Sélectionnez votre langue

Réflexion sur le rôle du soutien des équipes soignantes et de l’endurance psychologique : le cas des soignants algériens des services Covid


Nassima REMMAS: Université Djilali Liabes, Faculté des Sciences Humaines et Sociales, Département de Psychologie et des Sciences de l'Éducation, 22 000, Sidi Bel Abbes, Algérie.

Rafika HAFDALLAH: Université Lounici Ali- Blida2, Faculté des Sciences Sociales, Département de psychologie, orthophonie et sciences de l'éducation, 9 000, Blida, Algérie.


Télécharger le PDF


Le soin est défini comme le fait de « s´occuper, de rétablir la santé de quelqu´un... impliquant attention, occupation, charge ou responsabilité…» (Olive & Mebtoul, 2010). Il implique un ensemble d´activités techniques et relationnelles, dont la finalité est d´apporter une réponse aux besoins d´autrui (Molinier, Laugier & Paperman, 2009). Cette fonction, fortement relationnelle, pourrait représenter une source de souffrance chez certains professionnels du fait de l’inadaptation des exigences de l’activité avec la structure de leur personnalité, entre leurs désirs et la réalité (Dejours, 1993). Cette souffrance est liée à une difficulté d´élaboration des représentations, affects et émotions, qui pourraient étouffer l´activité intellectuelle et la capacité imaginaire chez ces professionnels, et être source de somatisations multiples, de dépression, d’angoisse, d’agitation… (Barus-Michel, 2004). Selon une étude canadienne,la prévalence des troubles mentaux chez les infirmiers est plus élevée que chez la population générale, soit le trouble dépressif majeur (36,4%), trouble anxieux généralisé (26,1%), burn-out (29,3%) (Carleton & Stelnicki, 2020).

La pandémie du Covid-19 que le monde a subi ces dernières années a marqué toutes les catégories sociales à travers les décès et contaminations multiples, ce qui n´a pas épargné les professionnels de santé puisqu´ils sont les premiers exposés au risque. Cette exposition certaine a contraint les soignants à un rythme de travail exceptionnel : charge et volume horaire de travail - mesures de protection drastiques - confinement et éloignement de leurs familles pour minimiser le risque de transmission. Les contaminations avec hospitalisation et décès de certains professionnels ont été vécus avec une grande difficulté par le reste des soignants en activité. Selon la déclaration du Docteur Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), le nombre de décès dû au Covid-19 parmi les professionnels de santé s’élève à 240 depuis le début de la pandémie, dont 46 professionnels pour le seul mois de Juillet 2021, (Liberté, 01 er août 2021), ce qui a lourdement impacté le moral des soignants.

D’après les professionnels, le Covid-19, au tout début de la pandémie, opérait de manière « atypique », non connue ni maitrisée par les soignants jusque-là. La souffrance des patients était importante et ces derniers décédaient de manière imprévisible suite à des arrêts cardiaques soudains, ce qui a amplifié l´anxiété et la peur chez ces professionnels.

Pour ce qui est du vécu des soignants relevant d’autres pays, nous pouvons citer l’étude menée en France en avril et mai 2020, qui montre la prévalence des symptômes d'anxiété (40,6%), de dépression (46%) et de dissociation péri-traumatique (50,3%) chez les professionnels de santé des services de réanimation qui se sont retrouvés en première ligne lors de la première vague de l'épidémie de Covid-19 (Azoulay et al., 2020). Cette étude a mis en avant les facteurs en cause, à savoir la peur d'être infecté avec tout ce que cela implique comme charge mentale et le manque de temps pour se reposer ou prendre soin de sa propre famille.

Les enquêtes menées auprès du personnel hospitalier en Europe, Asie et Amérique du Nord après les épidémies antérieures à la Covid-19, ont révélé la vulnérabilité du personnel infirmier avec une anxiété centrée sur l’infection avec un risque accru de morbidité psychiatrique. Le contact avec les patients contaminés contribuait à majorer l’anxiété liée à l’infection, le sentiment d’épuisement et la sensation d’être dépassé au travail, voire la survenue de manifestations psychiatriques notamment celles du trouble de stress post-traumatique (El-Hage et al., 2020).

