PNR et d’établissements agréés, de manifestations scientifiques organisées ont été concrétisées, sur un plan institutionnel, par l’érection d’une unité de recherche sur les systèmes de dénomination (RASYD), la forme la plus aboutie en matière de recherche sur l’onomastique locale (deux divisions « anthroponymie » et « toponymie », 13 équipes de recherche (toponymie antique, toponymie médiévale, toponymie coloniale, patronymes et état civil, prénoms, onomastique littéraire, onomastique commerciale, onomastique électronique…).

Le cadre académique, eu égard à l’ampleur des traumatismes historiques menés à l’échelle de l’individu comme de la société, est en mesure d’exploiter ce genre de données grâce aux recoupements statistiques et techniques et aux procédures délibérément voulues et construites sur un traitement systématique dans la mesure où il s’agit de rappeler la dimension stratégique de la matrice ethnolinguistique dans la pérennité des faits de culture et de société.

Changement, langues et nomination : permanence et totalité

C’est dire, en fin de compte, les questions linguistiques, quel que soit le degré de technicité institutionnel de leurs modes de traitement dans les politiques publiques de régulation et de gestion, ne doivent cacher ou occulter des problèmes et des enjeux à caractère sociétal. La nature et la profondeur des bouleversements structurels de longue durée engagés sous la colonisation et dans la logique développementaliste postcoloniale dans la gestion de la société, de son espace et territoire, de sa « personne » et de son « groupe » est symptomatique de toute la difficulté à gérer à la fois la patrimonialisation d’un passif colonial, le caractère plurilingue et multilingue de la société et les impératifs de normalisation dans le cadre du développement moderne du pays.

La dénomination, les noms propres et leurs gestions relèvent désormais du fonctionnement moderne de la société. Des événements d’ordre sécuritaire, comme ceux de Tiguentourine, la disparition des touristes dans le grand désert algérien ou carrément leur kidnapping, les tremblements de terre (Boumerdes, Ain Temouchent, Chlef…), la gestion des frontières suite aux bouleversements politiques régionaux montrent de manière irréfutable l’intérêt de la connaissance des lieux, des personnes, des groupes, et surtout de leurs dénominations pour la localisation en toute rapidité et sûreté de tout événement à caractère national ou international, quel que soit sa nature.

Les dysfonctionnements de la dénomination sont structurels et leur solution relève d’une thérapie de type diachronique. La question de la dénomination est à inscrire dans le cadre d’un développement durable de la société et dépasse largement le cadre de la vie politique, administrative et culturelle actuelle, trop étroit, à la lecture des réactions à dominante exclusivement institutionnelle, pour restituer dans sa totalité, du moins dans ses grandes articulations, quelques faits de permanence, de données de fonds historiques, sociologiques, linguistiques, démographiques, religieuses, symboliques… structurant l’Algérianité dans la pluralité de son patrimoine historique et de ses parcours identitaires. Ces éléments structurants pris, de plus, dans la dialectique de leurs forces de généralisation régionale ou mondiale et de différenciation locale, semblent complètement échapper à cette démarche et aux représentations qui l’anime, parce qu’incapables de manière consciente ou inconsciente, raisonnée ou subjective, de poser une entité comme l’Algérie, le plus vaste pays d’Afrique, du monde arabe et du bassin méditerranéen, comme Permanence, à le penser et à le restituer comme Totalité.

Toute notre démarche consiste à :

  • Premièrement, à démontrer les limites objectives et opérationnelles d’une démarche strictement institutionnelle et administrative, quand bien même des efforts existent, tels ceux de mettre sur pied un dispositif actuel conforme ou proche au schéma organisationnel international, recommandé par les Nations Unies et mis en œuvre dans les pays développés et même sous-développés.
  • Deuxièmement, de mettre en exergue le rapport du patrimoine culturel immatériel à la problématique des référents culturels structurants, source de malentendus et de préjudices matériels et symboliques quand ils sont insuffisamment, voire maladroitement convoqués ou ne le sont pas du tout par les institutions et les élites nationales et locales, mais, qui constituent, du point de vue anthropologique et de manière intrinsèque, des éléments constitutifs de l’identité de cette nation.

