Insaniyat N°s 69-70 | 2005 | Les migrations – vues du Sud| p.25-44| Texte intégral
Dynamics of policy and citizenship rights: case of Ecuadorian and Moroccan migrants in SpainFrom the strong idea that each immigrant is an emigrant and based on an approach of multi-local ethnography of the type “follow the thing” and “follow the biography”, the proposed article studies the migrant as a subject in a paradoxical position, between a double absence and a double presence policy. From debates on voting rights in Spain, in Ecuador and in Morocco, the article analyzes the way political elites think and justify the political citizenship of the migrant. These principles of citizenship at the official level were confronted with the experiences of six migrants who gained visibility in the political space. This “living citizenship” perspective shows that no hasty conclusions should be drawn on political citizenship based alone on the clues of democracy. Experiences show that there are many facets to the individual feelings about the power to influence politics. From a methodological point of view, the article questions the place and the position of the researcher coming from a European country, in the face of the challenges of conducting interviews and multi-local investigation. |
Esther MIKUSZIES: Université de Kassel, Département de sciences politiques, Allemagne
Introduction
« Nous ne pouvons voter ni ici, ni là-bas », a déploré le représentant d’une association de migrants marocains dans un entretien à Madrid en 2009.[1] Bien qu’en Espagne la cohésion sociale soit construite autour de l’idée égalitaire du vivre ensemble (« convivencia »), dans les faits, la pratique citoyenne montre que les migrants sont traités comme sujet légal de manière inégale selon leur origine et leur culture. Suite à la signature d’un accord de réciprocité, les Équatoriens résidant en Espagne peuvent non seulement participer aux élections dans leurs pays d’origine, mais aussi aux élections locales en Espagne. Entre 2006 et 2013, ils ont pu participer à neuf scrutins équatoriens et pour la première fois en 2011, pour ceux qui avaient une résidence d’au moins trois ans, ils ont eu l’occasion de se rendre aux urnes pour les élections locales en Espagne. Par contre, les immigrés marocains déploraient de ne pouvoir voter nulle part[2].
L’inégalité légale entre les différents groupes selon leur origine paraît injuste et m’a amenée à suivre les traces de la citoyenneté politique dans deux constellations de mobilité : Équateur – Espagne – Maroc. En tant que sujet partagé entre la double absence et la double présence politique, le migrant est assujetti à deux souverainetés : celle du pays d’accueil et celle du pays d’origine, qui lui offrent la possibilité d’agir sur le plan politique, dans les deux pays en même temps. Pour analyser ce type de situation, j’ai mis en œuvre les principes méthodologiques « follow the thing » et « follow the biography », de l’anthropologue G. Marcus, qui invitent à étudier les phénomènes multi-locaux[3]. Pour comprendre les dynamiques de citoyenneté politique dans la migration, j’ai suivi une démarche qui se veut en même temps comparative et transnationale et qui rend visible diverses liaisons entre les différentes locations (« multi-sited ») et échelles (« multi-scaled »). Quoiqu’il soit impossible de m’émanciper entièrement de ma position en tant que doctorante européenne, cette approche m’a contrainte à changer de perspective, à me mettre à la place des acteurs dans trois pays et a donc contribué à atténuer le risque d’européocentrisme.
Figure 1 : Les constellations de mobilité : Équateur – Espagne – Maroc
Source : www.freevectormaps.com
La période d’enquête de mon étude porte sur la décennie 2000-2010, période durant laquelle le droit de vote des étrangers a été discuté en Espagne, en Équateur et au Maroc. À partir des débats qui portaient sur les droits de vote et ses modalités, c’est-à-dire le droit de vote des étrangers en Espagne et le vote à distance au Maroc et en Équateur, j’ai voulu comprendre comment les élites politiques pensent et justifient la citoyenneté politique du migrant. Dans les trois pays, les conceptions et les pratiques divergent.
En Espagne, la loi sur la citoyenneté est restrictive car elle prévoit l’accès privilégié à la nationalité espagnole aux nationaux venant des pays latino-américains[4]. A l’inverse, l’État équatorien proclame : « Nous sommes tous des migrants », ce qui incite la chercheuse Ana Margheritis à classer le pays comme un exemple de transnationalisme voulu par l’État depuis que le président élu en 2006, Rafael Correa, a adopté les revendications morales du migrant[5]. Enfin, pour le Maroc, E. Østergaard-Nielsen considère ce pays comme un exemple de transnationalisation menée par une autocratie libérale où les associations de migrants et les représentants de l’État interagissent dans l’espace transnational pour défendre leurs intérêts et asseoir leur pouvoir[6].
L’étude porte sur deux groupes d’immigrés, les plus nombreux parmi les non-européens, qui sont perçus différemment dans la société espagnole. En 2011, les Marocains et les Équatoriens représentaient respectivement 13,6%, 6,4% de l’ensemble des immigrés en Espagne[7]. Mon analyse s’appuie sur 80 entretiens menés en 2009 et 2010 auprès d’experts dans les trois pays[8].
Par ailleurs, notre corpus est constitué des textes, pour la plupart juridiques portant sur le droit de vote, par exemple, des bulletins officiels, des avis de juristes, des propositions et des textes de loi, des commentaires (historiques) de loi, les articles de presse et mes observations consignés dans mes carnets de recherche.
L’objectif de cet article est également de susciter l’intérêt de jeunes chercheurs autour des défis et des possibilités de l’approche multi-locale dans les recherches sur la migration et de contribuer à ouvrir un nouveau champ de réflexion sur les frontières de la citoyenneté politique dans l’espace transnational. Avec la notion de citoyenneté politique[9], je veux attirer l’attention sur la participation politique et l’appartenance politique des titulaires d’un statut ‹assuré›, c’est-à-dire un titre de séjour permanent ou la double nationalité.