D’après les déclarations des soignants interviewés dans le cadre de notre étude, le vécu oscillait entre débordement émotionnel et contrôle selon la phase de pandémie et les difficultés vécues. La connaissance scientifique sur le virus a permis à ces professionnels de comprendre les précautions à prendre pour se protéger de la contamination, et la thérapeutique envisagée pour sauver les patients. Cette connaissance a permis aux soignants de passer de la première situation de peur paralysante, d’impuissance et de désespoir à la reprise du contrôle.

Nous proposons dans cette étude une réflexion sur la crise sanitaire liée au Covid-19 en posant deux questionnements :

- Comment les soignants ont fait face à la pandémie et qu’est ce qui pourrait les aider à tenir le coup face à tout ce stress ? Cette interrogation implique une réflexion sur le premier temps de la crise caractérisé par l’inconnu et la non-maitrise du virus, l’absence d’organisation spécifique, le manque de moyens et le nombre élevé de contaminations et de décès.

- Quel est l’état psychologique des soignants après le Covid et avec la reprise de la vie « normale » ? Cette question implique une réflexion sur le deuxième temps de la crise, à partir de ce que gardent les soignants comme séquelles psychologiques de cette pandémie.

Méthodologie de la recherche

En vue d’évaluer l’état psychologique actuel des soignants après la pandémie et avec la reprise de la vie « normale », nous avons mené une recherche sur les soignants ayant travaillé au sein des services Covid. Nous avons fait le choix d’utiliser l’échelle HAD (Hospital and Anxiety Depression) et l’échelle d’endurance psychologique (Hardiness).

Population de recherche

Cette recherche concerne les soignants relevant des établissements hospitaliers de l’ouest et du centre du pays. Pour la première étape de la recherche, à savoir la pré-enquête (réalisée en 2022)3, il s’agit d’un groupe de 34 soignants, 24 infirmiers (dont 11 infirmières) et 10 médecins (dont 2 médecins hommes). La majorité de ces soignants a une expérience de moins de 5 ans.

Outils de la recherche

L’échelle HAD (Hospital Anxiety and Depression scale)

La HAD (Hospital Anxiety and Depression Scale) est une échelle élaborée par Zigmond et Snaith en 1983. C’est un auto-questionnaire composé de 14 items permettant d’évaluer deux dimensions, à savoir les symptômes anxieux et les symptômes dépressifs chez les soignants. Pour son utilisation dans le milieu algérien, des enseignants/chercheurs de rang magistral de l’université de Blida 2 ont procédé à la traduction et à la rétro traduction de l’échelle. Après calcul de la fidélité par les méthodes half- split et Alpha de Cronbach, l’échelle s’avère valide à 86,5%. Le coefficient alpha de Cronbach de l'échelle est estimé à (0,878), ce qui signifie que l'échelle est fidèle à (87,8%).

L’Échelle d’endurance psychologique (psychological hardiness)

Cette échelle a été conçue par Imad Ahmed Mukhaimer en 2002, elle comprenait à l'origine 47 items, répartis selon trois dimensions : l’engagement (16 items), le contrôle (15 items), et le défi (16 items). En 2011, Bachir Maamaria a mené une étude sur la population algérienne à l’issue de laquelle l’échelle a été modifiée (le nombre d’items a été augmenté à 16 concernant la dimension contrôle, ce qui a modifié le nombre total des items à 48) ; cette étude a été réalisée sur un échantillon composé de 392 personnes (dont 191 hommes et 201 femmes) parmi des étudiants, des employés et des professeurs de la ville de Batna. L’échelle se caractérise par une grande capacité à faire la distinction entre une endurance élevée et faible, notamment pour l’échantillon féminin (Bachir Maamaria, 2019). La fidélité de l’échelle a été calculée par la méthode « test-retest » et par le coefficient Alpha de Cronbach et s’avère statistiquement significative au niveau 0,01.