Les faits de dénomination et les actions publiques qui les supportent et les organisent posent au - delà  de la question sur quelques instruments de la filiation en Algérie, entre autres, l’état civil,  le code de la famille, le découpage administratif de l’espace national, la consistance territoriale des communes et des wilaya, toute la non/pertinence des paradigmes anthropologiques de l’action publique quand elle n’est pas capable de charrier avec elle les mutations et leurs significations, les usages et leurs déterminations, les réformes et leurs représentations.

Dès lors, à quelles logiques historiques et fonctions sociales, à quelles symboliques et usages rationnels, en somme à quelle représentation mentale onomastique de l’espace, du temps et de la personne obéissent-ils ?

Bibliographie

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Notes

[1] Dorion, H. (1994), (avec la collab.) de Poirier, J., Vallières, A., et Richard, M., « La toponymie : un patrimoine menacé ? » in Langue nationale et mondialisation : enjeux et défis pour le français, Actes du Séminaire, Québec, Éditions du Conseil supérieur de la langue française. .

[2] Ibidem.

[3] La presse écrite rapporte de manière régulière le nombre de requêtes de modifications formulées par les citoyens quant à l’écriture de leurs noms.

[4] Bulletin GENUNG (Groupe d’experts des Nations Unies sur les noms géographiques), New York, Imprimé aux Nations Unies, Organisation des Nations Unies, 2001.

[5] Djeghloul, A. (1984), Éléments d’histoire culturelle, Alger, ENAL, p. 145.

[6] Guillorel, H. (2008), (dir.), Toponymie et politique. Les marqueurs linguistiques du territoire, Bruxelles, Éd. Bruylant, p. 5.

[7] Siblot, P. (1999), « Appeler les choses par leur nom. Problématique du nom, de la nomination et des renominations », in Akin, S. (dir.), Noms et re-noms. La dénomination des personnes, des populations, des langues et des territoires, (Coll. Dyalang), Rouen, Publications de l’Université de Rouen-CNRS, p. 14.

[8] Lacheraf, M. (1998), Des noms et des lieux. Mémoires d’une Algérie oubliée, Alger, Casbah Éditions, p. 178.

[9] Benramdane, F. (2000), « Qui es-tu ? J’ai été dit. De la destruction de la filiation dans l’état civil d’Algérie ou éléments d’un onomacide sémantique », in Insaniyat, n° 10, p. 79.

[10] Dauzat, A. (1960), La toponymie française, Paris, Éd. Payot, 2ème éd., 1960, p. 7.

[11] Journal Officiel de la République Algérienne, JORA, du 10/03/1981, p. 163-164.

[12] Ibidem.

[13] Ibidem.

[14] Morsly, D. (1983), « Histoire et toponymie. Conquête et pouvoir », in Voyager en langues et en Littérature, Alger, OPU, p. 234.

[15] Lacheraf, M, Des noms et des lieux, op.cit., p. 165.

[16] Morsly, D., op.cit., p. 241.

[17] Organisation des Nations Unies (ONU), Cinquième Conférence des Nations Unies sur la normalisation des noms géographiques, Montréal, 18-31 août 1987, Vol. 1. Rapport de la Conférence.

[18] Benramdane, F. (2001), « Identité et complexe généalogique. À propos de la lettre de Abdelkader Hadjar », in Algérie Action, Littérature, Paris /Alger, Éd. Marsa, p. 214.

[19] Atoui, B. (2004), « L’odonymie d’Alger. Présent et passé : quels enseignements ? », in Nomination et dénomination. Des noms de lieux, de tribus et de personnes en Algérie, Oran, Éd. Crasc, p. 37.

