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Les théories des mouvements sociaux. Structures, actions et organisations : les analyses de la protestation en perspective

Insaniyat N°8 | 1999 | Mouvements sociaux, Mouvements associatifs | p. 145-163 | Texte intégral


Agricultural Algeria : From territorial build-up to impossible peasont emergence

Abstract : Agronomic and climatical conditions, ways of organization and space appropriation by rural communities, on the one hand, historical differences in seeing a central state emerge, political instability and agrarian colonization on the other hand seen to have been an obstacle to the forming and installing an Algerian peasantry tied to the land, holding permanent ownership titles, accumulating equipment, and appropriate technical systems. Collective owhership, extensive soil use, and the “ sorts of life” pastoral and semi­-pastoral had up to the 19 th C, a primate place in AIgeria. The peasant property of “melh” statute developed before colonization only in the outskirts of towns or cities which had been the seat of state dynasties in the past - in certain mountain massifs or in the oasis. It is mainly inside these zones that a peasantry deeply attached to the land evoluated, using often intensine exploitation methods for soil and water resources. The French colonization, not only operated the most radical rupture in complementory agricultural space use and their resources but it ruined at the same time, all possibility of development of a peasant base in A Igeria. The existence of an immense agricultural proletariat limited the Algeria agricultural organization choices following independence. An examination of handicaps, at the same time national and historical, deserves a necessary detour to partly understand the jams to which all agriculural politics carried out, have come up against.

Keywords : agriculture, rural, agricultural land, collective properties


Didier LE SAOUT : Institut Maghreb-Europe


Proposer de prendre en compte les "mouvements sociaux" comme catégorie d'analyse ne revient pas à cerner l'objet en toute simplicité. Si les différentes études des formes d'actions protestataires qui nous sont proposées tentent de rendre compte d'un même phénomène, elles n'usent pas moins de concepts différents. Cette diversité des théories des mouvements sociaux tient au lieu où elles ont été produites, principalement les Etats-Unis et l'Europe, au moment et au champ disciplinaire de leurs promoteurs. La notion de mouvement social n'est que la dernière forme consensuelle de ce qui est appelé "comportement collectif", "mobilisation protestataire", "action collective". Nous ne chercherons pas à penser ces différents concepts comme décrivant des réalités distinctes, mais plutôt à repérer les explications des processus protestataires en ce qu'elles offrent de particulier.

L'analyse des foules et des comportements collectifs

Faisant suite aux développements en Europe décrits sur les foules à la fin du dix-neuvième siècle qui s'expliquait par l'intérêt que leur portaient des criminologues italiens et français (S. Sighele et Rossi), l'ouvrage de Gustave Le Bon, Psychologie des foules publié en 18951, traduit l'intérêt pour les phénomènes collectifs qu'il replace dans une problématique véritablement sociologique. Cependant, à la différence des juristes, il ne conçoit plus la foule comme nécessairement "criminelle". Les foules étudiées dans cet ouvrage sont qualifiées "d'hétérogènes" elles se composent d'individus quelconques, dont le "degré d'intelligence " n'a que peu d'importance2. Ce trait vise à montrer que "l'intelligence" et par là même la raison des individus qui composent une foule, n'interviennent pas dans ces processus collectifs comme des traits essentiels, mais que seuls les sentiments inconscients sont importants. L'explication du processus de formation d'une foule tient tout d'abord selon G. Le Bon en ce que la foule ne se constitue pas spontanément. Le " meneur", "l'orateur ", le "rhéteur", est doté d'une capacité d'excitation des individus. Les individus ne suivent pas un quelconque raisonnement que pourrait lui tenir celui qu'on appellerait aujourd'hui le leader, mais sont plutôt, pour reprendre le terme de l'auteur, "suggestionnés"3, interprétant ainsi les images que ce dernier a pu agiter devant eux. La conviction de l'orateur, la répétition, l'exagération des "sentiments", représentent ainsi les traits spécifiques du caractère rudimentaire des suggestions qui atteignent ces individus. G. Le Bon nous dit en ce sens:" Tout dépendra de la nature de l'excitant, et non plus, comme chez l'individus isolé, des rapports existant entre l'acte suggéré et la somme de raison qui peut être opposée à sa réalisation "4.

Si les premières contributions qu'on rapporte à l'étude des mouvements collectifs sont relatives à des phénomènes identifiés comme des foules, la consolidation du champ de la sociologie aux Etats-Unis où "l'école de Chicago" joue un rôle structurant, élargit l'intérêt contenu jusque-là dans ces recherches. L'étude des foules va alors se trouver intégrée dans l'étude des "comportements collectifs"5. Issu de cette tradition sociologique américaine de "l'Ecole de Chicago", Herbert Blumer dans un article publié en 1939, se propose d'étudier les comportements collectifs suivant une typologie dans laquelle il distingue cinq types6. Ce sont les comportements de foule tels que les paniques, les rumeurs et les émeutes, les comportements de masse qui ne sont pas organisés, l'opinion public, les tactiques communistes et la propagande, et enfin, les mouvements sociaux. La typologie des comportements collectifs présentée montre ainsi l'étendue des phénomènes pris en considération. Mais si H. Blumer cherche à définir les comportements collectifs de façon à ne pas embrasser touts les activités sociales dans lesquelles plusieurs individus agissent ensemble7, sa conception reste néanmoins trop large pour pouvoir conduire à l'explication d'un phénomène. Il inclut en effet dans cette catégorie les chants populaires, les danses, la mode. Seules la première et la dernière catégorie de sa typologie - c'est-à-dire les comportements de foule et les mouvements sociaux - méritent de notre point de vue une plus grande attention. H. Blumer conçoit dans ce cadre la foule comme une dissolution des attaches à des valeurs de groupe préparant à la destruction d'aires de l'ordre social et comme le moyen d'émergence d'action de groupes développant des sentiments collectifs8. Le "comportement de masse" a toute son importance en ce qu'il pose à son avis les questions de savoir de quoi est faite une "masse", comment elle opère, et quelles influences peut exercer son comportement sur la vie sociale9. S'il aborde le problème de la rationalité ou de l'irrationalité des paniques qu'il inclut dans la catégorie des comportements de foules, il n'explique toutefois pas les foules comme phénomène irrationnel, mais s'interroge sur les manières dont les gens parviennent à regagner un contrôle sur eux-mêmes10. On ne peut dès lors que remarquer que son analyse relève plus des propositions des domaines d'étude à entreprendre que de l'explication même des conditions de formation, d'émergence et de développement de ces mêmes phénomènes. L'intérêt principal de ces travaux doit plutôt être regardé comme la marque d'une première analyse de mouvements collectifs qui intègre le facteur organisationnel dans son explication11. On peut donc conclure à ce stade du développement de la sociologie que les travaux sur les "comportements collectifs " parviennent plus à identifier un problème qu'à proposer véritablement une explication de ces phénomènes.