Réflexion sur une stratégie de soutien des soignants dans la situation de pandémie : présentation d’une vignette clinique

Nous allons présenter le cas d’une infirmière que nous avons appelée Amel (rencontrée en Octobre 2020 dans un CHU à l’ouest d’Algérie), et qui a présenté un vécu psychologique fortement anxiogène en rapport avec la pandémie.

Amel est âgée de 35 ans, elle est infirmière de bloc depuis une dizaine d´années dans un Centre Hospitalo-Universitaire de l’ouest Algérien. Elle nous a relaté son vécu en rapport avec la crise sanitaire liée au Covid-19.

Amel nous raconte qu’elle a été passionnée par l’hôpital depuis son enfance, manifestant ainsi une « identification » à son entourage familial proche qui compte des médecins et des infirmières. Le métier de soin qu’elle « aime par-dessus tout », représente aussi :

« un devoir » : « j’essaye d’accomplir mon travail avec compassion pour le patient, avec qui je suis très sensible et à qui je ne refuse rien…je cherche constamment l’amélioration de son état de santé qui est une source de satisfaction profonde pour moi » nous dit-elle.

Au tout début de la première vague, Amel vit « un stress intense » en rapport avec un virus nouvellement découvert et donc méconnu ; le manque de mesures de protection ainsi que les moyens de diagnostic rapide n’a fait qu’accentuer son vécu chargé d’angoisse. Pendant cette période qui a duré plus d’un mois où elle était encore au bloc, Amel évoque la peur de contaminer ses deux enfants, ce qui la contraignait à des mesures drastiques qu’elle appliquait quotidiennement en rentrant chez elle (tout enlever et se doucher) ; un rituel qu’elle s’appliquait à respecter sans s’approcher de ses enfants. Cette première distanciation forcée a été très dure à vivre pour Amel, mais aussi pour les enfants en besoin d’affection et de sécurité face à toute cette ambiance chargée d’inquiétude.

En plein pic de cette première vague4, Amel a été affectée au service Covid, ce qu’elle a mal vécu et qu’elle résume en un seul qualificatif : « L’enfer » ; un qualificatif lourd de sens en rapport avec une souffrance cruelle et non expérimentée par les vivants. Cette souffrance était en rapport avec l’afflux des malades en nombre impressionnant, ce qui représentait une charge de travail difficile à assumer pleinement : « on faisait de notre mieux, mais on ne pouvait pas » ; une déclaration chargée tout de même d’une note de culpabilité ; elle relate sa grande difficulté à voir « les malades souffrir et mourir », car elle se sentait « impuissante face à la souffrance des patients », nous dit-elle. Elle était particulièrement marquée par les malades qui se trouvent seuls, sans proches et sans habits (après hospitalisation d’urgence et confinement) ; la douleur était plus importante quand « les malades dyspnéiques décédaient en une fraction de seconde… je les pleurais… puisque j’aurais pu être à leur place ou quelqu´un de mon entourage... ». Ce sentiment renvoie à un processus identificatoire à la douleur de l’autre, voire sa mort.

Dans l’exercice de sa fonction, le soignant est mis face à sa propre angoisse de mort (Valabrega, 1962 ; Jeammet, Reynaud & Consoli, 1996). Certaines recherches sur la problématique de la souffrance des soignants mettent l’accent sur les deuils multiples subis par ces derniers (Goldenberg, 1998). Cette souffrance est liée à l’accumulation des rencontres avec la mort et l´effroi, ce qui pourrait représenter une répétition de situations potentiellement traumatiques pour ces professionnels.

Cette situation traumatogène a été accentuée par la contamination d’autres médecins et infirmiers : leur hospitalisation et le décès de certains d’entre eux ont été mal vécus par les soignants en activité :

« Cette situation a augmenté le sentiment d’impuissance devant un virus dont le mode opératoire n’était pas encore connu, ce qui nous a contraint à redoubler de vigilance à travers le recours à des moyens drastiques de protection : trois paires de gants- quatre à cinq bavettes superposées… de peur de contracter le virus », nous dit Amel.

