Insaniyat N°77-78 | 2017 |Pratiques plurilingues et mobilités : Maghreb - Europe|p.141-161 | Texte intégral
Azzeddine MAHIEDDINE: Laboratoie Dylandimed, Université de Tlemcen, 13000, Algérie
Mohammed Zakaria ALI-BENCHERIF: Laboratoie Dylandimed, Université de Tlemcen, 13000, Algérie
Centre de recherche en anthropololgie sociale et culturelle, 31000, Oran, Algérie.
Introduction
La mobilité internationale des étudiants connait une dynamique importante en ce début du 21ème siècle et constitue, vu ses enjeux (impacts économiques et socioculturels notamment), un élément important des flux internationaux. D’un point de vue (socio)linguistique, cette mobilité géographique s’accompagne généralement d’une dynamique plurilingue dans la mesure où elle entraine un développement du répertoire verbal. Cette double dynamique, spatiale et langagière, renvoie à une conception plus large de la mobilité linguistique, conçue comme un processus constitutif de constructions linguistiques et identitaires complexes de locuteurs pris dans diverses situations de pratiques socio-culturelles (Van Den Avenne, 2005).
Le présent article interroge la dynamique des répertoires verbaux chez des étudiants algériens en mobilité universitaire en France, et s’inscrit dans le cadre du projet scientifique « Dynamiques spatiales, langagières, identitaires, de la circulation migratoire étudiante (Maghreb, France
et Canada) »[1].
Nous utilisons ici des entretiens semi-directifs, menés auprès de trois étudiants algériens (Nouredine, Asma et Abbas) à différentes étapes de leur projet migratoire (avant et pendant la mobilité). Nous examinons, d’une part, leur biographie langagière et leur trajectoire de mobilité (contextes dans lesquels les sujets ont évolué avant et lors de la mobilité) ; d’autre part, nous nous appuyons sur une analyse linguistique de leurs discours, avant et après la mobilité, pour mettre en évidence une mobilité linguistique (Veltman, 1997). Dans ce sens, certains phénomènes linguistiques, tels que les expressions idiomatiques, sont pris comme indicateurs de cette mobilité linguistique qui se manifeste dans
et par le discours.
Ainsi, l’objectif est de montrer comment, chez ces étudiants en mobilité académique, la dynamique des répertoires verbaux se trouve corrélée à une dynamique spatiale et une socialisation dans le pays d’accueil marquée par une inscription dans de nouvelles sphères sociales ou sphères d’activités.
Méthodologie : terrain, outil et corpus
Pour le présent article, nous nous focalisons sur trois étudiants algériens que nous avions enregistrés avant leur départ (candidats à la mobilité) et au moins une année après leur mobilité en France (étudiants en mobilité). Il s’agit d’entretiens semi-directifs.
Ces trois enquêtés sont tous titulaires d’un master, obtenu à l’université de Tlemcen. Nouredine s’est rendu à Metz dans le cadre du programme d’échanges européen e-metallic, pour y préparer un doctorat en physique. Asma s’est inscrite en master microélectronique et nanoélectronique (MINELEC) à Marseille. Abbas, quant à lui, est doctorant à l’INSA de Lyon.
Rappelons que le contexte sociolinguistique, dans lequel ont vécu nos informateurs avant leur mobilité est un contexte multilingue où l’arabe algérien domine en tant que langue vernaculaire. Les autres langues (l’arabe standard et le tamzight notamment) sont utilisées selon les circonstances et par une minorité instruite (pour ce qui est de l’arabe standard) ou ethnique (pour ce qui est du tamazight). Le français, malgré sa forte présence dans les différentes sphères d’activités, n’est pas la langue dominante des échanges courants entre les Algériens. Il s’agit dans bien des cas de l’emploi d’une variété de français appelée « français parlé d’Algérie » (Queffelec et al. 2002). De ce fait, le français est pratiqué par une certaine classe sociale instruite, dira-t-on. Même si au demeurant les étudiants en mobilité universitaire possèdent des compétences linguistiques scolaires, voire universitaires en français, leur permettant une certaine facilité dans leurs études, elles peuvent – dans certains cas – s’avérer insuffisantes dans l’établissement des relations sociales avec des locuteurs francophones pour qui le français est la première langue de socialisation.
Les entretiens semi-directifs réalisés, d’une durée d’une heure en moyenne, ont été transcrits. La convention par défaut pour la notation est l’orthographe standard du français. Le choix d’une transcription orthographique répond aux exigences de lisibilité et de fidélité à la fois. Elle permet une navigation commode dans les transcriptions (pour la recherche de mots clés, par exemple). Les conventions de base utilisées sont présentées en annexe.
