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La création de Médina Jdida, Oran (1845) : Un exemple de la politique coloniale de regroupement urbain

Insaniyat N°5 | 1998 | Villes Algériennes | p. 103-111 | Texte intégral


The creation of M’edina - Jdida, Oran (1845) : An example of colonial politic for urban regrouping

Abstract : The politic of arab colonization aiming at regrouping tribes, which BUGEAUD had pioneered, has often been confused with the politic of quartering claborated much later by field marshal RANDON. But between these two politics, other attempts at tribal settlement, and iii a general way of Algerian rural populations by building arab villages had been tried and, even spread to urban populations, their setting up at entrances to towns caused a security problem for the military, as was precisely the case of Oran, where the return of native population made the creation of Medina Jdida necessary in 1845, by LAMORICIERE.

Keywords : El Medina Jadida, colonization, inhabitants, arabs, stabilization


Saddek BENKADA: Centre de Recherche en Anthropologie Sociale et Culturelle, 31 000, Oran, Algérie.


La politique de regroupement des populations qu'avait connue l'Algérie durant la guerre de libération nationale, n'était pas en fait une nouveauté. Elle trouva déjà son application dès les premières années de l'occupation, au moment fort de la première guerre d'indépendance. Cette politique de regroupement qu' inaugura le général Bugeaud, visait principalement à regrouper sous les murs de la ville ou aux abords des camps militaires, les tribus ralliées, pour les mettre à l'abri des représailles de l'émir Abd-El-Kader. Cependant, ce qui n'était au départ qu'un regroupement provisoire, évolua chez Bugeaud vers l'idée d'une création de villages indigènes qui furent destinés à récompenser les Douair et les Zméla des services qu'ils ont rendus aux troupes françaises. Il ordonna ainsi donc, d'édifier pour eux d'abord, en 1837, les premiers villages arabes fortifiés à El Mallah. Ce fut là aussi, la première ébauche du projet de colonisation arabe de Bugeaud.

1. La politique de construction de "villages indigènes".

Cette politique de construction de villages indigènes, inspira le général Lamoricière qui, en 1845 ordonna la création à Oran du premier village indigène qu'on appela initialement Médina Jdida et qui sera beaucoup plus connu par la suite sous l'appellation de Village nègre.

En 1846, le colonel WALSIN-ESTERRAZY, sous-directeur des Affaires arabes à Oran [1], s'inspirant de l'idée du général Lamoricière pour la création d'un village indigène à Oran : conçut un projet de construction de villages similaires dans la plaine d'Oran destinés aux tribus qui relevaient de son administration, en particulier les Douair et les Zméla. Les maisons qui seront construites dans ces villages, devaient selon lui «comporter deux bâtiments plus élevés que les autres et de style oriental : la maison du chef de douar, au milieu d'un des côtés, et la mosquée sur celui de la face opposée. Quelques maisons devaient avoir deux ou trois chambres et une écurie située à proximité; toutes auraient une cheminée. L'enceinte du village serait suffisante pour parquer les bestiaux à l'intérieur» [2] Le projet du sous- directeur des Affaires arabes fut rapidement approuvé, et aussitôt, il passa un marché avec deux entrepreneurs européens d'Oran, pour la réalisation de 35 villages. en commençant par les Zméla.

Il tout lieu de penser que cette fixation de la population, voire même de son regroupement, procédait chez Walsin-Esterhazy d'une arrière­pensée politico-militaire évidente. En effet, cette évolution dans la forme de l'habitat amèneraient les tribus, pensait-on, à remplacer la tente par la maison, le douar par le village, « cette double modification de leur genre de vie et de leur habitat, fait remarquer Robert Tinthoin, aboutirait à la fixité de l'habitation, qui devait amener l'indigène à abandonner l'extrême mobilité qui avait fait la force d'A bdelkader.»[3]

Le général Lamoricière qui avait déjà à l'époque en gestation son fameux "projet de colonisation", trouva le projet de Walsin-Esterhazy assez original pour le reprendre et l'adapter à ses vues. Lamoricière décida ainsi d'accorder en 1847 une certaine quantité de terres aux cultivateurs indigènes qui s'engageront à construire des maisons et planteraient des arbres fruitiers. Confiants dans les promesses de Lamoricière, les Zméla furent les premiers en accord avec l'autorité militaire, a fixer en octobre 1847, les emplacements de leurs villages. Dès le mois de décembre, 18 villages furent déjà mis construction, ils prirent aussitôt le nom de "villages des Zméla". Les concessions de terrains obtenues en compensation de frais engagés en construction et en cultures étaient choisies autant que possible près des villages, de manière à englober dans leurs périmètres maisons et jardins. Il faut signaler toutefois, que certaines de ces concessions foncières furent nième accordées en compensation des maisons construites à Médina Jdida par les habitants originaires des Zméla, ce qui leur fit bénéficier d'une concession de terres de l'ordre de 4269 ha [4].