[20] « Des parents se sont vus rabroués par des préposés au guichet au seul motif de leur profonde algérianité. Certains ont accepté, la mort dans l’âme, de choisir un prénom figurant aux annexes du décret 81. 26 ; d’autres, par contre, ont porté l’affaire devant les juridictions compétentes, laissant leurs enfants sans réelle existence légale. Cela a été des jumeaux Belkhiri, dont le père Rachid choisi de pérenniser Gaïa et Micipsa». cf. Merahi, Y. (2004), « Prénomination berbère et contraintes administratives en Algérie », in Des noms et des noms. Anthroponymie et État civil en Algérie, Oran, Éd. Crasc, p. 97.

[21] Benramdane, F. et Atoui, B. (2004), (dir.), Toponymie et anthroponymie. Recueil bibliographique générale, Oran, Éd. Crasc.

[22] Benramdane, F. et Atoui, B. (dir.), Des noms et des noms. Etat civil et anthroponymie en Algérie, op.cit.

[23] « Il est intéressant de remarquer cependant que, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, la colonisation française n'a pas imposé partout dans l'empire les mêmes normes, et en tout cas pas aux mêmes dates. Pour limiter la comparaison au continent africain, on peut opposer par exemple les politiques adoptées par l'administration française en Algérie et à Madagascar. En Algérie, où la structure des noms avant l'intervention de la puissance coloniale était assez comparable à celle que nous venons de voir pour les Comores, une politique de normalisation du système des noms sur le modèle français fut assez tôt adoptée. Très significativement, la première tentative remonte à une loi sur la constitution de la propriété individuelle ; il s'agissait alors d'éviter les confusions qui auraient pu résulter dans les actes et les inscriptions d'hypothèques du grand nombre d'indigènes qui seraient désignés par les mêmes noms, tels que Mohamed ben Ali ou Fatma Bent Mohamed. On ordonna alors “l'adjonction d'un nom de famille au prénom ou surnom sous lequel est antérieurement connu chaque indigène déclaré propriétaire” (loi du 26 juillet 1873, art. 17). Cette mesure avait deux graves défauts… ». Gueunier, N.-J, (1999), « Nom, Prénom », une étape vers l'uniformisation culturelle ? Identité et statut juridique à Mayotte (Océan Indien Occidental) », in Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, n° 26, p. 45-53.

[24] Lapierre, N. (2001), « L’emprise du national sur le nominal », in Brunet, G., Darlu, P. et Zei, G. (eds.), Le Patronyme. Histoire, anthropologie, société, Paris, CNRS éditions, p. 115-132.

[25] Ageron, Ch.-A. (1968), Les Algériens musulmans et la France (1871-1919), t. I, Paris, PUF, p. 176.

[26] Milliot, L. (1937), in Benet, H., L’État civil en Algérie. Traité théorique et pratique de la constitution de l’État civil des indigènes algériens, Alger, Imprimerie Minerva.

[27] Ageron, Ch.-A., op.cit. Certains patronymes imposés Algériens étaient « odieux, obscènes, injurieux, marqués au coin de l’offense dépréciative et de l’humiliation caractérisée ».

[28] Yermeche, O. (2004), « L’état civil algérien : genèse d’un processus redénominatif », in Des noms et des noms…, op.cit., p. 20.

[29] Quemeneur, J. (1963), « Liste des communes d’Algérie», Cahiers Nord-Africains, n° 99, Novembre-Décembre., p. 65.

[30] Dorion, H. et Poirier, J. (1975), Lexique des termes utiles à l’étude des noms de lieux, Québec, Les presses de l’Université de Laval, p.14.

[31] Ngalasso-Mwatha, M. (2012), (dir.), « L’environnement francophone en milieu linguistique », Études africaines n° 4, p. 15.

[32] Une unité de recherche sur l’onomastique est créée au Crasc, intitulée Unité de recherche sur les systèmes de dénomination en Algérie (RASYD), DGRST, MESRS, Février 2013.

 

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