Entre double absence et double présence politique : l’actualité d’Abdelmalek Sayad
Le migrant se trouve dans une contradiction spatiale que le sociologue Abdelmalek Sayad décrit dans son ouvrage La Double Absence. Des illusions de l’émigré aux souffrances de l’immigré. Dans la société d’accueil, il vit en tant que travailleur en situation de vulnérabilité et dans le même temps, il est physiquement absent dans la société d’origine[10]. La tragédie de la double absence se résume au fait que l’émigré n’est jamais entièrement exclu de la société d’origine et n’est jamais totalement intégré à la société d’accueil non plus. Il mène une existence provisoire de l’« entre » ; accepté comme une main d’œuvre utile économiquement dont l’État peut se débarrasser à tout moment.
À plus d’un titre, le monde migratoire d’aujourd’hui est post-sayadien, ce qui impose, selon Stéphane Dufoix, la mise en œuvre d’une science de la double présence[11]. La double absence, constatée par Sayad, reste toujours valide, mais la double présence « fait apparaître un deuxième pôle, établissant ainsi la possibilité de moduler la prise en compte de la réalité le long de ce nouvel axe. […] la double présence ne se veut pas une description réaliste : aucun migrant, aucun individu, ne possède le don d’ubiquité physique »[12]. De nos jours, le migrant est présent dans l’espace politique du pays d’origine et du pays de résidence. Les gouvernements lui confèrent des droits politiques et civiques comme le droit de vote ou la possibilité d’être visible dans un conseil consultatif. À l’échelle individuelle, le migrant s’articule et prend la parole en tant que sujet nomade même dans le cas où son existence est rendue illégale par un statut légal[13]. La double présence ne décrit ni la fin de l’isolement et de l’exclusion dans la vie quotidienne du migrant, ni la figure de transmigrant politique. Le transnationalisme politique du migrant couvre, selon J.-M. Lafleur et M. Martiniello, « toute activité politique d’une personne qui réside principalement à l’extérieur de son pays d’origine et qui cherche à accroître son influence et son poids politique, à l’échelle individuelle ou collective, dans le pays de résidence ou dans l’État où le migrant est attaché » (Lafleur et Martiniello, 2009, p. 9). En réalité, peu de migrants maintiennent des relations politiques durables et intenses dans plus d’un pays.
Tableau 1: Localisations et appartenance selon Michael Collyer 2013
Penser la double absence et la double présence en tant que deux pôles signifie qu’il faut étudier toutes les dynamiques d’inclusion et d’exclusion de la citoyenneté politique. Le chercheur en migration M. Collyer propose – avec une grande portée heuristique – de distinguer entre le ‹nous, ici›, le ‹nous, là-bas›, le ‹eux, là-bas› et le ‹eux, ici›, ce qui permet de rendre visible la polarité entre double absence et double présence dans la constellation de mobilité[15]. La double présence n’est pas synonyme de cosmopolitisme ; au contraire, elle rappelle le fait que la pratique de citoyenneté reste le privilège du citoyen national résidant sur un territoire limité. Tandis que le « nous, ici » et le « eux, là-bas » marquent une disjonction exclusive qui est le fondement de la nationalité et de la mobilité d’où découlent les catégories du « eux, ici » et du « nous, là-bas ».
Sayad était en avance sur son temps alors que la plupart des chercheurs des pays occidentaux (Europe, Amérique du Nord) négligeaient les liens et les interdépendances dans les pays d’origine, en clair : la multi-localité. Avec l’avènement des études transnationales, la pensée de Sayad reste de grande valeur pour les études de la migration. Le migrant vit encore et toujours l’exclusion de constellations postcoloniales où les relations de pouvoirs sont asymétriques.
Défis et avantages de la recherche multi-locale
Sayad a réalisé une démarche qui fait penser à l’ethnographie multi-locale de Marcus (2011 ; 1995) dont la portée est d’atténuer les risques suivants dans la recherche sur la migration : le nationalisme méthodologique, le groupisme et l’ethnocentrisme[16]. L’anthropologue Marcus invite les chercheurs à devenir mobiles pour suivre (‹follow›) les personnes, les choses, les métaphores, les histoires, les biographies ou les conflits à des endroits différents[17].
Les défis et les chances qu’implique la démarche multi-locale ont été peu étudiés alors qu’elle a été mise en œuvre à différentes reprises dans des études de cas portant sur la citoyenneté politique dans la migration[18]. Cette démarche peut forcer le chercheur à changer de perspective, à permuter la position du « nous, ici » avec celle du « eux, là-bas » et à le mettre à la place de l’autre. Cela relativise les tendances ethnocentriques dans la mesure où le Maroc et l’Équateur sont deux pays parmi d’autres d’où sont originaires les citoyens émigrés en Espagne, l’Espagne est une destination parmi d’autres où les Marocains et Équatoriens se sont installés. À la différence de la comparaison, la recherche multi-locale ne cherche pas uniquement à additionner les cas, mais à étudier les dynamiques et la connexité de différents sites et échelles.
En plus des défis qui se posent quand un chercheur venant d’un pays du Nord fait des recherches dans un pays du Sud, il est important de réfléchir à ceux qui surgissent lors de recherches dans des contextes et avec des langues moins familiers.
