L'action patronale maghrébine

Insaniyat N° 11 | 2000 | Le Sacré et le Politique | p.117-127 | Texte intégral


Sultana DAOUD : Economiste, Département d’Electronique - U. S. T. Oran, 31 000, Oran, Algérie


Introduction

Au moment où l’évolution de l’économie mondiale est marquée par des regroupements régionaux, le niveau des échanges entre les pays du Maghreb demeure faible 1 à 2%. Malgré, sa situation géostratégique et ses ressources économiques, le Maghreb ne connaît pas un vrai dynamisme en terme d’implications dans les stratégies "inter-patronales". Cette non implication découle de divers facteurs limitant les contributions des associations patronales dans la construction de l’union maghrébine.

1. Les facteurs de blocage des stratégies inter- patronales au niveau maghrébin

Les pays du Maghreb se distinguent par certains caractères similaires qui sont en fait des facteurs de blocage réduisant les stratégies inter-patronales.

Parmi ces facteurs on constate :

- L’Etat demeure l’investisseur potentiel, l’action des entreprises publiques dépend quelquefois du politique et non de l’économique. Même si le Maghreb constitue un marché en forte croissance et en réformes permanentes, les moyens incitatifs relatifs à l’investissement industriel restent encore limités;

- Les capitaux industriels nationaux sont insuffisants, ils sont en général de type familial et se concentrent dans la sphère commerciale. La situation politique fragile au Maghreb paraît décourager les investisseurs maghrébins;

- L’instabilité politique en Algérie, sa position géographique (le seul pays du Maghreb possédant des frontières terrestres avec tous les autres pays maghrébins), ainsi que l’hétérogénéité des régimes politiques au Maghreb ont ralenti l’avancement du projet grand Maghreb ;

- Les capacités des entreprises maghrébines en matière d’organisation et d’innovation sont insuffisantes.

Malgré que, les productions maghrébines soient très disparates donc ; elles peuvent être complémentaires les unes aux autres : en Algérie et Libye, les hydrocarbures, au Maroc, les phosphates, l’agriculture (agrumes), le tourisme ; en Mauritanie existe des potentialités importantes en matière de pêche ; en Tunisie l’agriculture, le tourisme. Les entreprises maghrébines ne connaissent pas une réelle collaboration entre elles. Dans la structure par régions économiques du commerce extérieur algérien, le Maghreb représente 0,26% en 1998 et 1999. Il existe effectivement nombre d’accords et de traités entre les pays, pourtant, ce nombre est loin de traduire le degré de coopération que ces pays sont capables de développer. D’ailleurs, “depuis la 2ème moitié des années 1980, aucune véritable alternative de développement ne s’est dessinée pour relayer la dynamique excluante des programmes d’ajustement structurels. Ces pays continuent d’épuiser les gains d’un régime industriel privilégiant les avantages statiques (hydrocarbures, phosphates) ou peu évolutifs (textile habillement) (…), l’ajustement opéré sur le seul facteur travail ne permet pas aux producteurs maghrébins le statut de sous-traitant de l’industrie européenne”[1].Dans ces pays, la libéralisation s’est manifestée comme par ailleurs, par une baisse des ressources externes, par l’émergence ou la consolidation d’un secteur privé. D’ailleurs, “cette tendance à la libéralisation économique actualise ainsi la question de savoir dans quelle mesure la croissance d’un secteur privé est de nature à affecter le mode de fonctionnement de régimes caractérisés par une primauté du politique et à correspondre à la montée en puissance de groupes sociaux capables de peser dans un rapport de forces avec les bureaucraties étatiques”.[2]

2. L’entrepreneur

2.1. Définition

Toute une littérature s’est développée sur l’analyse de l’entrepreneur, en tant qu’acteur du développement économique, et même politique. L’un des auteurs qui s’est vraiment préoccupé à définir l’entrepreneur, est Joseph Schumpeter. Il souligne l’idée de capitaine d’industrie. Il présente l’entrepreneur comme l’agent économique qui en effectuant une nouvelle combinaison de facteurs de production à l’intérieur de l’entreprise, en est l’élément actif. Il met l’accent sur la notion du chef dont le rôle reste important dans le champ de l’activité sociale. Pour l’auteur, le chef est qualifié par ses capacités acquises pour l’effort concernant l’initiative et la volonté. Le chef opère de l’autorité. De cette idée de chef, transposé du social à l’économique, émane la notion d’entrepreneur.[3]

De même, la théorie de l’entrepreneur chez Schumpeter distingue l’entrepreneur en tant qu’innovateur et non inventeur. Il ne découvre pas les nouvelles combinaisons de facteurs de production, mais il les réalise tout en les faisant admettre par son environnement.