D'autres études publiées dans les années soixante marqueront de ce point de vue une nouvelle étape. Si l'explication des mouvements collectifs s'apprécie tout d'abord chez certains auteurs par les propriétés qu'ils reconnaissent à la structure sociale comme affectant l'action collective, certains auteurs abordent directement le problème de l'explication des révolutions ou révoltes en centrant leurs analyses autour de la notion de "frustration relative"12. Ces analyses des mouvements expliquent le phénomène collectif par la frustration éprouvée par les acteurs. La théorie des révolutions proposée par James Davies en est un exemple13. De son côté, Ted Gurr souligne l'importance de la différence entre ce que ces acteurs espèrent obtenir et ce qu'ils obtiennent effectivement. Quelques soient les configurations constatées entre l'évolution des attentes et le niveau de satisfaction, la frustration conduirait à la violence14.

Dans les recherches qui suivront, l'explication des "mobilisations protestataires", de "l'action collective" ou des "mouvements sociaux" se substitue à l'étude de ce qui était jusque là nommé les "foules" et les "comportements collectifs ". On atteint là une période où l'intérêt pour l'étude de tous ces processus collectifs se développe fortement.

Individus, valeurs et organisations

Trois grands types de recherches qui se mesureront eu égard à la multitude et la richesse des travaux qu'elles ont suscités émergeront au cours des années soixante-dix : le paradigme individualiste, l'approche des nouveaux mouvements sociaux et la perspective de la mobilisation des ressources. Alors que la première approche reste centrée sur l'action individuelle, les deux autres qui ont dominé l'étude des "mouvements sociaux " depuis les années soixante-dix, conçoivent l'analyse de l'action collective comme la mise en évidence de processus collectifs. L'une s'est développée en France puis en Europe, l'autre aux Etats-Unis, ce qui a conduit de nombreux auteurs à les considérer, au vu de leur localisation initiale et de leur développement, comme étant respectivement européenne et américaine15

L'individu et l'action collective

Le paradigme individualiste pose l'action rationnelle de l'individu comme étant à la base de l'explication de l'action collective16. Si l'économiste Mancur Olson ne s'est pas intéressé à l'action collective de protestation en tant que telle, il entend néanmoins expliquer différents types d'actions collectives. En plaçant la question de la rationalité de l'action collective au centre de son travail, il nous fournit en effet dans son ouvrage "Logique de l'action collective"17 une contribution importante à l'explication de différentes sortes d'actions collectives telles que par exemple les élections et les négociations. Le "bien public" et les "incitations sélectives" représentent les notions centrales qui organisent sa réflexion. M.OIson nous montre qu'il est rationnel pour un individu de ne pas participer à une action collective produisant un "bien public" (ou encore "bien collectif") dès lors que d'autres individus le font pour lui - ce que M. Olson nommera free rider ("ticket gratuit "). Un bien public est produit grâce à des incitations sélectives car un individu n'a pas de lui-même intérêt à le produire. M. Olson le définit comme tout bien qui, consommé par une personne dans un groupe, ne peut absolument pas être refusé aux autres personnes du groupe18.

Si nous pouvons reconnaître que l'intérêt de la contribution de M.Olson tient en ce qu'elle a démontré qu'il n'allait pas de soi que des individus partageant des intérêts communs puissent agir collectivement, sa recherche n'est cependant pas exempte de critiques19. Alors nième qu'ils se sont appuyés sur certains éléments de cette problématique, des auteurs tels que Bruce Fireman et William Gamson - qui se réclament de l'approche de la " mobilisation des ressources " - ont déjà critiqué ce modèle en estimant que les tactiques et les stratégies étaient sous-évaluées par M. Olson.

Les nouveaux mouvements sociaux

L'examen de la perspective des "nouveaux mouvements sociaux " nous conduit à porter une attention plus particulière aux travaux d'Alain Touraine, à l'origine de la diffusion du terme de " nouveau mouvement social ", ainsi qu'à ceux d'Alberto Melucci. L'émergence de "nouveaux mouvements sociaux"20 est liée selon ces auteurs à des changements profonds observables dans la société. Alors qu'ils contrôlaient dans la société industrielle les ressources productives, les "mouvements sociaux " contrôlent également dans les sociétés "avancées" ou "post-industrielles", la sphère des services, de la consommation, des relations sociales21. En raison de ces changements qui affectent la structure sociale, les "nouveaux mouvements sociaux" qui émergent, ne luttent plus pour la réappropriation de la structure matérielle de production comme peut le faire "l'ancien mouvement " qu'est le " mouvement ouvrier", mais pour la "réappropriation de temps, d'espace et de relations dans l'existence quotidienne individuelle"22 Les actions requises pour contrôler les conflits structurels, indispensables à l'équilibre de la société, provoquent des contradictions avec d'autres éléments du système lorsque les changements introduits leur sont antagoniques23. Mais Si les "mouvements sociaux " sont conçus comme l'expression d'un conflit de classe dans un système politique concret et/ou dans une organisation sociale"24, les auteurs ne recourent pas pour autant à une conception déterministe. Dans La voix et le regard25 ouvrage dans lequel il développe un cadre conceptuel pour l'analyse des "mouvements sociaux", A.Touraine s'oppose précisément au marxisme qui sous-tend une conception des "mouvements sociaux " comme manifestation des contradictions objectives d'un système de domination26 et les définit plutôt comme conduites socialement conflictuelles culturellement orientées27. Les valeurs représentent dès lors l'élément central qui participe à la formation des "nouveaux mouvements sociaux ". "Les valeurs supposent une conscience et un acteur: elles sont donc des formulations idéologiques et doivent être définies comme des interprétations de classe des orientations culturelles. Les valeurs sont toujours des valeurs de classe, alors que les orientations culturelles, tout en étant déchirées par les oppositions de classes, n'en ont pas moins une existence autonome. En d'autres termes les valeurs commandent les conduites sociales d'un acteur réel, individuel ou collectif, tandis que les orientations culturelles se situent au niveau d'un champ d'historicité, tel que le construit l'analyse. Par exemple la croyance au progrès, modèle culturel de la Société industrielle ne devient une valeur qu'en imposant l'acceptation de l'industrialisation dans son cadre social réel ou au contraire en contestant une domination sociale considérée comme obstacle au progrès"28. A.Touraine conçoit les processus de définition d'orientations culturelles comme des définitions fondamentalement différentes de processus d'interprétation idéologique de ces orientations. Le recours à la notion de culture lui permet de montrer que la société n'est pas réductible à la logique de domination ou de contrôle fondée sur des ressources matérielles caractéristiques de la société industrielle. En commandant les conduites de l'action sociale, les valeurs représentent donc pour l'auteur une caractéristique fondamentale pour l'explication de l'action collective.