La recherche multi-locale est trop souvent un privilège de chercheurs appartenant aux universités des pays occidentaux, dotés d’une bourse bien financée et titulaires d’un passeport européen facilitant une libre circulation à l’échelle mondiale. Les jeunes chercheurs équatoriens et marocains ont évoqué leurs positions moins favorables (ne serait-ce que l’obtention d’un visa) pour pouvoir mener de telles recherches. Par ailleurs, durant mes séjours de recherches de courte durée, j’ai acquis un savoir qui reste superficiel par rapport au savoir local. Si les études postcoloniales critiquent la division injuste du travail scientifique à l’échelle globale[19], c’est aussi le cas pour la démarche multi-locale qui est coûteuse et de longue durée. Dans l’idéal, elle se réalise avec un groupe de recherche composé de chercheurs venant de différents pays.
Il est également nécessaire de problématiser ma position en tant que chercheuse venant d’un pays européen, car j’ai conduit les entretiens dans des contextes moins familiers avec des langues qui n’étaient pas ma langue maternelle. À plusieurs occasions durant mes enquêtes, je ne savais pas comment réagir et interagir de manière convenable : au début de chaque séjour de recherche, les tabous anticipés et les possibles limites de ce qui est accepté dans l’espace public m’ont ébranlée. Par la suite, j’ai opté pour un guide d’entretien ouvert sans évoquer certains sujets comme l’intégrité territoriale du Maroc, préférant attendre que les enquêtés eux-mêmes fassent référence au sujet.
Pour valider les réponses, j’ai créé un groupe de discussion interdisciplinaire et multilinguistique avec de jeunes chercheurs, leur soumettant les différents entretiens réalisés. Méthode me permettant de prendre du recul par rapport aux réponses des enquêtés et des idées exprimées.
Tandis que l’analyse de contenu qualitative nous fournit des résultats superficiels, la procédure de reconstruction facilite la compréhension du sens du mot dans toute sa finesse, ce qui est précieux surtout lorsque l’on travaille dans des contextes et avec des langues moins familiers[20]. Par conséquent, il est important que l’interviewé ait l’occasion de développer le sujet et de s’exprimer dans sa propre langue. En ce sens, il était aussi fructueux d’avoir conduit les entretiens dans une langue qui m’était moins familière. Malgré le risque de mal interpréter les entretiens, la communication était plus riche que lors d’entretiens entre deux locuteurs ayant la même langue de naissance. A plusieurs reprises, voyant mon regard interrogateur, mes interlocuteurs ont approfondi, sont entrés dans les détails en me demandant « est-ce que tu me comprends ? », « est-ce que tu sais qui est… ». En voulant s’assurer que je comprenais leurs propos, ils ont commencé à m’expliquer « leur » monde. Cela valait la peine de faire confiance aux enquêtés qui ont apporté des rectifications essentielles et m’ont signalé, par exemple, que ma question sur le double lien dans le pays de résidence et le pays d’origine était européocentrique.
La procédure de suivre (‹follow›) le sujet ne se limite pas à la présence sur le terrain, mais porte sur la recherche dans son ensemble, c’est-à-dire sur les observations faites à distance, avant et après les séjours de recherche. Après le retour, le défi principal a consisté à mettre en relation les données que j’ai collectées dans les trois pays.
Les constructions légales de citoyenneté politique en Équateur – Espagne – Maroc
Selon l’article 13.2 de la Constitution espagnole, seul peut voter le migrant qui est citoyen d’un pays ayant signé un accord avec l’Espagne garantissant le droit de vote aux citoyens espagnols résidant sur son territoire. Ce principe constitutionnel m’a incitée à « suivre » la piste des citoyennetés politiques au sein des constellations Équateur – Espagne – Maroc pour enrichir les études sur le droit de vote en Espagne[21] et ouvrir des perspectives pour les pays d’origine. Même si les autres Etats n’ont réformé ni leur constitution, ni le droit de vote après que l’Espagne les a invités dans le cadre d’une initiative diplomatique en 2009 à signer un accord bilatéral, cette démarche a ouvert le débat dans les pays d’origine sur la citoyenneté de résidence[22].
La citoyenneté politique du migrant en Espagne : entre inclusion territoriale et sélection ethnique
Initialement prévus pour protéger les émigrés espagnols à l’étranger, les effets du principe constitutionnel de réciprocité se sont inversés au moment où l’Espagne est devenue un pays d’immigration. L’intention initiale des pères fondateurs de la Constitution était de protéger les Espagnols résidant à l’étranger et de valoriser leur lutte démocratique sous le franquisme. Ils ont cependant mis le droit de vote sous réserve de réciprocité parce que les revendications marocaines concernant les enclaves de Ceuta et Melilla les ont inquiétées[23].
Le régime de citoyenneté préférentiel, pourtant visible à travers les modalités d’accès à la nationalité espagnole, n’a guère été évoqué dans les débats publics[24]. Les militants du droit de vote d’« A qui vivo, à qui voto » (ici on vit, ici on vote) ont critiqué la réciprocité comme source de discrimination sans pour autant avoir réussi à imposer la revendication du droit de vote pour tous les résidents et à tous les niveaux du système politique.
En 2008, le gouvernement de José Luis Zapatero a mandaté un négociateur pour convenir de la réciprocité avec les États « avec lesquels nous avons d’importants liens historiques, politiques culturels »[25]. Un projet de loi prévoyait qu’un accord bilatéral de droit de vote devait au préalable être ratifié par le parlement espagnol qui devait juger si les élections dans le pays contracté ont lieu à des conditions équivalentes. Cela mettait les parlementaires espagnols dans le rôle de juge sur le droit de vote ailleurs dans le monde, tandis que la responsabilité pour l’inclusion politique des immigrés en Espagne a été partiellement conférée à leurs pays d’origine.
