Insaniyat N°54| 2011 | Tizi-Ouzou et la Kabylie: mutations sociales et culturelles | p.13-29 | Texte intégral
Tizi-Ouzou or the destiny of a col and its urbanization Abstract: The town of Tizi-Ouzou (in Kabyle the Broon Col) is the outcome, if one can say, of several geographical and historical determinisms. From a pass towards the upper high lands (or upper kabylie) and from observation posts and military control since Roman antiquity, its urbanization process is relatively recent and goes back to the colonial period (2nd half of the 19th C.). But, since then its transformation has been very quick notably due to the demographic importance of its hinterland (the presence of hundreds of villages which are densly populated) and its median position between the upper and lower Sebaou valley. Keywords: strategic col - colonial village - mountain space - urbanization - regional metropolis. |
Saïd DOUMANE: Université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, 15000, Tizi Ouzou, Algérie
L’émergence du “Col des Genêts”– Tizi Wezzu en kabyle- en tant que phénomène urbain est relativement récente (milieu du IIXe siècle). Sa fondation officielle, par décret impérial du 27 octobre 1858, stipulant, dans son article premier, qu’ « il est créé, dans la subdivision de Dellys, province d’Alger (…) un centre de population européenne de quatre-vingt-quatorze feux, qui portera le nom de Tizi-Ouzou », fait suite à un rapport émanant du ministère de l’Algérie et des Colonies demandant de « régulariser l’existence d’un centre de population qui s’est formé spontanément, dès 1855, au-dessous du fort de Tizi-Ouzou, sur le bord de la route d’Alger à Bougie (…), d’environ six cents habitants, des constructions assez importantes y existent déjà, et il convient de légaliser cette prise de possession en vue de faciliter le développement d’un centre qui nous met en relations journalières avec la population kabyle, et est appelé à devenir une ville »[1].
En fait, ce col est connu depuis l’antiquité comme lieu de passage et de fixation de postes militaires ; il donne accès au massif du Djurdjura et domine la vallée du Sébaou. Est-il, pour autant, prédestiné à devenir une agglomération urbaine ? En tout cas, il a souvent attiré l’attention de groupes belliqueux, notamment des puissances étrangères (Romains, Arabes, Turcs, Français.) qui ont eu pour visée de contrôler la Kabylie des hauteurs, cet arrière-pays montagneux densément peuplé et organisé en petites entités villageoises et en tribus autonomes.
Ainsi donc, le “Col des Genêts” a très tôt été remarqué pour sa position stratégique mais il n’a accueilli que tardivement des groupes de populations ; c’est le littoral voisin qui a vu naître les premiers centres urbains (Dellys, Tigzirt et, bien sûr Bejaïa) pour des raisons d’activités maritimes. Le poids politique et humain que prenait peu à peu la Kabylie montagnarde au cours de l’histoire, en tant qu’espace de refuge et de résistance, allait conférer encore plus d’intérêt au col. Avec la pénétration française et l’ouverture de la ligne de chemin de fer Alger-Tizi-Ouzou au début du XXe siècle, Dellys perdit sa place de principale cité urbaine de la Kabylie occidentale au profit de Tizi-Ouzou…
Lieu de transit civil et militaire ou ville, la dynamique historique et urbaine de Tizi-Ouzou a toujours été intimement liée aux péripéties de son imposant arrière-pays montagneux.
Tizi-Ouzou dans son environnement immédiat : de l’Antiquité à la présence ottomane
Le pays kabyle est pauvre en terres cultivables et en ressources naturelles. Pour cette raison, il a dû être faiblement peuplé à l’aube de l’histoire ; mais dès les premières invasions étrangères, son massif montagneux rude et très accidenté, aux petites vallées très encaissées entre des chaînons, a constitué un refuge temporaire ou définitif sûr aux habitants des plaines et des cités environnantes. Aussi, une vie sociopolitique, économique et culturelle dense et riche s’est développée sur les versants et les pitons au sein de structures villageoises et tribales. Face à la pauvreté du milieu, les hommes y ont fait preuve d’une certaine capacité d’adaptation et surtout d’ardeur au travail, pour survivre.
Ces conditions ne sont pas, à l’évidence, de celles qui favorisent l’émergence de villes.
On y trouve, néanmoins des traces ou des vestiges d’anciens bourgs (Boghni, Tiroual, Ait-Boumahdi, Tikobaine…), mais c’est surtout en Kabylie maritime et dans les vallées qu’ont été érigées des villes autour de forts militaires, notamment par les Romains : Iomnium (Tigzirt), Ruzuccurus (Dellys), Ruzazus (Azeffoun), Bida (Djemâa n’ Saridj)…[2].
A l’instar du col des Aït-Aïcha (Tizi-n- At Aïcha), les Romains ne pouvaient ignorer Tizi Wezzu – les deux cols étant proches (50 Kms) et reliés par une route qui suivait quasiment le tracé de celle qui existe aujourd’hui – d’où ils pouvaient surveiller le Mons Ferratus (dénomination romaine du massif du Djurdjura)[3]. Cependant, ils ne s’y sont pas fixés durablement, tout comme leurs successeurs, les Vandales et les Byzantins sous la domination desquels les tribus berbères ont pu reprendre pied dans les plaines.
Au cours du Xe siècle, deux grandes confédérations tribales occupaient les territoires qu’on désignera plus tard par le terme Kabylie : les tribus dites Zwawa installées dans la partie occidentale et celles dites Ketama dans la partie orientale, les deux ensembles vivaient d’une importante activité agricole et d’élevage et avaient « des villes construites en bordure des plaines protégées par des pics et des chaînes peu pénétrables »[4] Tizi-Ouzou n’était pas encore de celles-là.