2.2. Les motifs de l’entrepreneur

L’approche de Schumpeter suppose que l’entrepreneur est en perpétuelle création, puisqu’il est inspiré par des motifs qui ne sont pas tellement judicieux, mais plutôt passionnés comme :

- L’intention de créer son entreprise privée ;

- Etre motivé par la rivalité ; et pareillement, il prétend à prospérer pour la réussite elle-même ;  

- Le plaisir de fonder une forme économique nouvelle ;

- On constate, qu’il est malaisé de relever chez l’entrepreneur maghrébin des caractéristiques identiques à celles que recèle la définition de la théorie Schumpeterienne de l’entrepreneur. Le chef de l’entreprise maghrébine tend à être plus exploitant qu’entrepreneur.

3. Les déterminants de l’entrepreneur maghrébin

Même si, certains auteurs montrent que les entrepreneurs maghrébins sont les principaux agents économiques de la transition des économies maghrébines vers l’économie de marché, les traits qui les distinguent par rapport aux entrepreneurs dans les pays développés entravent le processus de transition. On note[4] :

- Certains entrepreneurs sont hostiles à la mise en pratique des politiques de stabilisation et d’ajustement, ainsi qu’à l’établissement des accords de libre échange dont l’objectif primordial est la libéralisation de l’économie maghrébine car, ils risquent de perdre certains privilèges assurés grâce à leur subordination à l’Etat.

- La prédilection des entrepreneurs pour les entreprises familiales autant dans les modalités de gestion que dans le statut juridique.

- Le caractère sociologique du secteur privé du fait qu’il est constitué d’un nombre très important de dépendants (n’employant pas de salariés et recourent à des aides familiaux).

- Le niveau d’instruction des entrepreneurs demeure limité, ce qui empêche de rénover les formes de gestion des entreprises maghrébines.

- Les contraintes susmentionnées entravent les mouvements d’entreprises tels que les regroupements, les fusions, les cessions, etc.

La taille moyenne des entreprises maghrébines employant des salariés est révélatrice des limites de ce secteur. En Algérie par exemple, la taille moyenne des entreprises est estimée en 1998 à 20 salariés dans les BTP et 9 dans l’industrie.

Certains auteurs qualifient des entrepreneurs maghrébins de «Chasseur de rentes» ayant amassé des ressources colossales, par le fait que leur subordination à l’Etat, qu’en considération de leur dynamisme entrepreneuriale[5]. L’attribution des ressources étatiques aux entreprises privées ne se traduit pas par le développement économique national ; mais plutôt, par une augmentation des profits personnels du pouvoir privé.[6]

Même, s’il est difficile d’évaluer l’impact effectif des mesures de stabilisation, d’ajustement et de privatisation, on considère que les perturbations qui en découlent, ont provoqué des mutations non négligeables dans l’entreprise maghrébine, et ont renforcé de manière directe ou indirecte les effets des contraintes exogènes et endogènes déjà existantes. Ainsi, on assiste à une prolifération des activités du secteur privé dans le tertiaire car en général, les entrepreneurs maghrébins ne tentent pas d’affronter la concurrence étrangère accentuée par l’ouverture des économies maghrébines, mais plutôt éviter d’investir dans les activités de transformation et des projets de grande ampleur. Ce comportement permet de les qualifier de bourgeoisie compradore, parasitaire, subordonnée à l’Etat, incapable de fonder une bourse pour mobiliser les ressources et «Il n’existerait donc pas d’institutions formelles par l’intermédiaire desquelles les entrepreneurs pourraient accumuler le capital. Certains analystes affirment que le coté "retardataire" est moins la conséquence d’une animosité de l’Etat envers le secteur privé que le produit de l’échec même de la bourgeoisie»[7].

