Insaniyat N°65-66 | 2014 | Algérie 1962 | p. 187-210 | Texte intégral
Three "Algerian" reactions on the future of Algeria, 1830-1834 Abstract: The early years of French colonization remain either a hardly known or not enough studied period of Algerian colonial history. Very often, history focuses on the resistance of Algerian people through illustrious characters such as Ahmed Bey and Emir Abd-el-Kader, and so many others. What about political resistance? How was the Algerian question going to be approached on political plan, while in the rural areas we prepared the resistance and the offensive? To do it, the present study features three personalities: Hamdan Khodja, Ahmed Bouderba, and Sheikh Al Hadj Sidi Saadi, quite as different from each other by their community membership and their standpoint. They did not fail to defend social interests, each one according to his own vision of facts. Even if their approaches let appear a controversy or lend confusion, the fact remains that all worked for same one and unique purpose which was to spare the future of Algeria. Keywords: political resistance - Algeria - colonization - Algiers - 1830. |
Abla GHEZIEL: Université Toulouse 2, Jean Jaurès.
Equipe de recherche : Groupe de Recherche en Histoire Immédiate (GRHI), Unité de recherche : FRAMESPA UMR 3651.
Même si la résolution de conserver Alger avait été définitivement prise le 20 juillet 1830 ; aucune décision réfléchie n’avait été réfléchie pour convenir de l’avenir de la future Algérie : « Alger était tombée entre nos mains, il s’agissait maintenant de décider ce que nous ferions de la Régence. Malgré le soin avec lequel il s’était appliqué à réserver notre liberté d’action, M. Polignac était encore incertain sur ce point »[1]. Divers documents font référence à des projets étudiés et proposés au cabinet de Polignac, tels que restituer la Régence à la Sublime Porte sous certaines conditions, la partager entre les États européens, ou la céder à l’ordre de Malte, mais rien dans l’immédiat ne laissait envisager une colonisation totale.
La politique de la France, pendant les quatre premières années de sa présence, fut caractérisée par l’incertitude et l’inquiétude d’où la politique d’improvisation que menèrent les chefs militaires de cette époque. Ces derniers administrèrent Alger selon leurs aspirations et priorités du moment : adaptant leurs démarches et leur commandement en fonction des réalités du terrain, des chefs indigènes influents, ainsi que des populations locales qui allaient devoir composer avec l’arrivée des futurs colons. La société de l’ex-Régence allait, une fois de plus, changer et devoir composer avec de nouveaux schèmes de pensées venus d’un monde tout à fait différent du sien, de sa langue, de sa religion et de ses mœurs. Mais sur un plan politique, qui allait, parmi cette société et en ce début de colonisation, s’imposer pour défendre l’avenir de l’Algérie ?
Avant de répondre, il nous semble important de revenir sur la structure sociale de la Régence d’Alger à la veille de conquête française. A la mort de ses deux frères (ʽArūğ et ᾿Isḥāq) lors de la bataille de Tlemcen en mai 1518 contre les Espagnols, Ḫayr al-Dīne se retrouve avec un héritage qu’il ne peut défendre seul, il fait appel au sultan ottoman Selim Ier afin de se placer sous sa protection. La même année, Alger fait officiellement partie de l’empire ottoman. Le pouvoir devient vassal, il est soumis à l’autorité suprême du sultan. Par la suite, ce pouvoir passa par différentes phases avec la même constante qui est : le pouvoir restait aux mains de la gent militaire, laquelle prenait plus d’assurance et affirmait son autonomie : donc une république militaire semi-indépendante. Alger évolua d’un état de vassalité à celui d’un État-Empire autonome, jouissant d’une indépendance de fait, prenant ses propres décisions, mais qui restait rattachée à l’autorité turque, l’assurant de sa loyauté et de sa fidélité. Un État dans lequel gravitaient plusieurs communautés :
Les Turcs et leur milice des janissaires, représentants absolus du pouvoir exécutif. Ils occupaient les plus hautes fonctions de l’État. Si au début du XIVe siècle, ils restaient en retrait des nationaux. Au XIXe siècle, ce n’était plus le cas ; c'est-à-dire avaient fini par s’intégrer et à assimiler les systèmes de croyances et de valeurs de leur nouveau pays et à réussir leur intégration[2].
Les Kouloughlis, cette classe désignait les métis nés d’un père Turc ou d’une Mauresque ou d’une Indigène, même s’ils étaient issus d’une noblesse, il n’en demeurait pas moins qu’ils étaient inférieurs aux Turcs. Ces derniers avaient peur qu’ils ne se dressent contre eux et ne prennent le pouvoir, comme ce fut le cas en 1595, appuyés par les Kabyles, mais le projet fut découvert et il se termina par un massacre. Plus tard, la révolte de 1633 essuya un terrible échec et subit une répression implacable ; les rescapés réussirent à se sauver et se réfugièrent dans les montagnes, et se baptisèrent les « Zouatnas ». Ils se mirent à la culture des oliviers ; d’ailleurs c’est de là que leur vint leur nouvelle appellation. Dès le XVIIIe siècle, le statut des Kouloughlis évolue. Ils progressent dans la hiérarchie sociale et se voient confier des postes dans l’administration et la politique.
Les Maures, réfugiés d’al-Andalus, représentaient la classe bourgeoise des cités. Ils vivaient en retrait des autres populations autochtones. Ils n’occupaient pas vraiment de postes politiques mais exerçaient leur influence par les mariages avec les hauts fonctionnaires turcs.
Les Arabes et les berbères Kabyles et Mozabites formaient une quatrième classe, les premiers semi nomades ou nomades occupaient les plaines, et les seconds, les montagnes qualifiés par certains auteurs comme indépendants.
Chacune de ces communautés et en fonction de son environnement, rural ou citadin, formait une sorte de microsociété, qui obéissait à une hiérarchie constituée de trois classes sociales : les djouads représentants de l’aristocratie militaires de l’épée, suivaient les chorfas (les hommes de religion), et enfin les hadars représentants la classe bourgeoise des cités.
Aussi, il ne faut pas oublier les communautés minoritaires que constituaient les israélites et les esclaves. La communauté israélite était répartie en trois catégories : les Juifs indigènes, les Juifs andalous, et les Juifs livournais. Ces derniers bénéficiaient de privilèges et étaient dispensés des interdits. Ils deviennent en quelques années les confidents et banquiers des deys. Quant aux esclaves, généralement des noirs, ils provenaient soit des razzias que certaines tribus alliées des Turcs effectuaient dans le grand Sud d’où elles ramenaient les prisonniers pour les revendre sur le marché de Biskra, de Bou- Saada ou M’sila… , soit de de la filière des traites marocaines, soudanaises ou nigériennes qui se chargeaient de leur vente dans les grandes villes. Il arrivait, aussi, que quelques fois, lors des razzias qu’effectuaient les tribus makhzen, que des Arabes et des Kabyles soient capturés, ces derniers étaient revendus aux grands de la bourgeoisie des grandes cités. Quant aux esclaves chrétiens, ils étaient pris lors des courses des corsaires.
Ainsi, La société, à l’époque ottomane, formait un conglomérat de populations où se greffaient différentes mentalités et ethnies ; une société à la fois homogène et hétéroclite administrés par les institutions beylicales. Une hiérarchie qui met l’accent comme le souligne J.-C. Vatin sur : « la prépondérance d’une aristocratie composée de deux éléments : militaires étrangers ou assimilé d’une part, Turcs et Kouloughlis et autochtones, grandes familles de commandements et grandes familles maraboutiques d’autre part »[3].