L’arrivée des Hilaliens, turbulente confédération arabe en 1051-1057 accentua le mouvement de repli des tribus berbères dans les zones montagneuses et désertiques et les villes périclitèrent. Il a fallu attendre l’avènement des Almoravides et surtout des Almohades (1147-1269) pour voir s’instaurer un minimum de stabilité, sécurité et d’acculturation en particulier. D’importantes cités connurent alors un grand essor : Dellys, Béjaïa, M’sila, Constantine…
La décadence des Almohades précipita une nouvelle fois l’ensemble du Maghreb dans le morcellement et les luttes dynastiques. La partie orientale de la Kabylie reconnut plus ou moins l’autorité des Hafsides (1228-1574) dont l’un des clans rivaux était établi à Béjaïa.
C’est dans ce contexte que se formèrent en Kabylie, au début du XVIe siècle, deux petits royaumes montagnards, celui des Aït-el-Kadi à Koukou (en amont de l’oued Sébaou) et celui des Aït-Abbas (à l’est de l’oued Sahel), de part et d’autre du Djurdjura. Ces deux petits royaumes autochtones, profitèrent dans un premier temps, du déclin des villes pour accueillir de nombreux citadins, artisans et marchands, avant de connaître à leur tour la décadence, minés par leur rivalité et « un chassé-croisé d’alliances »[5] néfaste avec les puissances méditerranéennes (turque et espagnole).
La vallée du Sébaou qui était jusque-là cultivée par les montagnards des environs sous la surveillance des Aït-el-Kadi, devint l’objet de querelles entre tribus, ce dont profitèrent les Turcs, déjà présents à Dellys vers 1517-1518, pour s’approcher du “Col des Genêts” et du bastion kabyle. Ces derniers commencèrent par ériger des bordjs (fortins) à Tizi-n-At Aïcha, Bordj Ménaiel, Chabet-el-Ameur dans la vallée des Issers avant de faire leur entrée dans la vallée du Sébaou au début du XVIIe siècle[6]. De proche en proche, des postes avancés furent mis en place à Tadmaït et Tizi-Ouzou vers 1640, avant la construction effective du bordj de Tizi-Ouzou en 1720-1721 et de celui de Boghni, en remontant l’oued éponyme, quelques années postérieurement[7]. La tribu des Amraoua établie dans la partie de la vallée du Sébaou limitrophe de Tizi-Ouzou se soumet aux Turcs et bénéficie, en échange, de terres et de l’exemption de l’impôt. Le bordj de Tizi-Ouzou accueillit un embryon d’administration turque qui s’entoura de smalas de quelques milliers de cavaliers, installées à différents endroits de la vallée, dont une au pied du bordj, constituant ainsi le premier village de Tizi-Ouzou.
Les tribus montagnardes, évincées de la culture des terres de la vallée, entrèrent en conflit direct avec les smalas turques, ce qui poussa la Régence d’Alger à agrandir le bordj de Tizi-Ouzou sous la houlette du bey Mohammed Ed-Debbbah (l’égorgeur)[8]. La tribu des Amraoua était alors divisée en deux fractions : Iعemrawiyen-u- fella (les Amraoua d’en haut) sous tutelle turque et Iعemrawiyen-n- wada (les Amraoua d’en bas) reconnaissant plutôt la famille des Aït-Kaci, la branche la plus influente des Amraoua établie à Tamda (Haut Sébaou), les deux “soff-s” étant séparés géographiquement par le bordj de Tizi-Ouzou. L’administration turque entretenait la rivalité entre les deux clans et jouait souvent de l’intrigue pour maintenir sa domination sur l’ensemble. Par le biais du marché du Sebt El Khodja très fréquenté par les deux fractions des Amraoua et des tribus environnantes, le bordj exerçait une certaine surveillance des alentours.
Tizi-Ouzou prit alors un certain ascendant sur les autres villages de la vallée mais durant tout le temps que dura l’occupation ottomane, il n’y avait guère sur le col que le bordj et son petit village abritant la smala, installé en contrebas. A vrai dire, en raison de la nature de l’administration ottomane – elle avait pour mission principale de prélever l’impôt –, il ne pouvait en être autrement[9]. Au début du XIXe siècle, de nombreux villages de montagne étaient nettement plus peuplés que Tizi-Ouzou.
C’était l’occupation française, d’une autre nature (colonisation agraire et de peuplement) qui allait transformer, à partir des années 1850, le sort et la physionomie du “Col des Genêts”.
La colonisation française : du village colonial à l’émergence d’une ville
La Kabylie fut la dernière région de l’Algérie du nord à être soumise par l’armée française au cours de la décennie 1850. Comme les Turcs, les Français ont entrepris son approche par étapes successives, en occupant d’abord les villes du littoral : Bougie (1833), Dellys (1844), etc.
Jusqu’à la prise définitive de Tizi-Ouzou (1855-1856), le bordj abandonné par la garnison ottomane était occupé par les Aït-Kaci et le marché du “Sebt” continuait à être animé sous leur contrôle.
C’est vers 1842 que débute la campagne de Kabylie sous la houlette du maréchal Bugeaud. Les colonnes françaises parties du littoral, investirent le Bas-Sébaou mais ne purent remonter la rivière, contrariées par la résistance des Amraoua dirigée par Belkacem-Ou-Kaci dans le Haut-Sébaou. En 1847, une nouvelle campagne fut plus décisive et le maréchal Bugeaud réussit à installer ses premiers campements au pied du bastion kabyle qu’il appelait « l’horrible guêpier » [10].
