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Revue française de science politique, Le genre à la frontière entre Policy et Politics, 2009/2 - Volume 59, 228 pages

Ce numéro thématique sur le genre apporte, à travers les analyses et les critiques d'idées de ses contributeurs, un éclairage intéressant sur plusieurs aspects mettant en évidence le rapport du genre au politique. Il porte, comme le soulignent ses coordinatrices Laurie Boussaguet et Sophie Jacquot sur « l’articulation entre mobilisations féministes et mise à l’agenda de nouveaux problèmes publics ».

Dans un essai portant sur une typologie des usages du concept Genre, J. Jenson et E. Lépinard, rappellent l’intérêt de la science politique aux études sur le genre. Qu’il s’agisse de l’État, des mouvements féministes ou des politiques publiques, le genre, selon la façon par laquelle il est « mobilisé », conduit à une typologie, que les auteures entreprennent selon trois approches :

  • Le genre comme dimension sexuée de l’objet de recherche : études sur les mouvements de femmes, mouvements féministes, femmes dans l’État, féminisme d’État ;
  • Le genre comme variable dans l’analyse des politiques publiques : dimension genrée dans l’élaboration des politiques et effets genrés de ces politiques ;
  • Le genre comme objet et comme concept : production et transformation des rapports de genre et de leur signification via des politiques publiques.

Bien que les auteures reconnaissent, dans leur article fouillé, que leur typologie est impartiale et incomplète, leur contribution permet, toutefois, l’ouverture d’un débat sur « les concepts traditionnellement utilisés [et] la délimitation des domaines de recherche ou les présupposés sur ce qui constitue “le politique” » réinterrogées par le genre.

Abordant la question des inégalités entre hommes et femmes dans la sphère politique à partir d’une approche de genre, S. Jacquot part du militantisme féministe pour aborder ensuite « le processus de re-problématisation de la question des inégalités entre les femmes et les hommes »,  enfin « l’institutionnalisation du gender mainstreaming », à partir « du milieu des années 1990 ».

À ce dernier point, l’adoption du gender mainstreaming qui, dans le champ politique, signifie une approche intégrée de l’égalité dans la prise de décision et dans la participation des femmes au pouvoir, a permis dans la Communauté européenne « d’en faire le nouveau principe directeur et l’instrument premier de l’action de l’Union en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes ».

L’annexe méthodologique qui suit l’article de Jacquot montre, chiffres à l’appui, et à partir d’une « littérature grise issue des institutions européennes » tout l’intérêt du gender mainstreaming pour garantir l’égalité entre les sexes, mais aussi de comprendre la répartition sexuée au sein des institutions européennes.

Sur les mobilisations féministes pour la parité politique, L. Bereni revient au débat franco-français qui, depuis 1992, n’a cessé de se poursuivre. Entre  « imposer le  “50-50”  comme arithmétique paritaire » et obtenir un « compromis final », considéré par l’auteure comme une « parité plus contraignante », se manifeste « (le caractère transversal et multipolaire de l’espace de la cause des femmes [qui] peut constituer […] une ressource stratégique, compensant ses faiblesses structurelles, notamment ses effectifs restreints et la marginalité politique de ses troupes ».

De la parité comme moyen garantissant l'égalité entre les sexes dans la vie politique, à la genèse d'une politique d’égalité professionnelle en France, A. Revillard montre, à partir d'une étude sur le Comité du travail féminin (instance consultative créée en 1965 au sein du ministère du Travail), comment le "féminisme de l'État", dans ses différentes approches, a conduit à la mise en œuvre de la politique d’égalité des chances. Bien que faible institutionnellement, le Comité, comme le souligne l'auteure à réussi à récompenser  « cette faiblesse structurelle par un usage stratégique de l’expertise critique, comme levier de promotion de réformes et vecteur d’une sensibilisation plus générale à l’enjeu des inégalités professionnelles ». Á travers son bulletin d’information, la constitution d’un réseau d’expertise et les séminaires sur le travail des femmes en France, le Comité s'est imposé comme un lien représentatif, constant et nécessaire, entre le gouvernement et la société civile.

Dans un essai d'approche genrée de la démocratie et une étude des politiques féministes comparées, A. Mazur s'intéresse aux politiques des pays occidentaux à l'égard des revendications féministes et le progrès réalisé en termes de droits des femmes et d’égalité entre les femmes et les hommes. En interrogeant les demandes des mouvements sociaux, les politiques gouvernementales et le militantisme féminisme, cet article, qui s'appuie sur des analyses comparatives et qualitatives, constitue une référence incontournable pour une approche genrée de la démocratie.

La richesse des articles de ce numéro donne de nombreuses perspectives de recherche sur le rapport entre les études du genre et la démocratie. Le lecteur intéressé par les études sur la condition féminine y trouve certainement une remarquable cohérence méthodologique et argumentative.

auteur

Belkacem BENZENINE

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