De son côté, A. Melucci distingue "l'action collective" du "mouvement social"29, "L'action collective implique l'existence d'une lutte entre deux acteurs pour l'appropriation et l'orientation de valeurs sociales et de ressources, chacun des acteurs étant caractérisé par une solidarité spécifique". "L'action collective inclut aussi tous les types de comportement qui transgressent les normes qui ont été institutionnalisées dans des rôles sociaux, qui vont au-delà des règles du système politique et / ou qui attaquent la structure d'une société de classes". Une action collective conflictuelle peut remplir seulement l'une des conditions, alors que le mouvement social est un type d'action collective qui satisfait aux deux conditions. A.Melucci propose alors de "distinguer une pluralité de significations analytiques qui éliminent l'apparente unité de l'objet empirique"30 et donne la définition suivante du "mouvement social": le mouvement est l'expression d'un conflit structurel, l'action collective implique la solidarité, le mouvement pousse le conflit au-delà des limites de compatibilité du système auquel il est fait référence. Mais, élément des plus importants, le "mouvement social" est pour lui une construction analytique et non un objet empirique.

Cet exposé des principaux arguments appelle plusieurs remarques. Les contributions d'A.Touraine, parce que principalement focalisées sur la notion d'historicité, écartent un certain nombre de problèmes cruciaux qui apparaissent lorsqu'on réduit l'angle d'approche macrosociologique des conditions structurelles des mobilisations protestataires. En effet, cette analyse ne conçoit les processus d'interprétation au niveau des valeurs uniquement comme une production idéologique définie en tant que production de classe. De la même façon, ces conceptions macrosociologiques conduisent les auteurs à sous-évaluer le poids des organisations protestataires comme catégorie pertinente pour expliquer l'action collective. L'opposition que construit A.Melucci entre d'une part la culture, et d'autre part les institutions et les organisations, est à cet égard significative de cette sous-estimation du facteur organisationnel31. De la même manière, la sociologie de l'action d'A.Touraine qui s'appuie dans l'étude des mobilisations anti-nucléaires et régionalistes32 sur une "méthode d'intervention sociologique" est révélatrice du peu d'importance donnée aux différents groupes protestataires. La constitution de groupes de réflexion dans lesquels le chercheur se mêle à des militants choisis comme représentatifs des acteurs engagés dans les luttes, cherche à éviter la prise en compte des organisations militantes existantes. "L'acteur historique" prime sur l'organisation33 réduite à un rôle mineur.

D'autre part, si A.Melucci conçoit le "mouvement social" comme provoquant des "ruptures de compatibilité" avec le système politique, on peut s'interroger sur ce qui est "compatible" avec ce même système et ce qui ne l'est pas. On remarque alors que cet argument s'accorde avec la sous-estimation du facteur organisationnel. Aucune continuité n'est pensée entre des situations routinières et des situations traversées par des mobilisations sociales, car, par définition, l'irruption d'un "mouvement social" ne provient pas de l'action de certains acteurs ni même du système politique, mais des modifications de la structure sociale définie le plus largement. Mais si le reproche majeur que nous ferons à cette thèse tient alors en ce qu'elle néglige totalement le travail de mobilisation des acteurs insérés dans des configurations spécifiques de relations avec d'autres acteurs, il nous faut toutefois remarquer qu A.Melucci développe à juste titre une argumentation critique de la plupart des analyses des mouvements sociaux, y compris de la perspective des "nouveaux mouvements sociaux". Contre les analyses selon lesquelles il existerait des questions générales comme pourrait l'être par exemple la "question jeune" ou la "question écologique", il oppose la nécessite d'une décomposition analytique selon le système des rapports sociaux investi par l'action et selon les orientations que l'action assume34. Cela lui permet d'affirmer qu'une grève ouvrière n'est jamais un phénomène homogène. L'idée fondamentale tient en ce qu'il faut décomposer au maximum le mouvement et le recomposer dans un système de relations significatives pour individualiser le sens et la direction d'un mouvement, Par cette critique portant sur la définition même du mouvement social, A.Melucci s'oppose à la construction par le chercheur de catégories qui opèrent à partir des caractéristiques communes de phénomènes analysés35.

Par ailleurs, Si dans le paradigme individualiste, l'individu est confronté à des biens publics, il est confronté dans le modèle des nouveaux "mouvements sociaux" à des valeurs. La relation d'un individu entre ce bien ou ces valeurs est respectivement assurée par les préférences ou la conscience. La conclusion à laquelle nous étions parvenu concernant les analyses du modèle individualiste sont alors encore les mêmes. L'explication des "mouvements sociaux" semble buter sur la prise en compte des processus interprétatifs. Les interprétations de "classe" n'éludent pas à notre avis le problème d'identification des représentations d'acteurs protestataires produites par des schèmes interprétatifs.

La place de l'organisation protestataire paraît dès lors être un point sensible de l'explication. Le recours à "l'approche de la mobilisation des ressources", dans laquelle le problème de l'organisation est placé au centre de l'explication, pourrait alors s'avérer d'une grande aide.

La théorie de la " mobilisation des ressources"

La "mobilisation des ressources" représente donc l'autre grande approche qui s'est développée dans les années soixante-dix portant sur les mobilisations protestataires. L'étude des protestations comme formes rationnelles produites par l'action d'organisations rompt ici clairement avec les analyses des foules comme comportements irrationnels. Cette approche, qui a nourri l'essentiel des recherches portant sur les mouvements collectifs aux Etats-Unis, s'est rapidement imposée comme une référence centrale pour beaucoup de travaux sur les mouvements sociaux dans le monde entier. Le but de cette discussion n'est donc pas ici de nier l'importance des résultats produits par cette perspective. Si nous ne pouvons que reconnaître les apports que la mise en évidence des processus d'activation de ressource par les organisations que cette approche a fourni à l'étude des mobilisations protestataires, nous développerons cependant, après avoir rappelé le schéma conceptuel qu'elle propose, certaines remarques reposant sur des arguments à notre avis discutables.