Cette situation complexe peut engendrer chez certains soignants une douleur liée à un état d’impuissance, différente de la souffrance qui mobiliserait une tentative d’adaptation au manque de satisfaction, et qui caractérise,selon Paul Ricœur, les « affects ouverts sur la réflexivité, le langage, le rapport à soi, le rapport à autrui, le rapport au sens, au questionnement » (cité par Legrand & Loas, 2001, p. 161). Dans une pareille situation, la différence est variable selon les sujets, puisque liée à la force du Moi, à la solidité des assises narcissiques (Barus-Michel, 2004), voire, à l’endurance psychologique.

L’organisation des équipes était structurée selon une garde de 24 heures et un repos de trois jours au lieu de confinement des soignants, loin de leurs familles, et ce pendant un mois et demi (la mère d’Amel s’occupait des deux enfants). Au cours de toute cette période, Amel souffrait d’une perte d’appétit et des insomnies avec réviviscences des faits journaliers, mais aussi des cauchemars où elle revivait la souffrance et la mort des malades. Cette symptomatologie en rapport avec la souffrance émotionnelle a été rapportée de manière plus détaillée par le Center for the Study of Traumatic Stress (2020) à travers les insomnies, l’anxiété, la diminution de la perception de la sécurité, la colère, la recherche de bouc émissaire et sur-sollicitation des soins par peur de la maladie, des comportements à risque, une altération de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, l’isolement social, l’augmentation des conflits familiaux avec violence, etc.

La situation d’isolement forcé a conduit Amel à chercher les informations en rapport avec le virus, ses modes de contamination et ses risques sur la santé, et à maintenir un lien avec le monde extérieur via Internet. Bien que cela puisse avoir un effet positif, à savoir le maintien des liens sociaux, il pourrait aussi constituer une source d’inquiétude et de rumination pour les soignants en quarantaine. Dans ce sens, les recommandations du Center for the Study of Traumatic Stress (2020) insistent sur la limitation de l’exposition aux médias, car une exposition excessive ou à des sources non fiables pourrait augmenter le stress.

Amel nous raconte la procédure de préparation pour entrer dans le service, un rituel installé avec son équipe de garde :

« nous commençons notre service par la désinfection de la chambre de garde en groupe en se partageant les différentes parties ; suite à cela, l’habillement se faisait aussi en groupe où chaque soignante contrôlait aussi la procédure d’habillement et de vérification des tenues des autres tout en s’habillant et en étant sous le contrôle de ses collègues ».

Cette méthode « d’intervision » offrait de la sécurité à chaque membre car se sentant contrôlé aussi par les autres membres de l’équipe. Cette démarche nécessitait du temps et de la concentration pour enchainer les tenues en veillant à respecter l’ordre pour sécuriser la protection au maximum et éviter ainsi toute introduction du virus. Pendant la seule pause de leur garde, Amel et ses collègues pouvaient se reposer, se nourrir et discuter ; c’était le seul moment de répit avant de reprendre leur travail jusqu’au matin. À ce moment, le rituel pour enlever les tenues et se désinfecter se faisait aussi en équipe, à travers le contrôle des unes sur les autres comme sécurité supplémentaire en vue d’éviter le moindre risque ou erreur d’inattention. Ce rituel constituait une source de sécurité devant la peur paralysante des soignants au moment de porter leurs tenues « je tremblais au moment de m’habiller », nous raconte Amel. Cette « procédure collective », spontanément adoptée par Amel et son équipe, ainsi que la forte cohésion constatée, pourrait être interprétée comme un « espace transitionnel » au sens de Winnicott (1971), dont la fonction était de se protéger contre l’angoisse liée à la situation de contamination.

À l’approche de chaque garde, Amel éprouvait une anxiété intense avec insomnies et anticipation angoissante de la charge de travail à venir.

Cette expérience anxieuse se manifestait physiquement et émotionnellement ; Amel la qualifiait d'insurmontable, et la vivait seule dans son espace de confinement.