Cependant cette entreprise n'était pas exempte de quelques déboires, Théodore Laujoulet, pourtant notoirement connu pour ses scandaleuses spéculations immobilières à l'époque, rapporte qu'il avait été, «témoin du fait suivant. en 1847, les Arabes furent poussés à construire des villages indigènes dans la province d'Oran, plusieurs d'entre eux durent avoir recours à des emprunts pour lesquels ils eurent à payer une prime de 11% par mois, ce qui leur valut le sobriquet de "El adach fil mia" (7e onze pour cent).. ce qu'il y eut de plus remarquable, c'est qu'il était de notoriété publique qu1un des chefs indigènes, qui avait le plus contribué à propager cette ardeur jusqu'alors inouïe des Arabes pour la construction, commanditait l'israélite par l'entremise duquel se faisaient ces honteuses spéculations.» [5]

Cette politique de "colonisation arabe" dont Bugeaud traça officiellement les grandes lignes dans sa circulaire du 10 avril 1847, n'avait pas tardé à faire école et, donna lieu à bon nombre de conceptions de plans de villages qui répondaient au nouveau genre de vie qu'on devait donner aux tribus regroupées; entre autres, le "village du makhzen", conçu par le capitaine Richard, en 1848, ou celui du "village indigène", élaboré par de Martimprey en 1849 à partir exactement du plan initial de Médina Jdida qu'il traça en 1845. Ces modèles de village, inspirés de la politique de colonisation arabe de Bugeaud, et appliqués par les officiers des Bureaux arabes, ces « spécialistes de la destruction, comme le note Michel Cornaton, faisaient disparaître tout ce qui pouvait les encombrer, afin de s'approprier l'espace, qu'ils couvraient de figures géométriques de leurs tracés, les maisons elles-mêmes reflétaient la hiérarchie militaire. Tout est organisé en fonction de la maison du caïd responsable de la sécurité.» [6]

Cette politique de création de "villages indigènes" en Algérie, avec son prototype Médina Jdida; semble avoir largement inspiré à la même époque l'administration coloniale en Afrique Noire, où dès 1848. suite à la loi Victor Schœlcher sur l'abolition de l'esclavage dans les colonies françaises (27 avril 1848) furent créés, tout d'abord à Saint Louis du Sénégal ce qu'on a appelé des "villages de liberté" et qui sont devenus plus tard des "villages de réfugiés", destinés principalement à regrouper les esclaves nouvellement affranchis. Cette même politique, Galliéni ne fit qu'y revenir en 887, en créant de nouveau ces formes de villages, comme en 1895 suite à la révolte des esclaves du cercle de Siguiri, (région Est du Soudan français, l'actuel Mali). [7]

Il est cependant intéressant de faire remarquer que les motivations qui avaient incité à la création en Afrique Noire de ces "villages indigènes", procédait de la même démarche que celle des officiers des Bureaux Arabes en Algérie. La principale raison en Afrique Noire, en était selon Mahdjemout Diop: «d'enrayer le vagabondage et l'insécurité [...] en effet, dans l'Afrique des XVIIè et XVIIIè siècles, les conséquences de la traite des esclaves et la disparition des grands Etats organisés avaient créé une insécurité quasi-générale. Les guerres de conquête coloniale, ici contre El Hadj Omar et Alamany Samory essentiellement, et la suppression de l'esclavage avaient rendu la situation encore plus trouble en jetant sur les routes des masses dé gens désorganisés».[8]

2. L'origine de la création de Médina Jdida.

La politique d'exaction et d'atrocités menée sous le commandement du général Boyer (Septembre 1831 - Avril 1833) qui eut pour résultat immédiat l'abandon de la ville par une très grande partie de la population musulmane, excepté les familles turco-koulouglies, des noirs sans attaches tribales et des juifs. Pour enlever donc tout espoir de retour aux habitants d'Oran; le général Boyer prétextant le motif que les faubourgs de Kheng-En-Netah, Ras-El-Aïn et Kélaïa, gênaient énormément le dispositif de défense de la place, les fit incendier et raser le 5 mai 1832 [9]

