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Anthropologie d'un nouvel espace habité : enjeux fonciers et spatialités des classes moyennes à Oran et sa banlieue (Algérie)

Insaniyat N°2 | 1997 | Espaces habités | p. 05-26 |  Texte intégral


Anthropology of a new dwelling space : land stakes and spatial logics of middle classes in Oran and its suburbs (Algeria)

Abstract : First generation property cooperatives (1977-1985) have set up for middle classes and local power a tremendous stake owing to the establishment of communal land reserves and this, in a country where private land appropriation was, in 1974, almost impossible because of the Algerian nationalization economy. Guided by modern planning methods, diverting the cooperative spirits has given rise to a new adapted dwelling space. In fact, the wager between modern rationality and identity logics has finished by modifying the outside arrangements and espacially the insides of villas owing to past heritage and actual needs. An analysis of habitat spatiality, considered as a series of logics belonging to the middle and wealthy classes, is well worth being studied more thoroughly and extended.

Keywords : inhabited space, the middle classes, home, state, family


Abed BENDJELID : Université d’Oran, Département de géographie et de l'aménagement du territoire, 31 000, Oran, Algérie.
Centre de recherche en Anthropologie Sociale et Culturelle, 31 000, Oran, Algérie.


En cette fin du XXe siècle, le territoire d'Oran et de ses communes de banlieue proche connaît une fragmentation du bâti que l'observateur averti peut distinguer sans aucune difficulté; en effet, celui-ci peut identifier d'un côté une urbanisation légale et de l'autre, une urbanisation illégale appelée à être, il est vrai, régularisée. A l'intérieur de la ville légale s'individualisent parmi les nouveaux sites urbanisés, l'espace des coopératives immobilières dont les caractères sont bien marqués par la qualité de ses constructions individuelles, son contenu social dominé par des classes moyennes et aisées et par un niveau d'équipement acceptable.

La municipalisation des terres urbanisables en 1974, à travers la constitution des Réserves Foncières Communales, a été bien vite perçue comme un énorme enjeu foncier avant d'être d'ailleurs, un enjeu immobilier. C'est toute la question du mode d'appropriation des terres publiques qui a été ainsi mise au centre d'un conflit entre la vision de l'Etat centralisateur et planificateur d'un côté, et les pratiques des acteurs locaux de l'autre.

En dépit d'un urbanisme réglementaire patiemment remodelé après l'indépendance, la course aux lots coopératifs a été menée tambour battant. Comment a été détourné, malgré les injonctions de l'administration centrale, l'esprit coopératif au profit de l'espace individuel? Peut être plus que la géographie sociale, l'approche anthropologique nous aide à mieux comprendre les manières avec lesquelles les classes moyennes et aisées ont tenté de concilier au sein de la production du nouvel espace habité individuel, la rationalité moderne des procédures administratives et architecturales et «l'autre rationalité» qui elle, semble répondre à une culture identitaire plutôt marquée par les coutumes et les traditions locales.

I. LES COOPERATIVES IMMOBILIERES: UN ENJEU FONCIER POUR LES CLASSES MOYENNES ET AISEES

a. L'enjeu foncier constitué par les Réserves Foncières Communales

L'année 1976 a marqué une étape importante dans la mise en forme des textes de l'urbanisme réglementaire de l'Algérie indépendante et bien plus, le gouvernement avait exposé clairement la politique de l'habitat à mener. En effet pour la première fois, le pouvoir central a reconnu explicitement qu'il ne pouvait plus désormais, prendre en
charge le financement et la construction des logements et, il a appelé «tous les citoyens, tous les travailleurs, tous les chefs de famille, individuellement ou groupés au sein de coopératives…» à «participer à l'entreprise d'édification du nouvel habitat…» relève la note de présentation gouvernementale relative à l'habitat.

Amplifiés par le discours politique, les textes réglementaires ont trouvé au sein des groupes d'intérêts locaux un terrain extrêmement favorable pour une concrétisation rapide de la décision centrale. Logiquement reliée à la municipalisation des réserves foncières, cette application apparaît à la fois comme une manière de mettre à contribution les citoyens en vue de financer leur habitation, de redistribuer indirectement une partie de ressources pétrolières nationales et d'asseoir les classes moyennes salariées travaillant au sein des institutions publiques et administratives. C'est là que se situent les véritables enjeux de l'amorce d'un marché foncier, désormais entrouvert, capable de récompenser les gestionnaires d'une façon générale et les élus locaux en particulier. Ceux-ci avaient commencé à ébaucher les listes initiales constituant les premières coopératives immobilières en s'octroyant, dans les trois communes de la proche banlieue oranaise étudiées ici, des lots de terrain situés à l'intérieur des tissus urbains et pouvant couvrir jusqu'à 800 m2 chacun! (BOUZADA F. - MOUSLIM S., 1990). Les attributions d'assiettes foncières, géographiquement bien localisées, expliquent en grande partie l'origine de tous les conflits et toutes les tractations possibles et imaginables au moment de dresser les listes des participants à la constitution de toute coopérative immobilière. A travers ces enjeux fonciers et par là économiques, ont été occultées volontairement toutes les pratiques de népotisme et de corruption qui ont été révélées, quelques années plus tard, par une série d'incarcérations d'élus et d'employés de l'administration locale.

