De la protection à l’éducation au droit : continuités, discontinuités et ambivalences de la justice des mineurs au Portugal


 Insaniyat N°s83-84| 2019 |La délinquance juvénile: réalités et prises en charge|p. 169-175 | Texte intégral



Josefina CASTRO : Université Lusíada Norte, Faculté de Droit, Centro de Estudos Jurídicos, Económicos e Ambientais (CEJEA) et Centro de Investigação Interdisciplinar da Escola de Criminologia - Crime, Justiça e Segurança (CJS), Porto, Portugal.

Carla CARDOSO: Université de Porto, Faculté de Droit, École de Criminologie, Centro de Investigação Interdisciplinar da Escola de Criminologia - Crime, Justiça e Segurança (CJS), Porto, Portugal.


Introduction

À l'aube du 21e siècle, la justice juvénile au Portugal a connu une profonde transformation avec l’entrée en vigueur de la Loi de Protection des Enfants et des Jeunes en Danger et de la Loi Tutélaire Éducative en janvier 2001. La protection judiciaire des mineurs remonte à 1911, avec la publication de la Loi de la Protection de l’Enfance qui créa les tribunaux pour mineurs (Tutorias da Infância), chargés d'assurer « la garde et la protection des mineurs en danger moral, sans protection ou délinquants ». Cette loi, qui est considérée comme fondatrice d’une nouvelle branche du droit, a retiré les jeunes de moins de 16 ans, qui ont commis des infractions, du champ d'application du droit pénal.

Émergeant dans le contexte d'un État social républicain qui succède à la monarchie, cette loi diffuse l'image du mineur comme jeune en construction ayant besoin de protection, d'éducation et d'assistance pour échapper aux mauvaises conditions du milieu. Sous l'influence du mouvement de défense sociale, un régime disciplinaire et une hygiène morale s'imposent contre les germes de la dangerosité par une action qui se veut précoce et préventive[1].

Ce modèle de « protection » a évolué d’une logique paternaliste répressive vers une rationalité se voulant non punitive avec les deux versions de l’Organisation Tutélaire des Mineurs (OTM) de 1962 et 1978 (Agra et Castro, 2002, 2007). Publié quatre ans après la Révolution, au moment de la mise en place des principes de l’État de droit et de l’État social, décret-loi nº 314/78 du 27 octobre 1978 sera cité comme un exemple « maximaliste » du modèle de protection[2] (Gersão, 1996 ; Rodrigues, 1999). Au nom de l'intérêt supérieur du mineur, toutes les situations envisagées, qu’il s’agisse de mineurs en danger ou de mineurs délinquants, étaient pensées comme un symptôme d’inadaptation et ce critère déterminait la nature et la durée (indéterminée) de l’intervention. Toutes les mesures (mesures de protection, d’assistance et d’éducation) étaient indistinctement destinées aux mineurs en danger et aux mineurs auteurs d’infractions. La procédure tutélaire était très simplifiée et informelle et le tribunal pour mineurs jouissait d'un large pouvoir discrétionnaire. En raison de la fonction exclusivement protectrice et non punitive de l'intervention, les mineurs et leurs familles n'étaient pas assurés de moyens de défense et de garanties procédurales.

Jusqu’à l’entrée en vigueur des lois de 1999, et malgré des dysfonctionnements évidents, le système s’est maintenu sans altérations majeures. Il faut néanmoins remarquer la création des Commissions pour la Protection des Mineurs en 1991 (décret-loi n° 189/91 du 17 mai 1991) et la création d’un régime légal pour les jeunes adultes de 16 à 21 ans (décret-loi n°401/82 du 23 septembre 1982). Ces Commissions, appelées depuis 1999, Commissions pour la protection des enfants et des jeunes (CPCJ), ont le statut d’institutions officielles non judiciaires dotées d’une autonomie fonctionnelle. Elles représentent le souci de déjudiciariser les affaires des enfants et jeunes en danger en introduisant un style de gestion des problèmes sociaux caractérisé par l’appel à la communauté et à la responsabilité partagée entre les acteurs et entités locales, publiques et privées et l’État. L’action de protection sociale de ces commissions est fondée sur l’acceptation par les intéressés des mesures de protection, c'est-à-dire qu’aucune mesure ne peut être prise sans l’accord des parents ou des tuteurs des enfants. Malgré les altérations qui ont suivi la réforme de 1999, ce modèle est maintenu jusqu’à nos jours.

En ce qui concerne la création du régime pénal pour les jeunes adultes, le souci principal a été d’éviter, dans la mesure du possible, l’incarcération, en prévoyant des peines d'emprisonnement réduites et le remplacement des peines privatives de liberté de moins de deux ans par des mesures de l’OTM ou par des mesures de correction spéciales. Ce régime légal est encore en vigueur malgré les critiques et les propositions de réforme.

Dans un premier temps, on procède à l’encadrement du système tutélaire éducatif, en vigueur depuis 2001, en exposant sa rationalité, ses dispositifs institutionnels et les mutations introduites par rapport au modèle de protection. Ensuite, sont présentées les données disponibles sur l’évolution de la délinquance des jeunes et la prise en charge des mineurs au système tutélaire éducatif à partir des statistiques produites par les administrations policières et judiciaires. Finalement, sont discutées les continuités, discontinuités et ambiguïtés des développements actuels de la problématisation de la délinquance des jeunes, par rapport aux réponses à l'insécurité et aux politiques publiques en matière d’enfance et de jeunesse.

La réforme de 1999 et le régime tutélaire éducatif

En 1999, les deux lois qui organisent, aujourd’hui, la nouvelle justice des mineurs au Portugal sont publiées : la loi nº 147/99 du 1er septembre 1999 dite Loi de Protection des Enfants et des Jeunes en Danger et la Loi nº166/99 du 14 septembre 1999 dite Loi Tutélaire Éducative (LTE). Cette dernière fixe à 12 ans l’âge minimum requis pour intervenir et maintient l’âge de l’imputabilité pénale à 16 ans. Les mesures tutélaires éducatives peuvent être imposées jusqu’à l’âge de 18 ans pour des faits commis avant l’âge de16 ans et les mesures appliquées peuvent être exécutées jusqu’à 21 ans.

La mutation la plus significative du nouveau modèle réside dans la séparation entre le régime tutélaire de protection pour les enfants en danger et le régime tutélaire éducatif pour les enfants auteurs d’infractions criminelles. Cette séparation répond aux critiques, qui s’étaient accentuées pendant la première moitié des années 1990, envers l'organisation et le fonctionnement du système de justice juvénile ; critiques formulées principalement par les agents du système judiciaire et par les académiques. À côté de ces critiques internes, il faut remarquer la pression exercée sur le système portugais par les textes internationaux relatifs à la justice des mineurs, en particulier la Convention Européenne des Droits de l’Enfant ratifiée par le Portugal en 1990, ainsi que par les transformations des systèmes de justice juvénile observables dans d’autres pays.