L'intérêt majeur des études produites sous l'angle de cette perspective consiste à souligner la place et le poids des organisations dans des mobilisations protestataires. On peut généralement, à partir des distinctions qu'elle opère, aborder les problèmes de la spécialisation et de la professionnalisation. Ces processus permettent aux groupes mobilisateurs de recourir à une meilleure division des tâches, une meilleure organisation interne, et de bénéficier d'un meilleur équipement technique. La prise en considération des concepts que cette approche définit comme nécessaires à l'étude des protestations, contribue alors à mettre en évidence la caractéristique selon laquelle les processus d'activation réalisés par les organisations dans leur rôle de mobilisation des ressources sont inhérents à toute protestation.

La notion centrale autour de laquelle les auteurs construisent leur schéma d'analyse, est celle de "mouvement social" (SM). Ce dernier est défini comme un ensemble d'opinions et de croyances qui représentent des préférences dirigées vers des changements dans la société. Une "organisation du mouvement social" (SMO) correspond a une organisation qui identifie ses buts aux préférences "d'un mouvement social" et "l'industrie du mouvement social" rassemble les SMO " partageant les mêmes buts:" Tous les SMOs qui prennent comme but la réalisation des préférences les plus larges d'un SM constituent une industrie de mouvement social   l'équivalent organisationnel d'un mouvement social "36. Ces auteurs se proposent ici de montrer que différentes organisations peuvent poursuivre les mêmes buts. Les différences qu'ils établissent entre un "SM" et une " SMI" sont présentées comme il suit: "Séparer anaIytiquement ces composants en distinguant entre un SM et une SMI a plusieurs avantages. Premièrement, cela montre que les SMs ne sont jamais totalement mobilisés. Deuxièmement, cela met en évidence explicitement la composante organisationnelle de l'activité. Troisièmement, cela revient à reconnaître explicitement que les SMs sont typiquement représentés par plus d'une SMO. Enfin, la distinction permet la possibilité de la prise en compte de l'émergence et du déclin des SMIs qui ne sont pas totalement dépendants de la taille d'un SM ou de l'intensité des préférences en son sein"

Cette distinction qu'opère l'approche de la "mobilisation des ressources" entre, d'une part un "SM" et, d'autre part une "SMI " et une "SMO" traduit une séparation des plus nettes entre un aspect idéal qui correspond aux croyances ou aux préférences tournées vers le changement, diffuses dans la société et, un aspect organisationnel. Le choix du terme de "préférences" montre ici la filiation de cette approche avec le paradigme individualiste. La distinction analytique entre ces préférences et l'intervention des organisations, par laquelle le "mouvement social" (MS) est conçu indépendant de l'action des organisations nous paraît discutable en ce que les groupes contestataires cherchent seulement dans ce schéma théorique à atteindre des préférences qui préexisteraient à leur travail de mobilisation de ressources. C'est cette idée même d'autonomisation de préférences produites dans la société, fermées à l'activité des organisations, qui nous paraît être précisément le point faible de l'approche de la mobilisation des ressources car nous pensons que les notions de préférence ou de croyance conçues comme prédéterminées ne permettent pas de saisir cette production collective du phénomène protestataire. Si nous partageons avec l'approche de la mobilisation des ressources l'analyse selon laquelle les individus peuvent s'engager plus ou moins fortement, dans des actions protestataires comme le montre par exemple la différence qu'elle fait entre une "SMO" et le public, et que les organisations représentent des éléments stables et solides autour desquels ces positionnements vont pouvoir s'organiser, il ne faut néanmoins pas négliger l'élément selon lequel ces organisations défendent des arguments articulés dans un discours qui varie selon l'espace et le moment. Cette approche ne saisissant pas la production symbolique des organisations protestataires, les notions "d'industrie du mouvement social" (SMI) et de "mouvement social" répondent mal à un problème réel que rencontre toute analyse des mobilisations protestataires.

Nouvelles tendances dans l'analyse des mouvements sociaux

Alors même qu'il devenait hégémonique de par le monde, c'est ce besoin même de dépassement du cadre conceptuel de l'approche de la mobilisation des ressources qui a précisément été ressenti par plusieurs auteurs se reconnaissant pourtant dans cette dernière perspective. Deux nouvelles directions seront prises. La première s'intéressera à la dimension symbolique des mouvements sociaux. La seconde à la structuration politique qui permet leur émergence.

Les cadres de l'action collective

La notion de "cadres" ou de "schèmes" de l'action collective est présentée par ces mêmes auteurs comme une extension des analyses de la mobilisation des ressources. Par leurs travaux s'organisant autour de la notion de cadres d'action collective37, dimension éludée par l'approche de la mobilisation des ressources, David Snow et Robert Benford entendent proposer une extension de cette même perspective. Les notions de "cadre" (frame) et de "cadrage" (framing) sont alors très importantes dans l'argumentation de ces auteurs. Les "cadres" correspondent à des schèmes interprétatifs, et le "cadrage" au travail effectué par les groupes qui consiste à assigner un sens organisant l'interprétation des événements de façon à mobiliser une audience et gagner ainsi des soutiens. L'ajustement de ces schèmes (frame alignement) pose donc le problème du lien entre les orientations individuelles d'acteurs potentiellement mobilisables et les orientations des groupes qui mobilisent. Les valeurs et les intérêts des individus qui participeront aux actions de protestation sont alors congruents aux activités et à l'idéologie des acteurs qui mobilisent38.

La question que posent ces auteurs consiste à savoir pourquoi un public peut être mobilisé à certaines occasions lorsqu'un certain "cadrage" est utilisé et qu'il ne l'est pas à d'autres, alors même que ce même "cadrage" est présent. Le problème de la rationalité de l'action collective est ici posé en des termes différents de ceux posés jusque-là par les auteurs de la perspective de la mobilisation des ressources. Les arguments développés suivant la perspective des cadres de l'action collective s'appuient notamment sur les travaux de Bert Klandermans39qui prête à l'action collective une rationalité fondée sur la croyance en l'efficacité des actions de ceux qui y participent. Pour ce dernier, l'action sociale est contingente aux résultats que les personnes anticipent. L'optimisme quant aux résultats de l'action collective accroît la possibilité d'une participation: le pessimisme la réduit40. Ce point est pour D. Snow et R. Benford très sensible car il est présenté comme élément faisant la jonction entre l'approche socio-psychologique, que revendique B. Klandermans, et l'approche de la mobilisation des ressources. Néanmoins D. Snow et R. Benford estiment que ces considérations doivent être relativisées par le fait que ces croyances et attentes évoluent durant le cours de la participation aux actions de protestation. L'action des organisations joue sur ce point un rôle. Ces croyances sont alors sujet aux efforts de "micro mobilisations " pour les amplifier.