b- La voie de l'accession à la propriété foncière privée par la filière coopérative: le rôle des corporations professionnelles locales

Rumeur chez les uns et réalisme chez les autres ont joué lors de la confection de listes composées d'une vingtaine de personnes par coopérative immobilière. Regroupement professionnel et corporatisme ont, au départ, permis de dresser ces fameuses listes au sein même des institutions publiques administratives (assurances, finances, gendarmerie, douanes, hydraulique, enseignement, agriculture, université, entreprises du bâtiment, employés communaux, santé…), voire d'associations professionnelles privées (commerçants, industriels, professions libérales entrepreneurs…). Peu après, la dénomination initiale des coopératives immobilières faite selon la base professionnelle a finalement donné lieu à une substitution nominale qui a puisé ses qualificatifs dans l'histoire récente du pays, les textes idéologiques, les actions marquantes du développement économique, la symbolique…

Mieux informés car proches de la ressource d'information, les gestionnaires du secteur public et ceux qui gravitent autour du pouvoir ont su mettre à profit le discours politique qui invoquait «les nouveaux besoins de la population et les exigences du progrès social» pour se «placer» et ajouter sur les listes établies, quelques membres de la famille élargie et quelques connaissances occupées dans un secteur économique privé mal vu, à l'époque par le pouvoir central. Pour beaucoup, l'accès du marché foncier par le biais de la coopérative immobilière était une première étape vers l'appropriation privée du sol urbain bien plus intéressante que les avantages qui accompagnent cette opération. En ce sens, ce n'est pas tant la construction individuelle qui importait, mais l'acte juridique qui permettait de s'approprier à moyen terme une partie de l'assiette foncière, même si à l'échelon central, on voulait des maisons individuelles construites par des classes moyennes et non pour des classes moyennes du secteur public et même d'un secteur privé (acteurs de la vie économique, culturelle…) de plus en plus toléré. Toutefois, «le caractère professionnel du collectif des bénéficiaires, au départ remarquable, atteste d'une cohérence sociale recherchée par les classes moyennes, voire aisées, en vue d'obtenir le lot de terrain tant convoité et de profiter ainsi, des multiples avantages permis par l'organisation coopérative» (BENDJELID A.a. p.).

c- Les avantages consentis par l'Etat au profit des coopérateurs

Secondaires en apparence, les avantages concédés par l'Etat aux acteurs directes de cette filière de production du bâti sont, économiquement parlant, considérables.

En s'engageant dans la construction d'une maison individuelle dans un cadre coopératif, les membres de toute coopérative immobilière ont eu un accès prioritaire à l'achat de matériaux de construction et à des prix très avantageux auprès des agences locales des sociétés nationales de distribution. Dans un marché soumis périodiquement à des pénuries, le coopérateur détenteur d'une carte de client bénéficiait d'un quota prévu en matériaux de construction (ciment, briques, fer à béton, bois, carrelage, articles sanitaires…) et à des prix largement subventionnés par le budget de l'Etat!

Par ailleurs, la caisse d'Epargne a accordé des prêts avec des intérêts bonifiés très avantageux (4%) aux épargnants solvables, mais là, le crédit est individuel; consenti sur une vingtaine d'années, le prêt concédé a connu une progression constante: 240.000 dinars en 1978, 320.000 en 1982, et 450.000 en 1986. Quant au montage financier de l'opération, il demeure strictement personnel; selon les dires de certains coopérateurs-fonctionnaires, au début des années 1980, le prêt pouvait couvrir 40 à 50 % du coût global de la villa! Dans cet ordre d'idée, nous pouvons dire sans aucune exagération que les coopératives de la première génération (1977-1985) avait largement bénéficié des retombées de la rente pétrolière redistribuée (coût de cession du terrain, prix des matériaux de construction, subvention partielle des V.R.D., crédit bancaire bonifié…) par le pouvoir central. C'est ainsi que l'Etat-providence avait permis à un nombre appréciable de cadres supérieurs, de cadres moyens et d'employés occupés dans le secteur public de construire leur maison individuelle; une enquête menée en 1990 atteste que 40,2% des constructions coopératives avait bénéficié d'un prêt de la Caisse Nationale d'Epargne et de Prévoyance.

d- Au brassage social demandé par l'Etat, les groupes des acteurs locaux répondent par une action de différenciation spatiale