Après la reddition du Dey Huseïn et l’effet de surprise passé, l’heure était à l’organisation politique et à l’action offensive. L’administration ottomane n’existant plus, il fallait trouver des intermédiaires capables de représenter la Régence et de défendre les intérêts de ses populations. C’est dans ce contexte, et en parallèle de la résistance armée populaire menée à l’Ouest par l’Emir Abdelkader et à l’Est par le Ahmed Bey, que la politique algérienne allait faire ses premiers pas à travers des hommes cherchant à s’imposer comme les nouveaux interlocuteurs : les représentants d’un ordre nouveau. Le rôle politique qu’ils jouèrent, reste peu connu ou n’a pas eu l’intérêt qu’il méritait.
Nous tenons à rappeler que ce travail est une étude qui cherche, avant tout, à mettre en avant les premiers acteurs de la politique algérienne, et cela dès les premières années de la colonisation, de même que leur ligne de conduite vis à vis de cette nouvelle donne, ainsi que leur position envers la société « algérienne » telle qu’elle était à l’époque. C'est-à-dire restituer les faits et leur interprétation dans leur contexte historique sans aucune lecture nationaliste ou colonialiste.
Pour le besoin de cet article et afin d’illustrer notre analyse, nous avons choisi trois figures : Hamdan Khodja, Ahmed Bouderba, et Hadj Ali Sidi Saadi.
L’importance de ce choix réside dans le fait que chacun d’entre eux appartenait à une communauté différente. Dans le cas de Hamdan Khodja, Kouloughli d’origine, ses prises de positions restent plus au moins ambigües, difficiles à cerner par moment : d’une part il était pour une indépendance du pays, tout en souhaitant voir Alger restituée aux Ottomans, tout comme il n’était pas contre un protectorat français où le pouvoir serait entre les mains d’un musulman. A l’inverse, Ahmed Bouderba, morisque[4] d’origine, était pour collaborer et accepter la colonisation, à condition que la Régence soit sous domination française, tout en étant dirigée par un arabe. Ce qui n’était pas le cas pour Hadj Ali Sidi Saadi, lequel était prêt à se soumettre à condition que le trône d’Alger lui revienne.
Hamdan Khodja et sa politique libérale
Kouloughli de naissance, proche de l’oligarchie turque, Hamdan Khodja serait né à Alger en 1773. Il apprit le Coran auprès de son père qui était enseignant théologien à Alger, fonction qu’il reprit à la mort de ce dernier. Après ses études primaires, il fut envoyé à Istanbul pour y poursuivre ses études de théologie. A son retour, il enseigna quelque temps, fonction qu’il abandonna pour se lancer avec son oncle dans le commerce. Ses nombreux voyages lui permirent d’apprendre le français et l’anglais ; à ce sujet, nous devons être assez prudent quant à son niveau car lui-même reconnaissait que son niveau de français était assez modeste : « Ce consul (Deval) parlait aussi mal la langue turque que moi la langue française et n’en connaissait ni les nuances ni la délicatesse »[5]. Après l’occupation d’Alger, il fut nommé membre de la municipalité que Bourmont constitua. Selon H. Khodja, ce n’était qu’une mascarade, car : « Les délibérations étaient silencieuses et pour la forme ; enfin notre participation était nulle au fond »[6].
Face aux exactions commises par les troupes françaises, il rédigea en 1833 un manuscrit qui se voulait à la fois historique et politique, Aperçu historique et statistique sur la régence d’Alger, intitulé en arabe al Mir’āt’ (Le Miroir). Un témoignage qui demeure avant tout, un plaidoyer et un réquisitoire : un plaidoyer en faveur de la Régence et un réquisitoire contre l’administration de Bourmont et de Clauzel. Le manuscrit a été écrit par lui en arabe, et a été traduit en français par H.-D. Oriental et publié à Paris en 1834 aux éditons Goetchy fils et Cie.
Les initiales H.-D. nous poussent à croire que le travail de traduction fut l’œuvre du Tripolitain (Tripoli d’al Gharb) : Hassouna Daghiss[7]. Ce dernier, sur l’initiative de son père reçut une éducation européenne. Il commença sa carrière politique comme ambassadeur à Londres où il se lia d’amitié avec le philosophe Jérémie Bentham[8]. Puis en 1826, après son retour à Tripoli, il fut nommé par Youcef Karamanli ministre des Affaires étrangères. Avec Jérémy Bentham, il complota dans le but de renverser le pacha, mais se ravisa au dernier moment. Il prit la fuite et se réfugia à Istanbul[9] où il eut la direction du Moniteur ottoman[10], premier journal francophone destiné aux populations de l’Empire. Ce qui est sûr est que Hassouna Daghiss, était un homme d’influence, sa carrière a fait de lui un homme aguerri aux affaires politiques, et surtout qu’il maitrisait le français et l’anglais.
Pourtant, nous ne pouvons ni affirmer ni infirmer si c’est bien lui l’auteur de la traduction, car H. Khodja, lui-même, ne le confirme pas. Ce dernier, dans une lettre datée du 28 décembre 1833 qu’il adresse au général Voirol[11], écrivit que l’ouvrage a été imprimé à Paris et, que son fils Hassan en aurait reçu un exemplaire qu’il devait remettre à la Commission[12]. Chose qui n’a pas pu se faire car le livre arriva tardivement. Par contre, il ordonna à son fils de le remettre au général afin qu’il examine son travail : « J’ai donné ordre à mon fils de vous le remettre et je réclame .de votre justice d’examiner ce travail sans faire attention à son auteur, car chacun écrit d’après l’éducation qu’il a reçu et de son propre jugement »[13]. D’ailleurs, ce qui est singulier c’est que dans le Miroir, il ne fait aucune allusion à l’aide que lui aurait apportée Daghiss : en effet, la seule fois où il parle de lui, c’est quand il souligne la traduction que fit ce dernier de l’œuvre de Vattel[14], traduction qu’il a fait du français vers l’arabe.
La question est : pourquoi ne l’a-t-il pas clairement spécifié, étant donné qu’il ne manque pas de le féliciter pour son travail de traducteur : « Je ne lis pas le français, cependant j’ai bien connaissance de la traduction fidèle en arabe, que M. le chérif Hassuna Deguiz a faite du droit des gens de Wattel »[15].
Le texte original en arabe du Miroir n’a jamais été retrouvé, seule la version en français existe ; et c’est à partir de cette dernière, qu’il fut traduit, présenté et commenté en langue arabe par Mohamed Larbi Z’biri[16]. Non pas que nous voulions mettre en doute l’authenticité ou réfuter l’ouvrage, là n’est pas l’ objet de cette étude, mais nous sommes bien obligés d’admettre que l’original nous aurait mieux permis d’appréhender toute la richesse du texte et d’en exploiter les idées et, surtout de mettre fin aux doutes et aux rumeurs qui supposaient que le manuscrit avait été écrit par un publiciste français, donc n’aurait jamais été traduit. D’autre part, il existe une autre publication du Miroir où le texte est suivi d’une réfutation des amis du maréchal Clauzel ainsi que d’une réponse à la réfutation[17].
En 2009, lors du symposium organisé à Alger, portant sur thème « L’Algérie, durant la période ottomane : Les relations politiques, économiques et culturelles », les Archives Nationales d’Alger (A.N.A) se sont vues offrir par le gouvernement turc, deux manuscrits écrits en langue arabe. Le premier, intitulé Le miroir de l’Algérie, écrit en 1837 par Mohamed Redha, le fils de H. Khodja et le second est une copie d’un deuxième livre de H. Khodja dans lequel il traite et appuie les réformes engagées par le sultan ottoman, Abdelhamid II »[18].