Trois parcours de vie différents, trois profils langagiers différents : pour une cartographie langagière verticale
L’articulation espace –temps– action nous a parue intéressante dans la mesure où elle permet de mettre en évidence les indicateurs d’une mobilité spatiale, sociale et langagière. Des épisodes autobiographiques repérés dans le discours des enquêtés ressortent plusieurs éléments à travers lesquels nous pouvons parler d’une cartographie langagière verticale qui reflète « […] les parcours pluriels et fragmentés du sujet, ainsi que les contextes dans lesquels il vit et les autres sujets qu’il rencontre au cours de ces parcours » (Ambrosio et al., 2015, p. 12, citant Blommaeret, 2010). On peut dire aussi selon un schéma inverse que les parcours fragmentés du sujet, les contextes dans lesquels il vit ou a vécu ainsi que les sujets qu’il rencontre ou a rencontrés permettent de saisir la dynamique de son répertoire verbal plurilingue « segmenté » (Blommaeret, 2010). Pour pouvoir estimer l’impact de la mobilité spatiale sur le développement des ressources du répertoire verbal (Grosjean, 2015) du sujet migrant (l’étudiant en mobilité), il nous faut disposer d’un corpus longitudinal dont l’analyse, qualitative
et quantitative, va permettre de mettre en exergue des éléments saillants qui illustrent cette dynamique.
Profils plurilingues avec une deuxième langue forte, le français
Six langues sont évoquées par les trois enquêtés : l’arabe algérien, le kabyle, l’arabe standard, le français, l’anglais et l’espagnol. Les compétences inégales dans ces langues montrent bien le rôle de chacune d’elles dans la vie de tous les jours (famille, réseaux d’amis, études
et travail).
Nouredine
Issu d’une famille plurilingue, de mère kabylophone et de père arabophone (qui pratique l’arabe algérien), Nouredine est plurilingue
et possède des compétences de réception en kabyle. L’arabe algérien et le français sont principalement utilisés dans la communication quotidienne (souvent en alternance). Il possède un niveau scolaire en arabe standard (langue de scolarisation). Il a bénéficié d’une transmission familiale du français, langue très utilisée avec ses parents et ses sœurs. En dehors de la sphère familiale, le français est appris à partir de la 4ème année primaire jusqu’au baccalauréat. Nouredine a également fait ses études universitaires en français[2]. Á l’université, il a aussi recours à l’anglais, principalement à l’écrit.
Asma
Pour Asma, le français a toujours été présent dans la sphère familiale. Ainsi, peut-on estimer que les parents ont participé à la transmission de cette langue. Au sein de la fratrie, les échanges étaient surtout en arabe algérien qui reste, pour Asma, la langue principale de la communication quotidienne, même si le français intervient souvent de façon alternée (parler bilingue français-arabe algérien). Sa scolarité a été essentiellement en arabe standard et elle a appris le français de la 4ème année primaire jusqu’au baccalauréat. Les études supérieures étaient principalement en français. Vu son profil scientifique, une importance est également accordée à l’anglais.
Abbas
Pour Abbas, c’est l’arabe algérien qui domine les échanges courants, même si le français intervient souvent en alternance. Le français est présent dans son environnement familial. Nous notons, en effet, une pratique parentale du français avec la prégnance du mode bilingue et mixte (arabe dialectal – français). Par ailleurs, il possède des compétences en arabe standard, principale langue de scolarisation. Tout comme Nouredine et Asma, le français est appris de la 4ème année primaire jusqu’au baccalauréat. Son cursus universitaire se déroule essentiellement en français. Il valorise cette langue comme langue de réussite mais il affiche une attitude positive envers l’anglais qu’il considère comme langue de la science et de la technologie.
Pour Asma et Abbas, nous constatons qu’au fil du temps, le français est utilisé de façon prépondérante à l’école et l’université, et à un degré moindre dans la famille et les autres sphères d’activités (souvent alterné avec l’arabe algérien). En revanche, le cas Nourdine illustre bien l’apport des pratiques du français en dehors de la sphère scolaire et universitaire. En effet, le français est pour lui très employé au sein de la sphère familiale (très souvent en mode monolingue). Chez Asma et Abbas, ce sont plutôt les parents qui emploient le français dans la sphère familiale, en mode mixte (en alternance avec l’arabe algérien). Les parents d’Asma et d’Abbas (notamment les pères) ont appris le français comme première langue à l’école coloniale. Ils sont tous les deux cadres et hautement qualifiés. Voici quelques extraits qui illustrent, la présence et l’emploi du français dans l’environnement social de nos trois informateurs :
Extrait 1 (Nourdine)
Nrd : avec ma mère à la maison avec mes tantes
et mes oncles
Enq : mh et avec ta mère tu parles quoi
Nrd : la plupart du temps en français
Enq : en français
Nrd : la plupart tout le temps en français on a souvent l’habitude ici en Algérie quand on parle en français d’intégrer des mots arabes.
Extrait 2 (Asma)
Asm : non c’est pas pareil entre moi et mes sœurs on va dire que c’est plus arabe
Asm : par contre euh par mon père c’est plus euh c’est plus facile pour lui de communiquer en français qu’en arabe
Asm : ma mère non elle n’a pas vraiment du mal à s’exprimer en arabe mais sur un si je dois donner un pourcentage je ne sais pas c’est chacun mon père je dois dire à 70%
Enq : ouais
Asm : français ma mère 50 et mes sœurs 30.