Après deux nouvelles expéditions dirigées par le maréchal Randon au début des années 1850, fut décidée la mise en place d’une administration militaire dite du Cercle de Tizi-Ouzou destinée à mieux contrôler les populations kabyles. Le bordj devint une garnison militaire (Caserne Erlon), doté d’un entrepôt et d’un hôpital militaire (1854-1856).
A partir de 1854, les premiers aménagements du col commencèrent « en raison de son importance stratégique » [11]. On procéda aux premières expropriations terriennes (15 000 hectares dans un premier temps) et attributions de concessions en vue de la mise en œuvre d’un centre de colonisation. Celui-ci fut, à ses débuts, laborieux : Il y’avait en 1859 que treize immigrants européens installés dans les premières maisons au pied du bordj et quelques centaines d’autochtones (500 à 600 selon les sources militaires) et, à l’occasion de la famine de 1867-68 arrivèrent les premiers missionnaires. Devenu peu à peu village colonial, Tizi-Ouzou accueillait les premiers services publics : une justice de paix, une église, un bureau de poste, une école arabo-française, une école de fille, un lavoir public, une fontaine, un hôtel et un café-restaurant[12]. La population d’origine européenne atteignit alors 254 âmes à la veille de la grande insurrection de 1871[13].
Lorsqu’en mars-avril 1871, celle-ci éclata et embrasa « le pays comme une véritable traînée de poudre »[14], le village de Tizi-Ouzou fut attaqué et détruit par les insurgés kabyles, à l’instar d’autres centres de colonisation de Kabylie : Draâ-El-Mizan, Dellys, Béjaïa, Sétif… Mais, dès le mois de mai, l’armée française reprit l’offensive et réinvestit rapidement Tizi-Ouzou pour délivrer les Européens réfugiés dans le bordj.
La révolte matée, le village fut reconstruit et agrandi et les habitants “indigènes” furent refoulés vers le haut, au pied du mont Belloua. Il devint en 1872 chef-lieu d’une commune de plein exercice et reçut, suite aux séquestres fonciers, de nouveaux colons européens. La population d’origine européenne passait ainsi de 280 personnes en 1873 à 400 en 1874 et à 1.200 deux ans plus tard, c'est-à-dire presque autant que la population d’origine locale qui s’élevait à 1.500 âmes en 1876.
L’ouverture de la voie de chemin de fer Alger-Tizi-Ouzou[15] en 1888 donna un coup de fouet au développement de la ville naissante. De petit centre militaire, Tizi-Ouzou se vit nantie de nouvelles fonctions administratives et commerciales en raison, d’une part de l’afflux progressif d’immigrants européens et, d’autre part de la forte densité démographique de l’arrière-pays kabyle. Dellys, jusque-là principal centre urbain et portuaire de la Kabylie occidentale perdit alors de son importance au profit de Tizi-Ouzou, surtout après le prolongement de la ligne de chemin de fer de Mirabeau (Drâa Ben Khedda) à Tizi-Ouzou en 1910.
Toutefois, à l’intérieur de la ville, seule la partie européenne tirait avantage de ce nouveau dynamisme, la partie autochtone gardait son allure de village kabyle traditionnel et tendait à se replier sur elle-même.
Entre 1910 et 1920, de nombreux équipements et activités économiques viennent s’implanter dans le quartier européen : dépôts, commerces, usine d’électricité à base d’huile lourde… L’éclairage public de la rue principale (rue Ferdinand Aillaud devenue Grand-rue puis Abane Ramdane après 1962) qui était à base de lampes à carbure, fut remplacé vers 1917-1918, par l’éclairage électrique.
Dans les années 1920, les principaux commerces étaient constitués d’épiceries, de boulangeries, de dépôts de céréales et de figues… Il y’avait aussi un fondouck et un médecin installé dans le bordj. A la même période, les premiers véhicules automobiles commencèrent à circuler et les rues furent asphaltées à partir de 1925. Apparurent alors les premiers dépôts de carburant (Shell et Standard), la première pompe à essence ayant vu le jour vers 1922[16].
Le relatif boom commercial qui caractérise Tizi-Ouzou dès le début du 20è siècle était dû, plus au processus de monétarisation du mode de vie induit par la destruction de l’économie kabyle traditionnelle qu’à l’impact du pouvoir d’achat de la population européenne[17]. Par contre, il n’y eut guère d’activités industrielles. En effet, à Tizi-Ouzou, la colonisation française fut essentiellement le fait de quelques propriétaires terriens et surtout « d’employés de l’administration et de petits commerçants » [18]. La colonisation agraire s’était davantage déployée à l’ouest de Tizi-Ouzou et dans la proche Mitidja, d’où le chapelet de petits villages coloniaux qui se déploient entre les deux localités : Mirabeau, Camp du Maréchal, Haussonvillers, Bordj Ménaiel, Félix Faure, Ménerville, etc…
Chef-lieu d’arrondissement en 1900, Tizi-Ouzou a gardé son caractère villageois jusqu’à la guerre de libération nationale ; ce n’est qu’en 1956 qu’elle est promue chef-lieu de département. La ville connaît alors une remarquable extension en débordant de ses limites initiales, et commence à être dotée d’un certain nombre de nouveaux équipements administratifs et sociaux : hôpital, commissariat de police, siège de la préfecture…
A partir de 1956-1957, par suite de la politique de terre brûlée en zone de montagne, les ruraux affluèrent vers Tizi-Ouzou où ils furent parqués dans des cités de recasement : La Carrière, Cité Mokadem, etc… En 1958, à la faveur du Plan de Constantine lancé par le général de Gaulle, on créa les premiers emplois (hors agriculture) à l’endroit des autochtones et la construction des logements de type Habitat à Loyer Modéré (H.L.M.) : Cité Million, Cité Eucalyptus, Les Genêts… A cause de la guerre, Tizi-Ouzou connut ainsi sa première grande mutation socio-économique et démographique.