Le rasement de ces faubourgs précoloniaux n'avait pas été cependant sans conséquences graves sur le dépeuplement de la ville. En 1844, lorsque la guerre s'était éloignée de la banlieue d'Oran, la ville commença à connaître le début du retour par vagues successives de ses anciens habitants notamment ceux qui avaient leurs maisons dans les faubourgs détruits, suivis d'ailleurs par les éléments d'autres tribus que des années de misère et d'errance dues à la guerre avaient fini par faire échouer aux portes de la ville; ceux sont les fameux Djalis [10]. Dès lors, se posa avec acuité le problème de la réinstallation de tous ces nouveaux arrivants qui s'installèrent au milieu des décombres des faubourgs rasés, en y élevant des abris de fortune, occupant les grottes et même les anciens fours à chaux. 'De sorte qu'en peu de temps, la ville s'était vue ceinturer par un nombre impressionnant de constructions de fortunes. Cette "population flottante" comme on la désignait à l'époque, était pour le moins, pensait l'administration coloniale, compromettante pour la sécurité des abords immédiats de la ville.

Confronté à ce problème du retour des anciens habitants d'Oran; le sous-directeur de l'Intérieur, Berthier de Sauvigny, faisait observer en 1842, que « les Arabes ne peuvent rester, comme ils sont alors, éparpillés autour de la ville, sans point fixe, sans terre à cultiver, sans ordre, sans organisation, et surtout sans une surveillance active. On s'aperçoit déjà, souligne-t-il, de leur nombre toujours croissant, aux portes d'Oran et on ne les laissera pas, sans doute, continuellement dans cette position équivoque, aussi fâcheuse pour eux qu'inquiétante pour les Européens»[11] Il préconisa dès lors, que les douars installés sur des terrains appelés à être distribués aux colons, soient rejetés dans la plaine d'Oran sur « un terrain, assez vaste, entièrement à eux, dont ils pourraient disposer, qu'ils pourraient donner, vendre ou aliéner comme bon leur semblerait. » [12]

Aussi, pour contenir cette "population flottante" à l'intérieur d'un espace déterminé et facilement contrôlable administrativement et maîtrisable militairement; le général Lamoricière, commandant la Division de la province d'Oran, et assurant en même temps l'intérim du Gouvernement Général, ordonna par arrêté du 20 janvier 1845, la création d'un village indigène à Oran. B. Semmoud fait observer à propos de cette décision que «on pourrait penser qu'il s'agit d'un équipement réalisé au bénéfice de la population indigène. En fait, c'est une opération de cantonnement qui vise à repousser vers le Sud la population indigène qui encombre le plateau Karguentah. En effet, depuis presque une année déjà, l'établissement d'un plan régulier d'alignement est déjà prêt au début de 1845, alors que la création de Médina Jdida vient juste d'être arrêtée». [13]

La conception et la réalisation de ce nouveau village indigène à Oran fiat confiée au lieutenant-colonel de Martimprey, en délivrant dans un premier temps « des titres de concessions dans le nouveau village dit médina Djdida, que par ordre du général, écrit de Martimprey, je venais de tracer en avant de la lunette Saint André près d'Oran. Il devait abriter et réunir les indigènes Arabes et nègres dispersés jusque là dans les décombres des fossés, les vieux silos et les fours à chaux des environs de la ville dans laquelle la plupart exerçaient quelque petite industrie».[14] Ainsi donc, d'après un recensement effectué en 1846, Médina Jdida comptait déjà 2316 habitants.

Mais, il y a tout lieu de penser que l'objectif recherché dans la création de Médina Jdida ne s'était pas arrêté à la simple fixation au sol de la population mais, et là, nous partageons avec S.A. Reffes, l'idée qu'il s'agissait en fait de maintien des populations "sous surveillance étroite comme otage", notamment les familles des chefs makhzen qui «serviront déjà occasionnellement aux opérations psychologiques à la Bugeaud, qui veut construire pour eux des villages de colonisation à l'image de ceux des Européens [15]De ce point de vue, les officiers français n'ont fait que reprendre le bon vieux système des "familles otages" pratiqué par les Turcs et qui même, fiat l'une des conditions du traité du Figuier, conclu en 1836 entre le général Trézel et les chefs des tribus Douair et Zméla, qui stipulait dans son article 12 que « Un chef choisi dans chacune des tribus résidera à Oran, avec sa famille».