IV. Les organisations patronales

4.1. Définition

“On ne peut réduire le patronat à l’ensemble des patrons, de leurs entreprises et de leur comportement sur le marché sans prendre une dimension essentielle à la compréhension du phénomène. Certes, le patronat ce sont aussi les acteurs qui le constituent ; leur comportement et surtout les effets macro-économiques, en partie incalculables et en partie habilement utilisables, qui résultent de l’interdépendance des unités concurrentes. Le patronat, c’est encore le pouvoir de décision dans les entreprises, et par le biais du contrôle des investissements, également celui de décider du niveau d’emploi de l’économie dans son ensemble”[8].

4.2. Le rôle des organisations patronales

Pratiquement dans tous les pays, les organisations patronales éprouvent le besoin de détenir une position importante dans l’activité économique et non d’acquérir une taille plus grande. En fait, L’accroissement de leur représentativité est en corrélation avec la taille de l’entreprise. Par exemple, en France, ces organisations “représentent les 50% des effectifs salariés des entreprises publiques et privées. Les organisations du secteur industriel ont moins de ressources et d’adhérents, non pas parce que la propension à adhérer a diminué, mais parce que les mutations du système productif ont conduit à la disparition de bien des entreprises du secteur industriel et à la diminution de l’emploi, base à partir de laquelle est calculée la cotisation de l’entreprise à son organisation. En outre, la représentativité globale des organisations patronales est affectée par le poids plus grand pris par le secteur tertiaire[9].

Quoi qu’il en soit, les associations patronales prétendent à l’indépendance et à une division du travail politique de connivence. En tant que groupe social, plus qu’aucun autre, regroupant sur la base d’intérêts communs des hommes et des entreprises qui sont totalement en position de concurrence sur le marché, elles refoulent de courir le risque et d’être antagonistes.

En revanche, même si ces organisations peuvent souvent atténuer les pressions des conflits externes exercées par l’Etat ou les syndicats, elles sont loin de préserver la solidarité et l’autodiscipline en commun. Il est laborieux pour elles, d’établir un pacte entre l’ensemble des membres sur des intérêts fréquemment opposés, principalement pour les branches où la sous-traitance demeure un type de partenariat considérablement prépondérant, ainsi que les activités où prévaut une intégration verticale des seuils de production, comme le textile, le bâtiment, les industries alimentaires, l’épicerie fine[10].

Martin B.[11] affirme qu’au sein des organisations qui sont le plus profondément rapprochées à l’Etat, la représentativité du patronat public fait défaut. Le collectivisme et l’étatisme des représentants des entreprises privées et de leurs formations politiques ont pour contrepartie l’individualisme, l’acte dispersé et distant, la préférence de se référer au patron de l’entreprise publique. Dans ce contexte, on peut présumer que le patronat poursuit l’accomplissement de sa mission qui demeure décisive, mais déterminée. Il ne peut la réaliser qu’en collaboration avec ses acteurs collectifs.

Actuellement, les organisations patronales les plus présentées aspirent à concourir à la caractérisation d’un projet global ou sociétal. Toutes les formations doivent prouver que leur intérêt particulier contribue à tout droit à l’avancement de l’intérêt général. L’entreprise citoyenne n’est plus simplement un agent économique dont la fonction principale est la satisfaction des besoins ; elle a aussi une fonction sociale, qui consiste à contribuer aux décisions de société. Elle est dans l’obligation de participer totalement au processus d’orientation des politiques publiques [12]

4.3. Les organisations patronales au Maghreb

4.3.1. Les origines de l'entrepreneur maghrébin

Les entrepreneurs en tant que groupe social, ne parviennent pas encore à former une “classe”. Bien qu’on les considère comme les principaux intervenants dans le passage des pays maghrébins à l’économie de marché, leur caractère hybride et hétérogène persiste car :

- Ils appartiennent à l’ancienne élite capitaliste ;

- Ils possédaient des petites entreprises non touchées par les politiques de nationalisation ;

- Ils font partie de la nouvelle classe de la bourgeoisie d’Etat dont l’émergence était suscitée par le mouvement d’étatisation de l’économie des années soixante. Mais, par exemple en Algérie, les héritiers de cette catégorie d’entrepreneurs sont en général d’un niveau d’instruction universitaire. Ils introduisent de nouvelles conduites dans leur entreprise. Ils emploient les nouvelles techniques de management[13].