De 1962 à nos jours : la naissance et l’affirmation d’une métropole régionale ?
Cerner l’évolution récente de Tizi-Ouzou n’est pas aisé en raison de l’impératif de distanciation et du recul suffisant par rapport aux faits et évènements ainsi qu’au manque, voire l’absence de documents portant sur la période post-indépendance.
Quoiqu’il en soit, la ville de Tizi-Ouzou a connu au cours des trente dernières années, de profondes transformations guère aisées à cerner.
Toutefois, on peut postuler que les conditions historiques qui ont présidé à l’occupation humaine du “Col des Genêts” restent valables pour l’époque contemporaine. En l’espèce, les évolutions récentes de la ville ne peuvent guère se lire dans son cadre intra-muros ; elles s’inscrivent pleinement dans la dynamique de l’espace régional kabyle, du moins de sa partie occidentale : la Grande Kabylie. Aussi, convient-il de ne pas perdre de vue cette sorte de déterminisme régional qui tend à faire de la ville de Tizi-Ouzou un espace urbain où convergent les regards de centaines de villages kabyles. C’est que celle-ci est devenue, au fil du temps, un pôle politico-administratif, économique et socio-culturel où se nouent et se dénouent les problèmes et les contradictions d’un ensemble géographique et humain situé en gros entre deux autres cols, Tizi-n At Aïcha (Thénia ex : Ménerville) et Akfadou. De même que Tizi-Ouzou porte le poids historique du rôle joué par la Kabylie dans la guerre de libération nationale ; elle a notamment soutenu et abrité en 1962-1963, l’opposition à l’armée des frontières du colonel Boumédiène. En effet, le groupe dit de Tizi-Ouzou (B. Krim, M. Boudiaf, Mohand Ou Lhadj…), a établi son quartier général dans cette ville en vue d’empêcher la prise du pouvoir par l’armée des frontières dont la tête politique était le groupe dit de Tlemcen (A. Ben Bella, H. Boumédiène, M. Khider…). De même que le Front des Forces Socialistes (F.F.S.) créé en septembre 1963, trouve momentanément refuge à Tizi-Ouzou, avant de se replier dans la montagne.
De ces péripéties inhérentes aux luttes de succession au pouvoir colonial, Tizi-Ouzou – et plus globalement la Kabylie – en gardera les stigmates. En lançant, en 1963-1964, le projet de l’usine textile à Draâ Ben Khedda, Ben Bella tentait de désamorcer les tensions et les troubles de la période post-indépendance ; objectif, que reprendra à partir de 1965, le régime suivant. Jusqu’à la fin des années 1960, Tizi-Ouzou continuait à évoluer dans le cadre de l’héritage socio-économique colonial, c'est-à-dire un relais militaire, administratif et commercial. De fait, la période qui suit l’indépendance est caractérisée par un marasme économique et social persistant, aggravée par le retour de nombreux réfugiés et émigrés, d’autant que « les transformations économiques dont le nouveau gouvernement se prévalait n’avaient guère eu (…) d’application concrète »[19] dans une région parmi « les plus touchées par la guerre »[20].
Le régime issu du coup d’Etat de juin 1965, tout en gardant un œil vigilant sur les velléités séparatistes[21], ne perd pas de vue les immenses besoins dont souffrait la région ; et, à ce titre, il s’y attela à s’en occuper notamment, par l’élaboration et la mise en œuvre d’un important programme socio-économique destiné au développement de la Wilaya de Tizi-Ouzou. Le volet économique consistait à lui octroyer un certain nombre d’infrastructures au titre d’un Programme spécial et Boumédiène et son gouvernement tinrent réunion, à cet effet, à Tizi-Ouzou en octobre 1968. Plus que la région, ce fut Tizi-Ouzou-ville qui bénéficia de l’essentiel de l’enveloppe budgétaire allouée : nouveaux immeubles d’habitation, Maison de la culture, hôpital psychiatrique, siège de l’Inspection académique, lycée, institut de formation hôtelière, hôtel de haut standing etc… Quant au volet politico-culturel de ce programme, la politique d’arabisation de l’enseignement et de l’administration entreprise à l’échelle du pays, est particulièrement soutenue en Kabylie. Tizi-Ouzou est promue ville-pilote en la matière et ses « succès » sont mis en avant et cités en exemple dans les médias.
Mais, c’est au cours de la décennie 1970 que Tizi-Ouzou connaîtra sa vraie métamorphose. En effet, c’est durant cette période qu’elle reçoit des projets d’équipements structurants de dimension régionale et nationale. Parmi ces équipements qui hisseront Tizi-Ouzou au rang de ville moyenne, sinon à celui de métropole régionale de fait, on citera la zone industrielle de Oued Aïssi, la Zone d’Habitat Urbain Nouvelle (Z.H.U.N.) ou “Nouvelle Ville”, l’implantation de lotissements à habitat résidentiel, la rénovation du centre-ville, l’université… La réalisation de ces équipements induit la création de dizaines d’entreprises de B.T.P.et de services divers qui contribuent à la création d’une douzaine de milliers d’emplois, ce qui fait de Tizi-Ouzou à la fin des années 1970 et de la première moitié des années 1980 le quasi unique bassin d’emploi de la Grande kabylie. D’où, l’effet magnétique qu’exerce, depuis, la ville sur son arrière-pays, ce qui fait d’elle un pôle d’affluence qui attire quotidiennement un flux de visiteurs trois à quatre fois supérieur au nombre de résidents intra-muros. Il est vrai que la ville a concentré l’essentiel des investissements économiques et socioculturels destinés en principe à l’ensemble de la région, effet découlant, pour une large part, du schéma National d’Aménagement du Territoire (S.N.A.T.) qui assignait à Tizi-Ouzou le rôle de ville-tampon pour l’émigration kabyle vers Alger[22].