Le Miroir se divise en deux parties. La première est répartie en douze chapitres, les six premiers sont consacrés à décrire le pays, les habitants en faisant d’eux des êtres attachants, respectueux de leurs traditions ancestrales. Nous remarquons que pour désigner les habitants : Algérois, Kabyles, Arabes, Turcs ou Kouloughlis, il utilise le mot « Algériens », est-ce à dire que déjà les notions d’Etat et de nation avaient pris forme dans son esprit, et que de ce fait, il pouvait les appliquer à la Régence en rassemblant les différentes communautés qui se côtoyaient sans vraiment avoir à l’esprit ce sentiment d’unité ? Était-il le seul à le penser ou bien d’autres partageaient-ils sa vision ? Car par rapport aux correspondances qu’il adressait à l’administration turque, et telles qu’elles ont été traduites en arabe, nous pouvons observer que les vocables utilisées généralement pour désigner les populations sont « ‛ahl » ou « raʽiyya » ou sujets ou tout simplement il oppose les musulmans aux infidèles.
Les chapitres restants sont consacrés au gouvernement, à ses lois et à sa législation. Il insiste sur le fait que la Régence était un Etat fondé sur des principes républicains, qui n’a rien à voir avec un Etat corsaire sans foi ni loi comme le pensait l’Europe, Il écrit :
« Dans le cours de mon voyage en Europe, j’ai étudié les principes de la liberté européenne qui fait la base d’un gouvernement représentatif et républicain. J’ai trouvé que ces principes étaient semblables aux principes fondamentaux de notre législation, si ce n’est qu’il existe une différence imperceptible dans l’application »[19].
Toutefois, il ne nie pas l’aspect négatif de certains deys, de leurs erreurs qui ont entrainé le déclin de l’Etat algérien et l’occupation française[20].
La seconde partie relate le début de l’occupation française, de son administration et des erreurs tactiques et des exactions commises envers la population et ses biens. Il met l’accent sur les promesses non tenues de certains généraux, il les accuse d’avoir déshonoré leur intégrité ; c’est la partie miroir ou la partie négative de l’occupation, son but étant de faire passer un message libéral et de toucher l’opinion publique sur la question de l’indépendance de l’Algérie.
Ce n’est plus le Turc ni le Kouloughli qui parle mais l’Algérien qui est attaché à sa patrie : « […] chez nous nous n’étions pas hommes d’Etat, ce n’est que sur cette terre que nous avons acquis nos titres, et nos dignités… ; ce pays est donc notre patrie ! »[21].
Avant de poursuivre, cette citation mérite que l’on s’y arrête, car elle soulève plusieurs interrogations par rapport à la perception de « patrie » qui elle-même renvoie à des interrogations sur les notions de peuple, de communauté et de nation.
A travers le bref aperçu que nous avons donné de la société d’Alger, nous avons établi l’existence d’un monde rural et d’un monde citadin. Dans le premier, la résistance armée se mit immédiatement en place, exprimant ainsi « un patriotisme combatif et guerrier autant par instinct de conservation, leur terre étant l’enjeu principal de la conquête, que par esprit communautaire où se fondaient des concepts nationaux, spirituels et moraux »[22]. Quant au second, il resta plus au moins en retrait. Nous pourrions dire que la cité allait former une matrice, qui pendant des décennies durant prépara l’éveil des consciences des nationaux lesquels reprirent le flambeau dès le début du XXe pour exprimer la volonté des Algériens.
Par ailleurs, Lemnouar Merouche a su démontrer l’évolution du concept de nation en levant les ambiguïtés liées aux différentes notions que sont « patrie » et « nation algérienne ».
En effet, à partir de sources, l’historien explique qu’après l’arrivée des Turcs, l’Algérie était désigné sous l’appellation de Qotr al Jazā’ir ou waṭan al Jazā’ir, termes qui remplacèrent l’ancienne appellation al Maġrib al awsaṭ. Et, que pour faire la différence entre Alger et l’Algérie dans son ensemble géographique, la première était désignée par Dzayer et la seconde par al Jazā’ir. Puis à parti du XVIIe siècle, dans la langue française et dans les correspondances françaises, la Régence était appelée Royaume d’Alger ou la République d’Alger, formule utilisée seulement pour en désigner le territoire le pays. Quant à la notion de « patrie », selon L. Merouche, elle désignait le pays d’où le mot patriote retrouvé dans une correspondance datant de 1751, terme qui était associé aux habitants autochtones. Ce qui explique pourquoi après pourquoi le mot « algérien » commence à être très utilisé dès le XIXe siècle pour désigner les habitants de la Régence mais aussi pour les distinguer des Turcs[23].
Ainsi, nous comprenons que pour H. Khodja, lorsqu’il parle de patrie il désignait sa terre natale, et par peuple(s) l’ensemble des communautés de la Régence qui formaient une nation , un peuple de tribus tous unis par leur attachement à leur terre, ou comme le souligne M. Lacheraf : « Quoi qu’il en soit, nation Etat, ou nation communauté ou simple patrie solidairement agissante, et par cela même « nationale », quelque chose existait qui a permis à l’Algérie de s’opposer au cours de 130 ans à une grande puissance impérialiste et à la forcer en définitive à capituler »[24].
Ses prises de positions
A défaut de pouvoir présenter un texte en arabe, nous proposons dans ce qui suit une des correspondances de H. Khodja que nous avons retrouvée aux Archives Nationales d’Alger, laquelle a été traduite du turc vers l’arabe[25]. La lettre originale est écrite à la main, en osmanli et tient sur une page, pas de cachet ou de signature apparente. La correspondance[26] est adressée à un ami très haut placé du Sérail dont le nom n’est pas cité. Nous n’avons utilisé et traduit que les passages qui ont un rapport direct avec ses aspirations et motivations politiques.
Les points les plus importants concernent :
- son témoignage lors de la Commission d’Afrique ;
- de la politique et de l’administration française ;
- de son opposant Ahmed Bouderba, lequel fait tout pour saboter son travail ;
- enfin, sa position vis-à-vis de l’Emir Abdelkader.
Dans un premier temps, il rend compte de la réunion de la Commission d’Afrique, tenue début 1834, pour étudier la question algérienne. Il se veut confiant et sous-entend que l’occupation française est une question de temps ; elle ne peut avoir aucun bénéfice ou intérêt du fait de la différence de religion, de langue et de mœurs. Il insiste sur l’opinion française, laquelle est excédée par ces dépenses de guerre. Il ne fait aucun doute pour lui que : «…En gardant la Régence, la France n’en sera que dans un grand embarras, bien plus que les bénéfices et avantages qu’elle croit pouvoir réaliser »[27].
Puis il se lance dans une analyse selon laquelle le gouvernement français essaierait de s’en débarrasser au profil de la Sublime Porte, sous réserve de garder quelques avantages pour les Français en conservant les zones côtières. Il affirme que les avantages pécuniaires, jusqu’à ce jour, n’ont rien donné, et quant à leur rendement dans l’avenir, cela reste incertain.
Bien qu’il pense fermement que la France va quitter Alger et la restituer aux Ottomans, il avoue à demi-mot, que le Roi est impuissant et ne peut prendre de décisions seules, il est pieds et poings liés face à son gouvernement :
«…Même si en vérité le Roi serait pour restituer Alger à l’Empire Ottoman, il n’est pas libre de ses faits et gestes car il doit se plier à la volonté et aux décisions du Conseil. C’est pour cette raison que le Roi essaierait, en utilisant les affres de la guerre et de ses dépenses, à pousser l’opinion publique, à le forcer ainsi que le conseil à abandonner la Régence en la restituant aux Turcs »[28].
Il dénonce la propagande faite autour de la fertilité des terres et des produits qui pourraient être cultivés, Il qualifie la politique de la France de ce que nous appellerions à notre époque d’aujourd’hui une « opération de marketing » où la Régence apparait comme un nouvel Eldorado : terres fertiles, richesse… :
« …propagande qui a pour but d’accélérer la venue des colons. Cette dernière a eu des conséquences néfastes : elle a ancré l’idée de colonisation et a su récupérer l’opinion publique en sa faveur »[29].