- Ils constituent une nouvelle catégorie d’entrepreneurs favorisée par le contexte de libéralisation de l’économie

4.3.2. Les organisations patronales en Algérie[14]

Cette période de transition vers l’économie de marché est marquée par une prolifération de petites et moyennes entreprises activant dans le secteur privé et par la naissance de plusieurs associations patronales du même secteur. On distingue les associations les plus représentatives :

- La Confédération des industriels et producteurs algériens (CIPA) ;

- L’Organisation patronale féminine (SEVE) ;

- La Confédération générale des opérateurs algériens (CGEOA) ;

- La Confédération générale du patronat algérien (COGEPA) ;

- L’union générale des entrepreneurs algériens (UGEA) ;

- La Confédération algérienne du patronat (CAP) ;

- La Confédération nationale du patronat algérien (CNPA) ;

- L’Union nationale des entrepreneurs publics (UNEP)

Certaines de ces organisations, sont même représentées par des bureaux régionaux situés à l’Est, au Centre et à l’Ouest du territoire national. Elles sont dotées d’un conseil d’administration et d’un conseil des sages. Elles sont toutes supervisées par le conseil supérieur du patronat algérien (CSPA). Elles tentent d’assumer quatre grandes fonctions telles qu’on les observe dans d’autres pays industriels et en particulier en Europe, à savoir :

- La fonction revendicative : il s’agit d’exposer les revendications et les mécontentements et de créer les réseaux de communication avec les pouvoirs publics et les différentes institutions,

- La fonction propositionnelle : soumettre des propositions techniquement et économiquement réalisables, répondant aux exigences actuelles du pays,

- La fonction de négociation : il s’agit de présenter des justifications fiables ; d’anticiper les convergences et de conclure au moment opportun dans l’intérêt collectif,

- La fonction de service : les actions entreprises par les organisations patronales œuvrent vers la réalisation de :

- Agences de promotion de la jeune entreprise et bourses aux jeunes

- Centres de formation professionnelle ;

- Accès à des banques de données pour projeter les échanges à l’exportation;

- Agences locales pour la gestion des offres et demandes d’emplois dans les professions intéressées ;

- Assistance des entreprises dans leurs actions en justice pour la défense des intérêts individuels ou collectifs de la profession ;

Dans le cadre de leurs activités, les organisations patronales traitent avec les pouvoirs publics des contraintes auxquelles se trouvent confrontées les entrepreneurs algériens telles que :

- La perte de change issue de la dévaluation du Dinar algérien ;

- La protection de la production nationale contre les contrefaçons, les importations anarchiques de produits non concurrentiels ;

- Les contraintes douanières ;

- La gestion des zones d’activités industrielles ;

- Les lenteurs et contraintes administratives ;

- Les relations avec les institutions bancaires ;

- Les infrastructures de l’Etat (Wilaya, Domaine, les Postes et Télé- communication, la fiscalité et parafiscalité, etc.)

- Les contraintes liées à l’adhésion de l’Algérie à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC).

Par ailleurs, elles créent un comité d’affaires bilatéral entre les hommes d’affaires algériens et leurs différents partenaires. Ce comité a pour principaux objectifs :

- La promotion des relations économiques, commerciales, financières et industrielles entre les entreprises algériennes et étrangères ;

- L’organisation des contacts d’affaires entre les opérateurs des pays concernés ;

- La participation aux différents forums afin de développer les relations de coopération ;

- L’encouragement des investissements entre l’Algérie et les pays intéressés;

- L’identification des obstacles pesant sur le développement des relations entre les hommes d’affaires et entreprises d’Algérie et celles des différents partenaires. De même, des suggestions peuvent être formulées aux autorités publiques des pays concernés.

Après concertation, elles collaborent avec la Commission européenne et les pouvoirs publics en ce qui concerne l’appréciation du programme de soutien en faveur de l’Algérie qui regroupe les différentes rubriques :

- Appui à la privatisation et la restructuration industrielle ;

- Appui aux petites et moyennes entreprises ;

- Appui à la réforme du secteur financier et à la bourse ;

- Appui au filet social ;

- Facilité d’ajustement structurel.

4.3.3. Les contributions des organisations patronales

La plupart des travaux contestent la performance des organisations patronales dans les pays arabes en général et le Maghreb en particulier.