La majorité des arguments tournent autour des dysfonctionnements structurels du système, que les réformes précédentes ont échoué à corriger et qui sont, maintenant, considérés comme des effets pervers du modèle de protection (Gersão, 1996 ; Rodrigues, 1997, 1999 ; OPJP, 1998). Ces dysfonctionnements sont :

  1. une criminalisation de la pauvreté, lorsque la justice des mineurs prend en charge des situations de misère sociale que le système de protection sociale s'avère incapable de gérer. Le problème le plus important était le placement des mineurs en danger non-délinquants dans les centres de rééducation du ministère de la Justice, tendance qui a été légitimée par l’indifférenciation absolue des mesures à appliquer aux situations non délictuelles et aux situations de délinquance, par la loi de 1978 ;
  2. le surpeuplement de ces institutions, conséquence du recours abusif à la mesure de placement. De plus, le caractère indéterminé de la durée de la mesure prolongeait le séjour des mineurs (souvent jusqu’à 18 ans, seuil de la majorité civile) en déclenchant un effet cumulatif persistant malgré la diminution significative de l’application de cette mesure pendant les années 1990 ;
  3. le pouvoir discrétionnaire des tribunaux et l'absence de droits et de garanties pour le mineur en justice ;
  4. l'inadéquation du régime spécial pour les jeunes délinquants de 16 à 21 ans.

À côté de ces critiques axées sur la « justice » du système, le modèle de protection est aussi critiqué pour son inefficacité en matière de contrôle de la délinquance des jeunes. L’exigence de responsabiliser le jeune infracteur apparait à l’intersection du souci de le reconnaitre comme un sujet de droit et de la préoccupation sécuritaire, devenue plus expressive depuis le milieu des années 1990. Cette préoccupation sécuritaire se caractérise par une dénonciation de niveaux croissants de la criminalité dans le contexte d’une attention accrue portée sur l'immigration et une attention nouvelle portée à l'exclusion sociale touchant les quartiers défavorisés à la périphérie de Lisbonne et de Porto et leur association à la criminalité et à l’insécurité, de la part des medias, d’acteurs politiques et de citoyens. Bien que le problème de la drogue demeure présent dans cette configuration, sa visibilité a reculé face à d'autres phénomènes, en particulier la délinquance juvénile, la violence et le crime organisé qui ont fait l’objet d’une couverture médiatique et d'une attention sans précédent dans les débats politiques (Cardoso
et Castro, 2017).

Nous pouvons affirmer malgré les particularités propres à l’histoire portugaise en matière de justice juvénile, que les conditions qui ont déclenché la réforme sont communes aux conditions qui ont entouré les mutations vérifiées depuis les années 80 dans d’autres pays, que ce soit en Amérique du Nord ou en Europe et qui ont été interprétées comme le remplacement du modèle de protection par un « modèle de justice », ou encore par un retour au droit pénal et par une punitivité accrue (e.g. Junger-Tas, 1994 ; Muncie, 2005 ; Bailleau et Cartuyvels, 2007 ; Mucchielli, 2015).

Comme mentionné précédemment, la réforme n’a pas introduit d’altération de l’âge de l’imputabilité (majorité pénale) qui reste fixé à 16 ans (art. 19 C.P.). Le régime tutélaire éducatif concerne les jeunes âgés de 12 à 16 ans accusés d’avoir commis une infraction criminelle. Les mineurs de moins de 12 ans ne font pas l’objet d’une intervention tutélaire éducative[3].

Au-delà de la violation du droit pénal, l’application d’une mesure éducative s’appuie sur deux autres conditions : « la nécessité d’éducation au droit pour le mineur », c'est-à-dire la nécessité de l’éduquer au respect des normes pénales impliquée dans la commission de l’acte, et le fait que cette nécessité éducative subsiste au moment de l’application de la mesure. Ces conditions sont bien l’expression de la rationalité hybride et en même temps singulière du régime tutélaire éducatif.

D’abord, celui-ci s’inscrit dans une voie très étroite entre droit pénal et logique protectrice. En ce qui concerne le droit pénal, on affirme essentiellement sa « fonction bouclier » (Tulkens, 1997, p. 218), le droit pénal étant considéré comme « un système qui réalise de façon particulièrement active les droits fondamentaux » (Exposé des Motifs de la LTE, Rodrigues, Duarte-Fonseca, 2003). En effet, la procédure tutélaire éducative se rapproche de la procédure pénale nommément en ce qui concerne le principe de la légalité procédurale, le principe du débat contradictoire ou le droit de consulter un avocat. Du côté de la sauvegarde de l’intérêt du mineur, le principe d’une intervention qui se veut plutôt éducative est maintenu.

Singulière, parce que son statut doublement autonome est affirmé : face au nouveau régime de protection, le souci de séparer clairement la réponse judiciaire aux mineurs ayant commis des faits qualifiés comme infraction criminelle des dispositifs d’aide et de protection judiciaire aux jeunes « en danger » ; face au droit pénal, même si la responsabilisation du mineur est maintenant affirmée, elle est entendue comme étant au service d’une finalité éducative poursuivant l’intérêt du mineur. Il faut souligner qu’on est devant un régime tutélaire non-pénal à la finalité éducative.

Le concept qui illustre le mieux cette nouvelle orientation est celui d’éducation au droit. Cette notion exprime la finalité des mesures tutélaires et établit les conditions de légitimation de l’intervention (Castro, 2009). L’intervention devient légitime et nécessaire lorsque le jeune, portant atteinte aux valeurs essentielles de la société, manifeste une « personnalité hostile au devoir-être juridique de base traduit dans les normes criminelles » (Exposé des Motifs de la LTE, Rodrigues, Duarte-Fonseca, 2003). Il devient alors nécessaire de « responsabiliser le mineur face au dommage social qu’il a provoqué » et de « l’éduquer pour qu’il intériorise les normes et les valeurs juridiques ». Si, d’après le modèle de protection, les mesures tutélaires étaient déterminées par les conditions individuelles et sociales du mineur et, éventuellement, par l’infraction commise (celle-ci étant considérée comme un symptôme de celles-là), le nouveau droit des mineurs prend l’acte comme point de départ pour formuler un jugement sur la personnalité du jeune. C’est l’évaluation de la personnalité en tant qu’elle se révèlerait dans l’infraction qui détermine le classement de l’enquête, la suspension de la poursuite ou l’application d’une mesure. Un rétrécissement de la notion de personnalité, construite maintenant autour du rapport de la personne aux normes légales et spécifiquement aux normes pénales est sous-jacent à cette formulation. Si dans le modèle de protection, le droit cède la place à la connaissance de l'individu ; dans la tutelle éducative, l'individu à connaître est l'individu dans son rapport à la loi. C’est dans ce contexte que la nécessité de l’éducation à l’égard des normes juridiques s’affirme en tant qu’axe central du mécanisme de responsabilisation.

