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Catherine Miller, Enam Al-Wer, Dominique Caubet et Janet C. E. Watson, Arabic in the city. Issues in dialect contact and language variation, Routledge, Londres, New York, 2007

Les ouvrages en sociolinguistique de l’aire arabophone sont assez rares pour ne pas manquer de faire connaître au public intéressé par ces questions cet ouvrage qui rassemble les réflexions de spécialistes de la question, fruit d’un débat qui a vu sa complétude lors d’un work shop à Aix-en-Provence tenu en 2004.

Sans entrer dans le détail de tous les textes présentés, nous notons qu’ils s’organisent autour de trois axes : le premier s’intéressant aux corrélations entre les migrations, l’urbanisation et les changements linguistiques. Le second portant plus particulièrement sur la description des parlers urbains dans différentes régions du Monde arabe où le Maghreb n’est représenté que par le Maroc et la Mauritanie, mais il ne s’agit pas d’en faire le reproche aux éditeurs qui ont eu le mérite d’organiser ce débat avec les personnes qui ont bien voulu répondre à leur initiative.

Le dernier axe expose un certain nombre de phénomènes et de situations de contacts, de multilinguisme. Nous aurions préféré parler de plurilinguisme car la perspective n’est pas la même dans les deux acceptions, l’une privilégiant la somme des langues alors que l’autre appréhende ces situations dans une perspective de construction de dynamiques et d’interactions plurilingues plus intégrative, chaque phénomène de contact devenant l’épiphénomène de stratégies de locuteurs plurilingues se mouvant dans un espace pluriel travaillé, à la fois par la tendance au compromis dans les  pratiques et le conflit dans les représentations.

L’intérêt des contributeurs s’est porté sur de vielles cités telles que Le Caire et Damas, des cités émergentes comme Amman et Nouakchott, de cités en expansion comme Casablanca, Riyad, Sanaa, Tripoli (Libye) et Beyrouth, des cités provinciales comme Ksar El Kébir et Meknès au Maroc, Dhaman, Buraida, Abha et Skaka en Arabie Saoudite, enfin des cités comptant une diaspora arabe : Ceuta, Maiduguri au Nigeria et Saragosse.

A travers la discussion sur des anciennes catégorisations des dialectes arabes en urbain et rural ou en citadin et bédouin, les auteurs essayent de mieux appréhender les notions de konéisation, de nouvelle territorialisation des parlers avec la prégnance de certains traits ruraux  et même de vieux traits citadins dans les nouveaux parlers, les auteurs restent prudents dans la caractérisation des changements. Ces derniers doivent être expliqués en rapport avec une multitude de facteurs internes, externes et extralinguistiques dont l’ambivalence observée par rapport à la notion de métissage induite par les flux migratoires internes et externes en est l’exemple le plus emblématique tant l’idéal d’une norme bédouine est toujours présent dans les représentations des locuteurs.

Les dynamiques urbaines qui travaillent ces parlers ne peuvent être isolées des contextes politiques national et régional, ni des conflits idéologiques qui peuvent surgir dans cette partie du monde encore fortement travaillée par des logiques coloniales pour Ceuta ou postcoloniales pour les autres cas évoqués ici. Il va sans dire que développer ce genre d’études pour englober d’autres villes dans le Monde arabe permettrait d’avancer dans la compréhension de l’évolution linguistique de cette partie du monde qui connaît une rapide urbanisation et dans lequel les corrélations entre les langues, la modernisation, l’identité et le pouvoir sont très problématiques, est plus que nécessaire. C’est à quoi nous invite la lecture de cet ouvrage.

Khaoula TALEB IBRAHIMI

 

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