Après la fin de sa rotation et de la quarantaine exigée pour le personnel soignant, Amel a fait les tests nécessaires qui se sont avérés négatifs lui permettant ainsi de rendre visite à sa mère et de retrouver ses enfants. Cette phase « a été vécue avec un grand apaisement car elle représentait la reprise d’une vie normale », nous dit-elle. Mais qu’est-ce qu’une vie normale en temps de pandémie ?

L’entretien avec Amel s’est déroulé en octobre 2020, alors qu’elle se préparait pour sa deuxième rotation au sein du service Covid ; elle nous a fait part de sa pleine disposition à la réaliser « je suis prête pour travailler et en finir ». Amel évoque le courage qu’elle pense avoir développé suite à cette expérience « j’ai plus de courage après le Corona et une expérience à raconter » tout en partageant avec nous les moments de travail de son équipe à travers les photos qu’elle nous montrait avec fierté. En ce moment, le climat morbide était bien derrière « les informations obtenues sur le Covid nous ont apaisées, nous nous sentons moins déstabilisées par ce virus puisqu’on arrive à comprendre comment il opère ». Cela souligne l’importance de l’information scientifique dans la compréhension des éléments méconnus de la pandémie.

Cette distance a aussi permis à Amel de relever des éléments positifs de cette expérience fortement émotionnelle de par la dimension relationnelle définissant le « care » : « nous avons connu beaucoup de peur mais aussi des moments de joie après la guérison des patients… je donnais le maximum pour eux et leur reconnaissance je la recevais sous forme de prières... ». Cette expérience a permis à Amel (tout comme à de nombreux soignants), de donner un sens à sa fonction et à son rôle dans cette situation chaotique, contribuant à atténuer le sentiment d’impuissance. Ce sens est en rapport avec « l’utilité de ce qui est donné par le soignant, mais aussi ce qui est reçu en termes de reconnaissance ».

Le vécu psychologique face à la pandémie du Covid : entre débordement émotionnel et endurance psychologique

À l’issue de l’entretien, nous avons administré les outils de recherche (HAD et échelle d’endurance psychologique cités plus haut) afin d’évaluer le vécu d’Amel durant cette période fortement perturbante. Les résultats indiquent une symptomatologie anxieuse élevée chez Amel (avec un score de 12) ; elle affiche aussi une endurance psychologique élevée (avec un score de 131).

Sur la base de la vignette clinique et des résultats obtenus, nous émettons la première hypothèse selon laquelle l’endurance psychologique d’Amel l’a protégée contre les traumatismes cumulés durant son premier passage par le service Covid.

Son score élevé en endurance psychologique témoigne de sa capacité à faire face de manière efficace aux défis de la vie, notamment ceux liés à la responsabilité, à l'isolement et à la mort (Schellenberg, 2005).

Selon Kobasa, l’endurance psychologique se compose d’un ensemble de caractéristiques de personnalité dont l’engagement, le contrôle et le défi, permettant de résister face aux événements stressants de la vie (1982) et la participation active de la personne dans ces événements. L'engagement individuel permet la perception de la place qu’occupe l'individu dans son environnement, ce qui est essentiel pour faire face aux événements stressants. Le contrôle renvoie à la croyance que l’individu n’est pas impuissant face aux évènements de la vie et pourrait entreprendre une action face à la situation, impliquant une quête de sens à travers la recherche des résultats des actions entreprises. Le défi consiste dans le fait de percevoir les problèmes comme des opportunités de réalisation et non comme des situations insurmontables, à travers la poursuite de nouvelles expériences ; cette disposition personnelle va à contre sens de la dépression qui contient comme élément central la vision négative, le désespoir et l’impuissance.

Selon les recherches de Kobasa etal., (cité dans Schellenberg, 2005), une endurance psychologique solide fournirait une protection élevée contre les effets du stress. Amel a réussi à surmonter le sentiment d’impuissance éprouvé au début de la pandémie, évitant ainsi de sombrer dans le désespoir à travers l’adoption de méthodes actives de confrontation pour dépasser la situation difficile. L’action se révèle être un moyen de maitriser l’angoisse et la terreur de l’inconnu d’une part, mais aussi de maitriser le risque, d’autre part. L'engagement d’Amel envers les patients et l’envie de contribuer à leur bien-être se manifeste à travers le résultat élevé d’une des dimensions de l’endurance psychologique, à savoir l’engagement, qui constitue une caractéristique essentielle pour faire face aux événements stressants et pour donner un sens à sa vie.

