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Différenciations sociospatiales dans les nouveaux espaces urbanisés d’Oran

N°23-24 | 2004  | Oran : Une ville d'Algérie | p. 7-44 | Texte intégral


Socio spatial differentiation in new Oran urban spaces.

Abstract : Urban growth in the Oran agglomeration has on the whole been rather fast (832000 inhabitants in1988) it has been characterized by the appearance of a series of inhabited cores , planned or non planned, more or less fragmented A classical phenomenon, the slackening of outer- urban space management is at the same time geographical and demographical. Mainly inter-urban, residential mobility greatly accelerated during the 1990-2000 decade. Local land administration in favour town municipalities, decided in 1974 by the central political power has been the heart of land stakes involving the State, local collectivities, municipalities and social groups; Thus one must understand the fragmented configuration of Oran metropolitan space (map1). Besides land assizes attributed according to the rules, public land recently squatted has been occupied by predominantly urban households, even if the rural populations have taken part in a mobility stimulated by the insecurity in the countryside in the 1990 decade.

Underequiped in terms of road structure and collective equipment characterizing the various outer urban fragments however private commercial structures start by organizing this outer urban space owing to the emergence of small center points in the outskirts. Going back to the centrality of the Oran Medina Jdida and town centre appears to mark of differences and is done depending on the localization of the multiple inhabited cores. More often social habits linked to commercial attendance seem to last for populations subject to outer urban residence. At any rate, if the geographical differentiation is proved social differentiation seems less pronounced within this outer urban space.

Key words : differentiation - peri-urban slackening - social groups - land - mobility - centrality - Oran.


Abed BENDJELID, Mohamed HADEID, Sidi Mohamed TRACHE  : Université Es-Sénia, 31 000, Oran, Algérie
Centre de Recherche en Anthropologie Sociale et Culturelle, 31 000, Oran, Algérie
Abdellah MESSAHEL, Université des sciences et de technologie d’Oran – Mohamed Boudiaf, 31 000, Oran, Algérie
Centre de Recherche en Anthropologie Sociale et Culturelle, 31 000, Oran, Algéri


Durant le dernier quart de siècle, l’agglomération d’Oran, peuplée de 832 000 habitants [1] en 1998, a vu la multiplication et la croissance rapide de petits noyaux habités compacts et ce, dans un rayon d’une douzaine de kilomètres autour de la ville. Perpétuel chantier, cet espace périurbain est caractérisé par une morphologie différenciée de ses fragments bâtis qui alternent avec les vides des terres agricoles.

Au-delà des actions menées par les divers acteurs urbains, l’expansion accélérée du bâti planifié et non planifié qui apparaît liée à de multiples raisons (rôle de l’Etat-providence, large promotion sociale, népotisme, squats fonciers, crise politique…) interpelle à la fois aménageurs et aménagés sur les degrés des dysfonctionnements constatés et sur la redoutable question de la gestion urbaine d’une métropole régionale marquée par le sous-équipement de ses périphéries planifiées et non planifiées. En ce sens, de nombreuses questions jaillissent : qu’en est-il de la différenciation physique des nouveaux bâtis et de leur degré d’intégration urbaine, voire de leur différenciation sociale ? Quelles stratégies déploient les habitants des fragments spontanés pour imposer la régulation de leur site dans l’agglomération ? Enfin, au-delà de la délicate question posée par la viabilisation des sites nouvellement urbanisés, pouvons-nous détecter des niveaux d’autonomie commerciale au sein de quelques localités formant, de fait, de nouvelles centralités périphériques et ce, face à la double centralité urbaine jouée par le centre-ville d’Oran et Médina-Jdida, ancien quartier commercial « musulman »? Qu’en est-il, enfin, des pratiques sociales actuelles des habitants de la périphérie au sein de l’espace métropolitain oranais ?

L’agglomération oranaise : un formidable desserrement spatial et démographique illustré par une mobilité résidentielle intra-urbaine dominante

L’expansion considérable de certains noyaux de la zone périurbaine

• Une extension accélérée de la couronne périurbaine

Malgré les problèmes rencontrés concernant la disponibilité des documents cartographiques tels que les photos aériennes, la carte des phases d’extension de la ville d’Oran et de sa périphérie a pu être réalisée (carte 1).

Les documents cartographiques disponibles nous ont permis de déterminer trois périodes bien distinctes : la première, antérieure à 1972, montre clairement le vide entourant le périmètre urbain d’Oran, soulignant, de fait, l’importance des terres agricoles. Durant cette période, Oran pouvait absorber l’essentiel du croît démographique local, dans la mesure où les logements vides, abandonnés par les Européens après l’indépendance, ont permis d’abriter une part importante des populations locales et celles venues d’autres régions rurales ou urbaines. A cette époque, la couronne périurbaine avait une fonction pratiquement rurale. Lors de la deuxième période, allant de 1972 à 1983, la couronne périurbaine a commencé à être urbanisée. La saturation de la ville d’Oran et la constitution des réserves foncières communales, d’un côté, et la réalisation des nouvelles zones d’habitat urbain planifié, de l’autre, ont été les facteurs moteurs de l’urbanisation. Etirée de 1983 à 1997, la troisième période est caractérisée par un fort éclatement physique du bâti planifié et non planifié au sein de tous les noyaux de la couronne périurbaine ; durant cette quinzaine d’années, l’ampleur de l’extension spatiale de l’agglomération oranaise donne une idée sur la consommation des terrains agricoles (tab. 1).

Tableau 1 : Evolution des superficies de l’espace bâti de l’agglomération oranaise

 

Avant 1972

1972-1983

1983-1997

Moyenne d’extension (ha/an)

1972 -1983

Moyenne d’extension (ha/an)

1983-1997

Extension spatiale en hectares

3114

1123

4475

102

319

Source : Carte des phases d’extension de l’agglomération oranaise.

En fait, ce sont les nouvelles réalisations résidentielles qui sont à l’origine des principales extensions de périphérie des villes algériennes. Celles-ci se fondent sur l’habitat de type individuel où l’Etat reste le grand promoteur foncier, tantôt directement (cas des coopératives immobilières, mais aussi des recasements), tantôt indirectement par l’intermédiaire des collectivités locales et de leurs services techniques que sont les agences foncières locales, en stimulant des opérations de type lotissement.

• La méthode de sondage utilisée au sein de onze sites urbanisés

Une simple lecture de la carte d’extension de l’agglomération oranaise révèle clairement l’ampleur de cette expansion de l’habitat dans plusieurs secteurs périurbains. Dès lors, on peut s’interroger sur les modes de cet habitat nouveau : s’agit-il d’un habitat légal ou illégal ? Où se situent l’un et l’autre par rapport à la couronne périurbaine d’Oran ? Cet habitat est-il collectif ou individuel ? S’il est individuel, dans quel type d’opération a-t-il été inscrit ? En fait, il nous a été impossible de faire un bilan exhaustif de types d’habitat perceptibles dans cette couronne périurbaine.

Le recours à l’enquête par sondage était un fait incontournable pour analyser les différenciations résidentielles. L’enquête par sondage a touché 8 sites d’urbanisation diversifiés et dispersés [2] sur tout le territoire de la couronne périurbaine oranaise, et ce, en vue d’obtenir un échantillon représentatif des anciens et des nouveaux noyaux bâtis, tout en couvrant les divers types d’habitat produits tant par les institutions publiques (lotissements, recasements, coopératives immobilières, logements sociaux, habitat collectif) que par les acteurs privés (autoconstruction, constructions précaires, haouchs). 900 ménages ont été enquêtés en 2000-2001 au sein des communes d’Oran, Es-Sénia, Bir-el-Djir et Sidi-Chahmi.

Tableau 2 : Dominance des types d’opérations d’après les sites enquêtés

Carte 1 : L’extension de l’agglomération oranaise.

Le lotissement semble l’opération la plus couramment utilisée avec plus du 1/3 de l’ensemble des constructions recensées. Dans les nouveaux espaces urbanisés d’Oran, les types d’opération de l’habitat produit sont certes diversifiés, mais ils diffèrent d’un site à un autre (tab. 2). Les lotissements et les recasements dominent à Aïn-el-Beïda, à Sidi-Bachir et à Nedjma, tandis que l’autoconstruction n’est présente que sur les sites de la commune d’Oran (Cheikh-Bouamama, dit El-Hassi) et Bir-el-Djir (Khemisti). Quant aux coopératives immobilières enquêtées, elles ne sont présentes que dans la commune d’Es-Sénia. L’habitat précaire enquêté est implanté principalement dans la commune d’Oran, à Bouakeul et Cheikh-Bouamama (dit El-Hassi).

Un desserrement démographique illustré par un accroissement spectaculaire de certaines agglomérations périphériques

La première approche statistique a montré une nette progression démographique. La population agglomérée de la couronne périurbaine est passée de 18 808 habitants, en 1966, à près de 200 824, selon les données du recensement de 1998. Cette progression est caractérisée par la croissance rapide d’un certain nombre de noyaux tels que Bir-el-Djir et Nedjma à l’est d’Oran, Es-Sénia et Aïn-el-Beïda au sud. Cette explosion démographique n’a été ressentie qu’à partir de la fin des années 1980.

Tableau 3 : Evolution de la population dans l’agglomération oranaise

Source : O.N.S. (1966-1977-1987-1998).