3. Organisation spatiale de Médina Jdida.

Contrairement aux autres villes algériennes, où le pouvoir colonial s'était évertué à créer des quartiers nouveaux spécialement aménagés pour les européens, à Oran ce fiat la démarche inverse qui fiat adoptée, par « la volonté de créer une véritable nouvelle ville non pas pour les européens mais pour les "indigènes"». En effet, l'absence de Médina à Oran, n'avait pas rendu nécessaire d'entreprendre de grands travaux de « substitution au tisSu traditionnel pour coloniser l'espace urbain traditionnel avant de chercher à affirmer la métropole ou l'européanité», comme ce fut le cas à Constantine, par exemple[16]. Ce qui fait que, le recours à une bipartition du même espace urbain entre population européenne et population indigène s'avérait être inutile à Oran. Le choix même du ternie de médina dans l'appellation du nouveau quartier n'était pas fortuit. Il devait dans l'esprit des initiateurs remplir la même fonction que la médina traditionnelle, qu'Oran n'avait pu avoir. Une médina coloniale, s'il en fut, que B. Semmoud la compare très justement d'ailleurs, à la "nouvelle médina" de Casablanca sur bien des aspects urbanistiques (alignement des constructions, régularité du tracé des rues etc.)[17]

L'assiette d'implantation du nouveau faubourg de Médina Jdida fiat choisie sur le plateau des Kélaïa, appelé aussi plateau du Village Nègre; à un endroit situé à l'Est de l'ancien emplacement de la dechra des Kélaïa. Sur des terrains ayant appartenu à l'ancien Beylick, mais aussi à des propriétaires musulmans qui, au début de la colonisation avaient vendu un certain nombre de leurs terrains à des juifs, notamment à la famille Benhaïm[18]. Tout semble indiquer cependant que Médina Jdida ait été constituée initialement de trois micro-quartiers portant chacun la dénomination de Médina:

1-) Médina(t) El Radar : Située au Nord, elle était principalement habitée par les notables et les citadins comme l'indique à juste titre son nom, « c'était le groupement le mieux composé. fait remarquer le commandant L. Chèneval, en ce sens qu'il comprenait des artisans et des marchands déjà policés par un séjour dans les villes» [19]. Cette partie de Médina Djdida, nous la trouvons mentionnée pour la première fois en juin 1846 sur les registres de l'état-civil, sous l'appellation de "Village des Maures".

2-) Médina(t) El Abid : Cette appellation a donné la traduction française de "Village Nègre", qui fut étendue par la suite à tout le quartier de Médina Jdida. L'usage de cette dénomination à connotation ségrégationniste tant sur le plan spatial que sur le plan socio-ethnique, avait fini par l'emporter et connut même un certain succès en géographie urbaine coloniale, « nous la retrouvons, note L. Touati, dans toutes les villes-champignons qui se constituent dans les sillages de la conquête coloniale: Perrégaux, Sidi Bel-Abbès, Sig, Témouchent etc. En effet, à chacune de ces villes coloniales est attelé un "village nègre"». [20]

L’allusion à un village spécifiquement noir, nous la trouvons mentionnée pour la première fois sur le registre des décès de l'état-civil de la commune d'Oran en avril 1847 sous l'appellation de "village, dit des nègres". Ce micro-quartier, semble avoir été dès l'origine destinée à accueillir la population noire d'Oran; qui s'était installée autour de la quoubba de Sidi Blal, le saint tutélaire de toutes les communautés noires d'Algérie. Cette communauté disposait aussi d'un cimetière, avoisinant le cimetière de Sidi El Bachir, destiné à son propre usage [21]Cependant, malgré la suppression des corporations ethniques et professionnelles en 1868, la communauté noire, continuait pendant longtemps à être encadrée à Médina Jdida au sein de la "corporation des nègres". [22]

3-) Médina (t) Ech-Cherraga L. Chèneval situe l'emplacement de ce micro-quartier, «depuis les maisons qui fermèrent la place du boulevard joseph Andrieu à l'Est jusqu'aux portes du champ de manœuvre », son appellation laisse penser qu'il fût habité par les gens originaires de l'ancien khalifat du Cherg (Relizane, Miliana, Zemmora etc.). L. Chéneval note à propos de sa population qu'elle était « composée de nécessiteux de toutes provenances qui s'emploient comme portefaix sur les quais, comme manœuvres et terrassiers chez les entrepreneurs de maçonnerie». [23]