Le soutien du collectif soignant, ou comment faire équipe ? Un étayage nécessaire face à la forte perturbation émotionnelle

Nous formulons la deuxième hypothèse selon laquelle l’équipe de travail d’Amel, avec sa présence rassurante, lui a permis de résister malgré la forte déstabilisation qu’elle a éprouvée lors de son premier passage au sein du service Covid.

Le groupe, selon Didier Anzieu (1984), représente l’enveloppe qui réunit des individus ; pour Kaës, il serait mobilisateur de représentations et jouerait un rôle majeur dans le processus d´identification (Kaës, 2010). Bion a introduit le concept de « contenance » pour désigner la fonction du groupe, qu’il assimile à la fonction « alpha » de la mère pour son bébé, c’est à dire le traitement des éléments psychiques qu’il n’arrive pas à traiter lui-même et qui lui permet ainsi de « penser » (Ducret, 2011). Pour Bion (2002), la fonction de contenance désigne la capacité du groupe à accueillir la souffrance projetée par les membres pour qu’elle soit modulée par la suite ; elle serait alors « la capacité de créer des éléments de pensée, grâce à des processus dynamiques de liaison et de représentations des contenus psychiques impensables. C’est le passage d´une situation sans aucun sens pour le sujet vers un état émotionnel qui le met en lien avec lui-même, avec son corps et avec autrui » (Ducret, 2011, p. 34). Ainsi, l’objet contenant représente ici l’équipe de travail et aurait une fonction stabilisatrice pour le soignant.

Le groupe joue un rôle essentiel dans la restauration et la consolidation des fonctions intégratives du Moi, et pourrait « renforcer l’adaptation à la réalité et développer les capacités de sublimation : le groupe accomplit sa fonction thérapeutique s’il permet au Moi de s´étayer sur lui pour retrouver un fonctionnement approprié » (Kaës, 2010, p. 7). D’autres auteurs insistent également sur le soutien apporté à l’intérieur ou à l’extérieur de l’équipe et qui « constitue un élément susceptible de contrebalancer une charge mentale élevée » (Le Lan & Baubeau, 2004, p. 10). De cette manière, le soutien « professionnel » et « personnel » de l’individu « se traduit par l’ouverture aux autres, par l’empathie et par la transmission d’émotions positives » Ruiller (2012, p.15). Cela nous conduit à la notion de « care collectif » où agir ensemble dans un contexte précis devient la pratique de l’équipe ; c’est un processus de care interactif qui permet aux soignants d’agir au mieux en étant reliés (Beaucourt & Louart, 2011), ce qui engendre une forme de présence proche et empathique favorable à l’équilibre psychique des soignants et à la qualité du travail.

Le soutien apporté à Amel par sa mère en s’occupant de ses enfants, mais aussi celui de son équipe, lui a permis de dépasser la situation fortement perturbatrice et « traumatogène » de la contamination ; cela a également permis l’émergence de la capacité de penser et de travailler, ce qui a été salutaire pour Amel.

Quelles répercussions psychologiques chez les professionnels de santé après la fin de la pandémie ?

Résultats préliminaires de l’étude descriptive

Après le traitement statistique, les résultats se présentent comme suit :

Résultats de l’échelle HAD

Le tableau 1 ci-après montre que (58.82%) des soignants présente une symptomatologie anxieuse douteuse ou de niveau moyen et (23,5%) d’entre eux présentent une symptomatologie anxieuse de niveau élevé. Ce qui représente un pourcentage non négligeable de souffrance chez ces professionnels.