Le second point de la correspondance est consacré à son rival Ahmed Bouderba : homme politique de la communauté mauresque, qu’il accuse d’user de son influence sur certains caïds afin de saborder ses tentatives de négociations et pourparlers, aussi bien avec les Français qu’avec les autres communautés (Morisques, Arabes et Khouloughlis). Pour H. Khodja, A. Bouderba est un traitre car il pousse les gens à se défaire de l’autorité ottomane en maintenant la paix avec les troupes françaises, et il serait même prêt à accepter un infidèle comme Roi :
«…Il aurait suggéré de faire monter le fils de Louis Philippe sur le trône de la Régence ou sinon de désigner comme nouveau représentant des Français un Arabe en contrepartie d’un tribut… »[30]. Ce passage mérite toute notre attention : il ne peut accepter de vivre sous une autorité autre que celle d’un musulman même si c’est un Arabe ; en effet il vient contredire un autre passage du Miroir dans lequel il cite : «…Que ce soit Pierre ou Paul qui nous gouverne, qu’importe, pourvu que nous soyons bien gouvernés »[31] Cette pensée se confirme dans les paragraphes suivants, où il rapporte une entrevue entre les deux hommes. A. Bouderba serait venu lui demander son appui et son aide pour tenter de trouver une solution sur l’avenir d’Alger. A partir de là, chacun des deux expose son point de vue.
A. Bouderba est pour une soumission et une pleine collaboration avec les Français. Face à ce raisonnement, H. Khoja répond : « Jamais cela ne pourra se faire. En aucune façon, les sujets (…) n’accepteront l’idée que la Régence(…) soit vassale des Français. Ahmed bey et ses partisans refuseront. De plus, l’aide provenant de Tunis, du Maroc et de Fez vient du fait que la Régence soit vassale du calife Mahmoud II, donc ce projet ne pourra jamais voir le jour ».
Ce à quoi A. Bouderba réplique : « Les Arabes et les autres ne savent rien de ce qui se passe entre les Français et nous. Il suffirait qu’un drapeau musulman ou un étendard flotte pour qu’Ahmed bey se soumette et s’il refuse, ce seront ses hommes qui le tueront ».
H. Khodja : « Le problème n’est pas de connaitre l’attitude ou le destin d’Ahmed Bey ; la question n’est pas aussi simple que tu le crois ; elle dépasse la frontière : assurer l’allégeance de Arabes de l’est et de l’ouest n’est pas une affaire aisée. La soumission des Arabes à l’administration algérienne dépend du fait que l’Algérie est la vassale du calife musulman, le sultan Mahmoud II ».
Une administration algérienne, laquelle ne doit pas être confondue, avec le service administratif mais prise dans le sens de régence et d’autorité. Nous remarquerons ici que, pour H. Khodja malgré la domination française, il considérait toujours la Régence comme province ottomane, espérant son retour dans le giron de l’Empire.
En comparant ses propos dans le Miroir et dans la correspondance, il est question d’une Régence indépendante capable de rivaliser avec les pays européens : « Ce n’est pas avec une administration française ni avec la violence que l’on a pu réformer en Égypte et y rétablir l’influence française, ce n’est que par la présence du Vice-Roi et son nom qu’on est parvenu à civiliser »[32].
Nous devons aller au-delà de ces interprétations et y voir un parallèle entre Alger et l’Égypte de Mehmet Ali, une manière détournée de dire que la réussite est due au fait que le vice-roi est musulman, qu’il demeure avant tout sujet du Sultan et son vassal, malgré le soutien des Européens. Il faut aussi y voir un rapprochement, même s’il est implicite, avec Ahmed Bey, sur lequel H. Khodja fondait l’espoir de le voir régner et être à l’origine du renouveau. Quitte à être dominé et occupé, autant que cela soit par l’administration d’un musulman plutôt que celle d’un infidèle. D’ailleurs, dans son mémoire adressé à la Commission d’Afrique, il dit bien que si la France veut préserver ses intérêts au mieux, il lui serait judicieux : «…d’élire un prince mahométan connu et capable auquel la France confierait le sort de ce peuple avec le soin de le gouverner à l’aide des principes libéraux, compatibles avec les lois et les mœurs de ces peuples »[33].
Ici le terme « peuple » est à prendre dans sa conception la plus large ; c'est-à-dire l’ensemble des communautés sans distinction d’ethnie qui formerait plus au moins une unité.
H. Khodja poursuit en ces termes : « Je lui ai demandé, après cela, comment est-ce qu’il comptait faire pour obtenir cet argent pour organiser l’armée et pour payer le prix de la capitation. Bouderba me répondit. « Nous allons faire savoir aux populations algériennes (d’Alger) que nous avons acheté l’Algérie. J’ai en ma possession des lettres de notables « d’al watan[34]» disant : « achetez l’Algérie[35] et nous nous chargeons de rassembler la somme et si cela ne suffit pas, nous passerons un accord avec les Français pour nous laisser deux années sans rien payer…»
H. Khodja : «…le pays est une province ottomane, comment justifier soustraire ce pays à l’autorité de ses maîtres légitimes et comment pouvons-nous promettre de payer un impôt (ḫarāğ) à des infidèles sans la permission de l’empire ottoman ? Je lui dis que je ne pouvais cautionner une affaire aussi grave. Si cela venait à se produire, je ne pourrais plus vivre en Algérie, sous une administration autre que celle des Ottomans, de plus je ne pourrais jamais être d’accord sur le fait de payer un tribut à des infidèles ».
La position de H. Khodja est un paradoxe en soi : il parait être pour une indépendance ou une autonomie de la Régence, il est conscient que des réformes sont nécessaires pour la bonne marche du pays et sa sauvegarde, propos qu’il réitère dans la lettre qu’il adresse à la Commission d’Afrique :
« Non, les Algériens ne méritent pas qu’on les repousse de la société, ils font partie de la famille humaine… Veuillez prendre en pitié leur position, un changement de système peut seul rétablir l’ordre à Alger et faire renaitre la confiance. Le concours de vos hautes lumières a été jugé nécessaire et les Algériens espèrent en vous »[36]. Il est pour qu’elle soit sous une tutelle ou un protectorat, Il va même à solliciter et à interpeller les puissances européennes pour reconsidérer la question algérienne et aider les Algériens, tout comme elles l’ont fait avec les Grecs, les Belges et les Polonais[37] et pourtant, dans sa correspondance avec le Sérail, il espère le retour d’Alger dans le giron ottoman.
Face à ces enjeux économiques et politiques qui se jouent en cette partie de la Méditerranée, H. Khodja était lucide sur le fait que ce rêve de faire d’Alger un État moderne semblable à celui d’Égypte était une utopie. Ses choix et ses positions ne diminuent en rien sa sincérité à vouloir défendre son pays, ses compatriotes : car pour lui : « Cet ouvrage n’est qu’un simple rapport […] car je ne suis que l’écho des faits et l’organe de mes compatriotes »[38].
Voyant ses actions sans effets, il retourne à Istanbul d’où il continua à suivre l’évolution de la question algérienne. Il décède en 1842.
Ahmed Bouderba et sa politique de coopération
Négociant, d’origine mauresque, il vécut à Marseille, marié à une française. Étant donné qu’il vécut en France, il parlait français et l’écrivait, mais surtout il connaissait ses lois et sa législation. Suite à une banqueroute, il retourna à Alger, et c’est par lui, avec le fils de H. Khodja, que fut négociée la reddition du dey Ḥuseïn en 1830. C’est à partir de ce moment qu’il s’imposa comme homme politique. Bourmont constitua le conseil municipal et le nomma à sa tête, siégeaient également à ce conseil des notables et des Juifs de la ville. Les opinions à son sujet étaient partagées : pour les uns, il était un collaborateur, pour les autres une victime des Français. Pour certains, il était un allié influent, et pour d’autres un ennemi. Il est vrai que dans les premiers temps, il aida les Français en servant d’intermédiaire, croyant leur action juste[39], cela n’empêcha pas que l’on se méfia de lui et qu’on le considéra comme un espion à la solde de l’émir Abdelkader[40]. Aux dires de Pellissier de Reynaud, A. Bouderba était : « un homme d’esprit fin et rusé mais sans le moindre principe de moralité, et plus tracassier qu’habile[41]. Abou Qacem Saadallah reconnait en lui un personnage ambigu dont les motivations patriotiques et politiques restent difficiles à cerner, surtout après son témoignage devant la Commission d’Afrique, et le mémoire qu’il rédigea à l’intention de l’administration française pour asseoir son autorité.