Même en définissant «le cadre juridique des structures coopératives immobilières de réalisation au sein desquelles la construction privée prendra pleinement son essor» à l'intérieur de la note de présentation gouvernementale relative à l'habitat, l'Etat a recentré sa vision de l'opération en tentant d'éviter de ce fait, l'accaparement du foncier par les populations les plus aisées et les plus solvables. Ainsi, est recherchée une forme plus équitable de l'allocation foncière qui donne à des candidats ayant des revenus modestes la possibilité d'accéder aux coopératives immobilières. Des injonctions, à peine voilées, ont été destinées aux collectivités locales par le Centre; le but logique était d'obtenir un brassage socio-professionnel des bénéficiaires, évitant ainsi toute forme de ségrégation sociale et de différenciation géographique. C'est, ensemble-t-il, une des conditions de l'aide multiforme que devait apporter l'Etat aux collectivités locales dans le domaine du transfert de terrains urbanisables, du coût de la viabilisation, de l'aide technique…

Les injonctions de l'Etat ont été appliquées même si l'exécution a donné lieu, çà et là, à des dépassements. En général, la refonte des listes a rendu celles-ci professionnellement et socialement plus diversifiées. Cette nouvelle donne fait ressortir un éventail de catégories socio-professionnelles assez large (tab. 1). 

  1. 1= Place des catégories professionnelles dans les coopératives immobilières d’Oran et de sa banlieue proche (en valeur relative entre 1977-1993)

Catégo-

ries

Comm-

industr

Pro.libé

rales

Cadres sup.et

Emplo

yés

Ou-

vriers

Taux

Oran

34,2

3,3

29,5

23,7

9,3

100

Es-

Sénia

15,5

4,1

33,3

42,9

4,1

100

Bir-el-

Djir

32,6

5,9

40,2

19,3

2,0

100

Sources: Communes, BOUZADA F. & MOUSSLIM M., BENCHEHIDA D. & BENDJELID A.

Cette classification en cinq groupes sociaux des bénéficiaires d'un lot coopératif démontre clairement que toutes les catégories ont pu accéder, à différent degré bien entendu, à la propriété foncière grâce à la bienveillance de l'Etat. Néanmoins, on ne peut s'empêcher de relever que la politique du régime de H. BOUMEDIENE a été, durant cette période de développement planifié, favorable aux classes moyennes à l'image d'ailleurs, du phénomène observé durant les années 1940 et 1950 en Amérique Latine où beaucoup de salariés des classes moyennes avaient eu des facilités pour accéder à la propriété foncière urbaine et suburbaine. Dans les trois municipalités d'Oran, Es-Sénia et Bir-el-Djir, 61 à 80 % des membres de coopératives immobilières constituées sont pratiquement occupés dans le secteur public!

Nous pouvons affirmer que grâce à la coopérative immobilière ou au lotissement public, toutes les équipes successives d'élus locaux ont pu accéder à la propriété foncière dès que l'opportunité s'était présentée et ce, à un moment où l'Etat s'essoufflait à financer la totalité des programmes de logements planifiés. Cette allocation foncière a d'ailleurs été perçue par les bourgeoisies locales en formation comme le début de la privatisation en milieu urbain!

Globalement, au sein du territoire métropolitain, entre 1977 et 1993 «quelques 240 coopératives immobilières ont été créées dans les communes d'Oran, Es-Senia et Bir-el-Djir; le secteur de Bir-el-Djir demeure la zone d'allocation foncière la plus importante puisque 3.000 lots coopératifs y ont été situés par les pouvoirs publics…Au total, quelques 5.000 villas ont pu être localisées dans ces trois communes…et ce, sur une superficie de quelques 250 ha» (BENCHEHIDA D. - BENDJELID A., 1995). Sur ces 240 unités coopératives immobilières, il convient de souligner que trois catégories socio-professionnelles prédominent: les employés spécialisés, les commerçants et industriels, et les cadres supérieurs et moyens. Sur le plan strictement géographique, une prédominance préférentielle se dégage et tout se passe comme si dans chaque territoire communal, une catégorie sociale a délibérément choisi et imposé son nouveau lieu de résidence: Oran pour les commerçants et industriels, Bir-el-Djir pour les cadres supérieurs et moyens, et Es-Sénia pour les employés spécialisés.

Dans ce contexte, ce desserrement géographique tout à fait logique est partagé par de très nombreux salariés qui, aujourd'hui, reconnaissent avoir eu beaucoup de chance en accédant à la propriété individuelle par le biais de la coopérative immobilière; en ce sens, la mobilité résidentielle en direction de la banlieue semble pleinement assumée. Aussi convient-il de préciser, qu'entre 1977 et 1993, plus de 30.000 personnes ont été touchées par la mobilité résidentielle due à l'implantation de ces coopératives. C'est là, sans aucun doute une donnée essentielle de la différenciation spatiale de l'espace résidentiel oranais actuel.

