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Latifa SARI MOHAMMED (dir.), (2021). Discours, espaces et médiations face à la mondialité. Regards croisés. Alger : Hibr, 317 p.


Insaniyat n° 93, juillet-septembre 2021, p. 85-87


 


Latifa SARI MOHAMMED (dir.), (2021). Discours, espaces et médiations face à la mondialité. Regards croisés. Alger : Hibr, 317 p.

Dédié à la mémoire du Professeur Hadj Miliani, l’ouvrage collectif intitulé « Discours, espaces et médiation face à la mondialité. Regards croisés », dirigé par Latifa Sari Mohammed et préfacé par Ibtissem Chachou, donne suite à une réflexion qui a animé un colloque organisé les 2 et 3 décembre 2019 par le laboratoire de recherche LLC de l’Université de Tlemcen. Les dix-huit contributions, réparties en cinq axes, composant l’ouvrage, interrogent « discours, espaces et médiation » qui tendent à se reconfigurer et à s’adapter à l’ère de la mondialisation.

La notion de médiation est au fondement de la réflexion d’une grande partie des contributions. Dans le premier axe, dédié aux discours et aux représentations, Philippe Blanchet aborde les médiations interlinguistiques et interculturelles. Appréhendées en termes de grilles de perception, langues et cultures conditionnent, selon l’auteur, le regard de l’individu porté sur le monde. Ainsi, la richesse du répertoire linguistique du locuteur accroît sa capacité interprétative et compréhensive de l’Autre. Cependant, la médiation n’est pas seulement l’apanage des langues. En effet, Miriam Khelifa, auteure de la seconde contribution, nous montre de quelle manière la publicité audiovisuelle tend à endosser, à travers la dimension culturelle investie, un rôle médiateur dans les sociétés maghrébines entre les publicistes et les consommateurs.

La mondialisation s’accompagne d’une « intensification » du taux d’immigration des individus du Sud vers le Nord. Les sociétés sont, de ce fait, de plus en plus hétérogènes dans leurs composantes communautaires. Face à la diversité saillante dans la société française, les politiciens, selon Lorendana Trovato adaptent et réajustent leur prise de parole publique. Trovato, clôturant par sa contribution le premier axe, démontre à travers son article comment la dimension pathémique investie comme stratégie persuasive dans le discours politique assure une médiation et crée une connivence avec la société dans son hétérogénéité.

La question de la transmission/apprentissage des langues et de la culture d’origine se pose avec acuité au sein des familles de migrants. Dans le deuxième axe, dédié aux pratiques de communications et aux interactions linguistiques, Mohammed Zakaria Ali-Bencherif nous montre à travers sa contribution de quelle manière les parents et les proches assument le rôle de médiateurs dans la transmission des langues et de la culture d’origine. De plus, la mobilité spatiale intervient, selon le texte de Azzeddin Mahieddine, dans l’enrichissement et le développement de la compétence communicative. Cette dernière n’est pas uniquement tributaire de la durée d’immersion, la trajectoire de vie et les espaces de socialisation sont autant de paramètres à interroger.

Dans l’espace urbain, la création lexicale des jeunes habitants Casablanca, comme en atteste l’étude d’Ammi Abbaci recèle une dimension médiatrice dans le sens où elle traduit les maux vécus par leurs mots. La médiation se manifeste également dans le contexte publicitaire à travers l’actualisation de référents visuels qui tendent, selon Abir Abid à créer une connivence et à assurerun rôle médiateur entre opérateur et abonné.e.s.

La sphère numérique et la sphère médiatique, espace de médiation de l’information par excellence, se départagent le troisième axe de cet ouvrage. Le numérique tend aujourd’hui à constituer un espace d’extériorisation comme en témoigne la contribution de Samira Messaoudi qui met en exergue son rôle dans la médiation des souffrances de femmes victimes de violences conjugales.

À l’ère de la mondialisation, les médias ne sont plus à considérer comme de simples vecteurs de l’information. On observe au regard de la contribution de Elena Gallo que les médias, même s’ils rendent visibles les conflits et événements qui animent la société, ne jouent pas toujours le rôle de médiateurs dans les débats maisexploitent la polémique « comme facteur de spectacularisation ». Par ailleurs, dans la presse écrite, les effets humoristiques recherchés jouent tout aussi le rôle de médiateur. Selon Amal Bachir, l’une des auteurs, l’humour est même engagé dans une visée de conscientisation et crée une connivence avec le lectorat.

Le quatrième axe de l’ouvrage aborde le champ de l’enseignement des langues dans des contextes plurilingues et pluriculturels. Abdelhamid Belhadj Hacen signale dans son texte les failles qui subsistent dans l’enseignement des langues malgré la volonté institutionnelle exprimée en France et au Maghreb de privilégier l’acquisition d’une compétence plurilingue. La contribution de Marie Berchoud engage, dans ce même axe, les enseignants-chercheurs, médiateurs des savoirs, dans un sentier réflexif et les exhorte sur la nécessité d’inclure « le soi » avec son vécu dans l’analyse de leurs pratiques d’enseignement.

La médiation dans la classe de langue peut être d’ordre linguistique. Avantageuse au regard de la contribution de Meriem Stambouli et de Djamila Hamimeche, la médiation linguistique par le recours aux langues maternelles est cependant stigmatisée en Algérie. Par ailleurs, en faisant état d’une expérimentation de narration de récits en langues d’origine, Nathalie Charvy montre de quelle façon cette expérience a pu valoriser l’identité des élèves allophones et a su créer une médiation linguistico-culturelle entre eux. La médiation peut tout aussi se manifester en classe par le recours de l’enseignant à « des gestes professionnels » comme le montre les résultats de l’enquête menée par Rabéa Benamar.

Le dernier axe de l’ouvrage est dédié au monde de la littérature. Un nombre considérable de productions littéraires concordent avec les thématiques soulevées par la mondialisation, telles que les questions d’identité, d’altérité, d’intégration et d’exclusion. Dans ce sens, Souhila Boukri en explorant trois œuvres de Leila Sebbar, montre comment cette dernière déconstruit le « mythe de la pureté ».

De plus, la mondialisation s’accompagne de la mise en visibilité de l’identité, c’est ce que démontre Mohamed Zahir en observant l’ancrage de l’identité culturelle dans la dimension spatiale dans certaines œuvres maghrébines. Quant à la dernière contribution de l’ouvrage, elle s’intéresse aux écrivains de « l’entre deux ». Latifa Sari Mohammed postule que ces derniers usent de l’écriture pour communiquer un vécu et concilier entre les identités.

Dans cet ouvrage, ce n’est pas uniquement les angles d’attaque qui divergent mais les terrains explorés et les objets d’étude sont tout aussi pluriels. Cependant, un élément e constitue l’ossature : la mondialisation. Conçue en termes de partage de ponts culturels universels ou alors comme la mise en visibilité de la singularité de chaque communauté face à une tendance à l’homogénéisation, la mondialisation fait l’objet de débats et débouche sur un bon nombre de questionnements féconds comme en atteste les différentes contributions.

Hayet Imene BOUDJEMAA


 

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