Finalement, les députés qui ont défendu une position généreuse l’ont emporté sur ceux qui ont voulu restreindre l’option de réciprocité uniquement aux États jugés démocratiques. La majorité des députés s’est prononcé contre l’idée que l’indice démocratique d’un État soit le critère juste pour décider de l’inclusion politique du migrant, car cette norme punit doublement le migrant venant d’un régime dictatorial ou d’une région en guerre civile où il n’y a pas d’élections ou pas d’élections reconnues comme démocratiques[26].
De manière générale, le droit de vote des étrangers à l’échelle locale en Espagne sert d’exemple soulignant deux dynamiques simultanées, apparemment contradictoires. D’un côté, il s’agit de séparer l’appartenance politique du lieu d’origine, donc la citoyenneté de résidence qui a été célébrée comme la fin de la trinité sacrale entre État, nation et territoire. D’un autre côté, la réciprocité ne rompt pas avec la transmission héréditaire de l’appartenance politique par le hasard de la naissance. Par-dessus tout, c’est par le principe de réciprocité qu’une partie de la responsabilité pour l’inclusion du migrant en Espagne est transférée au pays d’origine comme nous allons le voir dans les parties suivantes.
Équateur : « Nous sommes tous des migrants » - la citoyenneté universelle dans la « révolution citoyenne »
L’Espagne a invité l’Équateur à signer un accord de réciprocité au moment où le président nouvellement élu, Rafael Correa, a proclamé la « révolution citoyenne » en lançant un débat général sur la citoyenneté et le vivre ensemble dans le monde de la migration. Dans un premier temps, le vote des étrangers en Equateur a été proposé à l’Assemblée constituante dans l’intention de rendre possible le vote des Équatoriens en Espagne. Pour lapremière fois dans l’histoire équatorienne, la Constitution de 2008 prévoit dans l’article 63 le droit de vote des étrangers.
La plupart des interviewés des associations de migrants et des chercheurs consultés par l’Assemblée constituante et par la SENAMI ont fait référence à l’idée générale de citoyenneté universelle, à la figure du transmigrant et à la famille transnationale pour justifier l’idéal du double vote du migrant, c’est-à-dire le vote des Équatoriens d’ailleurs et l’immigré étranger en Équateur, ici et là-bas. Au-delà, il faut constater que la différence entre « nous/eux » et « ici/là-bas » se dissout dans le discours officiel dans la mesure où les idées discutées dans la théorie postcoloniale et le concept indigène de « bonne vie » (sumak kawsay) confluent vers la revendication pour la citoyenneté universelle. « Nous ne sommes pas ‹ici› ou ‹là-bas›, mais nous sommes présents dans le monde entier »[27] constate le porte-parole d’une association à Quito pour affirmer que l’expérience de mobilité a un caractère transnational. C’est par la devise officielle « nous sommes tous des migrants » que les élites gouvernementales ont conféré au migrant un rôle de protagoniste dans la révolution citoyenne.
Près d’un demi-million de personnes avaient été forcées de quitter la république andine en peu de temps suite à la crise financière et politique de la fin des années 1990[28]. Cette expérience est durablement ancrée dans les esprits de tous les experts interviewés qui ont migré eux-mêmes ou ont de la famille émigrée. Pour de nombreux élus de l’Assemblée constituante, la mobilité est devenue une forme de normalité et non plus une exception à la vie sédentaire.
Quelques-uns ont, d’ailleurs, lutté pour les droits du migrant – « eux, ici » et « nous, là-bas ».
Les élites politiques ont réinterprété le principe de réciprocité hors du contexte espagnol en se référant à une idée de réciprocité plus universelle. Ils l’ont introduit comme obligation morale des pays d’accueil envers le migrant et mentionné dans le Plan National pour le Développement Humain dans les Migrations 2007-2010[29].
Aux yeux de la majorité des interviewés, la réciprocité est en même temps l’obligation propre et l’obligation de l’autre à gérer les politiques migratoires de manière responsable et durable comme s’il s’agissait d’un impératif catégorique. Selon une députée, ce principe oblige l’homme à appliquer la solidarité mondiale selon la devise « je te donne tes droits et toi, tu me donnes mes droits aussi »[30]. La générosité des Equatoriens devient la référence pour revendiquer que les États-nations respectent les droits de l’homme et signent la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Cette convention, élaborée sous l’égide de l’ONU, est entrée en vigueur en 2003 et s’adresse directement au migrant en tant que personne en lui reconnaissant des droits. Elle n’a été signée ou ratifiée que par une quarantaine de pays, essentiellement des pays d’émigration. Aucun pays européen ne l’a ratifiée[31].
En même temps, parler de la réciprocité a été l’occasion pour certains militants des droits des migrants de confronter les valeurs officielles avec la réalité. Procédant à une autocritique, les militants ont mis en lumière le racisme en Équateur vécu par les étrangers, les indigènes et les Afro-équatoriens ainsi que leur exploitation sur le marché de travail[32].