II. LE DETOURNEMENT DE L'ESPRIT COOPERATIF : LOGIQUES ET PRATIQUES D'ACTEURS

a- Injonctions centrales et pratiques d'élus locaux

Les injonctions de l'administration centrale ont produit leurs effets puisque toutes les entités immobilières ont changé leur dénomination à caractère professionnel et ont été obligées d'intégrer quelques chefs de ménage en leur sein. Mais, le pouvoir décisionnel donné par les textes de loi aux élus communaux était trop étendu dans le champ foncier pour permettre à tout bureau dirigeant une coopérative de contester frontalement les décisions de l'assemblée élue. Ainsi, toute controverse a donné lieu à un refus d'attribution par l'assemblée populaire communale d'une assiette foncière située au sein de son territoire administratif; en clair, la coopérative n'existe plus que sur le papier.

La stratégie la plus répandue et la plus occultée aussi, de la part des élus, a consisté à reformer discrètement le cercle des familles élargies, d'inclure des actifs d'un même terroir géographique et de préférence à revenus modestes, d'inscrire sur les listes des unités coopératives des connaissances proches et en ajoutant au passage, des personnes recommandées par quelques responsables influents au sein des différents pouvoirs. Cette stratégie d'accaparement de terrains fonciers du domaine public au profit de l'appropriation individuelle est révélatrice, d'un côté, d'une résurgence de l'esprit archaïque du douar face au beylick et de l'autre, d'une conjoncture politique devenue plus sensible à la satisfaction de besoins sociaux exprimés par des classes moyennes aspirant à mieux vivre et il faut de souligner, à un allégement primordial de l'enveloppe financière consacrées à l'habitat par le budget de l'Etat.

En dépit des orientations du Centre, l'allocation d'assiettes foncières est marquée par le résurgence de l'habitus qui, après un long effacement de sa pratique, réapparaît avec vigueur; cet effacement de la façon d'être est, rappelons-le, dû au rôle volontariste d'unification et surtout de nivellement de la société que recherchait foncièrement l'Etat algérien après l'indépendance. Ceci explique pourquoi, sur le terrain foncier se côtoient plusieurs groupes sociaux issus de différente origine géographique au sein d'une même coopérative immobilière. Toutefois, ce phénomène est loin d'être spécifique à l'Algérie dans la mesure où, comme dans de nombreux pays dans le monde et pour reprendre la formule classique, l'urbanisation a d'abord reproduit « le village dans la ville».

b- Quelques aspects de stratégies d'acteurs relatives au détournement de l'esprit coopératif

Sans vouloir entrer dans la constitution et le fonctionnement d'une coopérative immobilière, il importe de relever qu'un dossier comprenant toutes les pièces techniques relatives au projet coopératif est transmis à la municipalité pour agrément. Cette étape est capitale pour l'affectation d'une assiette d'implantation qui déclenche ainsi toute la procédure de transfert du terrain, du domaine public à la commune. Toutes les opérations sont faites d'une minière collective. La cession du terrain comme le permis de construire sont délivrés à titre collectif et non individuel dans la mesure où le plan architectural est pratiquement le même pour tous les bénéficiaires. Toutefois et en dépit de la réglementation, une mauvaise coordination a longtemps persisté entre la Commune et la Direction de l'Urbanisme de la Wilaya lors de la délivrance des permis de construire. En effet, dans de très nombreuses coopératives d'Oran et de sa banlieue, certains coopérateurs sont arrivés aisément à obtenir un permis de construire individuel. Plus grave, ce sont des élus, de grands commis de l'Etat et des fonctionnaires bien placés dans les institutions publiques; par conséquence ce sont là, des responsables chargés théoriquement de faire appliquer la loi qui sont à l'origine de cette pratique de détournement!

La seconde forme de détournement de l'esprit coopératif apparaît toutefois moins discutable, dans la mesure où le recours au crédit est fonction de l'épargne de chacun et le dossier déposé est strictement individualisé. Les choses étant ce qu'elles sont, cette étape marque une coupure entre le travail procédurier collectif attendu par l'ensemble des coopérateurs et l'action individuelle qui se concrétise par la signature d'un contrat de prêt entre le demandeur et la Caisse d'Epargne. Mis à part quelques unités coopératives, la réalisation de la construction a constitué la seconde rupture dans le cheminement théorique de l'opération car le coopérateur a bien souvent engagé lui-même un petit entrepreneur ou un maçon. Il faut dire aussi que les difficultés de construire collectivement étaient apparues dès le lancement des premières coopératives immobilières à Es-Sénia en 1977 (BELHAYARA G., 1990).

Tous ces aspects de détournement des textes se sont heurtés à la réalité du terrain économique et organisationnel, et aux pratiques sociales. Naturellement, celles-ci peuvent expliquer, en grande partie à la fois, le degré d'avancement des chantiers, la diversité de la morphologie du bâti des coopératives immobilières et le poids des habitudes sociétales dans les manières d'habiter l'espace.