Le taux d’accroissement global de cette zone durant cette période (1966-1998) est de l’ordre de 11,36 %, alors que celui de la ville d’Oran ne dépasse pas les 3,08 %. Le résultat par agglomération montre que certaines localités ont connu déjà des taux de croissance vigoureux durant la période intercensitaire (1977-1987) ; c’est le cas de Bir-el-Djir, Aïn-el-Beïda et Sidi-Marouf. Durant la dernière période intercensitaire (1987-1998), c’est Bir-el-Djir (24,20 %) et Nedjma (20,32 %) qui ont connu les plus forts taux de croissance. La population de cette dernière agglomération a été multipliée par presque huit fois, passant de 4 316 habitants en 1987 à 33 044 en 1998.

Tableau 4 : Evolution du poids démographique de la couronne périurbaine d’Oran par rapport à l’agglomération oranaise

Source : O.N.S. (1966-1977-1987-1998).

D’une manière générale, le dynamisme démographique que connaît la zone périurbaine oranaise a permis d’augmenter son poids par rapport à celui d’Oran. En effet, cette couronne, qui ne représentait que 5,5 % de l’agglomération oranaise toute entière en 1966, regroupe désormais près du quart de l’ensemble de la population oranaise agglomérée. Ce desserrement démographique accompagne naturellement le desserrement géographique au sein de la métropole régionale.

Une mobilité résidentielle massive, récente et modulée

Une mobilité résidentielle intra-urbaine dominante

Le résultat du sondage effectué sur la périphérie oranaise indique que la majorité des chefs de ménage enquêtés est venue des communes de la wilaya d’Oran (81.8 %). Sur ce taux, c’est la commune d’Oran qui détient la part la plus importante (64,7 %), Es-Sénia vient en seconde position avec 22,6 % puis Bir-el-Djir avec 5,5 %. Viennent enfin, les communes telliennes de l’Ouest algérien avec près de 13,4 %. Les communes des wilayas de Relizane, de Tiaret et de Mascara en sont les principaux pourvoyeurs. Quant à l’Est du pays, il s’avère que la majorité des chefs de ménage migrants reçus proviennent de la wilaya de Bordj-Bou-Arreridj, particulièrement des communes de sa partie septentrionale montagneuse.

Tableau 5 : Lieux de résidence antérieurs des chefs de ménage enquêtés

LIEUX

Effectifs

%

Commune d’Oran

430

53,3

Communes de la wilaya d’Oran

230

28,5

Sous total : wilaya d’Oran

660

81.8

Communes de l’Ouest

108

13,4

Reste de l’Algérie

34

4,2

Etranger

5

0,6

Total

807

100,0

Source : enquête terrain 2000-2001.

Le traitement des données collectées par secteur urbain fait ressortir que la majorité de la population périurbaine habitait auparavant la ville d’Oran elle-même; plus largement, l’essentiel de la mobilité se fait à l’intérieur du territoire de la wilaya (tab. 5).

• Une mobilité résidentielle massive enregistrée entre 1990 et 2000

Le traitement des données concernant les dates d’installation des chefs de ménage périurbains enquêtés révèle l’intensité des déplacements résidentiels durant deux décennies. La période qui a accueilli le nombre le plus important est indéniablement la décennie quatre vingt dix. En effet, plus de 70 % des chefs de ménage enquêtés se sont installés dans la périphérie oranaise durant la période 1990-2000 (tab. 6).

Tableau 6 : Date d’installation en périphérie des chefs de ménage enquêtés

Source : enquête terrain 2000-2001.

A elles seules, les cinq dernières années ont vu l’installation de 358 chefs de ménage sur les 821 enquêtés soit 43,6 % ! Ceci montre l’accélération de ce phénomène à partir des années 1990.

• Des motifs d’installation périphérique modulés dans le temps en fonction de divers facteurs

Les motifs d’installation des chefs de ménage dans la périphérie nouvellement urbanisée sont assez variés. Cette diversité semble être en rapport à la fois avec les anciens lieux de résidence et les dates d’installation des ménages. En effet, les raisons pour lesquelles les chefs de ménage ont quitté leur ancienne habitation sont multiples. Il s’agit en premier lieu pour 67,4 % des enquêtés des conditions générales de l’ancien logement (habitat précaire et exigu, loyer cher, état médiocre…) puis, en second lieu, pour des raisons politiques et sociales (question sécuritaire, conditions sociales, causes liées au travail) (tab. 7).

Tableau 7 : Motifs de déplacements des chefs de ménages

 

Effectifs

%

Conditions générales du logement

254

67,4

Problème sécuritaire

52

13,8

Raisons sociales

46

12,2

La recherche d’un travail

25

6,6

Total

377

100,0

Source : enquête terrain 2000-2001.

Ces motifs diffèrent naturellement selon les anciens lieux de résidence. C’est ainsi que les populations venues de différents quartiers de la ville d’Oran, ou de certaines de ses banlieues plus ou moins lointaines, se sont installées au sein de la périphérie proche. La domiciliation en périphérie des migrants provenant de communes lointaines est motivée par la mise à l’abri sécuritaire dans la ville et par la recherche d’un emploi. Naturellement, les mobiles diffèrent aussi selon la date d’installation des populations dans les diverses agglomérations périurbaines.

Tableau 8 : Motifs de déplacements des chefs de ménages selon leurs dates d’installation

 

Conditions générales du logement

Problème sécuritaire

La recherche d’un travail

Avant 1990

93

0

11

Entre 1990 et 2001

153

22

23

Source : enquête terrain 2000-2001.

Après 1990, la vie urbaine semble se compliquer et les réponses données par les habitants attestent de l’aggravation des conditions de logement, de la difficulté de trouver un emploi et de l’irruption de l’insécurité dans les campagnes (tab. 8).

Ainsi, nous pouvons affirmer que l’extension qu’a connue la ville d’Oran sur son territoire périurbain est liée à de nombreux facteurs, dont le plus important est dû principalement aux conditions générales du logement. Ne pouvant donner des conditions correctes de logement à ses résidents, la ville a vu une partie de sa population, des classes moyennes et aisées comme des catégories pauvres, s’installer en périphérie, et ce, en raison de la conjoncture politique et économique nationale. Ce sont là les principaux facteurs qui ont modelé la configuration actuelle de l’agglomération oranaise.

Les acteurs face à la question foncière : production bâtie planifiée et différenciation sociale peu marquée

Y a-t-il une différenciation sociospatiale dans ces nouveaux espaces ? Telle a été la question de départ à laquelle nous avons adhérée. Pour répondre à cette question, nous nous sommes attelés à décomposer les mécanismes de la production foncière et immobilière d’une part, et les acteurs de cette production d’autre part.

La législation foncière, support de l’urbanisation

Analyser la question foncière est le point de départ de toute éventuelle différenciation sociospatiale, et cela quelle que soit la formation sociale considérée. Dans les sociétés de type capitaliste, le foncier se présente certes comme un véritable « verrou » pouvant compromettre des opérations immobilières, mais aussi comme le principal moteur de ce que l’on appelle la ségrégation spatiale. Ceci est dû à la nature de la propriété, qui est une marchandise au départ et par conséquent soumise à la loi de l’offre et de la demande entre les individus directement. Ceci n’est pas du tout le cas de la formation sociale algérienne, du moins jusqu’à une date récente. En effet, dans l’écrasante majorité des villes algériennes, les terrains devant recevoir les extensions urbaines relèvent du domaine privé de l’Etat. L’agglomération oranaise est un cas type.

Confinée dans le Code civil jusqu’en 1974, la question foncière va faire l’objet de deux importantes lois, celle de 1974 intitulée « Ordonnance portant sur les réserves foncières » et celle de 1990 intitulée « Loi d’orientation foncière ». Encore en vigueur, ces deux lois forment le « lit » de tout le développement spatial, passé ou présent, de toutes les villes algériennes et ce, depuis 1974. On peut situer le début du développement spatial post-indépendance d’Oran à cette date, pour la forme habitat collectif et pour la forme qui nous préoccupe ici : l’habitat individuel réglementaire, en 1978.

Ce type d’habitat dans sa phase initiale, celle de la situation de l’assise foncière, va mettre en face trois acteurs. Ces derniers sont l’Etat, les collectivités locales et les populations, seules ou à travers les groupes sociaux. Qui sont-ils ? Quelles stratégies mettent-ils en place pour distribuer ou pour accéder au lot de terrain dans les coopératives immobilières, dans les lotissements et dans les recasements ? Produisent-ils une différenciation sociospatiale ? Si telle est le cas, qui en est le principal acteur ?

Notre point de départ est que toute différenciation sociospatiale dans les nouveaux espaces habités peut se mesurer par la production foncière. Cette dernière est le point de départ d’une structuration ou d’une déstructuration de l’espace urbain, qu’il soit ancien ou nouveau. Mettant plusieurs acteurs en présence, cette production foncière fera l’objet du premier volet de cette action. Le second volet portera sur l’étude des deux formes principales retenues délibérément dans cette recherche, celle des lotissements et celle des recasements localisés au sein des réserves foncières communales.

Les principaux acteurs de la production foncière et immobilière

Les mécanismes de la production foncière mettent en relation de face-à-face et de manière systématique les trois principaux acteurs que sont l’Etat, les collectivités locales et les groupes sociaux.

• L’Etat, principal déterminant de l’allocation foncière destinée à l’habitat individuel

D’une manière générale, l’Etat est l’organisation politique inhérente à toutes les sociétés anciennes ou modernes. Dans les définitions les plus courantes mais aussi dans les plus connues, il y a celle que souligne à juste titre G. Balandier (1984). Pour cet anthropologue, l’Etat est caractérisé par trois aspects fondamentaux, à savoir un territoire, le consentement d’une population et l’existence de structures organiques.