Les mesures tutélaires[4], exclusivement appliquées à la phase juridictionnelle, sont classées par la loi selon une échelle de gravité croissante, mesurée par le degré de contrainte que chacune est supposée représenter pour le mineur. La mesure non institutionnelle la plus grave est le suivi éducatif et l’internement en centre éducatif et elle est la seule mesure institutionnelle prévue. Toutes les mesures sont à durée déterminée selon les limites fixées par la loi. La mesure d’internement, c'est-à-dire le placement en centre éducatif du Ministère de la Justice, admet trois régimes d’exécution : les régimes ouvert, semi-ouvert et fermé. Le placement en régime semi-ouvert est applicable aux faits qualifiables de crimes contre les personnes et punissables d’une peine de prison supérieure à 3 ans ou à deux crimes punissables d’une peine de prison supérieure à 3 ans. Le régime fermé est applicable aux jeunes âgés de 14 ans ou plus[5] ayant commis un fait qualifiable de crime et punissable d’une peine supérieure à 5 ans de prison ou ayant commis au moins deux infractions contre des personnes punissables d’une peine supérieure à 3 ans de prison.

La durée maximale de la mesure d’internement est de 2 ans. Néanmoins, en régime fermé, la durée peut aller jusqu’à 3 ans pour les cas de « gravité exceptionnelle ». La durée minimale de l’internement est de 6 mois à la suite de la modification de la LTE en 2015[6].

La différence principale entre les régimes fermé et semi-ouvert est que, dans le dernier cas, le jeune peut être autorisé à fréquenter certaines activités à l’extérieur (en règle générale, sous surveillance).

En 2015, des modifications à la LTE ont donc été introduites (loi n° 4/2015 du 15 janvier). Ces changements correspondent, en général, aux problèmes que les acteurs du système ont mis en évidence au cours des années et ne représentent aucune inflexion dans la rationalité de la loi. Au niveau des mesures, il est constaté l’introduction du cumul des mesures d’internement ; le passage de la durée minimale des mesures d’internement en régime ouvert et semi-ouvert de 3 à 6 mois ; l’introduction de la possibilité de remplacer une mesure non institutionnelle par une mesure d’internement en centre éducatif en régime semi-ouvert lorsque l’échec de la mesure appliquée est dû à la conduite du mineur et que l’infraction qui a motivé l’intervention tutélaire éducative autorise l’application d’une mesure d’internement en régime semi-ouvert ou fermé[7]. Une autre modification importante est la possibilité de déclencher l’action publique, pour les crimes « privés » ou « semi-publics », indépendamment du dépôt d’une plainte par la victime[8].

En considérant que la majorité des actes commis par les jeunes correspond à ces catégories, cette modification de la loi a l’effet éventuel d’augmenter des poursuites. Enfin, est introduite une « supervision intensive » : l’exécution de la mesure d’internement peut inclure une période de supervision intensive ayant pour but l’évaluation des compétences acquises pendant le séjour en centre éducatif. Cette supervision, dont est chargée la Direction Générale de Réinsertion et Services Pénitentiaires (DGRSP), doit avoir lieu en milieu naturel de vie ou en « maison d’autonomie » et peut inclure la soumission à des conditions déterminées par le tribunal. Cette mesure cherche à combler ce qui a été conçu comme un vide problématique : le fait que la LTE ne prévoyait aucun suivi du jeune après sa sortie du centre éducatif et pendant son retour dans la communauté. Dans le même sens, il est établi une obligation d’articulation entre le centre éducatif et les services locaux de la DGRSP, et éventuellement la Commission de protection, pour préparer le retour dans la communauté.

Délinquance juvénile et contrôle social : les données officielles

Statistiques policières

Au Portugal, la définition légale de la « délinquance juvénile » concerne les jeunes entre 12 et 16 ans. Néanmoins, ont été inclus les autres groupes d’âge constitués dans les présentations statistiques de la police afin d’avoir une référence comparative. Il s’agit donc des personnes considérées comme suspectes par la police à l’issue de ses enquêtes.

Dans tous les groupes d'âge précédemment définis (individus de moins de 16 ans, de 16 à 24 ans et de plus de 24 ans), il s’est effectivement produit une augmentation plus ou moins forte au cours des cinq années précédant 2001 (figure 1 et tableau 1). Toutefois, la tendance la plus forte ne concerne pas les mineurs, elle concerne les personnes âgées de 16 à 24 ans. Après 2001, nous constatons une tendance inverse, à savoir une réduction du nombre de suspects dans le cas des mineurs de 16 ans, et après 2006, pour tous les autres suspects. La diminution est à nouveau plus accentuée dans les groupes de mineurs et jeunes adultes (entre 16 et 24 ans).

Figure 1 : Suspects de crimes enregistrés par la police (pour 1 000 résidents du même âge)

 

 

 

Sources : GEPMJ et DGPJ[9].

Le tableau 2 montre les taux de variation dans les 5 années avant 2001, l’année de l’entrée en vigueur de la Loi Tutélaire Éducative (LTE) et dans les 15 ans après.

Tableau 1 : Taux de variation de suspects enregistrés par la police d’accord les groupes d’âge

Taux de variation

suspects <16 ans

suspects 16-24 ans

suspects >24 ans

1996-2000

77,48

92,92

23,20

2001-2005

-10,28

4,90

4,74

2006-2010

-27,90

-37,76

-9,03

2011-2015

-6,94

-14,73

-8,79

Source : GEPMJ et DGPJ.

Statistiques judicaires sur l’application de la LTE

La procédure informelle typique du modèle protectionnel a été remplacée par une procédure d’inspiration pénale, constituée par l’enquête et la phase juridictionnelle. Les compétences et le pouvoir décisionnel pratiquement absolu du juge des mineurs sont maintenant largement partagés avec le parquet. C’est à lui que sont confiées la direction de l’enquête et, dans ce cadre, l’investigation des faits ainsi que l’évaluation de la nécessité d’éducation au droit. En ce qui concerne cette dernière, les instances judiciaires sont assistées par les services de réinsertion sociale du Ministère de la Justice (DGRSP), chargés d’élaborer des rapports sur la situation du mineur et d’accompagner l’exécution des mesures.

Compte tenu des principes d’intervention minimale et d’opportunité des poursuites, la loi prévoit des mécanismes de diversion. Axé sur l’investigation des faits et l’évaluation de la nécessité d’éducation au droit, le procureur peut classer sans suite (et sans conditions) l’enquête lorsque le fait correspond à un crime punissable avec une peine maximale d’un an et que la nécessité d’éducation au droit ne se vérifie pas, ou lorsqu’il s’agit d’un cas d’usage de stupéfiants (classement liminaire). À la fin de la phase d’enquête, une décision de classement sans conditions peut être prise dans les situations suivantes : l’inexistence du fait, l’insuffisance de la preuve ou lorsque le fait correspond à un crime punissable avec une peine maximale de 3 ans de prison, dès lors que la nécessité d’éducation est absente. Le parquet a encore la possibilité de suspendre la procédure pendant une période maximale d’un an lorsqu’il constate la nécessité de mesure tutélaire et que le fait est punissable d'une peine maximale de 5 ans de prison. Cette mesure consiste à autoriser le parquet à décider l’extinction de l’action publique en échange de l’accomplissement de certaines obligations acceptées par le jeune. Cette décision est liée à la présentation d’un plan de conduite jugé adéquate pour la prévention de la récidive. Le contenu du plan est établi à titre d’exemple par la loi et il ne diffère pas significativement de ce qui est prévu pour les mesures tutélaires non institutionnelles.

Figure 2 : L´évolution des affaires de mineurs à la phase d'enquête au cours de l’année

Source : GEPMJ et DGPJ.