III. L'ADAPTATION DE L'ESPACE HABITE INDIVIDUEL: UN VA ET VIENT ENTRE LA RATIONALITE MODERNE ET LES LOGIQUES IDENTITAIRES

Il s'agit maintenant d'analyser de quelles façons les classes moyennes et aisées qui, habitant un nouveau bâti, tentent de l'adapter à la fois, à la rationalité imposée par le modèle de vie citadin universel et à la seconde logique, plutôt liée à des comportements sociologiques traditionnels.

a- Les modes d'occupation au sol de la maison individuelle par les classes moyennes

En principe, le plan architectural de la maison individuelle devrait être conforme au plan originel tel que délivré par les Services de l'Urbanisme de la Wilaya; ceci est aussi vrai pour la disposition de la construction par rapport au plan de masse qui fixe l'emprise de l'espace habitable au sol en tenant compte des normes théoriques réglementaires. Or, dans la majorité des cas, cette emprise est dépassée à cause d'un ajout imprévu d'une ou de plusieurs pièces, d'un débarras, d'un garage, d'un petit sauna ou d'un petit hammam…Naturellement, ce besoin d'espace bâti se double d'une réduction de la superficie réservée au jardin et ce, au profit de la cour bétonnée assimilée au haouch traditionnel, espace privatif essentiel dans toute maison rurale ou urbaine du monde maghrébin.

Partie intégrante de l'espace modeste, ce haouch (cour) est traditionnellement bien utilisé dans la vie quotidienne par les femmes qui, systématiquement, ont donné leur avis quant à sa superficie et ont demandé la plantation d'une vigne grimpante…C'est là, une manière toute méditerranéenne de vivre et de s'abriter du soleil, les jours de grande chaleur. Ce mode d'occupation du sol négocié, concilie à la fois l'aspect moderne de la villa et l'aspect traditionnel du haouch classique (maison avec cour).

b- Les aspects extérieurs de la maison individuelle dans les coopératives immobilières: les images d'une régression architecturale et culturelle

De par les textes, une coopérative immobilière qui doit avoir un plan-type de villa voire deux ou trois, se retrouve finalement avec une incroyable variété de formes extérieures architecturales. En général, les villas construites apparaissent massives car bien chargées de ciment. Elles reflètent fidèlement le formidable gaspillage de matériaux de construction largement subventionnés, durant les années 1970 et 1980, par le jeu de la redistribution de la rente pétrolière assurée par les régimes de l'époque.

Une seconde lacune a désavantagé la profession d'architecte dans la mesure où des techniciens, injustement assimilés à des architectes, ont été agréés par le Ministre, pour ouvrir des bureaux d'études d'architecture. Bien plus, les architectes et assimilés chargés d'élaborer les plans d'architecture des villas ont conçu des plans de maisons individuelles trop «technicistes» oubliant de fait, le mode de vie et l'identité des algériens. Aussi, très peu ou pas de plans architecturaux de type maison citadine classique, dite de style mauresque appelée «Dar» largement répandue dans les villes précoloniales et adaptée au climat et à l'identité locale, ont été proposés aux coopérateurs. Ceci démontre probablement les lacunes observées lors de la formation donnée aux architectes dans la partie théorique consacrée aux rapports du bâti avec l'anthropologie sociale et culturelle et secondairement, avec l'analyse des milieux géographiques et environnementaux maghrébins. La formation des architectes dans les universités algériennes reste certes, ouverte sur le modèle occidental mais, cela n'explique pas tout et en particulier l'effacement du style architectural maghrébin. Or partout dans le monde, le logement habité tient impérativement compte des normes culturelles de la société, des facteurs climatiques locaux et de l'héritage architectural. C'est là, une profonde réforme qui est à concrétiser rapidement en Algérie tant dans le domaine de la formation universitaire des architectes que dans celui de la pédagogie à entreprendre, auprès des responsables centraux et locaux chargé de la gestion des villes. Le déclin de l'architecture se reflète aujourd'hui à travers l'extrême diversité des styles impersonnels, observables dans les zones urbaines comme dans les zones rurales. C'est probablement là, le signe d'une régression culturelle à laquelle pouvoirs publics, union des architectes et associations culturelles se doivent de remédier le plus rapidement possible.

Très souvent, l'aspect extérieur des constructions dans les coopératives immobilières d'Oran et de sa banlieue immédiate est en contradiction avec les traditions de la société, les moyens financiers des résidents et les facteurs climatiques locaux (innombrables fenêtres de moyenne et grande dimension, larges baies vitrées, portes-fenêtres en série…); ceci est d'autant plus étonnant que nous avons affaire en général, à des classes moyennes non dénuées de bon sens. En outre, on peut voir partout des balcons inutilisés, des terrasses et des vérandas abandonnées, des fenêtres et des portes-fenêtres perpétuellement closes…et ce, dans un climat où il ne fait froid, qu'à peine trois mois sur douze…