Cependant, ce ne seront pas ces modifications que les auteurs apportent au modèle de B. Klandermans41 qui retiendront notre attention. Nous dirons simplement sur ce point que plutôt que de contribuer à développer des considérations aléatoires, l'hypothèse selon laquelle les participants croient lorsqu'ils agissent que l'action collective produira des résultats efficaces, devrait faire l'objet par ces auteurs d'un travail de vérification. Mais le point important pour nous consiste plutôt à comprendre la place qu'occupe la production de cadres dans les processus de mobilisations protestataires. Affirmer que cette zone d'étude distinguée par D. Snow et R. Benford, était jusque-là négligée dans les travaux des mobilisations protestataires, ne saurait bien évidemment suffire à nous faire reconnaître une quelconque validité à leurs hypothèses de recherche42. C'est le raisonnement même qui nous est proposé qui nous intéresse. Avec d'un côté ce que les auteurs nomment la "résonance" publique d'un cadre dominant, et, de l'autre, l'action de protestation, le type d'explication proposé place la structure sociale et l'acteur, face à face à l'extrémité d'un même continium. D'une part, le potentiel mobilisateur des cadres défini par ses capacités d'élaboration et de "résonance", est considéré comme une donnée structurelle. D'autre part, I'intervention des organisations protestataires, souligne l'importance que revêt l'action. Ces deux volets donnent l'explication suivante. Si un "mouvement social" ne se développe pas alors même que ces conditions structurales sont remplies, c'est qu'il n'existe pas de cadre adéquat pour faire émerger les mobilisations ou que les groupes n'ont pas su le manier43. Les mobilisations pacifistes américaines fournissent alors les exemples de ces conceptions. La nature très restrictive du cadre dominant du "gel nucléaire" lors des protestation contre l'armement nucléaire dans les années quatre-vingt aux Etats-Unis, limite ainsi son potentiel d'élaboration. Le déclin des mobilisations est imputé à l'échec des acteurs de n'avoir pas su ou pu amplifier la "résonance" du cadre du gel nucléaire44. R. Benford est lui-même dans un autre article encore plus catégorique concernant l'importance du rôle des acteurs protestataires45. Le succès de la participation aux mobilisations est plus grand lorsque l'activité de "diagnostic", de "pronostic", et l'appel à l'action sont "richement développés"46

Par ailleurs, cette conception nous rappelle les développements d'il y a près d'un siècle de G. Le Bon en ce que la notion des "cadres de l'action collective", définie par R. Benford et D. Snow se rapproche de celle "d'idées-images" de l'auteur français. En effet, G. Le Bon nous disait déjà " Quelles que soient les idées suggérées aux foules, elles ne peuvent devenir dominantes qu'à la condition de revêtir une forme très simples et d'être représentées dans leur esprit sous l'aspect d'images"47. Il ajoutait: "Associations de choses dissemblables, n'ayant entre elles que des rapports apparents, et généralisation immédiate de cas particuliers, telles sont les caractéristiques de la logique collective. Ce sont des associations de cet ordre que présentent toujours aux foules les orateurs qui savent les manier. (...) L'orateur en communication intime avec la foule, sait évoquer les images qui la séduisent. S'il réussit son but a été atteint,' et un volume de harangues ne vaut pas les quelques phrases ayant réussi à séduire les âmes qu'il fallait convaincre"48. De la même manière que les "suggestions" maniées par les meneurs sont transformées par les foules en acte, les "cadres" conduisent au développement des "mouvements sociaux". Ces schémas d'analyses conçoivent les conditions idéelles, l'état de l'opinion et des croyances chez G. Le Bon, la "résonance" publique d'un thème chez R. Benford et D. Snow, comme des conditions structurelles rendant possibles l'action collective. Le "meneur" d'un côté, ou la "SMO" de l'autre, ne peuvent rencontrer de succès seulement lorsque ces conditions sont remplies. Alors seulement leur capacité de mobilisation devient fondamentale pour le développement des actions de protestation.

Cette conception même de la rationalité de l'action collective est à notre avis contestable. Penser qu'il suffit aux groupes de bien mobiliser les cadres pour voir des mobilisations se développer n'est qu'une illusion semblable â celle que pourrait avoir un publicitaire à la recherche du bon slogan pour développer les ventes d'une entreprise. C'est une conception de l'action collective que nous qualifierons d'idéaliste que nous devons ici repousser, car nous pensons qu'il serait erroné de vouloir distinguer les conditions et le contexte de production des interprétations de l'activité tactique des acteurs protestataires. La production de sens inhérente au développement de mobilisations protestataires doit plutôt être comprise comme une activité tactique prise dans des configurations sociales données. Selon nous, la distinction clairement prononcée par l'approche de la "mobilisation des ressources" entre une dimension idéelle et une dimension organisationnelle, ne saurait être pertinente car elle sépare des prédispositions d'acteurs potentiellement mobilisables, de l'activité tactique des acteurs qui mobilisent, capables de construire des actions de protestations dans le cours des interactions.

La structure des opportunités politiques

D'autres explications se proposeront alors, tout en s'appuyant sur une analyse de la structuration sociale, de prendre en compte les stratégies déployées par les acteurs. L'approche de la "structure des opportunités politiques" (Political Opportunities Structures) affirme ici que les structures politiques peuvent soit contribuer au développement des mobilisations, soit restreindre leur essor. Pour Herbert Kitschelt, la protestation anti-nucléaire qu'il étudie est chargée de nouvelles revendications non encore intégrées par les acteurs institutionnels. Plusieurs éléments constitutifs de cette "structure"49 doivent selon lui être pris en compte. La disponibilité des ressources telles que par exemple l'information et l'argent, est une variable importante50, tout comme le sont les règles institutionnelles qui peuvent faciliter ou empêcher l'institutionnalisation de nouveaux groupes. De la même manière, des mobilisations déjà développées peuvent avoir un effet entraînant pour l'émergence de nouvelles mobilisations. La structuration des "opportunités politiques" doit alors être prise en compte suivant les stratégies des acteurs protestataires. Les incidents dans les confrontations éclatent plutôt dans des configurations où l'Etat est "fermé " aux revendications protestataires, alors que dans les Etats "ouverts" aux demandes des acteurs contestataires, les manifestations jouent par exemple un rôle mineur51. L'action collective de protestation est donc dépendante de la "structure des opportunités politiques" car cette dernière "permet" ou "modèle" l'action des acteurs protestataires.