Extrait 3 (Abbas)
Abs : c'est pour ça que mon niveau de français s'est amélioré
Enq : et comment est-ce que vous avez du coup entre le lycée et puis l'université vous avez pris d'autres cours à l'extérieur de français pour renforcer le niveau ou
Abs : non c’est mes études qui améliorent mon français
Enq : d’accord
Abs : c’est ça en lisant les documents techniques
Enq : Hum
Abs : j’améliore mon français.
Pratiques langagières lors de la mobilité : contacts, pratiques plurilingues et réseaux
L’analyse des pratiques langagières, avant et pendant la mobilité, permet de dégager des éléments pertinents qui renseignent sur la dynamique des répertoires verbaux des locuteurs. La mobilité spatiale entraine une mobilité linguistique laquelle implique également une mobilité sociale, voire socio-culturelle et socio-professionnelle.
Une cartographie langagière verticale, conçue à partir du triptyque espace-temps et action, permet, à notre sens, de comprendre comment (par quelles voies/voix) et où les trois informateurs se sont appropriés les langues et ont développé leurs répertoires selon une temporalité multidimensionnelle. La ligne de vie relative au triptyque espace-temps
et action, articulée avec ce qui ressort comme éléments linguistiques dans leurs discours, permet de comprendre la recomposition du répertoire (Lambert et Billez, 2005). Nous avons relevé à travers quelques épisodes autobiographiques (récits de vie) relatés par nos enquêtés, des indicateurs qui renseignent sur leur socialisation langagière ainsi que sur leurs profils langagiers. La biographie langagière (Molinié, 1996) permet de caractériser la recomposition du répertoire.
Avant leur arrivée en France, les sujets-enquêtés sont tous des locuteurs du français transmis, à des degrés divers, par le milieu familial et développé à l’école et l’université. Installés en France (résidence universitaire ou studio) et fréquentant des locuteurs francophones dans différentes sphères d’activités, leurs pratiques langagières ont subi des changements et les ressources de leurs répertoires verbaux se sont développés. En effet, leur contact permanent avec des locuteurs francophones (avec des Français notamment) a contribué à l’amélioration significative de leurs compétences communicatives, surtout si l’on sait qu’ils pratiquaient avant leur arrivée en France un français standard (scolaire/universitaire) mais aussi une variété du français (le français parlé en Algérie).
Selon les déclarations des trois enquêtés, la mobilité spatiale s’est accompagnée d’une mobilité linguistique. Celle-ci apparait à travers l’emploi courant de la langue du pays d’accueil, les langues présentes dans leur quotidien mais aussi à travers les attitudes qu’affichent les sujets vis-à-vis de ces langues. Ces attitudes participent d’un apport non négligeable au développement des compétences communicatives mais aussi des ressources du répertoire. Nous pouvons, à ce propos, noter les traces de l’activité épilinguistique dans le discours des enquêtés qui valorisent le français ainsi que l’anglais. On notera également une conscience linguistique affichée et un discours assez homogénéisant à propos du français et de l’anglais en tant que langues indispensables dans leur vie estudiantine et sociale. Abbas, par exemple, a utilisé l’anglais dans son expérience socioprofessionnelle en tant qu’enseignant vacataire à l’université. Nous pouvons déduire de leur discours que les deux langues en question représentent une sorte de « lingua franca » qui permet non seulement l’accès à la science mais constituent aussi un atout déterminant de la compétence plurilingue et pluriculturelle (Zarate, 1997).
Extrait (Nordine)
E : mh mh + et euh vous avez progressé en anglais + ou vous étiez déjà très bon
Nrd: non non j'étais loin d'être très bon je suis encore loin loin d'être déjà pas très bon déjà d'être bon + loin + je lis beaucoup plus en anglais euh je regarde maintenant les émissions de télé des films en V.O plus facilement que qu'avant + mais non je cherche à suivre une bonne formation en anglais pour pouvoir euh + parce que mon problème actuellement en anglais c'est euh tout ce qui est débat et: conversation: improvisée scientifique + maintenant je peux préparer un exposé en anglais et exposer en anglais + répondre à certaines questions en anglais mais entamer un débat je sais que c'est impossible ++ pour moi à mon niveau c'est impossible + et ça c'est euh + problème de pratique + parce qu'en étant jeune j’ai pas pratiqué + j'ai pas trop parlé anglais et tout même si j'avais les bases des notions + on pratiquait pas on n'avait pas l'occasion de pratiquer + comme on est pas un pays anglophone + un pays francophone beaucoup plus donc euh.
L’examen du corpus a permis de comprendre à la fois l’importance accordée aux différents espaces de socialisation langagière mais aussi aux trajectoires spatiales (migratoires) des sujets qui ont conduit au développement du répertoire langagier. Visiblement, ceci correspond à une temporalité qui a contribué à la formation de l’étudiant en tant que sujet plurilingue. Tel est le cas de nos trois informateurs. A leur arrivée en France, ils possédaient des compétences en français mais aussi en anglais. Inscrits dans des réseaux de communication relatifs aux différentes sphères d’activités (université, laboratoire de recherche, résidences universitaires, lieux de stages, etc.), les sujets enquêtés mobilisaient les ressources de leur répertoire afin de communiquer avec leurs partenaires français ou francophones (les étudiants étrangers notamment). Si le choix du français pour Asma et Abbas dépendait des interlocuteurs, voire des relations-rôles, pour Noureddine cela relevait de ses habitudes verbales. Selon les déclarations de ce dernier, le français constituait la langue principale des échanges avec ses interlocuteurs. Pour Asma et Abbas, outre l’emploi du français dans un cadre universitaire, ils employaient souvent l’arabe algérien – en mode monolingue et mixte – avec leurs interlocuteurs maghrébins.