En général, l’inclusion politique du migrant a été justifiée par ses mérites économiques et politiques. L’émigré a été valorisé en tant qu’acteur politique précieux pour le développement du pays entier. La porte-parole d’une association de migrants a constaté : « Après dix ou quinze ans à l’étranger, ils ont une perspective que je trouve très importante. Après tout ce qui s’est passé ici, les gens sont devenus sceptiques. Leur perspective est différente de celle de l’Équatorien qui vit dans ce pays. Si nous unissons ces deux perspectives, cela nous aidera à enrichir la vie de chacun de nous »[33]. Les experts ont valorisé positivement l’expérience de mobilité car cette expérience rendrait le migrant plus créatif et plus critique envers les élites politiques jugées corrompues et clientélistes. On retrouve un paradoxe au niveau des discours. D’un côté, le discours officiel du président Correa qui se veut anti-néolibéral et anticolonial se refusant à valoriser l’homme à partir des critères économiques ; d’un autre côté, les migrants interviewés et les élites politiques qui ont justifié l’inclusion politique du migrant par son utilité économique pour le pays.
Maroc : valeur démocratique de la citoyenneté politique du migrant
Contrairement au cas équatorien, le Maroc et l’Espagne ne se sont pas accordés sur la réciprocité. L’éventuelle inclusion politique des Marocains résidant en Espagne fait l’objet de jugements mutuels entre un État marocain dont le concept de nation est fondé sur la ‹bay’a› (l’allégeance au roi) et un État espagnol qui identifie le droit de vote à l’échelle locale à partir du critère de réciprocité. Si les élites interviewées dans les deux pays ont cherché à comprendre le pourquoi de l’exclusion politique des Marocains en Espagne, elles l’ont fait en jugeant de manière réciproque la qualité démocratique de gouvernance et des principes de citoyenneté au Maroc.
En Espagne, les experts du droit constitutionnel ont classé le Maroc parmi les pays qui réservent le droit de vote à leurs nationaux[34]. Une partie des juristes et chercheurs à Madrid a mis l’accent sur le lien de loyauté exclusif entre le roi marocain et ses sujets, la ‹bay’a›, qui ne serait pas compatible avec l’idée de citoyenneté de résidence, et donc avec la réciprocité espagnole[35]. Bien que les autorités marocaines, après des décennies de contrôle, aient commencé dans les années 1990 à courtiser les migrants en tant que « Marocains résidents à l’étranger » (désignés par le sigle MRE), les experts en Espagne ont conservé l’image d’un monarque qui préfère des sujets « monogames et abstinents » aux citoyens s’impliquant dans l’espace politique[36]. L’image de déficit démocratique que les experts ont transférée du système politique au groupe du migrant venant du Maroc fait dire à la philosophe H. Béji « la carence démocratique nous prive de notre identité humaine : hier, j’étais un « sauvage », aujourd’hui, je suis un ‹non démocrate› »[37].
Des experts enquêtés, appartenant aux institutions politiques à Rabat, ont construit une image complexe du migrant qu’ils décrivent à la fois comme acteur précieux pour son savoir et sa contribution économique, mais aussi comme un travailleur vulnérable depuis la crise financière en Europe et comme musulman qui est facilement influençable. Ils projettent ainsi sur les Marocains émigrés l’image coloniale de la différence entre la population rurale considérée comme rétrograde et les élites urbaines pour justifier le besoin de contrôler cette population.
Par contre, les experts dans les associations de migrants et dans les institutions politiques au Maroc ne considèrent pas que le principe de réciprocité en Espagne soit légitime et ils le considèrent comme « une anomalie légale qu’il faut corriger »,[38] l’exception européenne.
Questionnés sur la réciprocité en Espagne, les enquêtés dans les diverses institutions politiques à Rabat ont souligné que les Marocains résidant en Europe sont depuis longtemps des électeurs, et candidats de partis politiques, c’est-à-dire des citoyens européens actifs à tous les niveaux dans l’espace politique.[39] En se référant à l’exercice du droit dans les pays européens considérés plus avancés par rapport à l’Espagne comme les Pays-Bas ou la Belgique, les interviewés à Rabat ont estimé que le vote des Marocains étrangers et naturalisés était la normalité. L’expert au ministère chargé des Marocains Résidant à l’Étranger et des Affaires de la Migration a expliqué que « dans d’autres pays […] les Marocains, même étrangers, peuvent participer aux élections locales. C’est un acquis énorme pour ces citoyens. Ils n’hésitent pas en faire usage pour leur bien »[40].
En occultant l’absence politique des Marocains dans les espaces politiques en Europe, une partie des enquêtés à Rabat a idéalisé l’image du Marocain ayant une forte présence politique en Europe, souvent sans faire la différence entre le vote local des étrangers qui existe dans 15 des 28 États membres de l’Union Européenne[41] et le vote et les candidatures des Marocains naturalisés dans un pays européen. De manière générale, pour les experts à Rabat, l’exclusion politique des Marocains dans les pays d’accueil ne peut pas incomber au Maroc.
L’argument de considérer l’émigré marocain comme un acteur politique, ayant « dans la vie politique du pays d’accueil » [42], se retrouve également dans le discours sur le droit de vote des émigrés au Maroc. Selon la Constitution de 1996 et la loi électorale, les « citoyens marocains résidant hors du territoire du Royaume » ont le droit de vote à condition de le faire dans un bureau de vote au Maroc. Pourtant, en 1984, Hassan II avait créé cinq circonscriptions électorales législatives à l’étranger : Paris, Lyon, Bruxelles, Madrid et Tunis. Mais elles ont été tacitement abolies après la législature de 1992.