A partir de 1980, cette politique dite d’“équilibre régional” connaîtra une période de fléchissement[23]. Tizi-Ouzou en pâtira ; elle verra par conséquent, les financements étatiques de ses projets se raréfier et sa capacité de création d’emplois freinée. Les seules réalisations notoires ont été celles d’équipements sécuritaires (casernes de gendarmerie et de police) implantés dans la banlieue de Tizi-Ouzou : Laâzib, Boukhalfa, Ihesnawen, Fréha.
Depuis lors, sa fonction de “ville-barrage” de l’exode kabyle vers l’agglomération algéroise est remise en cause et son développement sera poursuivi principalement par le capital privé ; ce qui se traduira, la corruption aidant, par une grande anarchie urbanistique et une dilapidation de son assiette foncière. Sa zone industrielle conçue par les planificateurs nationaux pour en faire le poumon économique du bassin occidental du Djurdjura, ne dépassera pas le stade d’îlot d’industrialisation sans grand impact sur la ville[24]. Aussi, Tizi-Ouzou est restée, pour l’essentiel, une cité où les activités tertiaires (administration, commerces, services…) prédominent toujours. Sa mutation industrielle n’a pas eu lieu.
Par contre, au plan politique et culturel, Tizi-Ouzou a été, dans la période 1980-2002[25], le théâtre d’une formidable effervescence qui a profondément marqué la ville et dont les effets vont bien au-delà de la Kabylie. En abritant, à partir de 1977-1978, un pôle universitaire qui a rassemblé en quelques années des milliers d’étudiants et d’enseignants venus des quatre coins de la région et de la diaspora, Tizi-Ouzou est devenue la caisse de résonance du mouvement revendicatif berbère.
Elle a vu naître les premiers regroupements et associations culturels et politico-syndicaux autonomes de l’Algérie indépendante : Associations estudiantines, association de médecins hospitaliers, Mouvement Culturel Berbère (M.C.B.), Association des Enfants de Chouhada, le parti du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (R.C.D.)…
Tizi-Ouzou et son université : un apport majeur mais des rapports ambigus
C’est en 1977-1978 que s’effectue la première rentrée universitaire à Tizi-Ouzou. Les premiers effectifs se sont élevés à 490 étudiants et des enseignants à 31, regroupés dans quatre instituts et installés à Oued Aïssi (site devant servir de centre d’accueil pour personnes âgées) en 1977 puis, en 1978, le lycée d’Ihesnawen encore en chantier, est affecté au centre universitaire. Plusieurs années après, à chaque rentrée universitaire, la commune de Tizi-Ouzou devait mettre à sa disposition des locaux désaffectés ou retirés à d’autres institutions pour faire face à l’afflux d’étudiants : salle de cinéma du centre-ville, amphithéâtre situé au sous-sol du sanatorium, un centre d’enfants de Chouhada, une ancienne école de techniciens du bâtiment etc…Tel est le début, pour le moins chaotique de l’université de Tizi-Ouzou.
En fait, dès le départ, l’histoire de cette université régionale, décidée lors de l’élaboration de la carte universitaire en 1974-1977, dont l’objectif officiel était de désengorger l’université d’Alger, est marquée du sceau de l’incertitude. Le lieu d’implantation initialement prévu était Bouira, choix motivé, selon les concepteurs de la carte par sa configuration de ville-carrefour entre la Kabylie, les Hauts-Plateaux et l’axe Alger-Constantine. Le président Boumédiène aurait tranché, semble-t-il en faveur de Tizi-Ouzou, faisant valoir l’argument démographique et la proximité avec la capitale.
On assistera, de ce fait, à une évolution erratique voire schizophrénique du centre, caractérisée par un afflux exponentiel des effectifs estudiantins en passant de 490 en 1978 à 13.500 en 1990, installés alors dans des structures inadaptées et ingérables. Aux premiers sites "prêtés" par la commune de Tizi-Ouzou, l’on relève de nouveaux campus tout aussi provisoires (Boukhalfa, ITE, lycée Hamlat…).
Ainsi, au lieu d’un pôle universitaire structurant pour la ville et son hinterland a surgi rapidement une structure éclatée, hétérogène et insérée de façon très peu harmonieuse dans l’agglomération en voie de métropolisation.
Au début des années 1990, suite à la décrispation politique de l’après parti unique et surtout en raison de l’explosion de la démographie estudiantine, l’ancien projet de construction est réhabilité. Le chantier est lancé de nouveau en 1994-1995 mais l’idée initiale est réduite à la réalisation d’un pôle technologique sur une assiette foncière fortement entamée par la spéculation et détournée vers d’autres besoins. Tout compte fait, les différents campus provisoires destinés à être fermés, deviennent des sites permanents et reçoivent même des constructions additives pour faire face à la montée fulgurante des effectifs estudiantins (2.000 à 3.000 nouveaux inscrits en moyenne par an depuis une douzaine d’années pour atteindre au total 33.000 à la rentrée 2004-2005.
Répartis de façon aléatoire à la périphérie de la ville (est, ouest et sud), les sites se caractérisent par leur faible intégration au tissu urbain et fonctionnent comme des appendices que les autorités publiques s’efforcent de tenir à l’écart de la vie de la cité. Il n’y a, en effet, à l’intérieur de la ville de Tizi-Ouzou aucune infrastructure socioculturelle (restaurant universitaire, bibliothèque, lieux pour les sports et les loisirs…) destinée aux milliers d’étudiants transitant quotidiennement. Il n’a pas été prévu de centres d’accueil répondant aux besoins spécifiques des étudiants qui constituent pourtant un quart de la population de la commune de Tizi-Ouzou. Jusqu’à ce jour, rien n’est encore décidé pour faire face à l’afflux croissant de la population estudiantine à Tizi-Ouzou.