En Algérie, ce type d’organisation politique de la société, en d’autres termes celui de l’Etat, a toujours existé. Sans remonter loin dans le temps, l’Etat a existé au sein de la formation sociale algérienne bien avant la colonisation française (l’Etat algéro-ottoman ou celui de l’émir Abd el-Kader). Cependant, cette dernière s’est faite de manière très violente et a balayé l’Etat précolonial de façon radicale et pour longtemps. A ce propos, M. Camau (1983) souligne qu’« en Algérie, la destruction de l’Etat s’est doublée d’une destruction radicale du tissu social traditionnel, effet conjugué de la pacification militaire, de la réorganisation administrative et judiciaire, de l’accaparement des terres au profit des colons et du jeu de nouveaux circuits d’échange… ».

La notion d’Etat reste une notion très abstraite, mais nous ne devons pas la confondre avec les notions d’appareil de l’Etat et d’institutions. Ces deux dernières nous renvoient à l’idée d’instruments. En effet, l’Etat en tant que tel ne veut rien dire, mais il va toujours se manifester à travers ses appareils et surtout à travers ses institutions.

Plusieurs définitions de l’Etat sont proposées par différentes disciplines (droit, sociologie, économie…) ; pour notre part, nous adhérons totalement, et même si nous devons nous répéter, à celle que G. Balandier appelle « les définitions communes. Elles caractérisent l’Etat par trois aspects principaux : la référence à un cadre spatial, à un territoire, le consentement de la (ou des) population (s) vivant à l’intérieur de ses frontières, l’existence de structures plus ou moins complexes qui constituent le fondement de l’unité politique ».

L’Etat se présente comme le véritable centre de décision, et cela à tout point de vue. Ainsi, l’Etat algérien va mettre en œuvre des politiques économiques, mais aussi sociales (emploi), fondées sur le mythe du développement. L’une des politiques majeures mises en œuvre est celle de l’industrialisation, qui supposait chez les décideurs la modernisation. Le modèle adopté est celui de l’économiste français G. Destanne de Bernis : c’est le célèbre modèle de l’industrie industrialisante. On supposait que tout l’effort de développement devait être fait pour doter le pays d’une industrie lourde de base, qui allait avoir un effet d’entraînement sur tous les autres secteurs. Ainsi, vont être délaissés des branches d’activités vitales et, pour ne citer qu’une seule, celle de l’habitat. Par ailleurs, l’homme en tant que moteur de tout développement n’a pas été pris en compte. Les tenants du modèle considéraient que c’est l’usine qui formerait l’homme ; c’était sans compter sur les pesanteurs sociologiques et anthropologiques qui, dans le cas de notre société, demeurent très fortes. Ainsi, en réalisant des usines, on pensait former « un homme nouveau ». On croyait plus à la machine qu’en l’homme.

Par ailleurs, ce qui a toujours caractérisé l’Etat était le volontarisme dans toutes ses actions. Tout se fait de haut en bas ; là aussi, c’était sans compter sur les spécificités locales, pour ne pas dire régionales. A titre d’exemple, la décision administrative prise vers les années 1980 sommait toutes les collectivités locales algériennes de produire 200 lots par an et par commune ; or, on sait parfaitement que la taille des communes est différente, parfois à tous les points de vue…

Dès 1974, l’Etat algérien va promulguer différents textes relatifs à la politique urbaine, dont un des volets notables concerne la politique foncière, la définition de normes et la promulgation de règlements juridiques.

On peut schématiser en définissant l’Etat comme étant un système social issu naturellement de la formation sociale concernée inscrite dans un territoire plus ou moins matérialisé. Il est fortement centralisateur et dominateur. Il est détenteur de la force et du pouvoir. Cependant, il lui est nécessaire pour se maintenir de se légitimer sans cesse, soit par le discours, soit par une pratique, soit par la force. Ces trois moyens de légitimation peuvent être utilisés séparément ou en même temps. La question foncière en est un exemple frappant.

• Les communes : des collectivités locales ballottées entre différents acteurs

Les communes en Algérie sont un héritage colonial. Elles sont d’abord et avant tout des collectivités locales, tout en étant des entités territoriales. La commune constitue l’unité administrative de base. Elle se compose d’une assemblée élue et d’une administration présidées par le maire. L’instance supérieure est la wilaya, qui est dotée de services déconcentrés de l’Etat et d’une assemblée élue.

Les premières communes qui préfiguraient celles d’aujourd’hui à travers tous les pays sont apparues déjà à l’époque féodale en Europe. Mais il s’agissait d’abord d’une organisation sociale avant d’être une organisation territoriale. Durant la période féodale, la commune rassemblait les bourgeois des villes. Ces derniers établissaient un code entre eux et le seigneur ou le souverain concerné pour une auto-administration.

Qu’est-ce qu’une commune dans l’Algérie d’aujourd’hui ? Une commune est considérée comme une unité territoriale bien délimitée avec des populations qui tantôt doivent s’organiser, tantôt sont organisées. Le mode d’organisation souhaité, mais imposé, est la représentation dans une assemblée populaire. Cette assemblée doit à la fois satisfaire les exigences de l’Etat central sans lequel elle n’a pas d’existence, et satisfaire les exigences des groupes en présence qu’elle administre et dont certains l’ont aidée à diriger la commune grâce à la position qu’ils occupent dans les institutions de l’Etat. Ces exigences sont parfois contradictoires, et c’est là le principal conflit auquel sont confrontées les assemblées populaires communales algériennes. Cela est parfaitement illustré à travers la production foncière, pour peu que l’on admette que la commune est le second acteur, dans cette question, après l’Etat.

La commune est considérée par le pouvoir central comme la cellule administrative de base où les citoyens sont égaux. A notre avis, la commune est plutôt le maillon entre le pouvoir central et les groupes sociaux en présence. C’est à l’intérieur de cette institution que vont s’affronter tous les acteurs de la production foncière, par exemple. En tout cas, ceci est tangible et réel durant la période et dans le cas des réserves foncières communales (c’est-à-dire depuis la promulgation de la loi de 1974 et bien après la promulgation de la seconde loi portant orientation foncière de 1990). D’ailleurs, c’est pour cela qu’il semble pertinent d’analyser ce contexte des réserves foncières, depuis la promulgation de la première loi foncière de 1974 jusqu’à aujourd’hui à travers le cas oranais. C’est le cadre et la période la plus prolifique en matière de production foncière et en matière d’extension spatiale pour l’ensemble des villes algériennes. La plupart ont doublé, voire presque triplé la surface de leur espace urbanisé, même si c’est d’une manière fragmentée.

Par ailleurs, au sein de la commune le pouvoir stricto sensu n’existe pas, ou en d’autres termes le pouvoir ne veut rien dire. Quand bien même il existe, il dépend du pouvoir central (pouvoirs juridiques, financiers, coercitifs des appareils…) et du pouvoir des groupes locaux identifiés (membres de parti (s) politique (s,) organisations de masse, associations, moudjahidines, enfants de chouhadas, syndicats…) ou informels (notables, ouled el-bled, groupes de pression…).

La commune se présente comme un acteur particulier, ballotté entre les autres acteurs et intervenants. L’analyse en profondeur du Code communal révèle un aspect bicéphale de cette institution. En effet, la commune est tantôt définie comme représentante de l’Etat, tantôt comme représentante des populations et, donc, des groupes locaux. Cette double « casquette » fait que le pouvoir communal est difficilement repérable et, par voie de conséquence, difficile à analyser. De manière générale, une assemblée communale reflète, de façon directe ou indirecte, les intérêts des groupes locaux. Ainsi, la plupart des stratégies mises en place sont fondées sur cette réalité. La commune est souvent en relation avec les appareils centraux de l’Etat représentés localement par différentes directions de l’exécutif de la wilaya telles que celles de l’urbanisme, l’agriculture ou les domaines. Elle essaye alors de négocier, au mieux, les intérêts des groupes locaux par le contrôle, mais aussi par les orientations importantes, telles que les extensions urbaines, les choix de localisation de sites pour ce qui est de la question foncière, par exemple.

• La formation des groupes sociaux

Par groupe social, nous entendons un groupe restreint formé par un ensemble d’individus ou par des populations. Nous empruntons le terme de groupe aux tenants du béhaviorisme (psychologie du comportement). Dans ce sens, un groupe est un ensemble de personnes ; il se fait et se défait au gré des circonstances et toujours par rapport à un intérêt particulier. Ainsi, dans la question foncière, les groupes ne le sont que par rapport à l’espace. Les populations locales s’organisent entre elles, donc en groupes, pour avoir accès au lot de terrain ou pour négocier les viabilités nécessaires de leur nouvel espace (lotissement). Les groupes sociaux constituent le troisième et dernier acteur dans la production foncière.

Sur le plan local, nous trouvons des groupes sociaux dont les référents et les appartenances sont certes différents, mais parfois complémentaires. Cela peut être des groupes formés sur la base d’une origine lointaine commune, d’un voisinage ancien, d’une activité commune ou sur une base symbolique telle que celles des organisations des anciens moudjahidines ou des enfants de chouhadas.

Nous préférons utiliser les termes de groupes sociaux à celui de tribu pour désigner les populations locales car la notion de tribu nous renvoie aux liens de parenté alors que dans la notion de groupe social il n’y a pas que la parenté, parfois même elle est inexistante. Par ailleurs, le terme de tribu est un terme ayant une lourde connotation coloniale. Il nous semble qu’il n’est plus possible d’utiliser le terme de tribu pour qualifier les populations locales. Si l’organisation sociale précoloniale s’articulait autour des tribus, aujourd’hui il n’en reste de celle-ci que des « morceaux » qui souvent n’ont plus de liens très forts, ni entre leurs membres, ni avec leur lieu d’origine.