Cependant, les militants des droits des migrants n’ont pas cessé de revendiquer le droit de vote immédiat des citoyens marocains à l’étranger, ce que le chercheur et militant du droit de vote A. Belguendouz a documenté dans le « Plaidoyer pour les citoyens marocains à l’étranger »[43]. En 2005, Mohamed VI reconnaît « les Marocains résidant à l’étranger » comme « atout majeur pour le nouveau Maroc » et annonce qu’ils bénéficieront d’une représentation politique dans les deux Chambres, le droit de vote actif et passif et la création d’un Conseil Supérieur de la Communauté marocaine à l’étranger sous sa présidence[44]. Deux ans plus tard, il a désigné 37 membres du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME) parmi « les personnalités marocaines connues, en terre d’immigration, pour leur haute moralité et leur rattachement aux constantes et aux valeurs sacrées de la Nation […] »[45]. Selon le président du CCME, « la citoyenneté, ce n’est pas nécessairement et uniquement être député, mais un projet exigeant un débat sensible au contexte respectueux de chaque pays »[46]. Convaincu qu’il n’y a pas de recette miracle pour la participation politique des « communautés marocaines à l’étranger », il a proposé de chercher en plusieurs étapes un modèle adéquat pour le contexte marocain : avant d’ouvrir le débat au public, ce sont les experts qui devraient « mobiliser la connaissance académique disponible » afin de prendre aussi en compte les attentes dans les pays d’accueil.
Par contre, les militants du droit de vote se sont référés à l’égalité citoyenne, l’idée d’une vie digne et le constat que le migrant est concerné par les décisions politiques au Maroc pour revendiquer le vote à distance immédiate[47]. Ils ont critiqué les élites politiques qui cherchent à retarder ce droit de vote en prétextant l’insuffisance de réflexion[48]. Cette attitude des élites politiques fait incontestablement partie de la persistance autoritaire[49].
De manière générale, l’analyse de la constellation hispano-marocaine montre que l’évaluation de la qualité démocratique joue un rôle important pour préparer l’inclusion politique dans le droit.
Conclusion
Dans le chapitre « exister, c’est exister politiquement », Sayad défend la nécessité du droit de vote au moins dans les instances où se jouent les intérêts de la vie quotidienne et de la vie morale. Pourtant, il se questionne sur son efficacité. « Même si ce droit de vote était reconnu et existait formellement […], suffirait-il à bannir les inégalités et à réparer les injustices dont sont victimes les immigrés exclus ou éloignés de la décision politique ? Il ne suffirait pas si toutes les conditions sociales préalables, nécessaires pour le rendre effectif et pour lui conférer son efficacité, continuaient à manquer. Mais ces mêmes conditions pourraient-elles se réaliser en l’absence de ce droit fondamental et indépendamment de celui-ci ? Ceci ne se peut sans cela »[50].
En conclusion de cet article, j’évoquerai la confrontation que j’ai réalisée entre les principes officiels de citoyenneté politique du migrant avec les expériences de six migrants qui ont acquis une visibilité dans l’espace politique[51]. La perspective de ‹citoyenneté politique vécue› pointe du doigt ce qui reste invisible en étudiant l’échelle officielle : elle montre que ce serait aller trop vite en besogne que de conclure à la citoyenneté politique sur la base de l’indice de démocratie d’un pays.
Les trois migrants marocains ont eu le sentiment de pouvoir agir sur le plan politique comme l’affirme l’ancien député des Marocains vivants à l’étranger qui se sentait compétent au sein des réseaux du makhzen, c’est-à-dire par rapport à ceux qu’ils nommaient « fils du roi », « cousins du roi » [52].
Mais l’analyse de la « citoyenneté vécue » montre aussi les handicaps dont sont porteurs les migrants dans l’exercice de leurs droits comme le rapporte une militante issue de la population quichua qui a lutté pour la défense des endettés lors de la crise financière et immobilière. Les banquiers exerçaient des pressions, même sur les double-nationaux, les obligeant à renoncer à leurs droits pour éviter des poursuites : « Tu as la double nationalité, signe ici, renonce à ta double nationalité et rends ton appartement ! Tu me montres ton billet d’avion pour le retour, tu rentres chez toi et j’annule ta dette »53.
Le fait que beaucoup d’immigrés aient perdu leur travail suite à la crise économique et financière mondiale en 2008 rappelle ce que Sayad a écrit sur les droits du migrant en tant que chômeur : « c’est le droit d’exister, même en tant que chômeur, et comme tout autre chômeur, sans se voir rappelé à sa condition de travailleur avant même celle d’être humain ; sans se voir renvoyé à une quelconque légitimité ou origine. C’est là que se situe la frontière qui sépare les uns des autres, ceux qui ont un ‹quelque part› où être renvoyés, en fait ou en droit, et ceux que l’on ne peut renvoyer, ni en fait ni en droit, parce qu’ils sont chez eux »[53].
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Notes
[1] Entretien réalisé le 2 avril 2009 dans le local de l’association Ibn Battuta à Madrid.
[2] Le droit de vote des marocains résidant à l’étranger ainsi que la possibilité d’un droit de vote des étrangers sur la base de la réciprocité se trouvent dans les articles 17 et 30 de la Constitution marocaine de 2011.
[3] Marcus, G. (2011), « Multi-sited Ethnography: Five or Six Things I Know About It Now », in Coleman, Simon et Hellermann, Pauline (dir.), Multi-Sited Ethnography. Problems and Possibilities in the Translocation of Research Methods, New York, Routledge; Marcus, G. (1995), « Ethnography in/of the World System: The Emergence of Multi-Sited Ethnography », Annual Review of Anthropology, no 1.
[4] Howard, M.-M. (2009), The Politics of Citizenship in Europe, Cambridge, New York, Cambridge University Press, p. 94 et suivantes.