En 1866, avec la construction du nouveau mur d'enceinte, Médina Jdida fut englobée dans le périmètre intra-muros et ainsi donc passait du statut de faubourg à celui de quartier. Ce nouveau statut, lui avait permis ainsi qu'au quartier Saint-Antoine de bénéficier des opérations d'urbanisme en cours de réalisation, notamment en matière de voirie, programmées dans le cadre des différents plans d'alignement et de nivellement qui étaient initialement destinés aux faubourgs de Karguentah, Saint Pierre et Saint Michel. A propos des alignements de Médina Jdida; R. Lespès, notait qu'ils dessinaient: «dans sa partie Est, et à droite de la rue du Figuier, un réseau très régulier de rues se coupant à angle droit, mais le pâté Ouest se ressentait du désordre qui avait prévalu pendant très longtemps. Toute la partie construite autour de la place Adélaïde était fort mal perçues de rues privées, non encore classées. Le boulevard du Sud, ajoute R. Lespès, était réduit en largeur pour permettre de nouvelles constructions; on constatait en effet. une augmentation progressive de la population musulmane. Sur son parcours serait aménagée la place principale de cette ville indigène»[24]

Conclusion

Nombreux sont ceux qui, comme R. Lespés, Ch. A. Julien, ou B. Semmoud , qui pensent que la création de Médina Jdida ait été le résultat d'une politique de "cantonnement" des populations indigènes en milieu urbain. Il semblerait dans ce cas bien précis, que le terme de cantonnement ait été improprement employé, car la politique de cantonnement proprement dite ne fut appliquée qu'à partir de 1853 par le maréchal Randon, qui fut par ailleurs un fervent partisan de "la petite colonisation", favorisant en exclusivité l'immigration des Européens et, de surcroît d'origine paysanne. Tandis que, la politique de colonisation arabe de Bugeaud et son corollaire, la construction de villages indigènes, s'était donnée, dès les, débuts de l'occupation coloniale, pour objectif de regrouper pour des raisons éminemment militaires les tribus afin de les arracher à l'influence de l'émir Abd-El-Kader.

En définitive, nous estimons à l'instar de Michel Coquery, qui semble avoir eu une idée plus nuancée que d'autres sur la politique de construction des villages indigènes, et en particulier leur modèle Médina Jdida, et sans aller jusqu'à la considérer comme une forme de regroupement", comme le pense Michel Cornaton ; il l'assimile tout au plus, «à une première forme de recasement et de fixation aux portes de la ville de populations autochtones ayant fui lors de la conquête et revenues ensuite plus nombreuses». [25]


Notes

[1]- WALSIN-ESTERHAZY, Louis-Joseph-Ferdinand (1807-1857).- Polytech­nicien, arrive en Algérie en 1832 comme lieutenant. En 1842, il fût nommé chef d'escadron au corps de cavalerie indigène, puis lieutenant-colonel au 2è Spahis et colonel en 1847. Sa fonction de commandant du Bureau arabe d'Oran, lui avait permis de se mettre en relations avec de nombreux notables Algériens qui lui ont fourni les matériaux pour écrire ses deux ouvrages; la Domination turque dans l'ancienne régence d'Alger (Paris, 1840), et la Notice historique sur le Makhzen d'Oran (Oran, 1849).

[2]- TINTKOIN, R. -Colonisation et évolution des genres de vie dans la région ouest d'Oran de 1830 à 1885. Etude de géographie et d'histoire coloniales.­ Oran, L. Fouque. 1947.- p. 130

[3]- Idem.- p.130.

[4]- Idem.-p.145

[5]- LAUJOULET, Théodore.- Le commerce en Algérie. Etudes sur le peuplement utile de l'Afrique française.- Paris, 1851.- p. 68.

[6]- CORNATON, M..- Les regroupements de la colonisation en Algérie.- Paris, éd. Ouvrières, 1967.- p.45

[7]- MAHDJEMOUT, Diop.- Histoire des classes sociales dans l'Afrique de l'Ouest I. le Mali.- Paris, F. Maspéro, 1971.-p. 39.