À l’analyse des données judiciaires (figure 2) la grande majorité des affaires se terminent sans qu’aucune mesure ne soit appliquée. La majorité des affaires sont classées sans suite (et sans aucune condition) pendant l’enquête. En effet, entre 2001 et 2017, en moyenne, seulement 22% des enquêtes clôturées ont été renvoyées vers la phase juridictionnelle. Le classement sans suite et sans conditions constitue la décision majoritaire. La suspension de la procédure (sous conditions) reste très peu significative (en moyenne 3,5% des affaires clôturées chaque année (entre 2002 et 2017) dans la phase d’enquête. Les affaires renvoyées vers la phase juridictionnelle ont une très forte probabilité de faire l’objet d’une mesure tutélaire.

D’abord, les données montrent le rôle vraiment décisif du parquet dans l’appréciation des affaires et dans le processus décisionnel. D’une part, ces chiffres peuvent être interprétés comme une preuve de la faible gravité de la majorité des actes qui entrent dans le système judicaire. D’autre part, on peut dire que les principes d’opportunité et d’intervention minimale consacrés légalement sont largement mis en pratique, ce qui est décisif pour assurer la célérité des affaires et pour diminuer le temps que le jeune reste en contact avec le système judiciaire. Finalement, la diversion ne se traduit pas dans un effet de net-widening, puisque celle-ci aboutit, presque exclusivement, à un classement sans suite et sans conditions, c'est-à-dire, sans que le mineur ne soit sujet à aucune intervention du système. En 2017, 28% du classement est justifié en raison de l’absence de nécessité d’éducation au droit lorsque le fait correspond à un crime punissable avec une peine inférieure à 3 ans de prison.

En ce qui concerne la phase juridictionnelle, la loi établit que la mesure appliquée doit être proportionnelle à la gravité du fait et à la nécessité d’éducation révélée dans la commission du fait et encore présente au moment de la décision. Parmi les mesures jugées adéquates et suffisantes, le tribunal doit choisir celle qui, concrètement, puisse représenter la moindre intervention dans la vie du mineur et qui puisse obtenir la plus grande adhésion de la part de celui-ci et de sa famille. Le même critère doit guider le choix de la modalité et du régime d’exécution des mesures. La majorité des mesures sont appliquées par le juge au stade de l’audience préliminaire, procédure qui se veut informelle et consensuelle.

Figure 3 : Mesures appliquées aux jeunes infracteurs

Source : DGPJ et PGR

L’examen de l’évolution des mesures imposées entre 2001 et 2017 (Figure 3)[10] montre  que les mesures les plus appliquées sont le suivi éducatif (en moyenne 26% des mesures appliquées), l’exécution d’activités d’intérêt général (23%),l’imposition de devoirs (20%) et l’internement (11%).

En ce qui concerne les mesures non institutionnelles, les activités d’intérêt général et l’imposition de devoirs sont celles qui ont le plus augmenté depuis 2001. En comparant les 5 premières années (2001-2005) de l’implémentation de la LTE, et les 5 dernières (2013-2017), nous remarquons une multiplication par quatre et par trois respectivement.

En contrepartie, on constate une stabilité en ce qui concerne l’application du suivi éducatif qui était aussi une des mesures les plus utilisées avant la réforme. L’admonestation, qui représentait la mesure la plus appliquée avant la réforme et pendant les premières années d’implémentation du régime tutélaire éducative, ne représente que 4% du total des mesures appliquées entre 2010-2017. Les autres mesures non-institutionnelles, comme la fréquence de programmes de formation et la réparation restent à des niveaux résiduels.

En ce qui concerne l’internement, on constate une croissance de celui-ci après l’implémentation de la LTE : pendant les cinq années, après l’entrée en vigueur de la LTE, il constitue 10% de la totalité des mesures appliquées, face à 2% pour la même période avant la loi[11]. Néanmoins, en observant son évolution jusqu’à présent, le plus évident est la diminution d’environ 60% entre 2011 et 2017. Le régime semi-ouvert est le plus appliqué, suivi par le régime fermé et le régime ouvert qui, depuis 2013, ont connu des tendances inverses : une légère augmentation du régime ouvert face à une légère décroissance du régime fermé.

Toujours au sujet des mesures, il faut dire que, contrairement à ce qui se passe dans de nombreux pays, la justice restauratrice n'a pas été envisagée en tant que telle dans la LTE, à moins qu’on en ait une approche (très) maximaliste (Walgrave, 2000). D’une part, s’il est vrai que la loi prévoit la possibilité de solliciter l’intervention des services de médiation, cette mesure, telle que définie dans la loi, est très éloignée d’une visée réparatrice ou restauratrice : elle joue le rôle d’instrument pour obtenir un consensus entre la justice et ses destinataires, en particulier le jeune et sa famille, à propos d’une solution ou d’une mesure tutélaire (qui, éventuellement, peut avoir une nature réparatrice, mais pas nécessairement). D’autre part, les mesures de réparation envers la victime et les activités d’intérêt général sont déterminées par les autorités judiciaires sans aucun recours aux procédures restauratrices, concrètement sans la participation de toutes les parties. Face à cette absence, une question s’impose : quelle est la place de la victime dans la justice des mineurs ? Dans l’Exposé des Motifs de la LTE, on justifie la nouvelle attention conférée aux victimes à partir de l’importance du rôle qu’elles peuvent jouer dans la procédure tutélaire éducative[12]. En effet, la victime est surtout conçue comme un instrument d’accomplissement des finalités d’éducation et de responsabilisation du mineur. Le législateur a considéré que la sauvegarde de l’intérêt du mineur imposait une limitation au statut de la victime, par rapport même à certaines prérogatives de celle-ci dans la procédure pénale[13].

L’exécution des mesures tutélaires éducatives

Les institutions d’internement ont toujours été au cœur des arguments en faveur des réformes successives du droit des mineurs en raison des effets de la surpopulation chronique et des problèmes suscités par l'hétérogénéité de cette population (Beleza dos Santos, 1926 ; Caeiro, 1974 ; Gersão, 1988, Duarte-Fonseca, 1998, 2005). L'image actuelle des centres éducatifs, basée sur les données statistiques postérieures à la réforme, est radicalement différente. En effet, la réforme a eu des effets profonds en ce qui concerne les établissements d’enfermement du Ministère de la Justice. Au moins dans les aspects les plus évidents aux yeux du public. Nous soulignons la réduction brutale de la population enfermée, compte tenu de la restriction du placement en centre éducatif pour les délinquants, grâce à la séparation entre le régime de protection et le tutélaire éducatif, l’adaptation des centres aux nouvelles exigences de sécurité, surtout aux conditions imposées par le régime fermé.

Figure 4 : Nombres de places disponibles et nombre de mineurs placés en centres éducatifs (CE)

Source : DGRSP, GEPMJ/DGPJ.

Bien que le nombre de jeunes placés dans les institutions du Ministère de la justice (dénommées centres éducatifs par la LTE) ait diminué d'environ 60% entre 1992 (N = 1052) et 2000 (N = 634), l’entrée en LTE en 2001 a réduit la population placée de 34,5% par rapport à l'année précédente (Figure 4). En décembre 2000, la population était de 634 jeunes, avec un taux d'occupation de 96,5% (déjà réduite par rapport aux décennies précédentes). Un an plus tard, les chiffres ont considérablement changé : 219 jeunes dans les centres éducatifs, avec un taux d'occupation de 58,7% (Castro, 2009).