Dans les métropoles telle qu’Oran, la référence à l’ancêtre éponyme, qui est l’apanage de tous les membres d’une tribu, n’existe pratiquement plus. On sait que l’on est originaire de telle ou telle région sans plus. On fait plus souvent référence à l’appartenance à la ville où l’on réside qu’à l’origine de ses parents. C’est le critère de l’ancienneté dans la ville qui fait que l’on est « citadin » ou non. Par ailleurs, les arrivées migratoires massives qu’a connues Oran pour des raisons historiques au lendemain de l’indépendance, ou bien plus tard, sont des arrivées de régions bien déterminées, mais vides de liens tribaux. Il s’agit de populations issues du monde rural et des villes de l’Ouest algérien essentiellement.

En fait, en ville ou plutôt en milieu urbain, d’autres liens se tissent en dehors de toute considération tribale. Ces dernières deviennent secondaires, mais ne s’estompent pas ; on peut dire qu’il y a un phénomène de résurgence dans ce cas. Souvent, on utilise son appartenance tribale pour mieux négocier un lot de terrain, surtout si le décideur est natif de la même région ; nous considérons cela comme une stratégie de groupe, et cela est valable pour des groupes qui n’ont pas d’autres référents. Ce capital symbolique peut être aussi fort que celui que l’appartenance à un autre groupe tel que celui des anciens moudjahidines ou celui des enfants de chouhadas.

Les réserves foncières communales : un facteur déterminant pour la production de nouveaux espaces habités.

Jusqu’à l’avènement de la loi portant sur les réserves foncières communales (février 1974), on peut dire qu’il n’y avait aucun texte réglementaire, spécifique, en matière de foncier. Le marché foncier, presque inexistant, était confiné dans le Code civil, véritable héritage du temps de la colonisation.

L’ordonnance 74-26 du 20 février 1974 : un cadre juridique exemplaire détourné de ses objectifs

Ce texte juridique portait sur la constitution des réserves foncières au profit exclusif des communes. L’idée de réserves foncières est née de la nécessité de trouver des espaces urbanisables pour le programme de développement national planifié qui commençait à pendre de l’ampleur.

En effet, ce vaste projet intéressant l’ensemble de l’armature urbaine va très vite se heurter à ce que l’on appelle communément le « verrou foncier ». C’est une véritable révolution du foncier urbain qui va s’opérer dès 1974 ; la nouvelle loi va ignorer et minimiser toute propriété et considérer que tout terrain situé à l’intérieur d’un périmètre d’urbanisation comme une réserve foncière appartenant à la commune concernée.

Cet important texte juridique a été conçu et produit pour servir de « lit » à un vaste programme de localisation d’industries et d’équipements des villes algériennes, et n’est pas l’aboutissement ni le fruit d’une gestation. Il semble que, dans l’esprit du décideur et non dans celui du législateur, le problème était beaucoup plus une question de mise en chantier de programmes nécessitant des assiettes foncières qu’une quelconque politique foncière qui mettrait en action des mécanismes de transaction dès le départ. Ces derniers sont les véritables moteurs d’une éventuelle différenciation sociospatiale.

Dans l’esprit du législateur, la commune ne devait jouer que le rôle d’un appareil de l’Etat à qui est dévolu cette impérative mission. A cet effet, la commune se trouve malgré elle dotée d’une mission la dépassant largement. Cette mission vise à formaliser l’acquisition foncière, mais aussi la cession ou la rétrocession de terrains aux différents utilisateurs. On peut dire, en d’autres termes, que c’est l’Etat (la commune n’étant qu’un appareil de celui-ci) qui a été dès le départ l’instigateur, mais aussi le réalisateur de cette technique des réserves foncières communales. Il est le principal artisan et, de ce fait, il sera le principal, si ce n’est le seul acteur, de la production foncière et par voie de conséquence celui de la production immobilière.

A ce niveau, les assemblées populaires communales n’ont aucune autonomie, d’autant plus que dans l’agglomération oranaise la quasi-totalité des zones d’extension urbaine relève du domaine privé de l’Etat.

Toutes les communes, sans exception, quelle que soit leur spécificité ou leur taille, étaient tenues, dès la promulgation de cette ordonnance, d’appliquer localement cette loi décidée par le pouvoir central. Aucune concertation n’a été menée avec les assemblées locales, et encore moins avec les communes caractérisées par une prépondérance de terrains privés ; le centre n’a pas non plus tenu compte des doléances transmises.

Bien qu’en définitive la loi sur les réserves foncières soit un cadre exemplaire pour tout développement cohérent des sites urbanisés en raison de son monopole foncier, il n’en demeure pas moins qu’elle a été très vite dépassée par les enjeux locaux en matière de cession de lots de terrain. De manière intrinsèque, la loi n’apparaît pas mauvaise, mais elle a été mal appliquée, pour ne pas dire détournée, et ce, jusqu à l’heure actuelle.

Ce qui a rendu obsolète et inopérante l’ordonnance 74-26 est paradoxalement la politique des lotissements et, par voie de conséquence, l’habitat individuel. A titre d’exemple, à partir de 1988, les communes de l’agglomération oranaise se sont lancées dans la production de vastes opérations de lotissement et de recasement, sans pour autant mener les procédures d’usage, notamment l’intégration des assises d’accueil des projets dans les réserves foncières communales. Cette situation persiste encore aujourd’hui. En outre, il y a lieu de noter un grand paradoxe induit par cette ordonnance, c’est celui qui a transformé une exception dans ses dispositions en une règle générale. En effet, si on assimile aujourd’hui les réserves foncières aux lotissements, le texte de loi n’a pas été promulgué pour cela, il a seulement donné une possibilité aux communes de pouvoir mener à titre exceptionnel des opérations de lotissement.

L’ordonnance 74-26, qui ne comptait que treize articles, a dans un de ses derniers articles donné la possibilité aux communes la faculté de lotir pour de l’habitat individuel. Dans l’esprit du législateur, cette faculté allait devenir, dès les années 1980, une règle quasi générale de toutes les communes d’Algérie. En se généralisant, cette pratique va être en bonne partie à l’origine de la fragmentation des tissus urbains de l’agglomération oranaise (Bendjelid A., 1998), dans la mesure où chaque commune composant cette agglomération va initier des programmes de lotissement sans aucune concertation avec les autres entités administratives voisines.

La fin du monopole sur le foncier effectué au profit des communes par le déclassement de la loi sur les réserves foncières, dès 1990, et par la loi d’orientation foncière, reste peu visible sur le terrain, du moins en ce qui concerne le foncier réservé à l’habitat de type individuel dans sa version lotissement et donc d’autoconstruction. Ce sont les grandes opérations de lotissement et de recasement de l’ère des réserves foncières qui constituent la grande base des nouveaux espaces habités de la périphérie oranaise.

Les lotissements et les recasements à Oran : accession foncière et réseaux sociaux

Plusieurs types de productions foncières sont mis en œuvre pour la réalisation de l’habitat individuel ; parmi ceux-ci, les plus utilisés sont les lotissements et les recasements. Le lotissement est le type le plus classique, le plus répandu et le plus connu. Il s’agit d’une opération de division d’un terrain en plusieurs lots, sur la base d’un parcellaire et d’un cahier des charges. Il est l’apanage exclusif des collectivités locales. Tous les autres types s’inspirent plus ou moins de cette procédure. Le recasement est une forme simplifiée de lotissement avec un parcellaire sommaire, souvent sans cahier des charges, où les surfaces des lots sont très petites (Messahel A., 2001). En général, ce type est initié par les services déconcentrés de l’Etat en collaboration avec les collectivités locales. A la différence des lotissements, les recasements sont le plus souvent pris en charge financièrement par l’Etat, notamment leur viabilisation. C’est pour cela qu’ils sont en principe destinés aux populations à faibles revenus et donnent lieu à des transferts de population, en général pauvres, résidant dans des vieux centres urbains ou des bidonvilles. Dans le cas d’Oran, ce type était destiné en partie aux populations de Sidi-el-Houari, de Derb et de quelques bidonvilles de la périphérie.

La politique du lotissement n’est pas un fait nouveau, ni à Oran ni dans les autres villes algériennes. En effet, durant la période coloniale, de nombreuses périphéries se sont formées à partir de lotissements. Cependant, durant cette période, c’est la loi du marché qui imposait l’accès à tel ou tel lotissement. Dans la période actuelle, ce n’est pas du tout le cas. Le prix d’acquisition étant dérisoire, ce sont d’autres mécanismes qui se mettent en place, et l’on pourrait déceler facilement des stratégies de groupes. Parmi ces groupes, le plus important au moment de l’application des réserves foncières est celui des membres du parti unique et de ses différentes organisations (anciens moudjahidines, enfants de chouhadas…). Les communes devaient forcément coopérer avec ces groupes et, dans toute distribution de lots de terrain, un quota leur était réservé.

Initialement, les lotissements comme les recasements ont été produits de manière plus ou moins réglementaire ; leur nombre était réduit. A partir de 1986-1987, on a assisté à une prolifération de lots de terrain et à des pratiques appliquées à la limite de la réglementation. Toutes les communes de la wilaya d’Oran ont connu ce phénomène que beaucoup ont qualifié de « mode ». Leur configuration géographique est particulièrement visible au sein de l’espace périphérique d’Oran, c’est-à-dire dans les communes limitrophes comme celles d’Es-Sénia, Bir-el-Djir ou Sidi-Chahmi. Ainsi, on enregistre pour l’année 1987 de très fort taux d’accroissement dans ces communes, accompagnés par une très forte demande de lots de terrain à bâtir. Celle-ci est en totalité concentrée sur les communes de Bir-el-Djir (près de 13 000 lots), Es-Sénia (plus de 10 000), Sidi-Chahmi (près de 9 000). Cette forte demande émanait en grande partie de la population oranaise habitant intra muros. Cela montre bien que les communes périphériques ont joué une fonction de desserrement démographique et résidentiel pour la ville d’Oran.