Bien souvent, la villa est vécue comme le symbole de la réussite sociale dans une société où le paraître est aujourd'hui, une donnée incontournable. En effet, même dans une société en crise, l'habitat individuel est un signe de promotion sociale pour tous ceux que l'on appelle dans le langage populaire «les arrivistes»… Néanmoins, partout dans les nouveaux espaces urbanisés ou en voie d'urbanisation riches ou pauvres, les habitants ressentent un climat d'insécurité dont les implications, à travers l'abus du barreaudage des portes et fenêtres, contribuent à enlaidir les maisons individuelles tout comme d'ailleurs, les surélévations successives des murs d'enceinte. Cette situation peut être décodée comme une volonté de protection des biens immobiliers et comme une préservation de l'espace domestique et féminin des regards étrangers.

c- L'agencement interne de l'espace habité: une mise à l'aise répondant à des pratiques sociétales passées et actuelles

Avant l'agencement interne de toute construction, le cahier des charges de toute coopérative immobilière vise à donner à l'ensemble résidentiel une cohérence architecturale extérieure conforme au plan de masse élaboré. C'est là une façon d'uniformiser la morphologie du nouveau bâti coopératif qui devrait s'intégrer progressivement dans le paysage urbain. Dans la seconde phase de l'opération, il a été laissé à chacun la liberté de l'agencement interne de l'espace habitable. C'est là un principe partagé par les bénéficiaires de très nombreuses coopératives en vue de dépasser une situation ambivalente qui découle de l'application de l'urbanisme réglementaire et de l'agencement interne de l'espace habitable selon les besoins familiaux de chacun.

De l'avis de quelques résidents faisant partie des classes moyennes, l'adaptation du bâti interne de la nouvelle maison se conçoit d'une part par rapport au passé résidentiel du coopérateur, c'est à dire par rapport à la promiscuité du logement antérieur et par rapport aussi, à la difficile cohabitation vécue au sein de l'habitat collectif. Ceci expliquerait probablement la reconstitution au sein de la nouvelle villa du haouch (cour) traditionnel, représentation identitaire d'un territoire perçu à la fois comme un prolongement des pièces habitées et comme un lieu fonctionnel vécu dans l'entente familiale. Pour toutes les personnes soumises à ce sondage, il s'agit surtout de se mettre à l'aise, d'oublier l'ambiance détestable de la vie d'immeuble où seules l'installation et l'entretien de l'antenne parabolique et la garde nocturne des véhicules ont été capables de créer un semblant de convivialité au sein des ensembles publics d'habitat collectif périphérique ou des immeubles. Cette mise à l'aise est véritablement assimilée à «une liberté retrouvée dans la mesure où aucune famille étrangère ne loge à l'étage supérieur…» relève avec justesse un cadre supérieur.

Sur un autre plan, la multiplication délibérée des pièces habitables répond à une véritable question d'anthropologie sociale et culturelle et concerne toutes les strates de l'armature urbaine algérienne. Ainsi, lors d'une enquête collective faite dans la petite ville de Nédroma (BENDJELID, A. - PRENANT, A.- SERDOUN, A.-, 1987) et en réponse à une question portant sur les motivations de la construction d'une villa de neuf pièces pour un ménage de cinq personnes, un autoconstructeur répondit après réflexion «le coût d'une ou de quelques pièces n'est rien…pour moi; l'essentiel est d'en prévoir suffisamment car il est possible qu'un fils revienne au bled, qu'un autre se marie…» et il a poursuivi son commentaire en soulignant que l'Etat a été, de toute façon incapable de résoudre la question du logement et ce, malgré tous les discours ministériels…

Le manque de confiance en l'Etat planificateur et redistributeur explique, en bonne partie, cette pratique nationale qui consiste à stocker tout, y compris…des pièces habitables et même, des appartements dans les villas… Aussi, construire des logements de type F13 ou F15 apparaît comme une logique tout à fait acceptable dans la mentalité de la population locale. Ce stockage de pièces a naturellement un impact direct sur la variété morphologique du bâti coopératif qui va du simple haouch comme ceux construits dans quelques entités immobilières à Es-Sénia à la villa classique, en passant par la villa-immeuble…Une enquête faite au sein de 14 coopératives immobilières situées dans la commune suburbaine d'Es-Sénia donne un T.O.L. (taux d'occupation par logement) de 5,07 personnes par logement, taux qui est relativement bas comparé à celui d'Oran (6,9 en 1992). Bien plus, le desserrement en cours, amplifié par le jeu de la construction de pièces en attente, ferait baisser le T.O.P. (taux d'occupation par pièce) au sein des coopératives immobilières étudiées, d'Oran et de sa proche banlieue au dessous de 1,5 personne par pièce!