Cette réduction s’explique par le retrait des enfants et jeunes en danger non-délinquants à la suite de la restriction de la mesure d’internement aux jeunes délinquants. Les enfants en danger qui se trouvaient dans ces institutions ont été transférés dans des institutions du système de protection. En 2008, le gouvernement décrète que le réseau national des centres éducatifs est composé de neuf centres, dont deux nouveaux, à Madère et aux Açores (ordonnance 102/2008 du 1er février). Seul le centre éducatif de Madère est entré en activité (en 2010) et a été fermé peu de temps après en raison du nombre très réduit de jeunes placés. Á la suite de la réouverture d'un centre au nord pour les filles au début de 2018, 6 centres éducatifs sont en fonctionnement, deux au nord du pays, un au centre et trois à Lisbonne, avec une capacité totale de 164 places (DGRSP, 2018).

Après une croissance d’environ 54% entre 2007 et 2011, une décroissance d’environ 46% entre 2011 et 2017 est observée. Au 31 décembre 2017, 147 jeunes (131 garçons et 16 filles) étaient placés, ce qui représente un taux de 14 pour 100 000 jeunes âgés de 12 à 20 ans (Figure 4). La large majorité de ces jeunes placés ont été condamnés à une mesure d’enfermement (95%), et une petite minorité est en situation de détention provisoire. En ce qui concerne celle-ci, on constate une diminution accentuée : en 2007 les jeunes en détention provisoire représentaient 20% de la population placée, contre 3% en 2017. La majorité des jeunes placés au 31 décembre 2017 (70%) sont âgés de 16 ans ou plus et environ 19% sont âgés de 15 ans. En ce qui concerne la durée des mesures d’internement, on estime une durée moyenne de 15,74 mois de séjour en centre éducatif (min= 12,5 en 2012 et max.=18,7 en 2015).

En écoutant les agents du système, surtout les magistrats, les centres éducatifs sont perçus comme des institutions organisées et disciplinées où les jeunes peuvent profiter de l’enseignement et de la formation vocationnelle. Dans les entretiens conduits dans le cadre du projet européen de recherche-action OUTinOUT[14], il a été constaté que même si la connaissance du fonctionnement concret des centres est très limitée, l’opinion générale est positive et surtout ancrée dans la conviction que les jeunes sont placés dans un environnement sécure et bien organisé, malgré les réserves exprimées face à la préparation du retour des jeunes dans leur milieu de vie et face à la prévention de la récidive. L’image favorable sur les centres éducatifs contraste avec la préoccupation relative  aux séjours dans les centres d’accueil du système de protection.

Nous trouvons, ces dernières années, des critiques plus sévères et détaillées sur le fonctionnement des centres éducatifs dans les rapports de la Commission de suivi et supervision des centres éducatifs (CAFCE). Les rapports produits jusqu’à présent[15] concernent particulièrement le modèle d’intervention. Parmi les problèmes diagnostiqués, nous relevons :

- La fermeture » des centres éducatifs « à la communauté, et par conséquent « la nature artificielle » de la vie quotidienne des jeunes internés. Ce problème s'étend aux trois régimes d'internement, puisque même dans le régime ouvert, contrairement à ce qui est établi par la LTE, les jeunes effectuent toutes les activités quotidiennes au centre, telles que la scolarité et la formation vocationnelle, tout comme les jeunes placés en régime semi-ouvert ou fermé. En effet, la LTE établit la classification des centres selon le régime d’éducation (ouverts, semi-ouverts et fermés). Après la réorganisation des centres, la majorité d’entre eux comporte, au moins, deux régimes. L’indéfinition qui en résulte se traduit par une extension de certaines des conditions plus restrictives à toute la population placée, nommément aux jeunes en régime ouvert (Duarte-Fonseca, 2005 ; SIO, 2006). Selon la commission, cette fermeture est aussi due à la faible et ponctuelle participation de la communauté aux activités du centre.

- « L’uniformité totale » du modèle éducatif qui, selon la Commission, ne permet pas la différentiation préconisée par la loi. En effet, les centres éducatifs fonctionnent d’après un modèle centralement défini par la DGRSP et axé sur deux éléments : la scolarité et la formation vocationnelle. Le quotidien des jeunes est organisé autour de ces activités dominantes. En effet, même si chacun des centres est responsable de l’élaboration d’un projet éducatif spécifique dans le cadre des orientations légales et administratives, on constate une faible spécialisation de l’intervention. Cet aspect conditionne nécessairement l’adéquation de la mesure aux nécessités éducatives concrètes du jeune (OPJP, 2004 ; Duarte-Fonseca, 2005 ; SIO, 2006 ; Neves, 2006).

Au Portugal, les pratiques d’enfermement, même pour les adultes, sont encore dominées par l’idéal de réhabilitation. Cependant, contrairement à d'autres pays, les développements de l’exécution des peines ne se sont pas traduits par une orientation thérapeutique. La structuration tardive des services de probation (actuellement DGRSP, après la fusion avec les services pénitentiaires), dans les années 1980, s'est développée principalement selon un modèle de réinsertion, axé sur des pratiques visant à établir ou à renforcer les liens sociaux et les opportunités de rétablissement du statut social du délinquant. En ce qui concerne les mineurs infracteurs placés en centre éducatif, l’intervention a jusqu'ici été principalement traduite en un modèle éducatif non spécifique basé sur la scolarité et la formation préprofessionnelle. On observe néanmoins l'intensification de la standardisation des procédés dans le traitement des situations, la présence d’éléments épars qui appartiennent au modèle risk-needs et whatworks, dans les documents d’orientation institutionnels et dans quelques pratiques de diagnostic et enfin, l’adoption, notamment dans l’exécution du suivi éducatif, d’instruments dont la logique de base est un modèle cognitive-comportemental sont observés.

La question fondamentale suscitée par ces constats est de savoir quel est l’impact éducatif de ces mesures tutélaires. Si la supervision du parcours scolaire et des rapports familiaux est suffisante pour éduquer au droit, alors nous devons admettre que les fondements et l’autonomie du système tutélaire deviennent vides par rapport au régime de protection. Par contre, si l’impact éducatif des mesures réside tout simplement dans leur caractère sanctionnateur, nous mettons en cause l’autonomie du droit tutélaire éducatif au sein de la justice pénale. Donc, la question qu’il faut poser à cet égard est celle de savoir en quoi consiste l’éducation au droit.