On considère que le patronat ne s’est pas constitué en groupe de pression, mais  il s’est accoutumé plutôt à faire le siège des administrations[15]. D’ailleurs, même s’il fait preuve d’un dynamisme associatif, sa marge de manœuvre demeure restreinte[16]. Dans ces pays, on assiste souvent à un amalgame entre libéralisme économique et autoritarisme politique. Le Monde arabe se présente en tant qu’espace où s’enchevêtre une problématique smithienne d’enrichissement avec une notion hobbesienne du pouvoir politique et du contrat social[17]. De ce fait, les organisations patronales prennent surtout une proportion mondaine, les réseaux d’accès au pouvoir bureaucratico-politique étant très personnalisés[18].

Labazée P. souligne «qu’il existe un ethos entrepreneurial au Moyen-Orient et au Maghreb... Mais, cet ethos n’occupe que les marges, il se réalise encore rarement sous la forme d’entreprise à la fois transparente et dynamique... Les entrepreneurs arabes subissent ou s'accommodent plutôt, qu’ils ne reconstruisent des règles d’un jeu économique largement dominé par les impératifs rentiers des pouvoirs politiques»[19].

En outre, on ne peut pas parler de citoyenneté des entrepreneurs ; ces derniers ne sont pas encore en mesure de traiter les questions relatives au pouvoir et à la société. Car même si l’entrepreneur adhère à un parti, il ne contribue pas totalement au processus d’orientation des politiques publiques puisque souvent il regagne les rangs d’un parti gouvernemental pour trois motifs : 

- Il réussit à réaliser ses projets en connivence avec l’administration ;

- Il bénéficie des facilités d’accès aux moyens matériels et/ou ceux qui relèvent de la représentation symbolique ;

- Il sera en mesure de faire pression sur l’administration ; en même temps, il se préserve contre les pratiques néfastes de certains groupes d’intérêt situés au niveau de l'administration[20].

Enfin, pour ces pays, la constitution d’une société où les citoyens pourraient intervenir dans la gérance des activités publiques dépend de la prédisposition des pouvoirs politiques ainsi que de tous les acteurs sociaux à réviser leurs axiomes et à reconsidérer leurs options[21].

Conclusion

Plusieurs démarches ont été menées pour concrétiser des relations économiques entre les différents pays du Maghreb. Cependant, le système productif maghrébin n’a connu aucun changement structurel ; le bilan demeure décourageant. Ce blocage d’échange n’est que passager. La prédisposition «normale» sera à une coopération économique largement engagée en dehors des relations habituelles.

L’objectif souhaité des organisations patronales maghrébines est d’échanger mutuellement des compétences, tout en consolidant les bases d’un partenariat durable. Les stratégies inter-entreprises de type coopératif, de même, d’accéder aux nouveaux segments de marchés autant de point de vue géographique que celui des gammes de produits.

Eric Gobe souligne que «Le passage progressif d’activités commerciales à l’industrie d’assemblage et à la production sur place relativise les affirmations sur le caractère inéluctablement compradore et parasitaire de la bourgeoisie arabe»[22]. De ce fait, tout n’est pas à mettre au passif des entrepreneurs en la matière, malgré ces caractéristiques dévalorisantes, il faut tenir compte du facteur temps et des aptitudes d’apprentissage des entrepreneurs en matière de management.

Les organisations patronales maghrébines continuent à jouer un rôle essentiel dans l’union du Maghreb, mais non indéterminé et qui ne leur est du reste possible, qu’avec l’aide des Etats ; ces Etats n’arrivent pas à approfondir leurs relations. Il en est ainsi au cours des négociations avec les institutions financières internationales ou avec l’Union Européenne dans le cadre de son élargissement au pays du Maghreb. A travers les différents programmes tels que le programme d’ajustement structurel, l’accord de libre échange, la mise à niveau, l’adhésion du Maghreb à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), chaque pays maghrébin tente de son côté de consolider ses relations avec ces organismes, au lieu de maintenir ensemble la même position et de réagir en commun. De plus, ces accords et ces programmes auraient pu être traités dans des conditions plus convenables s’ils avaient été simultanément négociés avec tous les pays maghrébins.