Cependant, plusieurs points de critique doivent selon nous être encore apportés à cette conception. Le premier porte sur l'état de configurations "fermées" ou "ouvertes", révélatrices des penchants objectivistes de cette démarche explicative. En effet cette distinction opérée à l'origine par Peter Eisinger52 et reprise par tous les auteurs organisant leurs travaux autour de la notion de structures des opportunités politiques53, revient à classer les mobilisations comme se déroulant dans un contexte politique qui leur est, soit défavorable, soit favorable. Les configurations nationales sont conçues comme des entités qui s'imposent inévitablement aux acteurs. Le second point concerne les fondements de l'explication, qui tend à réifier d'une part les acteurs institutionnels dotés d'un pouvoir de décision politique comme un "Etat" ou comme des instances administratives et d'autre part les acteurs protestataires comme un "mouvement social" ou encore comme un "nouveau mouvement social", celui-ci leur permettant de raisonner à partir de cas où de " nouveaux" intérêts ne sont pas encore intégrés par le système politique. Ceci conduit un auteur comme H. Kitschelt à repérer " une stratégie protestataire et "une" stratégie de l'Etat. Notre troisième point de critique, même s'il nous faut reconnaître que ce réductionnisme n'est pas repris par tous les auteurs se situant dans cette perspective –– Hanspeter Kriesi estimant par exemple que les alliances potentielles entre partenaires doivent faire l'objet d'une attention toute particulière54 –– tient en ce que cette analyse néglige des processus de concurrence entre acteurs protestataires ou entre acteurs constitutifs de l'appareil d'État, de même que des modifications d'enjeux à des moments différents. Dans tous les cas, l'incertitude des résultats produits par ce type de travaux est des plus grandes. Analysant les mobilisations contre les Pershing aux Pays-Bas sous cet angle, K.Kriesi conclut lui-même à la difficulté de juger si la structuration des alliances a pu contribuer à accroître la capacité de mobilisation "du mouvement de paix"55 Par ailleurs, le fait de prendre en compte une autre variable telle que le "potentiel de mobilisation", défini comme le réservoir de soutiens pour "le mouvement " disponible dans une société donnée56, montre encore combien l'insuffisance d'une explication centrée sur la notion de structure des opportunités politiques " est grande.

Conclusion

Aucune théorie des mouvements sociaux ne semble capable d'embrasser à elle seule l'ensemble des problèmes propres à toute étude empirique. Les nouvelles approches qui se consolident aujourd'hui représentent des tentatives plus intéressantes par les pistes de recherche qu'elles ouvrent que par les résultats obtenus à ce jour. En ce sens, plutôt que de croire en la puissance des idées sur l'engagement protestataire des individus ou de la structuration politique pensée de manière figée comme "ouverte" ou "fermée", nous insisterons en guise de conclusion sur le fait que l'explication de l'activité pratique conflictuelle devrait partir de la prise en considération de configurations de concurrence entre groupes. L'étude des interactions permet selon nous d'éviter le risque mécaniste contenu dans l'idée d'une imposition aux groupes protestataires de cadres symboliques préexistants. Elle souligne que le calcul des acteurs qui s'opère suivant l'appréciation de ce que pourrait être l'action des autres acteurs est un élément central de l'explication. Elle ne conçoit pas les formes de concurrence comme stables, mais place l'activité tactique des acteurs au centre de l'explication. Il nous semble alors possible d'appréhender la gestion d'un sens par ces organisations comme un processus fondamental qui participe à l'organisation même de leur concurrence. Il nous paraît sur ce point important de saisir que les groupes protestataires mobilisent avec le souci de paraître respectables publiquement. Cette forme d'apparition publique se manifeste dans l'usage du répertoire d'action collective, de même qu'elle repose sur les interprétations que les groupes développent. Si le travail explicatif des mobilisations protestataires doit reposer d'une part sur la mise en évidence d'organisations conçues comme des agences de mobilisation et d'autre part sur le jeu de concurrence et sur les interactions entre groupes protestataires, il doit encore prendre en compte a notre avis la caractéristique selon laquelle la gestion du sens constitue un processus fondamental pour l'explication des mobilisations protestataires. Cependant, et ceci marque peut-être la poursuite pour de longues années des recherches sur les cadres théoriques pour l'analyse des mouvements sociaux, il reste à construire une analyse de fond qui allie la dimension historique, le poids des déterminations sociales à l'activité tactique contenue dans toute entreprise de mobilisation protestataire.

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Notes

1 – Cf. LE BON. G..- Psychologie des foules.- Presse Universitaires de France. 1991. 4ème éd., (éd. Orig 1895).

Il ne faut pas néanmoins voir dans les travaux consacrés durant cette période aux foules, une approche homogène. G. Le Bon souligne dans l'introduction de son ouvrage, que ses conclusions diffèrent de celles de G. Tarde et S. Sighele. Cf. ibid.-p.6.

2 – Elles s'opposent aux foules "homogènes". Que sont les sectes, les classes et les castes.

3 – LE BON. G..- Dans un soucis de présentation scientifique de ces travaux s'appuie sur la théorie de la suggestion hypnotique que les expériences de Jean Martin Charcot avaient mises à la mode en France.

Cf. CHAZEL. F..- Mouvements sociaux.- in. Boudin (R). dir.. Traité de sociologie.- Paris. Presse universitaire de France, 1992.-p.275.

4 – Cf. LE BON. G..- Psychologie des foules.- Op. cité.-p.19

5 – c'est ce que montre l'important chapitre. "Comportements collectifs". Dans l'ouvrage de Robert Park et Emest Burgess. "Introduction to the science of sociology", publié en 1921, qui restera le manuel de base dans la discipline durant de nombreuses années.

6 – BLUMER. H..- Collective Behavior, in, Park (R), dir., an Outline of the Principals of Sociology. New York. Barnes & Noble. 1939.-p.p. 221-280 (rév.1951).

Nous faisant référence à la version modifiée publiée en 1951: Blumer (II). "Collective Behavior", in, Gittler (J.B), dir.. Reviews of sociology: an Analysis of a Decade. New York. John Wiley & Sons, p.p 127-158.

7Ibid..-p. 128.

8 - Ibid..-p. 131.

9 - Ibid..-p. 135..

10 - Ibid..-p. 133..

11 – Cette caractéristique est soulignée par Friedhelm Neidhart et Dieter Rucht.

Cf. NEIDHARDT. F.. RUCHT. D..- The Analysis of social Movements: the State of the Art some Perspectives for further Research.- in. Rucht (D), dir.. Research on Social Movements. The State of the Art in Westview press. 1991. p.p421-464.

12 – Les travaux expliquant les mobilisations protestataires à partir de la notion de "frustration relative" sont produit par des auteurs travaillant sans volonté de construire ensemble un paradigme. Ceci est bien différent des travaux utilisant la notion de "mobilisation des ressources". La caractérisation de la perspective de la mobilisation des ressources est due au travail d'assimilation et de regroupement opéré par ses promoteurs. Les ouvrages de M.N Zald et de J.D MeCarthy ont en effet su présenter une approche cohérente pour tout regard étranger.