Le régime pénal spécial pour jeunes adultes

Les données présentées jusqu’ici concernent les jeunes qui font l’objet d’intervention de la LTE. En ce qui concerne les jeunes plus âgés, de 16 à 21 ans, on a déjà mentionné le régime intermédiaire pour les « jeunes adultes » (décret-loi n°401/82 du 23 septembre 1982). Soucieux de ramener les mineurs de 16 ans et plus sous l'empire de la loi pénale mais voulant leur éviter les rigueurs de l'emprisonnement, le décret-loi prévoit des peines d'emprisonnement réduites et donne au juge la possibilité de remplacer les peines de prison de moins de deux ans par les mesures prévues par l’OTM ou par des mesures de correction spéciales, nommément le placement en centres de détention. Ce régime n’a jamais été significativement appliqué. Malgré l’invocation de cette situation comme un des arguments majeurs de la réforme, et en dépit de l’approbation en Conseil de ministres du projet de loi sur le nouveau régime spécial applicable à des jeunes adultes, qui prévoyait des peines de substitution à la peine de prison, nommément le placement en centre de détention, rien n’a été fait et les centres de détention n’ont jamais été construits. C’est-à-dire que l’emprisonnement des jeunes âgés de 16 à 18 ans (l'âge de la majorité civile) se fait encore actuellement dans les prisons communes, sans une distinction effective du régime des adultes. Cette lacune a été signalée dans les observations finales du Comité des Droits de l’Enfant sur le rapport que le Portugal a présenté en 2001. Le Comité salue la réforme de la justice des mineurs, en particulier l’adoption d’interventions séparées pour les jeunes de 12 à 15 ans, selon qu’ils soient en risque ou auteurs d’un acte qualifié d’infraction par la loi pénale. Ceci dit, le Comité manifeste son souci vis-à-vis des jeunes âgés de 16 ans et plus. Il invite le Portugal à « veiller, en particulier, à ce que les droits de ceux-ci soient pleinement protégés dans le cadre de la justice des mineurs ». Le rapport final de la Commission d’Étude et Débat sur la Réforme des Prisons (2004) et, plus récemment, les rapports de la Commission de suivi et supervision des centres éducatifs (CAFCE) vont dans le même sens.

Figure 5 : Nombre total de jeunes adultes (16-20 ans) en prison

Source : DGRSP.

Nous constatons une diminution évidente en termes absolus et relatifs du nombre des jeunes (âgés entre 16-20 ans) en prison depuis 2002. Il y avait 189 jeunes (42 mineurs de 16 à 18 ans et 147 jeunes adultes de 19 à 20 ans) en prison le 31 décembre 2017, environ 1.4% de la population carcérale. Ces chiffres, qui représentent un taux d’incarcération de 34.5 pour 100,000 habitants (pour le même groupe d’âge 16-20 ans), sont déjà le produit d’une nette tendance à la baisse des jeunes en prison. Cette tendance contrarie la croissance de la population carcérale vérifiée depuis 2009 (Figure 5).

De la protection à l’éducation au droit : continuités, discontinuités et ambivalences

Jusqu’à ce moment on a surtout présenté les tendances concernant l’intervention judiciaire auprès des mineurs délinquants ce qui, tout en suivant l’autonomie reconnue à la juridiction tutélaire éducative, correspond à une construction essentiellement légale et judiciaire du phénomène. Nous pouvons  réaffirmer ce qu’on a écrit il y a quelques années sur l’évolution récente du système de justice juvénile: le cadre qui vient d’être esquissé est loin de soutenir l’idée de l’accroissement de la punitivité ainsi que l’idée de tolérance zéro que le passage d’un modèle de protection à un modèle axé sur la responsabilisation laisserait supposer (Castro, 2009). En fait, le système est devenu moins interventionniste et plus sélectif.

Cependant, pour comprendre l'évolution du problème de la délinquance juvénile et son contrôle social, il est nécessaire de sortir des frontières du système de justice juvénile et d’inscrire l'objet dans des configurations plus larges, particulièrement dans les politiques publiques de l'enfance et de la jeunesse, et aussi dans les réponses à la criminalité et à l'insécurité. Bien qu’il soit impossible d'esquisser ce cadre dans l’économie de cet article, certains aspects peuvent, cependant, aider à comprendre la situation actuelle et même avoir une dimension prospective.

La délinquance juvénile et la problématisation de la délinquance et de l’insécurité au Portugal

Nous pouvons dire que pendant les dernières années, la problématisation de la délinquance au Portugal a connu des mutations. Le premier aspect concerne les objets qui attirent le plus l’attention des medias et du débat public et politique. La violence et le crime organisé ont été remplacés par la violence domestique et par la criminalité de col blanc, en particulier dans des affaires impliquant des élites économiques et politiques. En même temps, défiant les prédictions et les arguments utilisés par les forces de police afin de réclamer plus de ressources, la crise économique et sociale vécue par le Portugal pendant les dernières années, ne s’est pas traduite par une augmentation du désordre public et de la criminalité. En effet, suivant la tendance observée dans les pays occidentaux, la criminalité enregistrée montre une tendance à la baisse au niveau national, ainsi que dans les zones métropolitaines de Lisbonne et de Porto. Ces dernières années, la sécurité est devenue un atout et un projet national majeur pour attirer le tourisme. De plus, la crise ne s'est pas accompagnée d'une politisation accrue des questions de sécurité et de criminalité. Il semble plutôt que la problématisation de la sécurité publique et de la criminalité est devenue secondaire, que ce soit dans le discours médiatique ou politique, par rapport à d'autres préoccupations, en particulier les graves problèmes économiques et sociaux tels que le chômage et la pauvreté. Il est important de dire que les politiques criminelles ont, depuis longtemps, été soutenues par un large consensus entre les principales forces politiques, à savoir les partis socialiste et social-démocrate. Il est également important de souligner que le Portugal n’a pas connu la dérive punitive qui a été rapportée dans d'autres pays occidentaux.

En face de ces tendances, la délinquance juvénile, telle qu’elle a été dramatisée au début des années 2000, est devenue presque invisible. En même temps, nous constatons un déplacement contextuel de l’inquiétude face aux conduites des jeunes, qui trouve à l’école son siège privilégié. En effet, ces dernières années, l'école est devenue le principal contexte du discours sur la déviance juvénile. L'échec scolaire et l'absentéisme, l'indiscipline, les agressions et l'intimidation en milieu scolaire ont récemment mérité une attention particulière de la part des medias et des autorités publiques. Nous pouvons distinguer, au moins, deux approches différentes de cette problématique, qui coexistent actuellement, bien qu'elles aient émergé à des moments distincts. Le programme Territoires éducatifs d'intervention prioritaire (TEIP) est bien illustratif de cette évolution.

(i) La première approche est axée sur une rationalité essentiellement de prévention sociale. Créés par le Ministère de l'éducation en 1996, les principaux objectifs de ce programme sont de fournir une éducation de base universelle et de promouvoir la réussite scolaire de tous les élèves, particulièrement des enfants et jeunes appartenant aux milieux populaires les plus précarisés et identifiés comme en risque d'exclusion sociale et scolaire.