Ceci suppose que les actions des associations patronales dans la consolidation du grand Maghreb sont subordonnées au comportement des Etats maghrébins qui doivent participer activement à ce processus et par conséquent d’être en mesure de :

- Instaurer un cadre institutionnel et réglementaire permettant le renforcement des mesures incitatives dont l’objectif est l’accroissement des échanges intra- maghrébins ;

- Créer une institution maghrébine dont la mission principale est l’orientation et l’encadrement des investisseurs maghrébins attirés par le marché maghrébin, qui demeure un marché en croissance rapide et présentant des moyens de création de richesses. Pour stimuler l’investissement dans des projets de grande envergure et dont la rentabilité est à long terme, ces entrepreneurs “doivent pouvoir échapper à la culture de la peur engendrée par les comportements imprévisibles de l’administration ou du gouvernement et constituant encore un des fondements du mode de déploiement entre la bureaucratie et la société dans le monde arabe [23] ;

- Redynamiser les Chambres de Commerce maghrébines en définissant leur rôle ;

- Agréer les Chambres de Commerce maghrébines et étrangères ;

- Organiser le système d’information pour permettre la disponibilité de l’information ;

- Identifier les opportunités d’investissement en se basant sur les richesses locales (matières premières, main d’œuvre etc.) ;

- Rétablir les réseaux de distribution de marchandises de façon à simplifier leur circulation ;

- Initier les firmes maghrébines à d’éventuelles stratégies inter-entreprises par l’apprentissage et l’acquisition des compétences techniques ou gestionnaires au profit de leurs patrons.

Bibliographie

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BOUYACOUB, A..- Les caractéristiques de la gestion des ressources humaines dans les PME en Algérie à l’heure de la transition vers l’économie de marché.- Revue du CREAD, 1995.- p.76

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COLLECTIF.- Entrepreneur du Tiers-Monde.- Maisonneuve et Larose, 1994.

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GOBE, E..- Les entrepreneurs arabes au miroir des sciences sociales.- Annuaire de l’Afrique du Nord, tome XXXV, CNRS éditions, 1996.

JULIEN, P..- La petite entreprise.- Vuibert, 1987.

MARTIN, B..- Qu’est-ce que le patronat ? Enjeux théoriques et résultats empiriques.- Sociologie du travail, n°4, 1988.

MOUSSE.- Ethique et entreprise.- Vuibert, 1993.

TANGEAOUI, S..- Les entrepreneurs marocains. Pouvoir, société et modernité.- Paris, Karthala, 1993.

WEBER, H..- Cultures patronales et types d’entreprises : esquisse d’une typologie du patronat.- Sociologie du travail, n°4, 1988.


Notes

[1]- Collectif. Entrepreneur du tiers monde Maisonneuve et Larose 1994. .- p. 115

[2]- GOBE, E..- Les entrepreneurs arabes au miroir des sciences sociales. Annuaire de l'Afrique du Nord.- Tome XXXV. 1996.- p. 327.

[3]- Idem.- p. 328.

[4]- DAOUD, S..- Privatisation et émergence des PME en Algérie.- Colloque international : «Programme d’ajustement structurel et privatisation » du 27, 28 novembre 1999.- p.4 .

[5]- GOBE, E..- Op. cité.- p. 336.

[6]- Idem.- p.337.

[7]- GOBE, E..- Op. cité.- p. 335.

[8]- MARTIN, B..- Qu’est-ce que le patronat ? Enjeux théoriques et résultats empiriques.- Sociologie du travail, n°4- 1988.- p. 525.

[9]- BUNEL, J..- Les dilemmes de l’action patronale.- Revue l’IRES, n°20, 1996.- p..30.

[10]- MARTIN, B..- Op.cité.- p. 533.

[11]- MARTIN, B..- Op.cité.- p. 539.

[12]- BUNEL, J..- Op. cité.- p. 31.

[13]- BOUYACOUB, A.- Les caractéristiques de la gestion des ressources humaines dans les PME en Algérie à l’heure de la transition vers l’économie de marché.- Revue CREAD, 1995.- p.76.

[14]- Notre enquête auprès des adhérents de quelques organisations patronales représentées à l’Ouest du pays.

[15]- GOBE, E..- Op. cité.- p. 338.

[16]- TANGEAOUI, S..- Les entrepreneurs marocains. Pouvoir, société et modernité.- Paris, Karthala, 1993.- p. 285.

[17]- GOBE, E..- Op. cité.- p. 339.

[18]- Idem.- p. 338.

[19]- Cité par GOBE, E..- Op. cité.- p. 340.

[20]- GOBE, E..- Op. cité.- p. 339.

[21]- TANGEAOUI, S..- Op. cité.- p. 309.

[22]- GOBE, E..- Op. cité.- p. 335.

[23]- GOBE, E..- Op. cité.- p. 336.

 

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