Pour une cartographie spatio-langagière
Il est à noter qu’il est question d’un processus de socialisation (promu par les différentes sphères d’activités) et d’individuation (lecture-écriture) qui n’est pas sans incidences sur les pratiques langagières. Si nous prenons le cas d’Abbas, son contact avec le monde extérieur était très limité. Il passait plus de temps dans sa chambre pour étudier et avancer dans sa thèse.
La mobilité spatiale exige l’emploi de la langue de l’espace d’accueil et laisse peu de place à la langue de la première socialisation. La langue du pays d’accueil est selon les propos de Calvin Veltman (1997, p. 212) « […] employée dans des contextes de plus en plus nombreux et larges, jusqu’à rendre secondaire l’emploi de la langue maternelle, qui, au terme du processus, est potentiellement abandonnée. ». Dans le cas de nos trois enquêtés, la (les) première(s) langue(s) n’est (ne sont) pas abandonné(es). En effet, ils continuent à pratiquer leur(s) première(s) langue(s) dans d’autres sphères d’activités. Nous sommes donc loin de l’assimilation dont parle Calvin Veltman et qui se base principalement sur le fait que les locuteurs abandonnent une (leur) langue pour en utiliser une autre. C’est pour cette raison que nous utilisons le terme de mobilité linguistique dans le sens d’une dynamique qui provoque à la fois une appropriation et un développement des ressources du répertoire verbal (Grosjean, 2015). Le développement est vu ainsi comme une conséquence de la mobilité, ce qui laisse entendre, comme le soulignent Billez et Lambert (2005, p. 15), « une conception plus « circulante » des contacts de langues ».
Nous dirons que de nouveaux comportements langagiers apparaissent et sont marqués par l’émergence de formes saillantes (voir le cas des expressions idiomatiques infra). Ces formes qui émergent sont le résultat de contacts avec les individus rencontrés et de la spatialité vécue où les sujets ont évolué. S’ajoutent à cela les sphères d’activités auxquelles ils ont participé. Nous avons ramené les activités des trois étudiants à quatre sphères principales : l’université, le travail, les groupes côtoyés et la sphère privée. À ces quatre sphères correspondent des usages linguistiques variés : français, anglais, arabe algérien ainsi que des formes d’alternances codiques.
Les fonctions attribuées aux langues
La mobilité sociale en rapport avec les réseaux et les sphères d’activités induit des changements au niveau des fonctions attribuées aux langues. Chez les trois enquêtés, le français remplit une fonction communicative de premier plan tandis qu’avant la mobilité – en dehors du cadre scolaire/universitaire – c’était une langue réservée, selon les cas, aux pratiques familiales comme langue de « prestige » (voire véhiculaire pour Nourdine). Elle remplit également, dans le pays d’accueil, une fonction véhiculaire lors des échanges avec des étrangers qui pratiquent d’autres langues (L1). Quant à l’emploi de l’arabe, il renvoie à une fonction identitaire chez nos trois enquêtés même si les uns et les autres ne l’utilisent pas avec la même fréquence avec leurs interlocuteurs Maghrébins. Nous pouvons résumer cet état de fait comme suit :
- Fonction identitaire : l’emploi de l’arabe avec les maghrébins, la famille, les amis, les camarades de classe.
- Fonctions communicatives : l’emploi du français avec les Français et les étrangers à l’université et au travail. L’emploi de l’anglais au travail et dans les études.
- Fonction véhiculaire : l’emploi du français chez Nourdine lorsqu’il s’adresse à sa mère kabylophone. De même que cela peut correspondre à ce qu’Asma déclare faire lorsqu’elle s’adresse aux étudiants étrangers (les Chinois notamment).
Outre les fonctions attribuées aux langues pratiquées, les informateurs se positionnent par rapport à leurs interlocuteurs.
L’auto-évaluation : nos trois enquêtés estiment que leur niveau en français est bon et s’est développé au cours du processus de mobilité.
L’évaluation par les autres (Français) : le cas Asma : sa voisine française estime qu’elle n’a pas d’accent et qu’elle parle bien français.
Si nous comparons entre l’avant et l’après mobilité – notamment par rapport aux sphères d’activités correspondant à l’emploi des langues –, nous voyons bien apparaître la sphère socioprofessionnelle notamment pour le cas d’Abbas. Cette mobilité socio-professionnelle semble jouer un rôle important dans le développement de son répertoire verbal. Le français est la langue principale à côté de l’anglais.
Contrairement à Asma ou à Abbas qui ont limité leurs relations aux réseaux arabophones (maghrébins) ou francophones (avec des étrangers pour ce qui est de Asma), Nourdine a élargi ses contacts et ses réseaux vers des locuteurs français. D’ailleurs, les Maghrébins avec qui il est en contact parlent plus français qu’arabe, ce qui lui a offert plus d’opportunités non seulement pour pratiquer le français au quotidien et développer son répertoire verbal (les tournures et expressions idiomatiques le montrent clairement).