En définissant les écoles prioritaires comme celles implantées dans des zones les plus précarisées et celles qui ont des étudiants de différentes origines ethniques ou immigrants, le programme est spécifiquement orienté vers la prévention de l'absentéisme et de l'abandon scolaire, la promotion de la formation et du lien entre l'école et l’emploi. Il constitue un exemple des initiatives qui ont été lancées pendant la deuxième moitié des années 90, période qui peut être désignée comme « l'âge d'or » de la prévention sociale au Portugal (Castro, Cardoso et Agra, 2011). En effet, plusieurs mesures et programmes de protection sociale ont été mis en œuvre pour réduire la pauvreté, prévenir l'exclusion et promouvoir l'inclusion sociale. Implémentés par le gouvernement central, ils ont cherché à impliquer les autorités et les services locaux dans une logique de partenariat qui innovait dans un pays qui continue à être très centralisé. En plus, face à la conception « universelle » des politiques sociales construites après la Révolution de 1974, ces initiatives se développent selon un modèle de territorialisation des problèmes. Les quartiers de logements sociaux dans les zones métropolitaines de Lisbonne et Porto sont les cibles privilégiées. Dans ce contexte, et compte tenu des efforts de promotion de l'éducation dans un pays qui compta des décennies de retard sur les partenaires de l'UE, l'école représente une voie privilégiée pour atténuer la vulnérabilité et promouvoir le changement social.

(ii) La deuxième approche se développe plus tard, surtout à partir du milieu des années 2000, et correspond à une autre image de l’école, maintenant envisagée comme « source de problèmes ». Malgré les investissements dans l'éducation au fil des ans, les difficultés à surmonter l'abandon et l'échec scolaires sont devenues évidentes. En 2009, la scolarité obligatoire est passée de 9 à 12 ans. La même année, le Portugal a connu un taux d'abandon précoce de 30,9%, ce qui représentait deux fois la moyenne de l'UE (PORDATA[16], Magalhães et al., 2015). L’indiscipline en classe, les insultes, et les bagarres au cours de récréation, commencent à être de plus en plus définies en tant que violence. Faisant écho aux préoccupations du public concernant la sécurité en milieu scolaire, la deuxième génération du programme TEIP, lancée en 2008, a ajouté à sa mission la prévention de la violence et de l'indiscipline. Les interventions comprennent des activités éducatives et culturelles, sports et loisirs, médiation communautaire, tutorat, etc. L'école et la communauté sont considérées comme des agents de développement mutuel à travers un réseau qui comprend la communauté scolaire (étudiants, associations de parents et enseignants) et les agents institutionnels locaux dans la poursuite d'un plan éducatif. Cette association école-violence est devenue plus évidente entre le milieu des années 2000 et le début de la décade suivante, avec une série d’initiatives législatives autour de la « violence à l’école », dont l’image plus médiatisée et popularisée est le bullying. En 2010-2011, des initiatives parlementaires visent la création d'un crime de « violence scolaire » et l'aggravation des peines de toute une série d'actes déjà criminalisés, à condition qu'ils se déroulent dans des établissements d'enseignement ou dans leurs environs. La crise économique et politique qui a fait tomber le gouvernement socialiste en 2011 a interrompu la démarche d'évaluation de ces propositions. Nous relevons, également, en 2012, l’altération du Statut de l'étudiant de l’enseignement non-supérieur, qui va désormais inclure des extensives références au droit pénal.

De l’éducation au droit à la protection de la jeunesse ?

La différentiation construite par la réforme de 1999 entre enfance en danger et enfance dangereuse n’était pas suffisante pour cacher l’évidence : dans une large mesure, la matière sur laquelle opèrent le système de protection et le système tutélaire éducatif est la même.

L’entrée en vigueur de la LTE et surtout le climat d’alarme généré autour de la délinquance juvénile pendant la période de vacatio legis (entre la publication des lois en septembre de 1999 et son entrée en vigueur en janvier 2001) a suscité une asymétrie dans le partage des ressources entre le tutélaire éducatif et la protection. Même si les mineurs délinquants représentaient moins de la moitié des mineurs faisant l’objet de l’intervention judiciaire et même si le système de protection connaissait depuis toujours des problèmes structuraux, nommément en matière de ressources humaines qualifiées, les options politiques prises à l’époque ont privilégié le tutélaire éducatif. La nature « communautaire » imprimée au système de protection depuis les années 90, n’a pas réussi à cacher ses vulnérabilités nommément la fragmentation des services, l’instabilité des ressources et les difficultés de coordination. Malgré la collaboration accrue entre les différentes entités publiques et privés dans la prise en charge des problèmes, le poids du statut communautaire des Commissions de protection qui représentent le pivot du système de protection de l’enfance et de la jeunesse peut représenter un désavantage face au lien de dépendance des services vis-à-vis du pouvoir central. Aujourd’hui, il devient évident que le système de protection ne réussit pas à répondre à la complexité croissante des situations posées par les mineurs en danger, en particulier les mineurs qui ne correspondent pas, en termes d’âge et de comportement, à la traditionnelle figure de l’enfant délaissé, c’est-à-dire les jeunes à conduite déviante qui, avant la réforme, étaient plus susceptibles d’être placés dans les centres du ministère de la Justice. En ce qui concerne les problématiques signalées aux Commissions de protection, le dernier rapport de la Commission nationale de promotion des droits et de protection des enfants et des jeunes met en évidence la croissance, entre 2011-2016, des situations dans lesquelles l'enfant/jeune « assume des comportements qui affectent son bien-être » (indiscipline, bullying, consommation de stupéfiants et de boissons alcoolisées, etc.). D’après le Rapport CASA de 2016 (Instituto da Segurança Social, 2017) qui présente la situation générale du système d'accueil des enfants et des jeunes, ces situations, qui se réfèrent surtout aux garçons, ont tendance à augmenter avec l'âge : plus de la moitié (53,1%) se produisent dans le groupe d'âge de 15 à 18 ans, de 35,9% de 11 à 14 ans et de 7,5% de 6 à 10 ans. Environ 25% sont classifiées comme des situations de comportements « antisociaux graves et indiscipline ». Selon le même rapport, 27% des 5000 enfants et jeunes en institution d’accueil présentent des problèmes de conduite dont 24% sont qualifiés de gravité moyenne (vol simples, dommage, et agressions physiques) et 4% de gravité élevée (vols avec violence, l’utilisation d’arme et dommages graves…). La majorité de ces comportements concerne les jeunes entre 15 et 17 ans. Pour sa part, la DGRSP rapporte que « la large majorité des jeunes délinquants soumis à des mesures tutélaires éducatives étaient déjà signalés par le système de protection, soit par les commissions de Protection soit par la protection judiciaire » (Ministério da Justiça, 2017). En ce qui concerne les jeunes placés en centre éducatif, le taux s’élève à 75% dont 50 % étaient placés dans des institutions d’accueil résidentiel avant la mesure d’internement en centre éducatif.