[5] Margheritis, A. (2011), « Todos Somos Migrantes » (We Are All Migrants): The Paradoxes of Innovative State-led Transnationalism in Ecuador », International Political Sociology, no 5.
[6] Østergaard-Nielsen, E. (2012), « Political Liberalization and Contestation of Transnational Relations between Morocco and Moroccan Migrants in Spain », in Lyons, T. et Mandaville Peter, G. (dir.), Politics from Afar: Transnational Diasporas and Networks, New York, Columbia University Press.
[7] Instituto Nacional de Estadística (INE) (2011), Padrón, Población por Municipios 2011, cf.: http://www.ine.es/inebmenu/mnu_cifraspob.htm, date de consultation : 28 juin 2016.
[8] Par « experts », j’entends des personnes occupant des postes officiels, en lien avec la question du droit de vote, comme les porte-paroles dans les associations de migrants, les élus des commissions de suffrage, des commissions constitutionnelles ou d’autres institutions politiques. En plus des espaces où agissent les associations de migrants, le droit de vote a été discuté par les experts du Parlement espagnol, la commission de suffrage et des juristes. En Équateur, le droit de vote a été débattu par les membres de la commission constitutionnelle de 2007-2008, des chercheurs invités, les députés des circonscriptions électorales à l’étranger et par le Secretaría Nacional del Migrante (SENAMI). Au Maroc, je me suis entretenue avec des membres du groupe ‹droits politiques et citoyenneté› du Conseil de la communauté marocaine à l’Étranger (CCME), avec des experts des institutions s’occupant des émigrés, comme la Fondation Hassan II pour les Marocains Résidant à l’Étranger, avec des chercheurs engagés politiquement et avec les militants du droit de vote du mouvement Daba 2012 agissant en dehors du CCME.
[9] Janoski, T., Gran, B. (2002), « Political Citizenship: Foundations of Rights », in Isin Engin F., Turner Bryan S. (dir.), Handbook of Citizenship Studies, Los Angeles, SAGE.
[10] Sayad, A. (2014), La double absence. Des illusions de l’émigré aux souffrances de l’immigré, Paris, Seuil.
[11] Dufoix, S. (2010), « Introduction/Un pont par-dessus la porte. Extra territorialisation et transétatisation des identifications nationales », in Dufoix, S. (dir.), Loin des yeux, près du cœur. Les États et leurs expatriés, Paris, Presse de Sciences Po.
[12] Dufoix, S. (2010), « Introduction/Un pont par-dessus la porte. Extra territorialisation et transétatisation des identifications nationales », in Dufoix, S. (dir.), Loin des yeux, près du cœur. Les États et leurs expatriés, Paris, Presse de Sciences Po, p. 28.
[13] Rigo, E. (2011), « Citizens despite borders. Challenges to the territorial order of Europe », in Squire Vicky (dir.), The Contested Politics of Mobility: Borderzones and Irregularity, London, Routledge .
[15] Collyer, M. (2013), « Introduction: Locating and Narrating Emigration Nations » in Collyer Michael (dir.), Emigration Nations. Policies and Ideologies of Emigrant Engagement, New York, Palgrave Macmillan, p. 13.
[16] Wimmer, A., Glick Schiller, N. (2010), « Methodological Nationalism, the Social Sciences, and the Study of Migration. An essay into historical epistemology», in Vertovec Stephen (dir.), Theories, nos 1, London, Routledge.
[17] Marcus, G. (2011), op.,cit. ; Marcus, G. (1995), op.,cit. ; Faist, T. et all. (2013), Transnational Migration, Cambridge, Polity.
[18] Smith, M.-P., Bakker, M. (2008), Citizenship across Borders. The Political Transnationalism of El Migrante, Ithaca, N.Y., London, Cornell University Press.
[19] Ziai, A. (2012), « Postkoloniale Studien und Politikwissenschaft: Komplementäre Defizite, Stand der Forschung und Perspektiven », in Politische Vierteljahresschrift, n° 2.
[20] Kruse, J., Schmieder, Ch. (2012), « In fremden Gewässern. Ein integratives Basisverfahren als sensibilisierendes Programm für rekonstruktive Analyseprozesse im Kontext fremder Sprachen », in Kruse Jan (dir.), Qualitative Interviewforschung in und mit fremden Sprachen. Eine Einführung in Theorie und Praxis, Weinheim, Beltz Juventa.
[21] Andrès, H. (2007), Le droit de vote des étrangers. État des lieux et fondements théoriques, Thèse de doctorat d’État en Sciences politiques, Université Paris-Diderot, Paris VII; Zapata-Barrero, R. (dir.), (2009), Políticas y gobernabilidad de la inmigración en España, Barcelona, Ariel.
[22] Hammar, T. (1990), Democracy and the Nation State. Aliens, Denizens and Citizens in a World of International Migration, Aldershot, Avebury.
[23] José P. Pérez-Llorca du parti politique ‹Unión de Centro Democrático› a proposé de mettre le droit de vote de l’étranger sous la condition de réciprocité se référant à « l’existence de villes frontières au sud de l’Espagne et d’îles espagnoles qui, en ce moment, attirent l’attention de certains pays désireux d’exprimer leur africanité », Perez, V.-E., Abarca Junco, P. (1999), « Articulo 13.1 (1) », in Alzaga Villaamil, Oscar (dir.), Comentarios a la Constitución Española de 1978, Madrid, Cortes Generales, p. 205.
[24] Joppke, Ch. (2005), Selecting by Origin. Ethnic Migration in the Liberal State, Cambridge, Harvard University Press, p. 93 et suiv.