Pour accéder au lot de terrain dans des lotissements ou même dans des recasements, les dispositions réglementaires sont souvent occultées et font place à des pratiques de luttes urbaines. Le système du dossier dûment rempli et assujetti à une délibération de l’assemblée populaire de telle ou telle commune est souvent resté sur un plan théorique. Il n’existe pas, du moins à notre connaissance, d’acquéreurs ayant obtenu un lot de terrain sur une simple demande. Dans le cas des lotissements, on peut dire que plus de la moitié des acquéreurs ont eu recours à des « connaissances » faisant partie des réseaux sociaux (membres des différents groupes de pression) pour faire valoir un « droit » à un lot de terrain.

Les nouveaux noyaux illicites de la périphérie oranaise : squats, mobilités et tentatives d’intégration : le cas de Cheikh-Bouamama (dit El-Hassi, ex-Pont-Albin)

La vigoureuse et rapide extension non planifiée de Cheikh-Bouamama, en rupture morphologique avec les tissus urbains oranais

La production d’un bâti résidentiel est toujours le résultat d’une pratique sociale et culturelle des hommes. En périphérie urbaine, tout habitat nouveau est susceptible de donner lieu à une différenciation spatiale, voire sociale, qui marque le paysage urbain des villes algériennes, et ce, pour une série de raisons locales : habitat planifié ou non planifié, modalité d’accès au bien foncier, moyens financiers des ménages, site géographique, morphologie de la construction, niveau culturel des résidents, pratiques sociales des acteurs habitants…

Le fragment analysé, rattaché territorialement à la commune d’Oran, est implanté à la sortie occidentale de la ville en bordure de la route nationale 2 menant à Tlemcen. Ce noyau, peuplé de moins de 5 000 habitants en 1987 et rassemblant en 1998 plus de 30 000 habitants, a fini par fusionner avec l’agglomération chef-lieu. Le toponyme usité change selon les différents acteurs : dénommé initialement Pont-Albin, il est devenu pour la municipalité le secteur de Cheikh-Bouamama et, pour la population habitante, il est désigné sous le vocable de douar El-Hassi ; c’est là le toponyme utilisé couramment par les premiers squatters du site à la fin de la décennie 1980 et au début de celle de 1990. C’est dire implicitement aussi qu’à l’origine, les ménages se sont regroupés par affinité géographique d’origine de naissance autour de trois noyaux principaux dominés localement par les natifs des monts de l’Ouarsenis, de la Petite-Kabylie occidentale, d’Oran et d’autres communes d’Oranie… Dans ce douar qui s’est transformé progressivement en un quartier suburbain de la métropole régionale, le type de construction résidentielle dominant est individuel ; il est caractérisé par une morphologie d’un bâti maghrébin dénommé haouch. Là, l’observateur ressent sans difficulté une rupture morphologique entre les anciens tissus urbains oranais d’époque coloniale (Cité des Amandiers, Eckmühl…) et ceux produits récemment au sein du noyau d’habitat spontané de Cheikh-Bouamama.

Dans ce fragment en mutation physique continue, comparable aux autres bâtis spontanés répartis au sein de l’agglomération oranaise, nous avons eu affaire à une forte production d’un habitat illicite beaucoup plus qu’à un habitat illégal. Comme la plupart des villes maghrébines en ce début de siècle, Oran est caractérisé par la juxtaposition d’un habitat planifié, né à la fois durant les périodes précoloniales, coloniales espagnole et française, durant la phase de développement planifié, et d’un habitat non planifié induit par une forte demande de logements et par une difficile transition de l’économie étatisée vers l’économie libérale.

Sur les onze sites périphériques de l’agglomération d’Oran soumis au sondage en 2000-2001, 40 ménages enquêtés sur le site spontané du douar El-Hassi ont pu répondre correctement aux questions posées ; la méthode de sondage utilisée est dite aléatoire.

L’occupation foncière illicite : conjoncture politique et transactions informelles

L’occupation foncière des terrains appartenant au domaine public s’est faite dans ce noyau au cours de la décennie 1980 (Kétita A., 1990), et ce, dans une conjoncture politique marquée par la crise économique et politique. Celle-ci s’est traduite par un envahissement délibéré des terrains par des populations mal ou non logées qui n’ont pu bénéficier de logement public, ni de lot de terrain octroyés dans le cadre des réserves foncières communales (ordonnance de février 1974) aux classes sociales moyennes et aisées. Le squat s’est accéléré au début des années difficiles de la décennie 1990, au plus fort de la crise née du conflit entre le pouvoir politique central et les nouvelles municipalités élues représentant les partis de l’opposition, principalement islamistes ; le phénomène de l’occupation foncière illicite s’est poursuivi lors de la période de gestion communale assurée par les délégués de l’exécutif communal nommés.

Il faut rappeler tout de même que, d’une part, dans un rayon d’une douzaine de kilomètres autour d’Oran, la quasi-totalité des terres font partie du domaine de l’Etat et que, d’autre part, ce squat massif est révélateur de l’affaiblissement réel du contrôle de l’espace par les services de l’Etat… La construction des haouchs, faite rapidement avec les matériaux de construction disponibles et à bon marché (parpaings, ciment,…), a été inscrite sur le sol selon un plan de structure désordonné ; ce n’est qu’après avoir atteint un seuil de densité bâti que les squatters ont commencé par imposer à leurs futurs voisins les règles d’un alignement des constructions. L’occupation de terrains publics incultes, situés sur le versant méridional du djebel Murdjadjo, a aussi profité à des spéculateurs fonciers et immobiliers. En ce sens, seuls 32,5 % des ménages avouent avoir « accédé directement » au sol, alors que 55,0 % affirment avoir acheté à des particuliers leur construction : c’est dire la place tenue par les transactions informelles qui confirment l’existence de lotisseurs clandestins, désignés par les acheteurs de parcelle foncière par le mot de « particuliers » ou de « privés ». Bien plus, nombreux sont les squatters qui prétendent que l’occupation d’un lot public est un « droit » perçu comme un « dû », déjà reconnu par le discours politique de la période de développement planifié selon les mots d’un autoconstructeur.

Une mobilité intra-urbaine dominante en dépit d’une reprise de l’exode rural dopée par l’insécurité dans les campagnes

En ce qui concerne la mobilité des populations, un point capital mérite d’emblée d’être souligné, à savoir que seuls 42,9 % des migrants enquêtés dans les noyaux d’habitat spontané de Cheikh-Bouamama (dit El-Hassi, ex-Pont-Albin) et des douar A et B de Bouakeul viennent directement des campagnes ; en d’autres termes, cela veut dire que nous assistons à une reprise de l’exode rural motivée par l’insécurité, vécue dans les zones de montagne durant les années 1991-1998, qui a poussé les populations à rechercher un refuge au sein des quartiers urbains et, surtout, au sein des fragments d’habitat pauvre de la périphérie oranaise. Logiquement, cette migration veut dire aussi, en recoupant les données relatives au lieu de naissance et au lieu de résidence antérieure, que 57,1 % des migrants proviennent de secteurs urbains, soit de leur ville de naissance, soit qu’ils aient transité par une ou plusieurs quartiers de la métropole régionale ou par des villes moyennes, comme c’est dans notre cas. Le passage par Oran se fait aussi bien par la banlieue immédiate (Nedjma, Bahi-Amar, El-Hassi, Coca…) pour 50 % des migrants que par les quartiers oranais intra-muros (40 %) comme ceux de Bel-Air, Maqqari, Eckmühl, Cité Petit… ; le reliquat des 10 % recouvre des migrants ayant transité principalement par la ville moyenne de Relizane (105 000 habitants en 1998). Le transit de migrants par cette ville moyenne-relais s’expliquerait principalement par l’importance quantitative (70 % de l’ensemble des ruraux accueillis) des originaires des monts de l’Ouarsenis, essentiellement de la commune d’Ouled-Aïch et très secondairement de la commune de Zemmora ; les natifs de villes sont nés tant à Oran que dans les moyennes villes d’Oranie (Tlemcen, Tiaret, Mostaganem, Relizane) et dans quelques petites villes de la région (Oued-Rhiou, Mers-el-Kébir) ; quant au reliquat des 5 % des ménages soumis au sondage, ils n’ont pas donné de réponse. Si l’exode rural s’est perpétué dans le temps, il se serait probablement accru au cours de la décennie 1990 à cause de l’insécurité subie par les populations des zones montagneuses de l’Ouarsenis.

Il serait utile de souligner qu’en dépit de la place notable des migrations rurales directes (42,9 %), il n’en demeure pas moins vrai que les 57,1 % des ménages domiciliés au sein de Cheikh-Bouamama ont fini par acquérir une « certaine urbanité », soit en raison de leur naissance urbaine (Oran, Tlemcen, Tiaret, Mostaganem…), soit à cause de leur transit résidentiel par les villes moyennes-relais (Relizane), où ces populations ont pu se familiariser avec des « manières de vivre » plus ou moins urbaines.

Tableau 9 : Années de l’installation des ménages migrants à Cheikh-Bouamama (El-Hassi)

décennie 1980

1991-1996

1997-1999

1

24

15

Source : Sondage 2001

Tout ceci atténue fortement le cliché entretenu par les uns et les autres autour de la « ruralisation » des villes algériennes ; n’oublions pas que ce sondage a été effectué au sein d’un noyau d’habitat caractérisé par une occupation foncière illicite et qui demeure plus ou moins intégré dans la ville.