Voyant ses approches politiques échouer et déçu par les Français et leurs fausses promesses, il se consacra au commerce et se rallia à la cause de l’émir Abdelkader : «…Ainsi, nous dirons que Ahmed Bouderba, faute d’avoir pu tirer avantage de la présence française afin de réaliser ses ambitions personnelles et patriotiques, et ayant perdu espoir en la France, il se rallia à l’émir Abdelkader »[42].
A. Bouderba insiste sur le fait que les populations locales sont pour que les Français restent pour les gouverner et que la différence de religion n’est qu’un détail secondaire : « Nous ne serions musulmans que de nom mais administrativement nous dépendrions de l’autorité française »[43].
Ses propos semblent intéressants, en effet à partir de 1834, la France décide de garder l’Algérie, elle devient possession française. De ce fait, A. Bouderba serait pour une administration régie par les lois françaises, ce qui est, dans le contexte de l’époque, en contradiction avec les fondements du statut personnel musulman. Et d’un autre côté, sa position, vis-à-vis de la question de l’islam serait de le reléguer à un domaine spirituel sans pour autant y porter atteinte ; chose sur laquelle il insiste dans son mémoire où il conseille à l’administration française de respecter l’aspect religieux, qui reste l’un des moyens les plus sûrs pour la paix :
« Il faut que l’autorité tâche de faire tout son possible de ne changer rien, ni dans leurs mœurs, ni dans leurs usages ou habitudes surtout pour la religion, qui est la première base qu’il faut établir solidement avec les musulmans »[44].
A. Bouderba mit tout en œuvre pour s’opposer aux sympathisants et éléments turcs ; il intrigua contre tous ceux qui manifestaient des sentiments pour le retour du régime ottoman. Même les Juifs eurent droit à ses intrigues car ils représentaient des concurrents contre ses commerces. Toutes ses manœuvres lui valurent des plaintes, ce qui lui valut d’être exiler par deux fois : une première fois en février 1832, mais ce fut un exil volontaire qu’il sollicita de peur de représailles de la part de Rovigo, lequel pensait qu’il complotait avec un comité Maure contre les intérêts de la France, mais rien ne le prouvait réellement, et une seconde fois le 24 spetembre1836 par Clauzel qui voyait en lui un espion à la solde de l’émir Abdelkader.
Il ressort, après la lecture de diverses correspondances, qu’il jouissait d’une grande influence auprès des chefs arabes, beaucoup plus considérable que celle de H. Khodja. Les lettres qui lui sont adressées[45], par exemple, par Al hadj Muhieddine as-Seghir ben Sidi Ali ben Moubarak, chef maraboutique de Kolehah, le montrent clairement. Ce dernier lui fait le rapport des moindres faits et gestes de ce qui se passe aux alentours des tribus arabes et kabyles, et que la sévérité la plus implacable doit être appliquée envers les agitateurs ou les tribus récalcitrantes :
« Les tribus ont prêté serment sur le Coran de ne point attaquer les Français parce qu’ils ne leur ont rien fait et aussi à cause de vous »[46].
Il n’était pas le seul à penser la même chose, comme l’atteste cette lettre, datée de 1831, dans laquelle cheikh Zeïd ben Allal, autre chef arabe influent, laisse entendre que les rebelles méritent la mort et que ce n’est que par ce moyen radical que la paix sera possible :
«…Je vous apprends que les tribus qui méritent de périr entièrement sont celles de Wād el Zitoun, car c’est le refuge de tous les malfaiteurs. Béni Misera et Béni Saleh ont également beaucoup de mauvais sujets. Mais les plus méchants sont les habitants de Blidah car ils sont la cause »[47].
L’ascendant de A. Bouderba, comparé à celle de H. Khodja, parait beaucoup plus important, et il mettait un point d’honneur, à travers ses relations, à garantir cette paix, à tel point qu’il lui est demandé de conseiller à l’administration française un chef pour les musulmans. Par ailleurs, dans une autre correspondance, l’agha Al hadj Muhieddine as-Seghir ben Sidi Ali ben Moubarak recommande à A. Bouderba de conseiller aux Français d’élire le plus vite possible un chef parmi eux, que cela serait bénéfique pour les deux parties : «…de dire au général de nommer un gouverneur pour les musulmans cela va de votre intérêt et du notre »[48]. Qui désigne-t-il en ces termes : Les Arabes de la plaine ? Ou tous les musulmans sans distinction d’ethnie ? Nous en doutons, vu les difficultés qui subsistaient entre Arabes et Kabyles, et à titre d’exemple, al Hadj Saadi et ses alliés refuseront de se soumettre à l’autorité de Moubarak.
Henry Laurens souligne l’implication de A. Bouderba et celle de sa communauté dans la régénération de la race arabe[49], c'est-à-dire réactiver son implication politique : Rôle que confirme H. Khodja lorsqu’il se plaignait que A. Bouderba mettait tout en œuvre pour que les Français placent l’Émir Abdelkader sur le trône d’Alger. Il ne faut pas oublier que A. Bouderba ne voulait pas voir les Turcs reprendre le pouvoir. Choisir un chef parmi les Maures, n’était pas possible ; jusqu’à présent, aucun ne pouvait relever le défi du leader charismatique du schéma Khaldounien : un homme possédant à la fois les qualités d’un chef de guerre mais aussi un chef religieux qui saurait réunir autour de lui des alliés au nom de la religion. Donc le candidat archétype était, sans l’ombre d’un doute, Abdelkader, donc il se rallie à lui, et entame sa propagande avec l’aide des autres Maures. Nous savons que cette idée n’était pas du gout de H. Khodja, même s’il finit par accepter l’idée par défaut après la chute d’Ahmed bey en 1837. A. Bouderba retourna, à Marseille et de là à Paris, d’où il continua ses activités politiques. En 1834, sur la demande de la Commission d’Afrique il témoigna en faveur de la présence française.
A travers cet échange, il apparait que le terme de nation et de patrie chez les deux hommes n’a pas le même sens. L’un est attaché au pouvoir ottoman et souhaiterait le voir réinstaurer, alors que le second est pour une paix entre Arabes et Français. Là où H. Khodja voit une patrie : « Mes enfants et toute ma famille sont sous la domination des infidèles et moi je suis dans leur pays, combattant et luttant de toutes mes forces pour ma patrie (waṭanî) l’Algérie »[50], A. Bouderba, lui, y voit une nation algérienne où tous les différentes communautés finiraient par opter pour une politique de vassalité : « Si vous voulez que la nation algérienne vous obéisse, donnez un roi français ou prenez le parmi les Arabes musulmans »[51]. Même si Saadallah fait de A. Bouderba un leader national et l’insère dans un parti politique arabo-musulman en disant de lui : « Il est Algérien d’origine andalouse »[52]. Cela est contradictoire ; en effet dans le contexte de l’époque, les notions de parti national ou patriotisme ne sont pas clairement définis et se contredisent. Où commence le patriotisme, concerne-t-il l’ensemble de la Régence ou seulement la province d’Alger et de ses environs (Blida, Koléa, Dellys, Cherchell). Ce qui nous amène à notre troisième figure : Hadj Ali Sidi Saadi.