Ces comparaisons montrent bien les écarts entre les trois enquêtés. La comparaison des profils et des trajectoires complétée et justifiée par une analyse de leurs discours permettrait de saisir les contours de la mobilité spatiale et son articulation avec la mobilité linguistique.
Les expressions figées : indicateur de la dynamique langagière et de la maitrise de L2
L’une des pistes que nous avons choisie pour observer et mettre en évidence une dynamique linguistique chez nos étudiants en mobilité est celle des expressions idiomatiques et courantes. L’objectif est de voir, à partir d’une analyse linguistique des entretiens, comment le discours des étudiants, enregistrés à différentes étapes de leur projet migratoire, évolue au niveau de ces expressions.
Les expressions idiomatiques font partie du langage quotidien (jeter un coup d’œil, faire d’une pierre deux coups, reprendre du poil de la bête…). Elles reflètent la culture partagée d’une communauté linguistique, les modes de pensée et de vie d’un peuple, voire une certaine sagesse populaire.
Pour un apprenant d’une L2, la connaissance de ces expressions courantes ou idiomatiques permet d’accéder à une véritable compétence communicative/culturelle. Leur utilisation témoigne d’une certaine aisance. Elle donne plus d’expressivité et favoriserait la fluidité verbale en diminuant la fréquence et la longueur des pauses (de Serres, 2011).
À ce titre, les expressions idiomatiques peuvent être considérées comme un bon indicateur du développement de la compétence communicative en L2, comme le souligne Florence Detry (2014, p. 144) :
Pour un étudiant de LE, la connaissance et l’utilisation de ces expressions jouent un rôle décisif dans le développement de la capacité communicative (Higueras Garcia, 1997 ; Andreou et Galantomos, 2008 ; Garcia Moreno, 2011) et, de façon conjointe, dans l’éclosion d’un sentiment de confiance et de sécurité lors d’échanges avec des locuteurs natifs.
Il est donc pratiquement impossible d’arriver à un niveau avancé sans avoir une certaine maitrise de ces expressions. Par ailleurs, notons que l’usage des expressions idiomatiques serait éventuellement un moyen d’afficher une identité linguistique et culturelle valorisante (je sais bien parler français, comme vous/eux).
Critères définitoires et difficultés d’analyse
Pour faire le relevé des expressions idiomatiques et courantes dans notre corpus, il fallait revenir sur cette notion et la cerner d’un point de vue théorique.
Parler d’expressions idiomatiques ou courantes nous renvoie à la notion d’ « expression figée ». Cette notion demeure difficile à cerner. Le phénomène échappe à toute tentative de définition simple. C’est le constat que l’on peut faire à la lecture des recherches réalisées dans ce domaine.
Plusieurs critères sont couramment utilisés par les chercheurs pour définir une expression figée[3] : la polylexicalité[4], l’opacité sémantique (ou la non-compositionalité du sens)[5] et le figement formel[6] notamment. Cependant, les critères invoqués par les spécialistes ne s’appliquent pas systématiquement à toutes les expressions figées. Les traits définitoires ne se présentent pas toujours simultanément, si bien qu’il devient difficile, voire impossible de déterminer des conditions qui seraient suffisantes de manière générale pour qu'une séquence soit considérée comme figée.
Sans entrer dans un débat théorique sur les concepts de la phraséologie, et pour les besoins de notre recherche, nous nous sommes appuyés sur les travaux de Grunig (1997) qui pose l'idée que le trait définitoire serait plutôt de type psycholinguistique que linguistique, et en particulier mémoriel. Dans ce sens, toute séquence serait susceptible d'acquérir le statut d'expression figée « à condition d'avoir un statut social solidaire d'une inscription mémorielle » (ibid, p. 235). Autrement dit, la solidarité entre les mots serait inscrite dans la mémoire des locuteurs.
Ainsi, pour le relevé des expressions de notre corpus, et au-delà des critères évoqués par les linguistes, c’est notre connaissance de ces expressions (cette « inscription mémorielle » dont parle Grunig) qui nous a servi de point d’appui.
Choix de dénomination et expressions retenues dans notre analyse
Nous avons choisi de parler d’expressions idiomatiques et courantes. L’expression idiomatique désigne généralement des expressions fortement figées dont le sens est opaque (opacité sémantique). Il s’agit souvent d'expressions imagées ou métaphoriques telles que : La moutarde lui monte au nez ; Ne pas être dans son assiette ; Se noyer dans un verre d’eau ; Tomber dans les pommes ; etc. Quant aux expressions courantes, leur caractère figé est bien attesté. L’expression est bien inscrite en mémoire en tant que tel. Mais elles sont plus ou moins transparentes d’un point de vue sémantique (on peut aisément deviner le sens) ; par exemple : Dormir comme un ange ; Jeter de l’argent par les fenêtres ; Arriver à bon port ; etc.