Le squat de terrains publics de l’ex-douar El-Hassi s’est prolongé durant toute la décennie 1990 puisque 60 % des occupations illicites se sont faites entre 1991 et 1996, et 37,5 % entre 1997 et 1999, c’est-à-dire durant la période marquée par la crise politique, le terrorisme et la déficience du contrôle étatique sur l’espace (tableau 9). D’ailleurs, ceci est confirmé par la question portant sur les motifs de la mobilité géographique au sein de l’ex-douar El-Hassi puisque les 51 réponses obtenues se ventilent comme suit :

pauvreté et exiguïté du logement : 37,5 %

insécurité et terrorisme : 37,5 %

raisons familiales : 19,6 %

travail : 3,9 %

jeunes couples : 2,0 %

Les installations annuelles les plus nombreuses ont été relevées lors des années 1992-1995.

Des haouchs occupés par des actifs peu qualifiés

en voie d’intégration dans l’économie oranaise

Comme tout noyau d’habitat bâti sur des terres squattées, Cheikh-Bouamama garde encore les traces d’un plan de structure désordonné dans lequel le haouch rural connaît une progressive métamorphose architecturale en devenant un haouch urbain, et parfois même il est transformé en une sorte de villa ou de villa-immeuble, comme le long de la route nationale 2. L’image d’un désordre des constructions est d’ailleurs fortement accusée par la topographie accidentée des trois sites formant ce fragment, particulièrement dans sa partie haute.

Dans l’ensemble, la population résidente apparaît démunie. Toutefois, dans les trois petits fragments (douar Tiartia, douar El-Hassi, douar Ronca) de Cheikh-Bouamama, la population active sous qualifiée présente une certaine homogénéité sociale dans la mesure où 67,5 % des personnes enquêtées se déclarent manœuvres ou journaliers ; aucun cadre moyen ou supérieur, aucun commerçant ou entrepreneur, ne fait partie des habitants de Cheikh-Bouamama (tab. 10).

Tableau 10 : Catégories socioprofessionnelles des chefs de ménage résidents à Cheikh-Bouamama

Catégories

Taux (%)

Manoeuvres

57.5

Journaliers

10

Sans travail

10

Employés

5

Chauffeurs

5

Maçons

2.5

Fellahs

2.5

Retraités

2.5

Non déclarés

5

TOTAL

100

Source : Sondage 2001.

Cette population active essaie de s’intégrer – quand elle ne l’est pas encore – dans l’économie métropolitaine, principalement par l’occupation d’un emploi dans des branches d’activité peu exigeantes en qualification professionnelle (bâtiment à El-Hamri, distribution commerciale à Oran, services, transport…) ou par des tentatives d’insertion par le biais des activités informelles pour ceux qui se disent journaliers ou sans-travail. Plus du quart (27,5 %) travaille sur place, à Cheikh-Bouamama, alors qu’un seul produit de l’exode rural, originaire d’Ouled-Aïch (monts de l’Ouarsenis occidental), n’a pas subi de mobilité professionnelle car toujours occupé dans l’agriculture.

La libéralisation du transport collectif a eu un impact positif sur tous les nouveaux noyaux d’habitat non planifié, auparavant mal reliés à la ville. En effet, les actifs se rendent à Oran par le mode de transport le plus courant et le plus abordable (5 dinars par trajet en 2001), à savoir l’utilisation des fourgons aménagés. Par ailleurs, les réponses relatives à l’usage des services urbains font ressortir les relations privilégiées qu’entretiennent les habitants du fragment spontané de Cheikh-Bouamama avec Médina-Jdida, second pôle de la centralité commerciale d’Oran car ancien quartier « musulman », lieu de l’emploi tant formel (employés dans les services et les commerces…) qu’informel, qui est principalement lié à la revente de produits manufacturés importés ou locaux (confection, chaussures, bonneterie, friperie, bijoux, tissus…). A la suite de la crise économique et des effets de l’ajustement structurel, la centralité commerciale de Médina-Jdida a repris de la vigueur en raison de l’utilisation de ses commerces non seulement par les populations démunies et celles touchées récemment par la pauvreté, mais aussi par les ménages à moyen revenu de l’aire métropolitaine ; bien plus, ce second pôle commercial d’Oran a raffermi son rôle marchand régional à cause, paradoxalement, de la crise économique et de la libéralisation des échanges.

Niveaux d’équipement des nouveaux espaces urbanisés d’Oran et centralités commerciales

Un habitat périphérique planifié et non planifié caractérisé par un sous-équipement manifeste

A côté de l’éclatement physique du bâti dans la zone périurbaine oranaise, il faut souligner que ces nouveaux espaces urbanisés planifiés et non planifiés ont été souvent difficiles à équiper. L’état actuel de ces fragments révèle nettement la déficience de la viabilisation. L’habitat résidentiel a été considéré par les pouvoirs locaux comme la priorité, reléguant de ce fait la réalisation des infrastructures plus coûteuses et plus longues à concrétiser. Pour prendre la mesure de ce phénomène, nous avons préféré demander aux habitants de la périphérie ornaise de nous donner leur avis sur les conditions générales de l’habitat, perçu à la fois comme le logement, les infrastructures de base et les équipements collectifs.

Tableau 11 : Niveaux de satisfaction des populations périurbaines en infrastructures liées au logement

Source : Enquête terrain 2000-2001.

Pour la majorité des infrastructures existantes, il est clair que les habitants ne sont pas satisfaits. En effet, si l’électricité couvre une grande partie de ces nouveaux espaces urbanisés, la situation est presque moyenne quant à l’alimentation en eau potable et l’éclairage public. Le téléphone, le gaz de ville et l’assainissement semblent par contre moins présents. Quant aux équipements collectifs, le sous-équipement est plus prononcé. Les habitants concernés ne sont pas satisfaits des équipements culturels, sportifs, cultuels ou même sanitaires. Ce niveau de satisfaction est moyen quand il s’agit des équipements administratifs et assez bon pour les équipements scolaires (tab. 12).

Tableau 12 : Satisfaction des populations périurbaines envers les équipements collectifs

Source : enquête terrain 2000-2001.

Le résultat par agglomération permet de faire ressortir des zones périurbaines ayant un sous-équipement bien prononcé, alors que d’autres semblent être assez équipés. En effet, les sites tels El-Hassi au sud-ouest de la ville, situé sur la route de Tlemcen, ainsi que le site de Nedjma, dans la commune de Sidi-Chahmi, sont considérés comme les secteurs les plus défavorisés en matière d’infrastructures. Et si El-Hassi donne l’image d’un habitat précaire, Nedjma n’est qu’une vaste opération de lotissements. Cette localité rassemble, selon le recensement de 1998, plus de 33 000 habitants.

En fait, le sous-équipement est lié aux mécanismes qui président à la fois à la production foncière et à l’accession des lots. Sauf exception, en tout cas dans la périphérie oranaise, nous assistons souvent à la distribution de lots de terrain avant même la mise en œuvre des procédures réglementaires nécessaires à l’opération ; c’est dire là que la question de la viabilisation est dans l’ensemble occultée. C’est, certes, le cas de la vaste opération de recasement de Nedjma, où plus de 5 000 lots ont été alloués entre 1987 et 1990, et celui de la localisation de plusieurs lotissements situés dans toutes les communes périphériques, mais aussi celui des coopératives immobilières, notamment celles implantées dans la commune de Bir-el-Djir.

Tableau 13 : Sous-équipement des nouveaux espaces périurbains d’Oran en matière d’infrastructures

Source : enquête terrain 2000-2001.

En matière d’équipements collectifs, la situation est plus claire et fait apparaître les principaux sites connaissant un sous-équipement. Les poches d’habitat tels que Nedjma, Aïn-el-Beïda et Sidi-Bachir (ex-Bendaoud) sont apparemment les sites les plus oubliés. A titre d’exemple, Nedjma est déficitaire en tout type d’équipements et sa population s’est prononcée comme non satisfaite des conditions générales de leur habitat actuel ; par rapport à leur ancien lieu de résidence, les ménages soumis au sondage se sentent aujourd’hui mal à l’aise dans l’agglomération. Aïn-el-Beïda souffre aussi du manque d’équipements sanitaires, sans parler de l’éloignement de l’administration communale puisqu’elle est rattachée à la commune d’Es-Sénia. D’une manière générale, les besoins des habitants de ces sites nouvellement urbanisés ne sont pas satisfaits, notamment en ce qui concerne la santé et la culture.

Tableau 14 :. Sous-équipement des nouveaux espaces périurbains d’Oran en matière d’équipements collectifs

Source : enquête terrain 2000-2001.

Ce sous-équipement, marqué au sein de ces nouveaux sites périurbains de la ville d’Oran, n’a fait qu’accroître leurs liens avec la ville mère. Autrement dit, ces espaces sont presque dépendants entièrement d’Oran. Les déplacements quotidiens massifs entre la ville et sa zone périurbaine en témoignent certainement. Ainsi, on peut dire de cette zone périurbaine, caractérisée à la fois par un éclatement du bâti et une extension spatiale conséquente, par un déplacement presque forcé de ses populations pour des raisons sociales, économiques et sécuritaires et par un sous-équipement marqué en matière d’infrastructures et en équipements collectifs, qu’elle est tout simplement en difficulté. De fait, il est clair que ces espaces nécessitent un traitement urgent et spécifique car c’est l’image d’Oran toute entière qui est touchée.