Cependant, en dépit de l’isolement des campus hors de la ville, leur impact est de plus en plus manifeste. La présence quotidienne de milliers d’étudiants s’y exerce, conférant à la cité animation et de nouvelles mœurs. C’est ainsi que les commerces du centre-ville et des quartiers proches des instituts (ou facultés) s’adaptent aux besoins des étudiants (cybercafés, sandwicheries, boutiques de photocopies, de vêtements…), alors que les petits emplois pour étudiants commencent à voir le jour. D’autant que population estudiantine est en majorité composée[26] de filles avec quelques dizaines d’étudiants étrangers (Afrique noire, Madagascar…), ce qui donne une nouvelle coloration sociologique à la rue tizi-ouzienne.
Ainsi, devenue ville à forte population universitaire, l’urbanisation de Tizi-Ouzou s’affirme de plus en plus au vu des mutations socio-culturelles profondes et ses nouvelles fonctions à travers notamment les activités intellectuelles et culturelles… En tout état de cause, c’est grâce à l’université que les défenseurs de la revendication culturelle berbère et de façon plus générale de la demande démocratique qui ont trouvé un lieu de rassemblement propice. De ce fait, l’agglomération de Tizi-Ouzou est devenue, au cours de la décennie 1980, un pôle d’expression politico-syndical et culturel qui n’est pas resté sans effets sur la capitale proche, voire sur tout le pays. Le mouvement culturel berbère y a inscrit ses premiers jalons, comme à Bgayet, avant d’exercer son influence dans toute la Kabylie et bien au-delà.
La dynamique née de ce mouvement est à l’origine, nous semble-t-il, du renouveau des comités de villages (anciennement tajmaعt) en Kabylie. C’est le cas aussi dans les quartiers de la Haute-ville de Tizi-Ouzou qui ont gardé une certaine allure villageoise ; une dizaine de djemaâs ont (ré)apparu en 1988-89 avec leurs prérogatives traditionnelles (travaux d’intérêt collectif, rites sociaux : timechret, lwaعda…) mais aussi en prenant en ligne de compte les préoccupations nouvelles : démarches auprès des autorités politiques et administratives, logements, distribution de l’aide du Croissant Rouge… D’autres quartiers de la ville ont repris l’initiative[27] sous des formes et à des degrés divers ; les assemblées traditionnelles se sont (ré)implantées plus facilement dans les anciens quartiers. Mais, c’est en 2001-2002 que ces structures sociopolitiques d’origine villageoise se sont affirmées de façon plus visible à Tizi-Ouzou[28].
Evolution démographique et économique
Adossée à un massif montagneux densément peuplé (un à deux millions d’habitants selon un cercle d’influence d’une cinquantaine de kilomètres de rayon) et dépourvu d’activités économiques, la ville de Tizi-Ouzou est, théoriquement, toute désignée pour accueillir (recueillir pourrait-on dire) une bonne partie de cette population et lui offrir des moyens de vivre.
Avec l’afflux de population durant la guerre et surtout à la suite de la proclamation de l’indépendance (en juillet 1962), on pressentait un boom exponentiel de son périmètre urbain, d’autant que le nouveau gouvernement lança dès 1963 le projet du complexe textile de Draâ-Ben-Khedda (prévu en 1958 dans le Plan de Constantine) qui laissait prévoir des retombées économiques sur la cité et son hinterland.
Pendant environ un siècle, de 1858 date de sa fondation officielle, à 1954 date du début de la guerre de libération, Tizi-Ouzou était resté un bourg colonial et un grand marché hebdomadaire ouvert à la population du versant occidental du Djurdjura. Sa démographie intra muros est passée de quelques centaines d’habitants à la fin de la conquête de la Kabylie en 1858 (dont une bonne dizaine d’Européens) à environ deux mille en 1911 (dont 2/3 d’Européens, militaires non compris), autant dire un apport de population peu significatif eu égard à la multitude de l’arrière-pays montagneux (35.000 à 40.000 habitants en 1848, 43.000 à 45.000 en 1910 selon diverses estimations). Entre les deux dates, la population tizi-ouzienne a évolué en dents de scie passant de 2.700 en 1876 à 2.400 en 1881 pour régresser à 1.400 en 1890[29], et atteindre à 2.800 en 1901…, en raison probablement des conséquences induites de l’insurrection kabyle de 1871 (reflux de la population autochtone, fluctuation de l’élément européen…). A la fin du XIXe siècle, Dellys compte 3.600 habitants en 1881 mais la tendance commence à s’inverser au profit de Tizi-Ouzou avec l’ouverture de la voie de chemin de fer Alger-Tizi-Ouzou en 1888 en favorisant le long de la voie ferrée la création d’un chapelet de villages de colonisation. Aussi, Tizi-Ouzou prend- il un certain relief en devenant un entrepôt commercial et surtout en renforçant dans sa fonction de commandement militaire et administratif de la Kabylie occidentale, sans toutefois attirer la population environnante. C’est à partir de 1958, période d’intensification des opérations militaires dans les villages de montagne, que commencent à y affluer les villageois de proche en proche. La population de Tizi-Ouzou passe alors d’environ 5.500 habitants au début de la guerre (1954) à 15.000 en 1960 et 23.000 à la fin de la guerre de libération nationale contre 2 800 âmes en 1901 pour atteindre 3.000 en 1931 et 5.000 en 1950.