En dépit du niveau social et éducatif des coopérateurs appartenant aux classes moyennes et aisées, l'acte de fondation de toute construction individuelle (LAKJAA A., 1997) demeure lié à une série d'actes symboliques où se mêlent coutumes, rites et superstitions remontant loin dans le passé. C'est en définitive la société qui suggère ou impose ses coutumes à travers lesquelles la protection de la nouvelle maison et de ses habitants, du mauvais œil et des djinns est toujours de mise en cette fin du XXesiècle et ceci, quelque que soit la catégorie socio-professionnelle du coopérateur. D'ailleurs, même si celui-ci oublie cette pratique au moment du lancement du chantier, les maçons et les manœuvres originaires des zones rurales de montagne (Ouarsenis, Bousellam, Dahra, Ferdjioua, Monts de la Médjerda, Trara, Béni Chougrane, Monts de Daïa…) se font fort de rappeler les traditions au contrevenant et exigent le traditionnel sacrifice du mouton dans le but de protéger la construction et ses futurs occupants. Ces pratiques semblent renaître progressivement et se déroulent successivement au profit des ouvriers au moment de l'ouverture du chantier et à la fin des travaux au profit de la famille élargie, façon comme une autre de réconcilier les uns et les autres et de renouer des liens de solidarité familiale plus au moins distendus avec le temps. Sans vouloir insister sur les autres pratiques liées à l'espace habité nouvellement construit, nous pouvons relever que les coutumes et rites reviennent progressivement dans un pays où les traditions de la société rurale rattrapent, peu à peu, la société des villes. Par ailleurs, il est intéressant de souligner que ces pratiques ont repris de la vigueur depuis les émeutes d'octobre 1988, l'instauration du multipartisme en 1989 et la déliquescence graduelle de l'Etat.

Sur le plan fonctionnel, l'utilisation interne de l'espace habité, doté de tous les éléments de confort, est une adaptation à la structure architecturale de la maison et cela, grâce au jeu d'un va et vient entre la modernité plus ou moins assumée et le modèle culturel traditionnel toujours présent. Ainsi, dans la plupart des coopératives immobilières, la cuisine répond à une fonction essentielle dans la vie familiale. Elle est souvent doublée d'une petite pièce, équipée de «saddaris» (sorte de divan à fonction multiple où l'on peut s'asseoir, se reposer, s'allonger, dormir…); chambre dans laquelle femmes et enfants se regroupent d'autant plus facilement que cet espace est généralement agrémenté d'un poste de télévision. Cette pièce dédoublée qui sert en quelque sorte de salle de séjour, est utilisée quotidiennement même si elle reste un lieu féminin qui permet aux femmes de suivre les éternels feuilletons égyptiens…tout en étant proches de la cuisine…

Quant aux salles de séjour proprement dites, la maison individuelle des classes moyennes et aisées en comporte au moins deux.

D'habitude plus vaste, le salon maghrébin, dénommé aussi salon marocain, est équipé de «seddaris», de couvertures, d'oreillers… C'est à la fois la salle d'accueil des visiteurs, le lieu d'hébergement des invités de passage de l'espace de célébration de tous les événements familiaux (mariage, naissance, décès…). Ce salon maghrébin est aussi agrémenté de buffets et/ou d'armoires vitrées qui servent de présentoirs à la vaisselle de qualité gardée précieusement par les femmes pour servir les invités de marque; c'est aussi, sans doute là, la douce folie des algériennes…D'ailleurs, cette pratique concerne désormais toutes les catégories sociales, celles des zones rurales comme les catégories sociales, celles des zones citadines. Equipée à l'occidentale, la seconde salle de séjour comporte des divans, des fauteuils, le poste de télévision, le magnétoscope, la chaîne hi-fi, le téléphone… Alors que le salon maghrébin est fermé car réserve généralement aux invités, le living-room occidental est tout de même beaucoup plus utilisé par les familles. De toute façon, il s'agit pour toute famille de donner une image de réussite sociale aux invités et aux proches. Cependant, il faut préciser que l'accueil d'un invité se fait dans l'une ou l'autre salle de séjour; cette différenciation se fait naturellement en fonction de la qualité sociale, géographique et culturelle du visiteur.

Les espaces privatifs (chambre à coucher, chambres d'enfants…) sont systématiquement situés à l'étage, opérant délibérément une séparation avec la pièce qui accueille les invités. Fait social nouveau, les énormes villas construites par les classes aisées, voire moyennes, comportent une pièce spécifique réservée au stockage de produits alimentaires (semoule, farine, huile, café, sucre…), de produits de ménage (lessive, savon…), d'articles électroménagers (cuisinières, réfrigérateurs, machine à laver, postes de télévision)…C'est probablement là, une mentalité héritée des grandes familles de notables du monde rural; mais c'est aussi là, une pratique nationale récente qui s'est fortement développée durant les années de pénurie. C'est en effet pendant ces années-là, que le monopole commercial étatique avait démontré ses limites dans le domaine de la distribution.

d- La maison individuelle, facteur de reconstitution de la famille de souche

Mis à part quelques familles nucléaires de cadres supérieurs et moyens occupés dans le secteur public, la réalisation d'énormes villas au sein des coopératives immobilières d'Oran et de sa banlieue proche peut signifier, bien souvent, la reconstitution de «la famille» à cause précisément de l'ampleur prise par la crise de logement en Algérie.