Parmi les expressions courantes, il y a ce que certains appellent les pragmatèmes (Perko, 2001). Ce sont des préconstruits langagiers dont l’emploi dépend étroitement de critères pragmatiques : ils sont figés par rapport à des situations caractérisées. Par exemple : à bientôt ; je vous en prie ; qu’est-ce que tu veux que je te dise ; on verra bien, etc. On parle aussi de « séquences préfabriquées » (Forsberg, 2006).
Dans le cadre de notre étude, nous n’avons pas retenu certains types d’expressions figées ou locutions figées comme :
- Les mots composés : coffre-fort, pomme de terre, chemin de fer...
- Les locutions grammaticales (prépositives et conjonctives) : en l’absence de, grâce à, étant donné que, à condition que...
- Les locutions adverbiales telles que : au fur et à mesure, de toute façon, quelque part...
En effet, ces locutions occupent une fonction syntaxique précise au niveau de la phrase, au même titre que les mots simples. Elles font partie du lexique essentiel et apparaissent dans des distributions où elles ne sont pas distinguables des mots simples. On pourrait même dire que, dans la conscience des locuteurs, elles sont plus proches des mots simples.
Quelques résultats d’analyse
Le cas Nouredine : Les résultats obtenus dans le cas de Nouredine sont assez significatifs.
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Avant la mobilité |
Après la mobilité |
Expressions maitrisées |
07 |
15 |
Expressions non maitrisées |
04 |
02 |
En effet, le nombre d’expressions idiomatiques et courantes maitrisées (correctement employées) passe de 07 (1er entretien) à 15 (2ème entretien). Voici quelques exemples :
Avant la mobilité
- 275 : je voulais pas partir à l’aveuglette
- 854 : il y a toujours des hauts et des bas
- Après la mobilité :
- 727 : je me retrouve dans mon élément maintenant tout est tout est facilité
- 245 : et je joins aussi euh + l'utile à l'agréable
Il était également intéressant pour nous, par rapport à notre objectif, d’identifier les expressions non encore maitrisées. Les mauvaises formulations, les reformulations, les hésitations, les autocorrections, les balises (« comme on dit ») ou les commentaires métadiscursifs peuvent être autant d’indices d’une appropriation en cours.
Exemple 1
- 304 : ils ont été l’objet de euh de mettre ce qu’on appelle les bouchées doubles
Dans cet exemple, l’expression utilisée (mettre les bouchées doubles) n’entre pas dans la structure syntaxique adéquate. L’hésitation (euh) est suivie de l’expression « ce qu’on appelle » ; celle-ci fonctionne comme une balise qui suppose que l’expression n’est pas encore totalement maitrisée. Le locuteur cherche sans doute l’adhésion ou l’hétéro-correction de son interlocuteur.
Exemple 2
- 446 : une fois que je verrai la fin du tunnel le bout du tunnel je vais
Nous aurions pu classer cet extrait dans les expressions maitrisées. Toutefois, le discours semble bien montrer une maitrise en cours qui est marquée ici par une autocorrection (auto-initiée).
Dans le tableau statistique, nous constatons que le nombre d’expressions non maitrisées passe de 04 à 02. Ce qui constitue un indicateur en faveur d’une mobilité langagière chez Nouredine.
Le cas Asma
Les résultats obtenus dans le cas d’Asma montrent un usage moins important des expressions idiomatiques et courantes. Néanmoins, ils témoignent également d’une évolution du répertoire verbal.
Avant la mobilité |
Après la mobilité |
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Expressions maitrisées |
03 |
10 |
Expressions non maitrisées |
01 |
03 |
Le nombre d’expressions correctement utilisées passe de 03 à 10. Voici quelques exemples :
Avant la mobilité
- 160 : mais question pratique on n’est pas vraiment au top
et c’est ce qui me manquait - 739 : c’est notre pays qui refuse c’est un peu c’est un peu difficile à digérer
Après la mobilité
- 333 : nous on préfère euh on préfère ne pas trop se casser la tête
- 394 : c'est un petit difficile mais bon on verra ce que ça va donner euh
Par ailleurs, le nombre d’expressions non maitrisées passe de 01 à 03. Ce qui est l’indice d’une mobilité linguistique chez Asma. En effet, une appropriation singulière par rapport à l’expression figée standard témoigne également d’une appropriation en cours.
Sur l’emploi de « du coup », « genre » et « truc » : tics de langage ou effets de contagion ?
Comme il a été souligné plus haut, l’examen des entretiens des trois sujets-enquêtés (avant et pendant la mobilité) permet de dire, à la lumière des données statistiques ci-après, que l’emploi des trois éléments révèle une mobilité linguistique corrélée à la mobilité spatiale. Les écarts soulignés entre l’avant et l’après illustrent bien cela. De même que les écarts soulignés entre les trois enquêtés quant à l’usage des trois éléments, ils montrent, compte tenu du contact, des pratiques et des rapports au français, que le développement du répertoire est en lien avec une mobilité verticale sociale et spatio-temporelle (la trajectoire du sujet).