Un équipement commercial sommaire mais différencié

La périphérie urbaine oranaise n’est ni physiquement continue, ni démographiquement homogène. On serait tenté de dire que plus le poids démographique d’un centre urbain est important, plus son volume commercial est conséquent. Or, la réalité au sein de la périphérie d’Oran est tout autre, en ce sens qu’il n’existe pas réellement de corrélation entre ces deux paramètres.

• Le volume commercial :

des écarts importants d’un centre à l’autre

Un nombre limité de centres urbains dispose d’un équipement commercial relativement important : c’est le cas d’Es-Sénia, Sidi-Bachir, Nedjma, Cheïkh-Bouamama et Aïn-el-Beida, qui rassemblent le plus gros des activités de distribution de la périphérie d’Oran : plus de 200 points de vente par centre (tab. 15). Il semblerait, donc, qu’il s’agit des plus grosses agglomérations. Cependant, le volume commercial n’a pas de sens réel dans l’absolu. En effet, les densités commerciales sont très variables d’un centre à l’autre, et le niveau d’équipement du centre n’est pas nécessairement proportionnel à sa population, du moins pour les localités pour lesquels nous disposons de données démographiques.

• Des densités commerciales plus révélatrices du sous équipement périurbain

L’analyse du tableau 17 met en lumière l’existence d’un sous-équipement commercial caractérisé de localités périurbaines, notamment parmi les plus récemment urbanisées. Nedjma, Sidi-Bachir, Cheikh-Bouamama et Aïn-el-Beida affichent de faibles densités commerciales : 16 commerces pour 1 000 habitants à Es-Sénia, contre seulement 5,7 à Cheikh-Bouamama, alors que ce dernier est bien plus peuplé. Les agglomérations de Nedjma, Sidi-Bachir et Aïn-el-Beida présentent une situation pratiquement similaire. Il s’agit, en fait, des centres qui ont connu un accroissement démographique des plus élevés durant les deux dernières décennies (tab. 16) : la population de Aïn-el-Beida et celle de Sidi-Bachir a été multipliée par 2,5, celle de Nedjma par 10 entre 1987 et 1998 ! En définitive, ce sont les localités les mieux desservies par le réseau de transport, celles se trouvant en liaison directe avec Oran et les plus anciennement urbanisées qui disposent de la structure commerciale la mieux développée, malgré la relative faiblesse de leur poids démographique. Ce sont Es-Sénia et Khemisti qui possèdent les densités commerciales des plus élevées. Néanmoins, la notion de densité commerciale doit être manipulée avec beaucoup de précaution dans la mesure où les densités spécifiques révèlent d’autres différences.

 

• Des commerces tournés essentiellement vers l’activité courante

En effet, la nature commerciale dénote que celle-ci est dominée par le commerce à fréquentation courante, quel que soit le centre considéré. Les commerces alimentaires dominent l’activité périurbaine, en particulier dans les centres les plus récemment urbanisés tels que Cheïkh-Bouamama (54 %), Nedjma (46 %), Sidi-Bachir (37 %) et Aïn-el-Beida (46.3 %). A titre comparatif, Oran enregistre seulement 26 % pour cette même catégorie. Par ailleurs, cette activité est secondée par les services individuels les plus courants (salons de coiffure, studios de photographie, hammams…), qui ne nécessitent pas toujours un investissement important et dont le rayonnement est pratiquement local. Malgré l’importance de ce type d’activités dans la périphérie oranaise, les commerces courants restent en deçà de la demande locale, dans la mesure où les densités commerciales courantes sont loin d’atteindre celle de la ville d’Oran (tab. 17). 

Tableau 17 : Les densités commerciales selon les agglomérations

Agglomé-rations

Population

Commerces

Densité commerciale

Dens. comm. courante

Dens. comm. anomale

Oran

631344

14275

22.6

10.7

09.8

Bir el Djir (commune)

67846 ?

105

?

?

?

El Amir

2932

95

32

18.4

7.2

Canastel

5000 ?

47

?

?

?

Khémisti

?

182

?

?

?

Sidi el Bachir

37624

361

9.6

6.6

02

Nedjma

33044

265

08

5.6

1.6

Es Sénia

29267

468

16

10.6

3.8

Si Redouane

?

56

?

?

?

Cheikh Bouamama

36204

205

5.7

4.8

0.5

Ain Beida

26726

272

10.2

7.1

2.1

Sources : Enquêtes de terrain, 2000-2001 pour les commerces (Trache, Bendjelid, Hadeid, Messahel). - RGPH 1998, pour la population. 

En outre, le commerce anomal est pratiquement inexistant dans ces nouveaux sites et les densités commerciales enregistrées sont quasiment nulles, à l’exception d’Es-Sénia et d’El-Amir (ex-Bernardville), localités très proches physiquement de la ville d’Oran et qui apparaissent, aujourd’hui, plus comme des quartiers périphériques d’Oran que comme des agglomérations périurbaines.

Par ailleurs, l’ensemble des centres, et en particulier ceux de Nedjma et de Sidi-Bachir, disposent d’activités commerciales sans rapport direct avec leur population, par conséquent totalement en inadéquation. En effet, ces agglomérations accumulent de nombreux points de vente spécialisés dans les matériaux de construction (17 à Nedjma, 11 à Sidi-Bachir, et 10 à Khemisti) tournés vers la satisfaction d’une demande dépassant la seule aire métropolitaine.

Il semble, donc, que les nouveaux centres urbains de la périphérie oranaise accusent une faiblesse caractéristique de leur équipement commercial – et cela, même dans les catégories les plus courantes – et en particulier au sein des agglomérations les plus éloignées d’Oran et dans celles qui ont connu une urbanisation récente spectaculaire. Cela va pratiquement conférer à ces centres une sorte d’incapacité à satisfaire les besoins de leur population, qui va se tourner vers d’autres centres urbains (Oran, en particulier) où l’offre est plus importante, doublée d’une qualité et surtout d’un assortiment commercial plus varié.

Centralité commerciale de la ville d’Oran et petites centralités périphériques

• La consommation courante est assurée par les centres périurbains locaux

La satisfaction des besoins alimentaires passe principalement par le centre de résidence. Les commerces alimentaires de la périphérie oranaise arrivent à répondre moyennement aux exigences de sa population. A titre d’exemple, la consommation alimentaire est exclusivement locale pour les agglomérations de Nedjma et de Aïn-el-Beida, respectivement 84 % et 94 %. Par contre, les populations de Khemisti et de Canastel manifestent une certaine insatisfaction à ce niveau. En effet, 50 % de la population de Khemisti et les 2/3 de celle de Canastel s’approvisionnent à l’extérieur de leur lieu de résidence, et en particulier à Médina-Jdida et, secondairemen,t au centre-ville (tab. 18a à d).

Cet état de fait s’explique par deux observations intéressantes à relever :

a) le sous-équipement commercial alimentaire des agglomérations de Khemisti et de Canastel pousse leur population à s’adresser à la ville d’Oran ;

b) la population concernée par cette situation travaille dans la ville d’Oran et entretient, par conséquent, des rapports anciens et étroits avec les centres commerçants comme Médina-Jdida et la rue des Aurès (ex-rue de la Bastille). De ce fait, ces consommateurs préfèrent regrouper leurs achats en un seul et même endroit ; Médina-Jdida comme le centre-ville constituent l’espace privilégié à cet effet.

• Une forte dépendance des centres périurbains
envers la métropole pour les biens de consommation
épisodique et pour certains services

A travers les résultats obtenus, il apparaît clairement que la périphérie urbaine oranaise est largement dépendante de la ville mère. Bien plus, une bonne partie des consommateurs périurbains continuent à fréquenter les centres commerciaux de la ville d’Oran et ce, même pour leurs achats les plus quotidiens ; ainsi, le nombre de ménages périurbains dont les achats alimentaires sont réalisés en dehors de leur agglomération de résidence représente près du tiers, soit 30,4 %. Cependant, cette moyenne cache des différences notables entre les centres ; elle est nettement plus faible à Aïn-el-Beida et à Nedjma, des centres périurbains caractérisés par une certaine homogénéité sociale à tendance pauvre, comparée à celle observée à Khemisti et à Canastel où les catégories sociales sont nettement renforcées par les professions libérales, les cadres et les employés de l’administration.

• Le centre-ville et Médina-Jdida demeurent des espaces à forte centralité pour la population périurbaine oranaise

Au regard des déficiences observées dans les structures commerciales périurbaines, l’influence d’Oran sur la périphérie urbaine se dessinait déjà à partir des analyses précédentes.

Les comportements de consommation sont en grande partie le résultat de cette insuffisance, en ce sens que la population nouvellement installée en périphérie exprime son fort attachement à la ville d’Oran dès qu’il s’agit de consommer des produits d’utilisation occasionnelle comme l’habillement, les équipements ménagers ou d’autres produits de qualité. Sur les 831 ménages traités lors du dépouillement de l’enquête, plus de 90 % déclarent, sans hésitation, faire leurs achats à Oran, et secondairement à Es-Sénia et Khemisti. Cela paraît logique, dans la mesure où le commerce de type anomal est quasiment inexistant dans les agglomérations périurbaines d’Oran. Seules Es-Sénia et, à un degré moindre, Khémisti échappent à cette situation, car c’est là que des centralités secondaires s’affirment. Néanmoins, Oran reste le premier fournisseur de ces populations en leur offrant aussi bien les équipements nécessaires que l’assortiment aussi varié que possible des différents produits.

Tableau 18 : Lieux de consommation (achats de biens) des populations périurbaines d’Oran

a. Nedjma.