En somme, si la guerre d’indépendance a déclenché les premiers mouvements d’exode rural vers Tizi-Ouzou, cet exode ne fut pas massif car étroitement contrôlé par l’autorité coloniale. De plus, restée à l’état de bourgade coloniale sans activités économiques d’envergure (industries, services…), la cité ne pouvait recevoir un afflux important de population[30]. Les initiatives prises à partir de 1958 (construction de logements collectifs, tentatives de redynamisation de l’artisanat local…), dans le cadre du Plan de Constantine, étaient arrivées trop tard et en tout cas très insuffisantes pour répondre aux besoins d’une région très appauvrie et déstructurée par la guerre. Aussi, pendant longtemps, Tizi-Ouzou a été plus un point de transit et un marché qu’un lieu de fixation durable pour les montagnards kabyles ; cette caractéristique est, dans une certaine mesure, encore en vigueur aujourd’hui.
Les flux massifs des ruraux vers les villes, qui marquèrent l’Algérie à l’indépendance (à partir de juillet 1962), furent relativement modestes à Tizi-Ouzou. De 1962 à 1966, période d’exode des Européens, la population tizi-ouzienne n’augmenta que, si l’on peut dire, d’environ 4.000 âmes (de 23.000 à 27.000 habitants). Il a fallu attendre les premières actions d’investissement de l’État (le Programme Spécial de 1968 et surtout les projets d’équipement du début des années 1970 : industries (textile et électroménager essentiellement) et logements (pour les fonctionnaires et autres agents de l’État) pour voir Tizi-Ouzou devenir un pôle d’attraction démographique. La population passe alors à 41.000 habitants en 1977 et 60.000 en 1987, soit un taux de croissance d’environ 52% de 1966 à 1977 et de 46% de 1977 à 1987. Mais ce croît moyen de 5% l’an sur une trentaine d’années (1960-1990), n’est plus que de 3% à la fin du XXe siècle et semble décliner encore au début des années 2000[31] Au début du 21è siècle, la population de Tizi-Ouzou n’a pas encore atteint les 100.000 habitants (79.300 en 1998) et selon diverses projections, ce chiffre ne sera atteint que vers les années 2010-2012, voire au-delà.
Ce ralentissement de la croissance démographique de la ville de Tizi-Ouzou s’explique par trois facteurs, essentiellement :
- La persistance, voire la modernisation de l’habitat rural kabyle qui, de plus en plus renforcé par la micro urbanisation de montagne, joue un rôle non négligeable dans le maintien des villageois dans leur village.
- La raréfaction de l’emploi depuis le milieu des années 1980.
- La pénurie de logements dans le périmètre urbain de Tizi-Ouzou.
A cela on pourrait ajouter la contrainte topographique (insertion de l’espace urbain tizi-ouzien entre les monts du Belloua et d’Ihesnawen qui limitent de façon draconienne son assise foncière).
Quoi qu’il en soit, la situation économique actuelle de la ville de Tizi-Ouzou caractérisée par la contraction de l’investissement public (léthargie du complexes textile de Draâ-Ben-Khedda et de la zone industrielle de Oued Aïssi, dissolution de nombreuses petites et moyennes entreprises, notamment celles du bâtiment, fragilité de l’entreprise privée…)[32] ne laisse pas envisager, à court et moyen terme, un dynamisme économique suffisant, à même de relancer la croissance démographique et urbanistique de la ville.
Toutefois, en raison de la grande intégration de Tizi-Ouzou avec son arrière-pays kabyle, et ses fonctions administratives, universitaire et commerciale, de par sa position de ville médiane entre la Kabylie occidentale et l’agglomération algéroise, son rôle de métropole régionale ne cesse de se renforcer. Dans cette perspective, il est impératif qu’elle se dote d’une politique urbaine rigoureuse afin d’une part, d’agir positivement sur l’aggravation de nombreux problèmes : dysfonctionnement et engorgement de la métropole, dilapidation patrimoine foncier... et d’autre part, d’anticiper sur les besoins futurs de ses habitants intra-muros et de ses centaines de milliers de visiteurs quotidiens.
Bibliographie
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Notes
[1] Extraits du Décret impérial du 27 octobre 1858 portant création du centre de Tizi-Ouzou et d’un rapport à l’Empereur du 25 octobre 1858 ; voir annexes dans l’ouvrage collectif de Dahmani, M. ; Doumane, S. ; Oualiken, S. et Saheb, Z., Tizi-Ouzou, fondation, croissance, développement, D.B.K./Tizi-Ouzou, Editions Aurassi, 1993.
[2] Cf. Notes sur l’histoire des Kabylies, FDB. 1964.
[3] Cf. le Mesnage, P. J., Romanisation de l’Afrique du Nord, Paris, Edition Gabriel Beauchesne, 1913.
[4] Ibn Khaldoun cité par Kaddache, M., in l’Algérie médiévale, Alger, SNED, 1982, p. 66.
[5] Cf. Morizot, Jean., Les Kabyles, propos d’un témoin, Paris, CHEAM, 1985.
[6] Située à l’embouchure de la vallée du Sébaou, Dellys est entre les mains de Kheireddine Barberousse en 1517-1518, d’où il organise ses expéditions en Méditerranée et ses incursions en Basse Kabylie. En 1520, eut lieu à Tizi n At Aicha, la première grande bataille entre Kabyles et Turcs, où fut tué le souverain de Koukou Ahmed ou- El Kadi.
[7] Cf. Robin, N., notes sur l’organisation militaire et administrative des Turcs en Grande Kabylie, in revue africaine n° 17, 1973.