Tics de langage dans l’air du temps : des usages qui en cachent d’autres
Dans bien des cas, les tics de langage relèvent d’habitudes verbales ou d’habitus (Pierre Bourdieu, 1984). Leur usage répandu amène certains à parler d’effet de contagion. Ces mots ou expressions utilisés « à toutes les sauces » reçoivent des attitudes négatives de la part de certains locuteurs dits « puristes » et des attitudes positives chez les usagers qui y voient un effet de mode, une inscription dans l’air du temps. Il s’agit plus précisément de mots/expressions qui renvoient à un univers sémantico-lexical et sémantico-référentiel que l’on pourra comprendre dans et à travers le contexte d’utilisation[7]. Georges Kleiber (1987) parle de « mot-chose » qui apparait dans le discours comme indice d’une carence dénominative. Par exemple, « truc »[8] est un substantifs-relais de « chose ». Ce dernier représente à la fois « … la puissance et le caractère sémantique vague et général de mot-caméléon qu’on lui prête d’habitude le prédestinent à un service référentiel « tous azimuts. » (Kleiber, 1987 : 109). Tout comme « chose » et « machin », « truc » désigne toute chose dont on ne sait pas le nom ou l’objet dont le nom ne nous vient pas tout de suite à l’esprit. De ce fait, peut-on dire, à travers l’emploi fréquent chez Asma et Abbas de « truc », qu’il s’agit de lacunes dénominatives (lexicales) ?
On voit bien que l’emploi de « truc » a augmenté chez les trois locuteurs lors de la mobilité. A ce propos, on peut se demander, à l’aune de l’aspect lacunaire auquel il renvoie, si cela peut être considéré comme indice d’une stratégie communicative pour compenser une lacune lexicale (Bange, 1992) ou encore comme un marquage pour se montrer « branché » et par conséquent pour signifier que « je parler comme eux/vous » (les Français).
Par ailleurs, nous avons noté l’usage fréquent de « du coup » et « genre » après la mobilité, chez nos enquêtés (notamment Asma et Abbas). Leur utilisation à tout bout de champ peut être interprétée comme appropriation en cours ou l’indice d’une incompétence lexicale. Il en est de même pour « genre » qui signifie exemple, utilisé au même titre que « comme ». « Genre » et « comme » sont parfois employés l’un à la suite de l’autre et créent un effet cumulatif appréciable (Ploog, 2018).
La locution adverbiale « du coup » est un « connecteur plus ou moins logique » (Foucher Stenklov, 2015, p. 11) qui permet de faire le lien entre deux idées. Dans un article du Figaro et al., intitulé « Des expressions à bannir du bureau "Du coup"… », le chroniqueur Quentin Périnel affirme que du coup est étymologiquement la contrefaçon grossière de « par conséquent ». Selon lui, c’est un indice qui montre que les usagers ne souhaitent pas faire d’efforts d’argumentation (ils bâclent). Pour ce qui nous concerne et sans entrer dans une analyse de ses emplois, nous allons nous arrêter à la fréquence de son usage chez nos trois informateurs en considérant cela comme un indice d’un processus d’appropriation (prise et réemploi).
Fréquence de l’emploi de « truc », « genre » et « du coup » : avant et pendant la mobilité
L’analyse quantitative montre bien la fréquence de l’emploi des trois mots avant et lors de la mobilité. Les écarts entre l’avant et le pendant sont importants et renseignent bien sur l’appropriation des trois mots par nos informateurs. Même si les chiffres parlent d’eux-mêmes en nous offrant une valeur numérique significative du développement langagier, une analyse syntactico-pragmatique permettrait certainement de dégager d’autres indicateurs sur le degré de maitrise et le développement des ressources du répertoire et par là, saisir les contours de la mobilité linguistique.
Tableau : Emploi de « truc »
Tableau : Emploi de « du coup »
Tableau : Emploi de « genre »
Il est intéressant de constater, à la lecture des trois tableaux, que nos informateurs n’emploient pas les trois mots avec la même fréquence. Les chiffres concernant l’usage de « du coup » par Asma et Abbas, de même que « genre » chez Asma, sont significatifs d’une dynamique langagière.
Articulés avec les profils langagiers, les écarts statistiques soulignés entre Nourdine, Asma et Abbas nous renseignent sur l’étendue de leurs répertoires respectifs, sur leur aisance linguistique et sur la dynamique socio-langagière à l’œuvre. Les usages des trois termes induits par la mobilité et le contact avec des locuteurs pour qui le français est la première langue sont un indicateur intéressant qui renseignent sur la mobilité linguistique. Il s’agit, à notre sens, même si parfois les trois mots sont vides de sens, de « lexiculture ». Cette dernière semble correspondre à cette situation de mobilité où le poids de la langue et de la culture sont non négligeables. La notion de « lexiculture » renvoie, selon Robert Galisson (1987), à la valeur que les mots acquièrent par les usages et les usagers. A partir de là, nous pouvons estimer la valeur[9] des trois éléments dans les pratiques langagières de nos informateurs. Une analyse approfondie des valeurs et des fonctions qu’ils remplissent pourraient permettre d’évaluer leur efficacité pragmatique et nous renseigner sur leur appropriation soit comme tics langagiers (effet de contagion), soit comme une conséquence de contacts de langues ou d’une indigence lexicale.