Seules les études expliquant l'action collective principalement à partir de la frustration relative sont prises ici en considération. Cela écarte les explications qui y recourent accessoirement. Pour, G. Le Bon. Par exemple, le système éducatif a produit une "armés mécontents", prêts à suivre les meneurs, car l'Etat n'a eut recours qu'à une minorité d'individus, laissant ainsi les autres sans emplois.

Cf. LE BON. G..-psychologie des foules.- Op.cité.-p.p. 51 et suiv.

13 – DAVIES.J –Toward a theory of Revolution- American Sociological Review, Vol27. n°1. 1962- p.p5-19. (Traduction française in. Bimbaum (P), Chazel (F). Sociologie politique. Textes Armand Colin. 1978).

14 – Cette conception a connu de multiple développement. Par exemple, l'analyse portant sur mai 1968 en France par Pierre Bourdieu donne une place importante à la frustration des agents.

Cf. BOURDIEU, P..- Homo Academicus- Paris, Editions de minuit. 1984.

15 – Pour une discussion de ces deux approches, cf.:

KLANDERMANS. B..- New social Movements and Resource Mobilization: the European and the American Approach.- International Journal of Mass Emergencies and Disasters, n°4. 1986.-p.p 13-37.

KLANDERMANS. B..- New social Movements and Resource Mobilization: the European and the American Approach Revisited .-in. Rucht (D), dir Research in Social Movements. The State of the Art in Western Europe and the USA. Boulder (Col). Francfort-sur-le-Main. Westview press. Campus Verlag, 1991.-p.p17-44.

Il existe un grand nombre de travaux discutant ces deux approches dans des présentations générales consacrés à l'étude des "mouvements sociaux". On peut consulter notamment:

RUCHT. D, dir..- Research on social movements…-op.cité

CHAZEL. F.- mouvements sociaux.- art.cit.

16 – Remarquons, ici que des auteurs tels que D. Rucht et F. Neidhart, dans un bilan qu'il veulent exhaustif de l'état des recherches dans le domaine des "mouvements sociaux" n'ont pas inclus les contribution se situant dans cette approche de l'action collective. Il est regrettable qu'ils se soient limités à l'analyse de ces phénomènes suivant la terminologie de "mouvement social" proposées par les auteurs mêmes plutôt que sur les phénomènes étudiés.

Cf. NEIDHART. F., RUCHT. D.,- the analysis of social movements… art.cit

17 – OLSON. M –Logique de l'action collective- Paris. Presse universitaire de France.1978

La contribution de M. Olson ne constitue pas pour autant une théorie de l'action collective, mais plutôt comme le rappelle Alessandro Pizzorno, une théorie de la production de biens collectifs.

Cf. PIZZORNO. A.-considerazioni sulle theorie dei movimenti sociali.- problemi del socialismo. Vol 12.1987.-p.p11-27 (Trad française:"Considération sur les théories des mouvements sociaux". Politix. Vol. 9, 1990. p.p74-80)

18 – OLSON. M.- Logique de l'action collective.- Op.cité.- p.36.

19 – FIREMAN B., GAMSON. W., - utilitarian Logic in the Resource Mobilization Perspective.- in ZALD. M.N., MCCARTHY. G.D, dir.- The Dynamics of social movements. Cambridge (Mass). Winthrop. 1979.-p.9.

20 – Nous reprenons ici les mêmes trois caractéristiques distinguées par B. Klandermans pour discuter cette approche. Elles permettent à notre avis de cerner les particularités de ces travaux.

Cf. KLANDERMANS. B.- The peace movement and social movement theory.- art.cit.-p.p4-5.

21 – MELUCCI. A.- the new social movements: a theoretical approach.- social science information. Vol. 19 n°2, 1980.- p. 217.

22Ibid.- p.219

23Ibid.- p.215.

24 - Ibid.

25 – TOURAINE. A. la voix et le regard. Pris. Editions du Seuil, 1978.

26 – De la même manière, A. Melucci estime que le marxisme, en définissant les préconditions de révolution au regard des contradictions du système capitaliste, sous-estime les processus par lesquels l'action collective émerge.

Cf. MELUCCI.A.- the new social movements..- art.cit.-p199.

27 – Cette analyse qui conçoit la culture comme un élément central dans la définition des mouvements sociaux est aussi partagée par A. Melucci ils adoptent tous deux un modèle général à trois niveaux. Le développement de l'information, des services est caractéristique de la "société post-industrielle". Des orientations culturelles dégagent dans ce type de société, de la domination de classe chez A. Touraine , ou bien de la domination matérialisée par les institutions et les organisations chez A. Melucci. Les nouveaux mouvements sociaux agissent principalement sur la définition de ces orientations.

28 – Touraine (A). La voix et le regard, op. cit., p86s.

29 – Cf. MELUCCI. A.- the new social movements..- art.cit.-p202.

30 - Ibid.- p.33

31 –Il affirme aussi dans un autre ouvrage que dans l'action collective contemporaine, l'organisation n'est plus un moyen tendu vers une fin et qu'elle ne peut pas être seulement estimée au regard de sa rationalité instrumentale.

Cf. Melucci (A). Nomads of the present. Social movements and individual needs in contemporary society. Londres. Hutchinson Radius, 1989, p74.

32 – Cf. Touraine (A). Dubet (F). Hegedus (Z). Wieviorka (M). La prophétie anti-nucléaire. Paris. Editions du Seuil 1980.

Touraine (A). Dubet (F). Hegedus (Z). Wieviorka (M). le pays contre l'Etat. Luttes accitanes. Paris. Editions du Seuil 1981.

33 – Les "réseaux" comme dimension organisationnelle, distingués par A. Melucci, ne sauraient, à notre avis, rendre compte de l'activité instrumentale de l'organisation dirigée vers sa reproduction en tant qu'appareil.

34 – MELUCCI. A.- l'invenzione des presente. Movimenti, identità, bisogni individuali. Bologue, II Mulinon, 1982.- p.16.

35 – Voir par ailleurs la critique de Klaus Eder de la notion de "sujet historique" chère à A. Touraine. La critique de K. Eder qui ne néglige pas la prise en compte du "macro-niveau", conçoit les "mouvements sociaux" comme construisant leur propre existence dans l'espace public communicationnel.

EDER. K. au-delà du sujet historique: vers une construction théorique des acteurs collectifs. –l'homme et la société. Vol.101.1991.- p.p121-140.