[25] BOCG, n° 224, 18 août 2010, p. 15.
[26] Un député du parti de gauche a demandé : « Pourrions-nous appliquer le principe de réciprocité strictement aux citoyens qui ne peuvent pas voter dans leurs pays d’origine ? De nos jours, un citoyen chinois ne peut pas voter dans son pays natal. Demanderons-nous non seulement qu’il ne puisse ni voter dans son pays d’origine, ni en Espagne parce qu’un Espagnol ne va jamais pouvoir voter en Chine ? » (Herrera Torres au Congreso de los diputados, 09 juin 2010).
[27] Entretien réalisé à l’association AESCO, Quito, le 24 mars 2010.
[28] Jokisch, B. (2014), Ecuador: From Mass Emigration to Return Migration?, in Migration Policy Institute (dir.), http://www.migrationpolicy.org/article/ecuador-mass-emigration-return-migration, date de consultation : 02 octobre 2015.
[29] « Las relaciones con los otros Estados se construyen con base al acatamiento a la legislación internacional, bajo el principio de reciprocidad » (SENAMI, 2007, p. 7).
[30] Entretien avec la députée pour la circonscription Europe, Océanie et Asie, Quito, le 24 mars 2010.
[31] Bielefeldt, H. (2006), « Menschenrechte ‹irregulärer› Migrantinnen und Migranten », in Alt, J., Bommes, M. (dir.), Illegalität. Grenzen und Möglichkeiten der Migrationspolitik, Wiesbaden, VS Verlag.
[32] Entretien à la SENAMI, Quito, le 16 mars 2010.
[33] Entretien à l’association AESCO, Quito, le 24 mars 2010.
[34] Santolaya Machetti, P., Díaz Crego, María. (2008), El sufragio de los extranjeros. Un estudio de derecho comparado, Madrid, Centro de Estudios Políticos y Constitucionales.
[35] Fernández Borbadillo, P. (2011), « Las alteraciones del censo electoral: el voto inmigrante », in Grupo de Estudios Estrategicos, Análisis n° 8783, http://www.gees.org/files/article/23072011083021_Analisis-08783.pdf, date de consultation : 02 octobre 2015.
[36] Entretien avec un député du Parti socialiste et militant dans l’Association des Travailleurs Marocains Immigrés en Espagne [ATIME], Madrid, 27 octobre 2016, Haas, 2007.
[37] Béji, H. (2008), Nous, décolonisés, Essai, Paris, Arléa, p. 46.
[38] Entretien avec le président d’ATIME, membre du Conseil de la Communauté Marocaine à l’Étranger (CCME), Madrid, le 23 septembre 2009.
[39] Entretien avec un responsable au ministère chargé des Marocains Résidant à l’Étranger et des Affaires de la Migration, Rabat, 26 mai 2010.
[40] Idem.
[41] Le droit de vote à l’échelle locale existe en Belgique, en Danemark, en Estonie, en Finlande, en Irlande, en Lituanie, au Luxembourg, aux Pays-Bas, au Portugal, en Suède, en Slovaquie, en Slovénie, en Espagne, en Hongrie et en Royaume-Uni, Groenendijk, 2014.
[42] Entretien avec un responsable au ministère chargé des Marocains Résidant à l’Étranger et des Affaires de la Migration, Rabat, 26 mai 2010.
[43] Belguendouz, A. (2008), Plaidoyer pour les Citoyens Marocains à l'étranger. Un combat pour les droits humains. Des Amicales…au Conseil, Salé, Beni Snassen.
[44] Discours du Roi Mohamed VI du 06. novembre 2005 à l’occasion de la « Marche Verte ».
[45] Dahir n° 1-07-208 du 21 décembre 2007 portant la création du conseil de la communauté marocaine à l’étranger, in bulletin officiel du 7 février 2008, p. 94.
[46] Entretien au CCME, Rabat, le 01 juin 2016.
[47] Daba, 2012.
[48] Entretien avec un militant de droit de vote, Rabat, 07 juin.2010
[49] Boukhars, A. (2011), Politics in Morocco. Executive Monarchy and Enlightened Authoritarianism, Londres, Routledge.
[50] Sayad, A. (2006), L’immigration ou les paradoxes de l’altérité. 2. Les enfants illégitimes, Paris, Raisons d’Agir, p. 25-26.
[51] Ces six migrants sont :
1) une députée à l’Assemblée nationale à Quito, élue pour la circonscription Europe, Océanie et Asie et ancienne présidente de l’association Rumiñahui à Quito ;
2) un ancien député marocain, entre 1984 et 1992, représentant les Marocains vivant en France ;
3) un Équatorien de Madrid qui a fait campagne pour le Parti Populaire (PP) aux élections locales de 2015 ;
4) une Marocaine qui milite pour la présidente du PP dans la région de Madrid et le Parti authenticité et modernité (PAM) au Maroc, qu’elle considère comme le « parti du nouveau roi » ;
5) une militante quechua, élue dans un conseil de quartier, qui lutte pour « un monde meilleur » et contre l’exploitation des endettés lors de la crise hypothécaire ;
6) un élu au conseil de quartier « Centro » à Madrid qui a été invité aux consultations du Conseil consultatif des Droits de l’Homme (CCDH) au Maroc pour préparer la création du CCME.
[52] Entretien avec l’ancien député au parlement marocain 1984-1992, Rabat, 31 mai 2010.
53 Entretien à l’association Coordinadora Nacional de Ecuatorianos en España, Madrid, le 04 août 2010.
[53] Sayad, A. (2006), op.,cit., p. 31.