Hadj Ali sidi Saadi
Les documents et sources le concernant laissent paraitre un personnage complexe: tantôt d’origine modeste, tantôt chérif respecté, ou bien fervent résistant à l’occupation française, ou comme lui-même se qualifie : un héritier qui cherche à reprendre un trône qui lui revient de droit. A partir des différentes versions : sources écrites et témoignages contemporains, nous avons essayé de reconstituer quelques bribes de la vie de ce personnage en mettant en évidence ses prises de position par rapport au contexte de l’époque.
Abou Qacem Saadallah décrit Sidi Saadi comme un élément important de la résistance et fervent opposant à la présence française[53], qui refusa toutes tentatives de négociation ou de cohabitation avec les Français, tout comme il était opposé fermement au retour des Turcs. Il mena une guerre sans merci contre l’envahisseur, appelant et haranguant les foules à la guerre sainte. Cependant, il s’avère que ses aspirations politiques et religieuses dans le cadre de la résistance demeurent mitigées. Sidi Saadi fut impliqué dans les attaques contre l’escorte de Bourmont à Blida en juillet 1830, contre Clauzel en novembre 1830, et en dernier lieu contre la ferme-modèle de Maison Carrée[54] (juillet 1831). Il subsiste des zones d’ombre quant à la concordance des faits par rapport à son arrivée et ses prétendues entrevues avec le dey Ḥuseïn. Si vraiment il était opposé aux Turcs, pourquoi cette entrevue ?
Le duc de Rovigo dans une lettre adressée au Ministre de la guerre Soult, rapporte qu’au moment du débarquement français, Sidi Saadi revenait du Pèlerinage, et qu’avant d’arriver à Alger, il s’arrêta à Livourne où il aurait rencontré dey Ḥuseïn[55]. La première chose qu’il fit, dès son retour, fut de prendre attache avec les différentes tribus, et il s’associa à Ben Za’mûm[56] chef de la tribu des Flissa pour mener la résistance. Dans une lettre adressée au duc de Rovigo, Sidi Saadi se présente comme étant de noblesse chérifienne et membre d’une zaouïa de la Grande mosquée d’Alger, dont ses ancêtres avaient eu la charge :
« Mes ayeux (sic) à moi, étaient empereurs à l’ouest, comme je vous l’ai dit. Au temps du sultan Akhal, un de mes grands-pères, il est dit dans notre histoire qu’ils gouvernaient depuis le Maroc jusqu’à Constantine. Mes ayeux (sic) ont construit la grande Mosquée d’Alger […] Dieu a voulu que ce royaume fut perdu pour nous »…[57].
Avant de poursuivre, les propos de Sidi Saadi sur sa généalogie méritent réflexion, ils suscitent deux hypothèses. Il dit que ses aïeux auraient construit la Grande mosquée d’Alger, or la construction de celle-ci fut l’œuvre de la dynastie al Moravide, du temps de Yūsef ibn Tašfīn, en 1097. Par contre, le minaret fut construit, en 1324, par abū Tašfin (1318-1337), sultan zianide[58]. Le territoire de cette dynastie s’étendait depuis la capitale Tlemcen, allant de la Moulouya et de Sijilmassa, à l'ouest, jusqu’au sud de la Grande Kabylie et à la Soummam, à l'est. La capitale fut l’enjeu des rivalités avec les dynasties Mérinides, Hafsides et Saadienne. Affaiblie par d’incessantes querelles et des guerres, le pouvoir des ʽAbdalwādides prend fin définitivement avec l’arrivée des Turcs en 1550[59].
Quant à son grand-père « sultan Lakhal » (le noir), l’histoire médiévale du Maghreb fait référence à deux souverains possibles. Il s'agit, du calife Abū Yūsuf al-Manṣūr (1184-1199), et du sultan mérinide Abū ʿInān (1348-1358). Ces deux souverains passaient pour être des guerriers zélés de la guerre sainte. D'un point de vue anthropologique, on peut remarquer qu'ils sont devenus des rois légendaires puisque jusqu'à aujourd'hui des contes maghrébins font référence à eux[60]. Par ailleurs, dans la dynastie des Bendjellab (sultans de Touggourth), on trouve un sultan, Mohammed 1er (1729-1756), connu sous le nom de sultan Lakhal, et dont la branche serait issue des Mérinides[61].
Il va sans dire que faute de sources beaucoup plus avérées, ces hypothèses ne se sont que de simples spéculations, car cela nous pousserait aussi à remettre en question son appartenance confrérique. Par rapport à ce point, Saadallah affirme qu’il appartenait à l’ordre de la Rahmanyya, contrairement à ce qu’écrit Rovigo, dans un rapport[62] envoyé au ministre de la guerre dans lequel il affirme qu’il est d’origine turque et négociant très proche de l’ancien dey, d’où la rumeur qui disait que le retour du dey était imminent et que Sidi Saadi l’aiderait à reconquérir la Régence. L’agha Al hadj Muhieddine as-Seghir ben Sidi Ali ben Moubarak rapporte que Sidi Saadi disait que Ḥuseïn pacha lui avait envoyé de la poudre en grande quantité ainsi que de l’argent, et c’est pour cela que les Kouloughlis et les Turcs l’auraient rejoint, et qu’il aurait même pris le titre de pacha[63] .
Paul Azan[64] nous dit que Sidi Saadi était le gendre de Ben Za’mûm, grand chef kabyle, mais que cette parenté ne lui donna aucune autorité, même, après avoir rejoint les rangs de l’émir Abdelkader en 1834. Certaines tribus le rejetèrent du fait de ses origines modestes. Ce qui est contradictoire avec la réalité du terrain et du contexte. Sachant que ce rejet semble chose assez rare, quand on connait les rapports qu’entretenaient les populations avec les marabouts et hommes de religion. Ce qui remet en question à la fois l’hypothèse de son appartenance à la Rahmanyya, et celle du grand chef kabyle commandant les montagnes Zwawa, comme le prétend Abderrahmane Mohamed al Djilali[65].
Dans une autre lettre à Rovigo, datée du 30 janvier 1832, et signée de Sidi Saadi, celle-ci suggère que les relations avec celui-ci avaient débuté fin décembre 1831, et que c’est Ben Za‛mûm qui, dans un premier temps, servit d’intermédiaire. Ce dernier adressa une lettre à Rovigo, dans laquelle il demandait de considérer Sidi Saadi comme étant leur seul représentant : «… au sujet de hadj Ali Sidi : il est notre chef et directeur de nos affaires ainsi que celles de notre pays. Nous acceptons tout ce qu’il acceptera, car c’est un homme versé dans le secret du gouvernement et qui saurait tout diriger. Lui seul peut être à la tête du peuple. Il vous demande par écrit qu’elles sont vos conditions. Ses intentions sont bonnes et pacifiques. Confiez-vous à lui avec sécurité, il n’en résultera que le bien être du pays(…) il convient aussi que vous reconnaissiez sa grandeur et sa puissance, puisque c’est lui de l’est à l’ouest qui commande sur nous. Je vous demande pour lui de le laisser hisser un drapeau rouge et loger à la Kassaba. Toutes les conditions que vous lui ferez, seront acceptées car il est notre roi »[66].
La lettre traduite par Zaccar (interprète français) semble apporter un tout autre discours concernant les véritables motivations de ce personnage, à aucun moment il n’est question de revendications fanatiques. Les propos laissent apparaitre un discours cohérent, logique et surtout il est question, à la fois, d’une manœuvre politique et économique : ses revendications étaient axées sur trois points :
- Etre établi à la Kassaba et d’y hisser un drapeau rouge : sachant que le drapeau rouge étant la couleur de l’ancien gouvernement ;
- Lui livrer l’intérieur et l’extérieur de la ville ;
- Etablir des contrats commerciaux garantissant le libre commerce entre les deux parties.