36 – MCCARTHY. J.D., ZALD. M.N.- Resource Mobilization and Social Movements: a Partial Theory, in, Zald (M.N). MeCarthy (J.D), dir. Social movements in an Organizational society. Collected Essays. New Brunswick. Transaction Books. 1987.-p.21.

37 – Contrairement aux approches des nouveaux mouvements sociaux et de la mobilisation des ressources, la diversité des variantes à laquelle conduit l'analyse des cadres produits dans les mouvements sociaux ne correspond pas à un enracinement de ces recherches aux Etats-Unis, et ce, même si les travaux d'auteurs américains, notamment, David Snow et Robert Benford sont à l'origine de son développement actuel. La reprise en Europe principalement dans les travaux de Klaus Eder sur la communication écologique et le discours environnementaliste, montre par exemple que l'analyse en terme de cadres est reprise dans des problématiques bien distinctes. On ne peut parler d'une approche des cadres comme on peut parler par exemple d'approche de la mobilisation des ressources.

Cf. EDER. K.- Framing and Communicating Environmental Issues. A discourse Analysis of Environmentalism. Florence, Institut universitaire Européen. (Projet n°42, Research paper n°8), 1992.

38 – SNOW. D.A. BURKE ROCHFORD. E. WORDEN. S. BENFORD.R.- Frame Alignment Processes. Micromobilization, and Movement Participation.-American Sociological Review. Vol.51, n°4.1986.-p.p 464-481

39 – Cf. notamment:

KLANDERMANS.B.- Mobilization and Participation: Social-psychological Expansions of Resource Mobilization Theory.- American Sociological Review. Vo l49.1948. p.p 583-600.

KLANDERMANS B- The Formation Mobilization of Consensus- in. klandermans (B). Kriesi (H). Tarrow (S), dir. From Structure to Action: Comparing Social Movement Research across Cultures. Vol.1. Greenwich (CT). JAI Press 1988 p.p 173-196.

KLANDERMANS B. OEGEMA. D.- Potentials. Network. Motivations, and Barriers: Steps Towards Participation in Social Movements. –American Sociological Review, vol52, n°4. 1987, p.p 519-531.

40 – Cf. SNOW. D.A. BURKE ROCHFORD. E.WORDEN.S. BENFORD. R.D.- Frame Alignment processes..- art.cit

41 – Ces arguments de B. Klandermans sont particulièrement exposés in. Klandermans (B) "Mobilization and participation .." – art.cit.

42 – Il nous faut tout de même reconnaître, que la 'libération cognitive" du "modèle de processus politique" présenté par Doug McAdam proposait déjà de prendre en considération les conséquences que les changements affectant "les opportunités politiques" produisaient sur les représentations collectives des acteurs. Les schémas de D. Snow et al, ne sont pas très éloignés de cette conception. François Chazel fait justement remarquer que D. Mc Adam a entrouvert la voie à l'étude des "processus symbolico-cognitifs" – qui soustendent l'ajustement de structures de signification. Les travaux de D. Snow et R. Benford marquent, selon nous une nouvelle étape par laquelle l'étude de ces processus occupent dorénavant une place centrale.

Cf. CHAZEL. F.- La Place du Politique dans la mobilisation contestataires: une découverte progressive. In. Chazel (F), dir. Action collective et mouvements sociaux. Paris. Presses universitaires de France. 1993 p-156.

43 – Cette analyse doit être repoussée pour deux raisons parce que tout d'abord, l'ajustement des cadres est conçu pour reprendre les critiques de M. Dobry comme "une condition nécessaire" à l'action collective, et ensuite parce que l'activité tactique des acteurs reste déterminée par l'existence de cet ajustement.

Cf. DOBRY. M.- Calcul, concurrence et gestion du sens. Quelques réflexions à propos des manifestations étudiantes de novembre – décembre 1986. in. Favre (P), dir. La manifestation- Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques. 1990-p.377.

44 – il est vrai que certaines fois, pour rendre toute l'exactitude des arguments qu'ils défendent, ils conçoivent ce trait comme ne jouant selon leur terme qu'en partie. L'irritation ne peut alors que se dégager chez tout lecteur un tant soit peu attentif à la démonstration qu'ils suivent.

45 – BENFORD .R.D.- The Nuclear Disarmament Movement. In, Kurtz (L.R) dir. The Nuclear Cage : a sociology of the Arms Race. Prentice Hall, 1988. p.p 237-265.

46 – Ibid. p-199.

47 – LE BON. G.- Op. cité. P32.

48 - Ibid. p-34.

49 - KITSCHELT, H- Political Opportunity Structures and political Protest: Anti nuclear Movements in four Democracies.- British Journal of Political Science. Vol.16, 1986.-p. 61.

50 - KITSCHELT, H -s'estime a cet égard proche de la perspective de la "mobilisation des ressources". Sur cette dernière approche, voir les développements qui suivent.

51 - KITSCHELT, H – cite ici l'exemple de la Suède et des Etats-Unis.

Cf. Ibid –p.71.

52 – EISINGER. P..- The Conditions of Protest Behavior in American Cities.- American Political Science Review. Vol.67, 1973.-p. 11-28.

53 – Cf, par exemple, H. Kitschelt. H. Kriesi. J.W Duyvendak.

KITSCHELT, H..- Political Opportunity Structures -art. cit.

DUYVENDAK. J.W..- Le poids du politique. Nouveaux mouvements sociaux en France.- Paris, L'Harmattan, 1994.

KRIESI.H..-The Political Opportunity Structure of New Social Movements: its Impact their Development- Contribution au colloque" Social Movements. Counterforce and Public Bystanders" Berlin, WZB. 1990.

54 – KRIESI. H s'appuie ici sur la troisième dimension distinguée par S. Tarrow de la définition de la "structure des opportunités politiques". Pour ce dernier auteur, la "structure des opportunités politiques" doit s'apprécier au regard du degré d'ouverture et de fermeture de l'accès politique. Du degré de stabilité ou d'instabilité des "electoral alignments".

Cf. KRIESI. H.- The Political Opportunity Structure of the Dutch Peace Movement. West European Politics. Vol.12 n°3. 1989-p.295.

TARROW. S- struggling to Reform: Protest and Policy Innovation in Advanced Industrial Democracies.- center for international studies. Conseil University. 1983.

55 – Cf. KRIESI. H.- The Political opportunity structure of the Dutch Peace Movement- art. Cit. p-310

56 – H. Kriesi, s'appuie ici sur les travaux de Bert Klandermans et Dirk Oegema.

Cf. Klandermans (B). Oegema (D). "Potentials, Networks, Motivations, and Barriers", art.cit

 

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