         Produits


Lieu de

consommation

Alimen-tation

Vêtements

Articles ménagers

Articles

de luxe

Médica

ments

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nedjma

165

93.8

11

6.3

4

2.5

3

1.9

57

32.4

Médina-Jdida

9

5.1

160

91

134

82.2

154

95.7

6

3.4

Centre – ville

-

-

5

2.8

24

14.7

4

2.5

85

48.3

Autres

9

5.1

-

-

14

8

15

8.5

28

15.9

Ensemble

176

100

176

100

176

100

176

100

176

100

b. Aïn-el-Beida.

         Produits


 

Lieu de

consommation

Alimen-tation

Vêtements

Articles ménagers

Articles

de luxe

Médica-ments

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Aïn-el-Beida

143

83.6

2

1.2

3

1.8

9

6.5

100

63.7

Médina-Jdida

14

8.8

143

83.6

100

58.5

107

77.5

1

0.6

Centre – ville

1

0.6

24

14

60

35

20

14.5

34

21.7

Autres

13

7.6

2

1.2

8

4.7

35

20.5

36

21

Ensemble

171

100

171

100

171

100

171

100

171

100

 c. Khémisti.

         Produits


 

Lieu de

consommation

Alimen-tation

Vêtements

Articles ménagers

Articles

de luxe

Médica-ments

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Khemisti

31

49.2

7

11.7

6

9.5

6

9.5

43

68.2

Médina-Jdida

25

39.7

54

85.7

40

74.6

48

76.2

3

4.8

Centre – ville

3

4.8

2

3.2

13

20.6

9

14.3

16

25.4

Autres

4

6.3

-

-

4

6.3

-

-

1

1.6

Ensemble

63

100

63

100

63

100

63

100

63

100

 d. Canastel

          Produits


 

Lieu de

consommation

Alimen-tation

Vêtements

Articles ménagers

Articles

de luxe

Médica-ments

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Nbre

Part

Canastel

19

36.5

-

-

-

-

-

-

3

5.8

Centre – ville

8

15.4

20

38.5

36

69.2

22

42.3

23

44.2

Médina-Jdida

11

21.2

29

55.8

12

23

29

55.8

4

7.7

Khémisti

4

7.7

3

5.8

1

1.9

-

-

12

23

Gambetta

6

11.5

-

-

2

3.8

1

1.9

3

5.8

Esseddikia

-

-

-

-

-

-

-

-

5

9.6

Autres

4

7.7

4

7.7

1

1.9

-

-

2

3.8

Ensemble

52

100

52

100

52

100

52

100

52

100

Sources : Enquêtes de terrain, 2000-2001 (Trache, Bendjelid, Hadeid, Messahel).

Quel que soit le lieu de résidence en périphérie oranaise, la satisfaction des besoins épisodiques – appelés communément « biens anomaux » – est en très grande partie assurée par Médina-Jdida et le centre-ville d’Oran.

Au regard des tableaux 18 (a à d), la population périurbaine oranaise s’adresse exclusivement à Médina-Jdida et au centre-ville pour ses besoins occasionnels et rares. En d’autres termes, sur ce plan, il n’y a pas eu de changement de comportement de consommation de cette population, aussi bien pour cette population que pour l’ensemble de la population oranaise.

• Une relative diversité des lieux de consommation de services qui traduisent d’anciennes habitudes et des comportements de proximité

La fréquentation des services par les consommateurs périurbains révèle une certaine diversité quant aux lieux de consommation usités. Cette diversité n’empêche pas la majorité de la population des centres périurbains de satisfaire sa demande localement. Toutefois, le phénomène le plus intéressant à noter se rapporte au fait que certains ménages continuent à fréquenter des services en dehors de leur agglomération de résidence.

Trois cas de figures se présentent.

La satisfaction des besoins se fait sur des axes commerciaux privilégiés situés dans les centres secondaires de proximité qui se trouvent sur le passage des résidents. La population de Canastel et de Khemisti tend beaucoup plus à fréquenter le centre-ville et les centres secondaires de proximité de Gambetta, Bir-el-Djir et Esseddikia que Médina-Jdida, alors que celle de Aïn-el-Beida s’adresse, en plus du centre-ville, aux services du quartier de Maraval et de la ville d’Es-Sénia.

La satisfaction des besoins se fait dans les quartiers voisins, qui sont, le plus souvent, des quartiers de résidence antérieure ; les ménages perpétuent des habitudes, dont elle se détache assez difficilement. C’est le cas du recours au coiffeur, au hammam et au tailleur, dont la fréquentation est souvent liée à un comportement acquis ; les raisons et les motifs de ces pratiques sociales méritent d’être élucidées par l’anthropologie et la sociologie. Les exemples de Aïn-el-Beida et de Nedjma peuvent constituer des échantillons instructifs pour l’analyse sociétale.

La satisfaction des besoins se fait au centre-ville où, comme dans le cas des achats de biens, la concentration de nombreuses activités diversifiées dans un même espace reste plus attractive pour les populations des localités périurbaines. Le médecin, la laverie, le photographe… en tant qu’activités économiques exercent des fonctions anciennes de centralité et gardent encore un pouvoir attractif sur les habitants de la périphérie oranaise.

En dehors des services déjà cités, la mécanique automobile et la taille de vêtement par exemple exercent des attractions différentes sur la population. Ainsi, le quartier Victor-Hugo est assez fréquenté pour ses services mécaniques et l’entretien des véhicules, alors que Médina-Jdida continue d’offrir ses métiers de tailleur et de confection à la plupart des habitants périurbains, en particulier aux nouveaux résidents de Nedjma.

Conclusion

Au sein de l’aire métropolitaine d’Oran, l’extension rapide de fragments habités planifiés et non planifiés, implantés sur des terres publiques, a produit au cours d’un quart de siècle (1974-2002) une différenciation physique d’abord, morphologique ensuite. Le desserrement géographique et démographique en direction des territoires périphériques est somme toute classique, mais il reste caractéristique de l’urbanisation d’un pays du tiers-monde en raison de la non-maîtrise foncière, de la place occupée par l’habitat spontané et de l’absence du respect des plans d’urbanisme approuvés. Certes, l’Etat, acteur principal, avec sa réglementation juridique, ses normes de construction, ses institutions locales, ses instruments, ses moyens matériels…, a fini par être dépassé, à partir du moment où il a délégué l’application de sa politique foncière à des groupes sociaux situés dans le pouvoir local ou à ses marges ; encore une fois, l’allocation foncière irréfléchie faite par les assemblées communales successives, les irrégularités foncières et la déficience du contrôle ont fini par modeler un espace habité éclaté et inachevé, marqué par une série de ruptures du paysage urbain.

Quant à la différenciation sociale, elle peut être certes perceptible à travers des dominantes de catégories socioprofessionnelles résidentes relevées au sein des multiples sites enquêtés, mais elle reste aussi à nuancer en raison de la quantité de transactions foncières formelles et informelles, de l’insistance continue du pouvoir central visant à favoriser les mélanges de différentes catégories sociales lors de l’accès aux lotissements planifiés, et de la régularisation foncière entamée en 1985 puis relancée récemment plus ou moins efficacement. Bien plus, l’espace périphérique bâti du Grand-Oran qui s’est construit à l’ombre des réserves foncières communales, commence aujourd’hui, et seulement aujourd’hui, par connaître une décantation de son contenu social grâce à la libéralisation du marché foncier. En effet, la liberté appliquée dans les transactions foncières qui a donné lieu à de massives mobilités résidentielles d’Oran vers la périphérie va certainement esquisser, dans les prochaines années, la configuration d’une ségrégation sociospatiale ; toutefois, à l’heure actuelle, ce dernier phénomène ne semble pas être franchement marqué.

Habitat planifié et habitat non planifié souffrent indifféremment du sous-équipement lié à la viabilisation, même si c’est à des degrés divers ; aujourd’hui, l’Etat n’arrive plus à financer les divers réseaux… En provoquant la croissance des noyaux périphériques planifiés ou non, éclatés au sein de l’espace métropolitain, les multiples crises de la décennie 1990 ont compliqué les situations économique, juridique, politique et sociale, au point de donner libre cours à la croissance foisonnante des activités commerciales et de services. Certes, l’Etat a tant bien que mal réalisé des équipements collectifs, mais il n’a pu contrôler sérieusement la multiplication des locaux commerciaux. Ainsi, le long des grands axes routiers ont émergé des artères commerciales configurant, de fait, l’émergence de petites centralités périphériques, à l’instar de celles de Khemisti ou d’Es-Sénia. Apparemment classique, cette évolution ne va pas sans poser de problèmes de nature urbaine liés à la fois aux pratiques sociales de populations gardant leurs habitudes de fréquentation commerciale, à la gestion difficile d’une agglomération composée de communes dépourvues d’une structure intercommunale de coordination (communauté urbaine ou district urbain) et à la nécessaire concertation des divers acteurs (élus, institutions, entreprises économiques, associations, professionnels…), en vue d’assurer un fonctionnement optimal d’une métropole consciente des enjeux.

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NOTES

[1] - Agglomération composée des communes d’Oran, Es-Sénia, Bir-el-Djir et Sidi-Chahmi.

[2] - Huit lieux à travers 16 lieux habités ont été soumis au sondage : Canastel, Khemisti, Nedjma (recasement, lotissement), Es-Sénia (Bahi Amar, Si Redouane, Kora I et II, Habitat collectif récent), Aïn-el-Beïda (40 logements, lotissements, programme C.N.L., Cité O.PG.I.), Bouakeul (Douar A, Douar B), El-Hassi.

 

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