Conclusion
L’analyse des entretiens, recueillis avant et pendant la mobilité académique, a permis de mettre en évidence, chez nos trois enquêtés, un développement des ressources de leurs répertoires verbaux respectifs. En effet, à leur arrivée en France, ils avaient déjà un niveau en français qui leur permettait d’établir des relations sociales avec des locuteurs francophones (Français ou autres). Une fois en immersion, leur contact avec cette langue s’est intensifié, celle-ci étant devenue dominante, voire omniprésente dans les différentes sphères d’activités. La trajectoire migratoire a impliqué non seulement l’emploi intensif du français mais aussi l’apparition d’une nouvelle langue, l’anglais, notamment dans la sphère des études. Par ailleurs, l’usage de l’arabe algérien a été maintenu dans les échanges avec les maghrébins.
Au regard des résultats obtenus, nous dirons que la mobilité linguistique est manifeste, les trois locuteurs sont passés d’un français standard à un français courant ou encore d’une compétence linguistique scolaire et universitaire à une compétence communicative. L’examen du corpus a permis de constater une dynamique des répertoires saisie par l’observation de plusieurs indicateurs présents dans le discours des enquêtés, notamment :
- l’emploi plus important d’expressions idiomatiques;
- l’usage récurrent des mots « du coup », « genre » et « truc » qui pourraient être interprétés comme des tics langagiers ou des signes d’une indigence lexicale;
- la longueur moyenne des énoncés (qui témoignent d’une certaine aisance quant à l’emploi du français);
- la réduction des signaux de feedback (les phatiques qui étaient fréquents chez Abbas avant la mobilité);
- les marques transcodiques comme indices d’une appropriation en cours;
- des réajustements aux plans lexical et morphosyntaxique.
Ainsi, la présente étude illustre le lien entre la mobilité spatiale – et plus généralement la trajectoire de vie – et la dynamique langagière qui l’accompagne. Comme l’affirme Nathalie Thamin (2011, p. 80), « L’étude des trajectoires de vie des individus plurilingues est décisive pour comprendre l’impact de leurs expériences de mobilité et de migration sur les pratiques linguistiques et littératiées, le plurilinguisme et le développement des identités, dans une perspective écologique, historicisée, et localement située ».
Bibliographie
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Annexe
Conventions de base utilisées pour la transcription des entretiens semi-directifs, dans le cadre du projet « Dynamiques spatiales, langagières, identitaires, de la circulation migratoire étudiante (Maghreb, France et Canada) » :
Le souci majeur consiste à rester le plus proche possible des propos tels qu’ils ont été livrés en situation par les locuteurs enquêtés. Ainsi, la transcription doit représenter rigoureusement tout ce qui a été dit, notamment les traces de l’oralité telles que les répétitions, les marques réputées exprimer l’hésitation (comme euh, mh), les phrases inachevées, etc. Lorsque la forme sonore est ambiguë, nous recourrons soit à la transcription phonétique (entre crochets) soit à la multi-transcription (cf. tableau ci-dessus).
Notes
[1] Le projet, déposé à la MSHE Nicolas Le Doux (pour une présentation succincte, http://mshe.univ-fcomte.fr/poles-de-recherche/dynamiques-territoriales/axe-2-observation-des-territoires-daujourdhui/2014-07-09-13-11-18), repose sur la collaboration entre les universités partenaires de Tlemcen et de Bourgogne Franche-Comté à Besançon. Les financements obtenus (BQR 2013 ; LAFEF 2014-2017) ont permis de constituer un corpus de 55 entretiens semi-directifs (35 locuteurs ; 65 heures au total). Ces entretiens ont été recueillis auprès d’étudiants maghrébins à plusieurs étapes de leur parcours (avant/pendant/après la mobilité académique). C’est une partie de ce corpus qui est exploitée pour le présent article.
[2] En Algérie, à l’université, le français continue à occuper une place prépondérante dans les filières scientifiques et techniques.
[3] Á l’heure actuelle, il n’y a pas de véritable consensus sur la façon de nommer cet objet linguistique :« expressions figées » ou « locutions » (G. Gross) ; « unités
phraséologiques » ou « groupements agglutinés » (Bally), « locutions toutes faites » (Saussure), « lexies complexes » (Pottier), « phrases (formes, expressions) figées » (M. Gross), « synthèmes » (Martinet), etc.
[4] Pour parler d’expression figée, il faut qu’il y ait au moins deux unités lexicales autonomisables.
[5] Le sens d’une expression figée n’est pas forcément déductible du sens des unités lexicales qui la composent (la moutarde lui monte au nez).
[6] Les expressions figées n’acceptent pas certaines manipulations syntaxiques et autres modifications (transformations, paradigmes synonymiques, insertion et suppression d’éléments, modification de l’ordre des constituants...).
[7] Ceci qui peut correspondre aux indices de contextualisation (Gumperz, 1989) ou encore aux domaines langagiers (Fishman, 1982).
[8] Truc : utilisé beaucoup par les jeunes en France car il peut remplacer beaucoup de mots et cela leur évite de devoir chercher un vocabulaire plus précis.
[9] Nos informateurs ont tendance à s’approprier des formes nouvelles en gommant celles jugées non conformes ou comme relevant d’un français standard.