Bien sûr, ces chiffres n’amènent rien de nouveau. Ce qui est nouveau, c’est la croissance des appels à la nécessité de renforcer la « complémentarité » des deux régimes. Malgré les passerelles que les deux lois ont établies entre protection et tutélaire éducatif, les dispositifs institutionnels des uns et des autres systèmes ont construit chacun, selon sa propre logique, « son » objet d’intervention. La question c’est de savoir qu’elles sont les significations, maintenant, attachées à cet appel à la « complémentarité » :

  1. i) D’une part, cet appel souligne les liens entre délinquance juvénile et victimisation et insiste sur la nécessité d’introduire des réponses plus spécialisées pour la prise en charge des enfants en danger, en privilégiant la prévention sociale extra-judiciaire. En complémentarité, le développement d’une collaboration accrue entre tutélaire éducatif et protection ayant pour but d’assurer aux jeunes infracteurs des conditions d’intégration plus favorables. On reconnait que certains des changements apportés au LTE en 2015 s'inscrivent dans cette logique de socialisation du droit des mineurs, ainsi que les positions prises par la CAFCE.
  2. ii) D’autre part, cet appel va de pair avec une approche qui prend le système tutélaire éducatif comme une espèce de modèle à suivre en ce qui concerne la prise en charge, par le système de protection, des mineurs déviants. À titre d’exemple : les suggestions de création d’institutions d’accueil à régime « plus fermé », reproduisant en quelque sorte le modèle des centres éducatifs ; l’appel à signalisation des cas de mineurs infracteurs à prétexte d’une intervention (tutélaire éducative) précoce qui puisse infléchir une trajectoire criminelle avant l’âge de l’imputabilité pénale.

Conclusion

Le retour au droit, qui caractérise le système tutélaire éducatif mis en œuvre depuis 2001, caractérisé nommément par l’introduction des garanties procédurales, la responsabilisation du mineur et l'accent mis sur la proportionnalité, ne s'est pas traduit jusqu’à présent par une inflexion rétributive. En effet, la LTE maintient comme axe central de sa rationalité les besoins du mineur, cherchant à les concilier avec la reconnaissance de celui-ci en tant que sujet de droit, tout en imposant des limites à l’intervention de l’État. Dans ce sens, on observe une large utilisation du classement sans conditions ainsi qu’une diminution de l'application de la mesure d’internement au cours des dernières années.

Néanmoins, ces développements ne doivent pas conduire à ignorer le maintien des paradoxes qui, d'ailleurs, s’inscrivent dans la genèse même de la justice juvénile : l’insistance sur le renforcement du lien entre tutélaire éducatif et protection dans la prise en charge des mineurs infracteurs coexiste avec le maintien de l'âge de la majorité pénale à 16 ans, ce qui autorise l'incarcération des jeunes dans des établissements pénitentiaires pour adultes avant l’âge de la majorité civile. D’autre part, le renvoi à la juridiction tutélaire éducative parait être entendu actuellement de plus en plus en tant que solution pour combler l’inefficacité d’une action préventive au niveau de la protection. Bien sûr, il ne s’agit pas d’un mouvement de régression. Cependant, cette « solution préventive », qui aura comme effet d'anticiper le moment du contact avec la justice, oublie l’évidence qui montre les effets pervers de ces contacts, nommément au niveau de la prévalence, fréquence et gravité des comportements délinquants. Ces ambivalences nous ramènent à des questions fondamentales : qu’est-ce que, en fait, l’éducation au droit, quels sont les moyens opératoires et le temps adéquat pour sa mise en place ?

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Notes

(1) Université Lusíada Norte, Faculté de Droit, Centro de Estudos Jurídicos, Económicos e Ambientais (CEJEA) et Centro de Investigação Interdisciplinar da Escola de Criminologia - Crime, Justiça e Segurança (CJS), Porto, Portugal.

(2) Université du Porto, Faculté de Droit, École de Criminologie, Centro de Investigação Interdisciplinar da Escola de Criminologia - Crime, Justiça e Segurança (CJS), Porto, Portugal.

[1] Sur le mouvement de défense sociale et l’histoire de la justice juvénile en Europe, voir le numéro spécial de Déviance et Société, 2002, 26(3).

[2] D’après Gersão (1996, p. 70), le Portugal peut être considéré comme « l’État où ce modèle a été porté à ses conséquences les plus extrêmes ».

[3] Il a été estimé qu’en dessous de cet âge, l’infraction doit être considérée au même titre que les accidents de la nature. Néanmoins, les conditions individuelles et sociales de l’enfant peuvent susciter une intervention de l’État. Dans ce cas, l’intervention doit être uniquement de nature protectrice et avoir lieu dans le cadre de la Loi de Protection.

[4] Admonestation ; interdiction de conduire des cyclomoteurs ou d’obtenir le permis de conduire ; réparation à la victime; prestations économiques ou exécution d’activités d’intérêt général ; imposition de règles de conduite; imposition de devoirs; fréquence de programmes de formation; suivi éducatif; placement en centre éducatif.

[5] Avant les modifications introduites à la LTE par la loi n° 4/2015 du 15 janvier, le régime fermé était applicable aux jeunes âgés de plus de 14 ans.

[6] Originalement, la durée minimale de l’internement en régime ouvert et semi-ouvert était de 3 mois et de 6 mois pour le régime fermé.

[7] Avant l’altération de 2015, dans ces situations, le tribunal avait la possibilité de remplacer la mesure non-institutionnelle par l’internement en centre éducatif pendant quelques fins de semaine. Cette mesure a été supprimée.

[8] La LTE a suivi les critères établis par la procédure pénale en ce qui concerne la légitimité de poursuivre l’action publique. La procédure pénale fait la distinction entre les crimes « publics », « semi-publics » ou « privés ». Pour les crimes classifiés de « publics », la procédure pénale commence après la connaissance du crime, indépendamment de la volonté de la personne offensée. Pour les crimes « semi-publics » ou « privés », l’exercice de l’action pénale est subordonné au fait qu’auparavant la partie lésée ou offensée par le délit ait déposé une plainte. Pour les crimes « privés » s'ajoute la nécessité de présenter une accusation privée à la fin de la phase d'enquête. Cette classification repose, soit sur la gravité de la criminalité en question, soit sur la considération des intérêts de la victime. Le fait que la majorité de la criminalité commise par les mineurs (vols, vols avec violence, dommages, agressions simples) appartient aux deux dernières catégories a été entendue comme étant à la base d’une partie significative des classements sans suite. Ce fait a été entendu comme ouvrant la porte au sentiment d’impunité et conséquemment à une croissante probabilité de répétition des méfaits. En 2015, cette disposition a été modifiée.

[9] Estatísticas da Justiça, Gabinete de Estudos e Planeamento/Ministério da Justiça et Direção Geral da Política de Justiça (http://www.dgpj.mj.pt/sections/estatisticas-da-justica).

[10] Les données entre 2007 et 2009 ne sont pas disponibles.

[11] Par comparaison avec l’application de la mesure aux mineurs délinquants avant la réforme.

[12] Concrètement en tant qu’élément privilégié d’observation du mineur et élément qui introduit une dimension de consensus et de pacification sociale, en renforçant les objectifs de protection de la société.

[13] La procédure ne serait pas compatible avec le statut d’assistant ; l’option par la non adhésion de l’indemnisation civile ; le consentement de la victime est obligatoire seulement dans les cas qui incluent une réparation en son bénéfice ; la participation de la victime à la procédure doit être décidée en fonction de l’intérêt du mineur.

[14] OUTinOUT (Good practices and innovation in educational intervention for minors in penal context) - EUROPEAN COMMISSION JUST/2011-2012/JPEN/AG - Criminal Justice.

[15] Les rapports se réfèrent à la période 2011-2015.

[16] PORDATA – Base de dados sobre Portugal contemporâneo, Fundação Francisco Manuel dos Santos, https://www.pordata.pt/

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