[8] La tradition attribue au Bey Mohammed Ed-Debbah (l’égorgeur) le massacre de milliers de Kabyles dont il a exposé les têtes au Sebt-El-Khodja (le marché hebdomadaire de Tizi-Ouzou de l’époque, fondé par le caïd Ali Khodja).
[9] Le produit de la course en Méditerranée et de la fiscalité interne, étaient destinées à l’entretien de l’armée turque et aux dépenses des palais et résidences des Pachas, des Deys, des Beys et de leur administration. Hormis quelques établissements résidentiels et religieux, les Turcs n’ont fondé en Algérie ni villes ni infrastructures économiques et sociales.
[10] Expression rapportée par Germain, Roger, in La politique indigène de Bugeaud, Paris, Edition Larose, 1955, p. 162.
[11] Coll, L., Croissance urbaine et développement, le cas de la ville de Tizi-Ouzou, Doctorat, Université de Toulouse le Mirail, 1978.
[12] Cf. De Nogueira de Lima, J., Une opération de rénovation urbaine dans un pays en voie de développement, le cas de Tizi-Ouzou, mémoire de Maîtrise, Paris III, 1979.
[13] Cf. Julien, C. A., Histoire de l’Algérie contemporaine, Paris, PUF, 1964.
[14] Ibid, p. 487.
[15] De 1888 à 1910, la ligne de chemin de fer bifurque de Mirabeau (Draâ-Ben Kedda) vers Boghni.
[16] Nous tenons ces informations de Mr Salcédo, L., né à Dellys et installé à Tizi-Ouzou en 1911. Véritable mémoire de Tizi-Ouzou jusqu’à la fin des années 1980, M. Salcédo que nous avons rencontré en 1988 n’a pas lésiné sur son temps pour répondre à nos questions. Nous lui sommes très reconnaissants.
[17] La ruine de l’économie kabyle traditionnelle induite notamment par les conséquences de l’insurrection de 1871 (destructions, séquestres, corvées, représailles fiscales…) et l’irruption de l’économie capitaliste ont provoqué un vaste mouvement de prolétarisation des paysans et des artisans kabyles. Les marchandises issues de l’industrie française (cotonnades, savons, bougies…) firent leur apparition dès la fin du XIXe siècle non seulement à Tizi-Ouzou mais aussi dans les villages de montagne.
[18] Coll, J.L., Op. cit., p. 20.
[19] L’arrière-pays densément peuplé ne pouvait donc compter sur I ’infrastructure économique et sociale de Tizi-Ouzou pour absorber, au moins partiellement, son sous-emploi et son déficit en matière d’équipements socio-éducatifs.
[20] Lacoste- Dujardin, C. et Lacoste, Y., « Les revendications culturelles des Berbères de Grande Kabylie », in Le Monde Diplomatique, décembre 1980.
[21] Ibid.
[22] La réalisation effective de ces infrastructures s’étalera sur une période qui débordera sur la décennie 1980.
[23] Cette politique d’aménagement consistait à diriger certains investissements vers les villes de l’intérieur (Batna, Sétif, Tizi-Ouzou, Médéa, Sidi Bel Abbas…) de façon à atténuer la pression de l’exode rural sur les grands pôles industriels situés autour des trois grandes villes côtières : Alger, Oran, Annaba.
[24] Cf. Dahmani, M. et autres auteurs, Op. cit.
[25] Cf. Doumane, S., Modernisation économique et pesanteur socio-économique en Algérie, l’exemple de la Kabylie, doctorat, Université de Lille I, 1993.
[26] Un rapport élaboré en 1989-1990 par le vice-rectorat chargé de la planification intitulé Situation actuelle et perspectives de développement aux horizons 1999-2000, tirait la sonnette d’alarme en signalant le hiatus entre l’état des infrastructures et l’évolution des effectifs. Partant des taux de croissance de 1978 à 1989 (le nombre d’étudiants passe de 490 à 10.383), les effectifs prévus pour les années 1995, 1999 et 2000 sont estimés respectivement de 23.500, 53.000 et 55.000 ! !
[27] Chaque année à l’occasion du 20 avril, date-anniversaire de la grève de protestation contre l’interdiction d’une conférence de Mouloud Mammeri sur la poésie kabyle ancienne, se déroulent à Tizi-Ouzou et à Bgayet d’imposantes manifestations populaires.
[28] Il s’agit là d’un constat empirique, somme toute assez superficiel. L’approche de ce phénomène nécessite une étude approfondie et dans le temps, de manière à en saisir la teneur et les transformations sociologiques en cours.
[29] Chiffres estimés à partir de différents témoignages de militaires ou de chroniqueurs de la conquête ; ce n’est qu’après la généralisation de l’état civil au début du XXe siècle et surtout celui du recensement dans les années 1920 que le dénombrement de la population est devenu plus fiable.
[30] Pourvue d’infrastructures socio-économiques (emplois, logements…) destinées prioritairement à la population d’origine européenne, Tizi-Ouzou ne pouvait servir de réceptacle à la population kabyle qui fuyait les villages. Les destinations principales des migrants kabyles pendant la période coloniale, étaient l’agglomération algéroise et la France métropolitaine (pour l’émigration de travail masculine).
[31] Le taux serait de 2,3 % selon les chiffres de Brahim, Salhi., in Une capitale régionale, Tizi-Ouzou, Guide-annuaire de la Chambre de Commerce du Djurdjura (Tizi-Ouzou, Bouira), Agir-Plus Edition, 2003.
[32] Cf. Ouamer Oussalem, M., L’industrie dans la wilaya de Tizi-Ouzou, essai d’analyse en longue période, Guide-annuaire de la Chambre de Commerce de Tizi-Ouzou…, Op. cit.