En contrepartie, les Français seraient les maîtres de toutes les tribus.
«…Car les Français seraient alors maîtres de toutes nos tribus. La ville serait encombrée de nos produits et de nos minéraux. Nous nous arrangerons de manière que le pays ressemblera à celui de l’Egypte. Nous pourrons dire que votre arrivée nous aura fait du bien. Nous possédons chez nous des biens en abondance et un peuple nombreux. Si anciennement nous n’étions pas riches, c’est que le gouvernement d’alors était fourbe et nous n’y avons aucune confiance. Les Français trouveraient leur intérêt à un pareil arrangement, j’ai particulièrement bon cœur et je désire le bien-être général sans distinction de religion. Je serai juste avec les Français sans nul doute car j’aime l’esprit et les manières des Français. Le cœur de toutes les tribus vous appartiendraient si vous écoutez leur demande »[67].
Sidi Saadi envoya une lettre au duc de Rovigo, datée du 29 février 1832, dans laquelle il réclamait le trône d’Alger, assurant que ce pouvoir lui revenait de droit. Rovigo, ne lui accordant aucun intérêt politique ou militaire, par dépit, Sid Saadi se rallia à l’émir Abdelkader qui en fera un de ses lieutenants à Mascara.
Nous sommes bien loin du portrait épique qui présente Sidi Saadi comme étant un patriote et un nationaliste sans faille. Au contraire, nous sommes en janvier 1832, soit après 19 mois d’occupation ; les propos que tient Sidi Saadi mettent en avant certes, une envie de paix qui ne va pas au-delà de la province d’Alger. Si le caractère du discours reste religieux, il est évident que l’intérêt politique et économique n’est pas négligeable. Lorsqu’il utilise « nous » à qui renvoie ce pronom ? A l’ensemble des populations : Arabes et Kabyles ?
Tout en reconnaissant Rovigo comme sultan, il glisse des menaces implicites en traitant les Arabes de la Mitidja comme des traitres :
« …Ne croyez pas que je prenne pour appui les faibles habitants d’Alger. Les Algériens sont tous sous vos ordres, ils n’ont aucune force et ne cherchent que vos grâces. Vous êtes maître de les faire souffrir ou non, ils sont vos sujets soumis. Nous ne comptons pas sur eux car ils sont trop faibles. Je ne ferai pas comme le général votre prédécesseur, je ne m’appuierai pas sur les Arabes de la Mitidja pour attaquer les Cabaïls. Je m’appuierai sur les forts (…) ce n’est que vous prouvez le ridicule de votre prédécesseur qui voulait prendre le plus fort par le faible, nous avons ri de sa combinaison et de sa politique »[68].
Ces extraits de lettres remettent en cause ses motivations réelles, sinon comment expliquer qu’il était prêt à cohabiter et à reconnaitre la domination d’un non musulman et à se soumettre ? Et, quant au rôle qu’il aurait joué dans l’unité nationale cela reste encore à être défini. Une unité nationale exige une équité entre les membres des différentes communautés où l’appartenance tribale de ses membres ne serait que facultative : ce qui n’est pas le cas ; l’élément Kabyle est mis en avant puis viennent les Arabes d’Alger, et enfin les bédouins qui semble-t-il « ne diffèrent en rien des bêtes »[69], ce qui est péjoratif. Et quant aux habitants d’Alger, les Algériens (algérois), ce sont des faibles : rancœur, sans doute, qui s’explique par le fait que trois siècles plutôt, les habitants d’Alger livrèrent la ville aux Turcs, puis aux Français sans émettre aucune opposition.
Sidi Saadi, reste un personnage très controversé par ses propos et les témoignages rapportés. Kabyle ? Turc ? Ou tout simplement un héritier déchu qui tenta de reconquérir et de reconstruire un passé révolu ? Après la défaite de l’émir Abdelkader, il se retira dans les montagnes dans une zaouïa où il décède en 1844.
Conclusion
Chaque protagoniste que nous avons cité tenta de préserver, comme dans le cas de H. Khodja, une politique déjà établie par les Ottomans, mais en y apportant des réformes adéquates d’où le fait qu’il ait tenté un rapprochement avec Ahmed bey qui échoua, ou d’accepter la domination comme le préconisait A. Bouderba en collaborant pour faire prévaloir la nationalité arabe : c'est-à-dire une collaboration qui aurait débouché , à long terme, sur une égalité de droits. Avec Sidi Saadi, c’est un autre cas de figure qui se présente : c’est plus l’individualisme et le communautarisme qui prévalent.
Hamdan Khodja, Ahmed Bouderba et Hadj Sidi Saadi croyaient, chacun à leur manière, qu’ils étaient « l’homme de la situation », mais ils avaient aussi leur talon d’Achille qui était de n’avoir pu dépasser les différences ethniques, d’une part ainsi que leurs querelles, d’autre part. Au lieu de s’engager dans une politique d’unification, c’est le contraire qui se produisit : une politique de division, laquelle servit la régénérescence non pas d’un courant mais de trois courants : turc, arabo-andalou, et kabyle. Leur démarche resta stérile, sans résultat, car ils oublièrent que l’idée d’un État-nation reposait avant tout sur l’esprit d’unité qui faisait défaut aux différentes communautés de la société de l’époque.
Bibliographie
Sources et archives
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A.N.O.M, G.G.A, Correspondance générale des Arabes, 118miom 4, Série E, sous-série 1HH42, Lettre de Ben Zaamoum adressée au duc de Rovigo, le 30 janvier 1832.
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Sources électroniques
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http://www.lemidi-dz.com/index.php?operation=accueil&date_article=2009-10-14, consulté le 24 juin2012.
Notes
[1] Marchand, E. (1913), L’Europe et la conquête d’Alger, Paris, Perrin et Cie, Librairie Éditeurs, p. 293.
[2] Lacheraf, M. (2006), L’Algérie, nation et société, Alger, éd. Casbah, p. 255.
[3] Vatin, J.-C., (1983), L’Algérie politique. Histoire et société, 2ème édition, Paris, Presses de la Fondation des sciences politiques, p. 110.
[4] Morisque : terme qui désigne les musulmans d’origine arabe ou européenne venus d’Espagne.
[5] Khodja, H. (2006), Le Miroir, Aperçu historique et statistique sur la Régence d’Alger, Alger, ANEP, p. 106.
[6] Ibid., p. 161.
[7] Hassuna D’ghies.
[8] Jeremy Bentham né le 15 février 1748 à Londres et mort dans cette même ville le 6 juin 1832 était un philosophe, jurisconsulte et réformateur britannique.
[9] Hume, L.-J. (1980), “Preparations for Civil War in Tripoli in the 1820s: Ali Karamanli, Hassuna D'Ghies and Jeremy Bentham”, in The Journal of African History, Vol. 21, n° 3, p. 311-322.
[10] Quotidien publié à partir du 5 novembre 1831.
[11] Général Voirol, gouverneur général du 29 avril au 27 juillet 1834.
[12] Commission envoyée pour faire rendre compte des suites qu’il conviendrait de donner à l’expédition et enquêter sur les exactions commises par les troupes françaises dénoncées par Khodja avec son œuvre le Miroir.
[13] ANOM, G.G.A, Série H Registre n°1, sous série 1HH42, Correspondance générale avec les Arabes, copie d’une lettre de Hamdan Khodja adressée au général Voirol le 28 décembre 1833.
[14] Vattel, E. (Wattel) juriste suisse (1714-1767), auteur de Le droit des gens, paru pour la première fois en 1758.
[15] Yver, G. (1913), « Mémoire de Hamdan Khodja », in Revue africaine, n° 57, Alger, Librairie-études Jourdan, p. 138.
[16] Larbi Z’biri, M. (1985), Al Mir‛āt Alger, SNED.