Le chef de famille prévoyant décide de financer une villa-immeuble composée de plusieurs appartements, permettant ainsi à ses enfants d'occuper chacun un appartement. On assiste en fin de compte à la reformation de la famille de souche qui est recomposée par le père grâce à son pouvoir de décision. En effet, l'aménagement d'une série d'appartements dans «la villa» permet ainsi, à plusieurs générations d'y habiter, chaque ménage occupant un appartement. Néanmoins, nous avons là un modèle culturel de comportement qui autorise certes, une vie presque autonome à chaque ménage mais qui, aux yeux des autres, fait croire à une véritable vie de famille. En vérité, toutes les variantes possibles peuvent exister dans ce type d'habitat et seule une enquête de proximité bien ciblée pourrait évaluer l'importance de ce phénomène social.

C'est en définitive à un renversement de tendance que nous assistons depuis une douzaine d'années. En effet, après l'engagement volontariste de l'Etat en faveur de la promotion de la famille nucléaire lors de la politique d'investissements planifiés, l'aggravation de la crise du logement dont les causes demeurent complexes à analyser, joue fortement en faveur de la reformation des familles de souche dans la mesure où les jeunes ménages rencontrent de grandes difficultés pour trouver un logement locatif en ville, ou même en banlieue.

CONCLUSION

L'empreinte des coopératives immobilières marque aujourd'hui d'une façon indélébile l'espace métropolitain oranais. Le nouvel espace d'urbanisation apparaît certes, comme le produit d'une décision politique centrale, mais celle-ci a été appliquée d'une manière différenciée par les assemblées élues successives dans les trois communes étudiées. En dépit des injonctions du Centre, soucieux, il est vrai d'une recherche d'équilibre social et régional, les pouvoirs locaux, nommés et élues avaient fait des coopératives de la première génération (1977-85) un formidable enjeu pour les classes moyennes et aisées grâce aux réserves foncières communales et ce, dans un pays où l'appropriation foncière était, en 1974, presque impossible à cause de l'étatisation prononcée de l'économie algérienne. Néanmoins, il faut dire que dans de nombreux pays du tiers-monde, la promulgation des textes d'urbanisme réglementaire n'a pas empêché les pouvoirs locaux de s'accaparer des réserves foncières grâce à la mise en place de réseaux de relation et au soutien, plus ou moins conciliant, de l'administration centrale.

Dans le cas oranais, le détournement de toutes les étapes de la procédure administrative mise en œuvre par l'Etat est un fait irréfutable. Les héritages identitaires sédimentés au cours de l'histoire ont été peu à peu exhumés par des coopérateurs qui ont tenté de concilier à la fois les textes réglementaires, leurs propres coutumes, leur niveau culturel et leurs besoins sociaux immédiats. Par ailleurs, la société a bien souvent fini par imposer ses valeurs et ses traditions qui demeurent malgré tout, marquées par la ruralité (modes d'occupation du sol de la maison individuelle, aspects extérieurs de la construction, agencement interne de l'espace habité, reprise de nombreux rites liés à la fondation d'un nouvel habitat, reconstitution de la famille de souche…). Patiemment mise en œuvre par les acteurs, cette série de détournements cumulés, de dépassements et de ruptures marque un tournant dans les rapports existants entre la recomposition de la famille au sens large du mot, la crise économique et politique vécue par le pays depuis le milieu de la décennie 1980 et l'affaiblissement des structures de l'Etat.

A l'intérieur de l'aire métropolitaine oranaise, les coopératives immobilières de la première génération (1977-1985) peuplées de classes moyennes et aisées marquent durablement l'espace et se caractérisent par une esthétique architecturale de type franchement urbain. Toutefois à l'intérieur de ces mêmes entités immobilières, on peut observer aujourd'hui une différenciation dans la morphologie urbaine entre le bâti des catégories sociales aisées qui continuent d'agrandir leur construction tout en améliorant son esthétique et le bâti des classes moyennes salariées. Ceux-ci avaient certes profité des retombées de la rente pétrolière, mais il faut dire aussi qu'elles rencontrent, depuis le début de la décennie 1990, de grandes difficultés pour finir les travaux ou aménager leur maison en raison de la progression rapide de l'inflation. Cette différenciation sociale et économique entre des coopérateurs issus des professions libérales et indépendantes et ceux issus des classes moyennes salariées du secteur public apparaît aujourd'hui comme un intéressant champ de recherche et d'investigation en anthropologie de l'espace et en aménagement urbain. Ceci tant et si bien que cette différenciation demeure très mal perçue par les populations à revenus modestes qui assimilent les classes moyennes fonctionnarisées à des «bourgeois» même si en 1997, celles-ci sont en voie de paupérisation.

Sur le plan de l'aménagement de l'espace métropolitain, ces zones d'habitat coopératif le plus souvent implantées sur des sites vierges au sein de communes éprouvant de grandes difficultés financières, peuvent devenir des noyaux agglomérés structurants de la proche banlieue oranaise, pour peu que les décideurs se penchent un peu plus sérieusement sur le statut et l'aménagement du territoire métropolitain.

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