[8]- Idem.-pour.39

[9]- DERRIEN (commandant Isidore).- Les Français à Oran depuis 1830 jusqu'à nos jours.- Aix, Nicot, 1886, p. 33

[10]- Le mot Djali, « signifie vagabond, étranger au pays, qui pluralisé à la française fait aussi "Djalis", mais en se prononçant, comme il se terminait par la lettre i». Réponse donnée par le commandant L. Chèneval, dans une lettre datée du 17 septembre 1924, à une question posée par le commandant Pellecat, sur l'origine de Médina Djdida. (Archives du commandant Pellecat, Société de Géographie et d'Archéologie d'Oran).

Cf aussi, commandant L. Chèneval. "Souvenirs oranais la Place Sidi Blal". Echo d'Oran 19 mars 1925.

Il y a même l'appellation du "village des Djalis" qui est mentionnée en 1849 dans un rapport du chef du Bureau arabe de Médina Djdida. Cf Turin (Yvonne). Affrontements culturels dans l'Algérie coloniale. Ecoles, médecine, religion, 1830-1880.-Paris, F. Maspéro, 1971.-p. 144.

[11]- TINTHOIN R..- Op. cit..-p. 134

[12]- Idem.- p.134.

[13]- SEMMOUD, B..- Médina-Jdida. Étude cartographique et géographique d'un quartier d'Oran. Les rapports avec l'agglomération et la région Oranaises. 2 vol., Thèse 3~ cycle.- Paris VII, 1975, VoI.1.- p.47.

[14]- MARTIMPREY (général comte de ). Souvenirs d'un officier d'état-Major : histoire de l'Etablissement de la domination française dans la province d'Oran.­- Paris, 1886.- 288p., cartes.

[15]- REFFES, Sid Ahmed.- La propriété immobilière à Oran de 1832 à 1847. Thèse de doctorat ~ Paris, 1985.-p. 49.

[16]- PAGAND, B..- De la ville arabe à la ville européenne : architecture et formation urbaine à Constantine au XIX~ siècle.- RMMM, N0 73/74,1996.-p.p. 281-294.

[17]- SEMMOUD, B..- Op. cité..- p.47.

[18]- L'emplacement choisi pour la création de Médina Djdida, fut toujours revendiqué par les Domaines;« cette attribution de terrains considérés comme beylicaux. notait Derrien, suscita des actions en revendication et des procès devant le tribunal d'Oran et la cour d'appel d'Alger en 1849 et en 1855 qui déboutèrent les sieurs Benhaïm. Un arrêté gubematorial de 1870 donna définitivement à la ville d'Oran la propriété de toutes les rues du village nègre ». Derrien.- Les Français à Oran de 1830 jusqu'à nos jours. Aix, 1886, pp. 185-186 Cf. aussi   Revendication par Hippolyte-Auguste Bachelet, à l'encontre du Domaine de l'état. des terrains situés à Oran. maintenant intra-muros. et sur lesquels était au moment de la conquête. et extra-muros. un village appelé Kalaïa.- Oran, impr. Nugues. 1882.- 13p., plans.

[19]- CHÈNEVAL, L..-Souvenirs oranais la Place Sidi Blal.- Echo d'Oran 19 mars 1925.

[20]- TOUATI, Lahouari.- Economie, Société et Acculturation. L'Oranie colonisée. 1881-1937.- Thèse 3~ cycle, Université de Nice, 1984.-p. 155.

[21]- BENAADA, S..- Espace urbain et Structure' sociale à Oran de 1792 à 1831.- DEA-Sociologie, Université d'Oran, 1988.- 223 p., plans. annexes.

[22]- La communauté noire adresse en 1882 une requête au maire d'Oran, lui demandant la nomination de Ahmed Ould Moussa, propriétaire au Village Nègre; comme chef de la "corporation des nègres". Archives communales, dossier de l'indigénat.

[23]- CHENEVAL, L. .- Op. cite.

[24]- Les alignements mentionnés par Lespès, concernent principalement le sous­quartier de Sebalat Toîba, dont la place Adélaïde (actuelle place Daouadji) en constituait le centre.

LESPES, R..- Oran, étude de géographie et d'histoire urbaines. Paris, Alcan; Alger, Carbonnel; 1938, pp. 186-187.

[25]- COQUERY, Michel.- L'extension récente des quartiers musulmans d’Oran. ­Bulletin de l'Association des géographes français, N0 307-308,1962.-p. 175.

 

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