[17] Khodja, H. (1985), Le Miroir. Aperçu historique et statistique sur la Régence d’Alger, Paris, éd. Sindbad.
[18] Article paru le 14 octobre 2009 :
http://www.lemididz.com/index.php?operation=accueil&date_article=2009-10-14, consulté le 24 juin 2012.
[19] Khodja, H. (2006), Le Miroir…, op.cit., p. 70.
[20] Ibid., p. 101.
[21] Khodja, H. (2006), Le Miroir…, op.cit, p. 71. C’est nous qui soulignons.
[22] Lacheraf, M. L’Algérie, Nation et société, op.cit., p. 139.
[23] Merouche, L. (2002), Recherches sur l’Algérie à l’époque ottomane. Monnaies, prix et revenus 1520-1830, t. 1, Paris, éd. Bouchène, p. 10-12.
[24] Lacheraf, M. L’Algérie, Nation et société, op.cit., p. 7.
[25] Quant à la traduction, elle comporte 12 pages dactylographiées en arabe et traduite par Fikri Touna. Traduction sur laquelle nous nous sommes basée pour donner une version en français.
[26] Archives Nationales d’Alger (A.N.A), Ḫaṭṭ Hümāyūn, Bt30, correspondance n° A37711. Correspondance de Hamdan Khodja adressée à un ami, haut fonctionnaire de la Sublime Porte datée de 1250H (avril 1835).
[27] Archives Nationales d’Alger (A.N.A), Ḫaṭṭ Hümāyūn, Bt30, correspondance n° A37711. Correspondance de Hamdan Khodja adressée à un ami, haut fonctionnaire de la Sublime Porte datée de 1250H (avril 1835).
[28] A.N.A, Ḫatt Hümāyūn, Bt30, correspondance n° A37711. Correspondance de Hamdan Khodja adressée à un ami, haut fonctionnaire de la Sublime Porte datée de 1250H (avril 1835).
[29] Ibidem.
[30] A. N. A, Ḫaṭṭ Hümāyūn, n° 37711/A 1250H (avril 1835), lettre de Hamdan Khodja adressée à un ami intime au Sérail.
[31] Khodja H., Le Miroir…, op.cit., p. 121.
[32] Khodja, H., Le Miroir…, op.cit., p. 197
[33] A. N. A, Ḫaṭṭ Hümāyūn, lettre de Hamdan Khodja adressée à un ami intime au Sérail, n°37711/A 1250H (avril 1835).
[34] Dans la traduction en arabe le mot utilisé est « Watan ». Nous avons choisi de le transcrire tel quel car dans le contexte de l’époque et par rapport à divers correspondances ce mot désignait, une province, une région sans pour autant désigner l’ensemble de la régence d’Alger et de ses environs.
[35] Nous pensons plutôt qu’il s’agit de la province d’Alger et de ses dépendances et non pas l’ensemble de la Régence. En langue arabe, le même terme désigne la ville d’Alger et le territoire (Algérie). Le terme « chaâb » veut dire étymologiquement ensemble de tribus et de communautés.
[36] A.N.O.M, G.G.A, 18miom24, Série E liasse 615, copie de la lettre de Hamdan Khodja non signée adressée aux membres de la Commission le 26 octobre 1833.
[37] Khodja, H. Le Miroir…, op.cit., p. 157.
[38] Ibid., p. 198.
[39] Saadallah, A.-Q (2009), Al Ḥaraka al waṭanyya, Alger, Dār al Baṣāʽir, édition, p. 184.
[40] Azan, P. (1930), L’émir Abdelkader 1808-1883, du fanatisme musulman au patriotisme français, Paris, Librairie Hachette, p. 67.
[41] De Reynaud, P. (1854), Annales algériennes, t. 1, Paris, Librairie militaire, p. 77.
[42] Saadallah, A.-Q Al Ḥaraka al waṭanyya, op.cit., p. 105 (traduction personnelle).
[43] A. N. A. Document n° 37711/A1250 daté de (1834) correspondance de Hamdan Khodja adressée à un ami au Sérail.
[44] Yver, G. (1913), « Mémoire Ahmed Bouderba », in Revue Africaine, n° 57, Alger, Librairie Jourdan, p. 238
[45].A.N.O.M, GGA ,18Miom 14 /liasse 15 année 1831 : correspondance de Muhieddine as-Seghir ben Sidi Ali ben Moubarak, agha des Arabes à Bouderba.
[46] A.N.O.M, GGA ,18Miom 14 /liasse 15, année 1831 : correspondances de Muhieddine as-Seghir ben Sidi Ali ben Moubarak, agha des Arabes à Bouderba.
[47] A.N.O.M, GGA, 18Miom 14 /liasse 15, année 1831 : correspondances de Muhieddine as-Seghir ben Sidi Ali ben Moubarak, agha des Arabes à Bouderba.
[48] A.N.O.M, GGA ,18Miom 14 /liasse 15, année 1831 : correspondances de Muhieddine as-Seghir ben Sidi Ali ben Moubarak, agha des Arabes à Bouderba.
[49] Laurens, H. (1990), Le royaume impossible, la France et la genèse du monde arabe, Paris, Amand Collin, p. 62.
[50] A. N.A. Document n°37711/A1250, Correspondance Hamdan Khodja, datée de (1835) correspondance de Hamdan Khodja adressée à un ami au Sérail.
[51] Ibid.
[52] Saadallah, A.-Q, Al Ḥaraka al waṭanyya…, op.cit., p. 104.
[53] Ibid., p. 124
[54] Al-Harrach, banlieue d’Alger.
[55] A.N.O.M, G.G.A, Série E- liasse 472, Correspondance générale des indigènes lettre adressée du duc de Rovigo au ministre de la guerre le 22 février 1832.
[56] Ben Za‛mûm ou Ben Zaamoum.
[57] A.N.O.M, 118 miom4, Série E – 1HH42, Correspondance générale avec les Arabes, Registre n° 1, lettre du Hadj Ali Si Saadi au Duc de Rovigo, datée du 28 févier 1832.
[58] Les dynasties des Zianides, également appelée (ʽAbdelwādid).
[59] http://www.qantara-med.org article Les Abdelwâdides, consulté le 25 septembre 2012.
[60] Pour plus de détail voir Ferhat, H. (1992), Le Maghreb aux XIIe-XIIIe siècles : les siècles de la foi, éd. Wallada, Casablanca.
[61] Cité par Féraud, Ch. (2006), dans Histoires des Sultans de Touggourt et du Sud Algérien, Origines et histoire d’une dynastie saharienne, t. 1, Alger, éd. Grand Alger Livres, p. 39.
[62] A.N.O.M, 18miom22, Série E, liasse 472, Correspondance générale des indigènes, lettre adressée du duc de Rovigo a ministre de la guerre le 22 février 1832.
[63] A.N.O.M, 118miom4, Série E – 1HH42, Correspondance générale avec les Arabes, Registre n°1, lettre de l’agha des Arabes Muhieddine as-Seghir ben Sidi Ali ben Moubarak adressée à Rovigo, datée du 21 août 1832.
[64] Azan, P., L’émir Abdelkader 1808- 1883, op.cit., p. 108.
[65] Abderrahmane Mohamed al Djilali (2008), Tarῑḫ al-Ğazā᾿ir al‛Ām (Histoire générale d'Algérie,), t. 4, 8ème édition, Alger, Dar al Oumma, p. 246.
[66] A.N.O.M, G.G.A, Correspondance générale des Arabes, 118MIOM 4, Série E, sous-série 1HH42, Lettre de Ben Zaamoum adressée au duc de Rovigo le 30 janvier 1832.
[67] A.N.O.M, G.G.A, 118miom4, Série En sous-série 1HH « Correspondance générale des Arabes », lettre de Hadj Ali Sidi Saadi adressée au Duc de Rovigo le 28 février1832.
[68] Ibid.
[69] Ibid.