Selon une étude réalisée au Cameroun et qui avait pour objectif d’évaluer l’importance de la symptomatologie anxieuse et dépressive chez les personnels de la santé en rapport avec le Covid-19, il est fait état d’une prévalence de (26,5%) pour la symptomatologie anxieuse modérée et (15,3%) pour la symptomatologie sévère (Mboua, Nguépy Keubo, Ngueuteu Fouaka, 2021). Une autre étude a été réalisée sur les professionnels de santé en France parmi ceux qui ont fait face à la deuxième vague de Covid-19 ; cette dernière met en avant une prévalence des symptômes d'anxiété chez 60% des répondants, de dépression (chez 36%), de syndrome de stress post-traumatique (chez 28%) et de burnout (chez 45%). De plus, deux répondants sur cinq ont affirmé souffrir d'insomnies (Azoulay &al., 2021).

Tableau 1 : Niveau d’anxiété chez les soignants

Niveau de significativité

sig

Khi deux

Degré

Pourcentage

Répétition

Niveau d’anxiété

calculé

Théorique

0.01

0.006

10.118

9.21

2

17.64

06

Absence de symptomatologie

58.82

20

Symptomatologie douteuse / niveau moyen

23.5

08

Symptomatologie certaine/ niveau élevé

Ces résultats semblent corroborer ceux de l’étude menée sur les soignants relevant de l’hôpital de Sfax- Tunisie, prenant en charge des patients ayant des formes modérées à sévères d’une infection à SARS COV2 durant le deuxième trimestre de 2021. Cette étude a révélé que 30% des participants souffraient d’une anxiété et 14% souffraient d’une dépression (Khemakhem et al., 2021).

Le tableau 2 indique que (67,64%) des soignants présentent une symptomatologie dépressive sévère, et (29,4%) d’entre eux présentent une symptomatologie dépressive de niveau moyen, ce qui dénote de la grande souffrance de l’écrasante majorité du groupe ciblé par la recherche (33 soignants parmi les 34). Ces résultats sont supérieurs à ceux révélés par l’étude Camerounaise en 2021 qui a relevé un taux de de dépression générale de 33,1 % et de 9,6 % pour la dépression sévère.

Une revue systématique portant sur 70 études avec 101 017 participants a montré que 30 % des soignants présentent des symptômes anxieux, 31,1 % des symptômes dépressifs et 44 % des troubles du sommeil. Ces résultats s’expliquent, selon les chercheurs,par plusieurs « facteurs traumatisants ou anxiogènes dont la charge de travail quotidienne, le fardeau de la prise de décision dans des situations particulières, les taux quotidiens élevés de mortalité ou encore les changements récurrents des procédures hospitalières » (Marvaldi, Mallet, Dubertret, Rose-Moro
et Guessoum, 2021).

Tableau 2 : Niveau de dépression chez les soignants

Niveau de significativité

sig

Khi deux

Degré

Pourcentage

Répétition

Niveau de dépression

calculé

Théorique

0.01

0.000

21.588

9.21

2

2.94

01

Absence de symptomatologie

29.4

10

Symptomatologie douteuse / niveau moyen

67.64

23

Symptomatologie certaine/ niveau élevé



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Résultats de l’échelle d’endurance/psychological hardiness

Le tableau 3 montre que 44,11% des participants présentent un niveau d’endurance moyen, et 29.41% d’entre eux présentent un niveau d’endurance élevé.

Une première étude menée par Cobaza en 1979, montre que l’endurance psychologique (psychological hardiness) est une variable intermédiaire entre la maladie, le stress et la maladie psychosomatique en offrant une protection pour les individus exposés à un stress élevé. Une seconde étude de Cobaza réalisée en 1982 a démontré que l’endurance avec ses trois dimensions : engagement-contrôle et défi, non seulement atténue la réalité des événements stressants sur l'individu, mais constitue également une source de résistance et de constance, ce qui mobilise des stratégies d'adaptation efficaces, telles que la concentration sur le problème et la recherche d'un soutien (Williams, Weibe, Smith, 1992).

À ce stade de notre étude, il est prématuré de tirer les conclusions sur les valeurs retrouvées étant donné qu’elles concernent un échantillon restreint. Nous pensons qu’un échantillon plus large, permettrait d’obtenir des résultats plus précis concernant les dimensions évaluées et des interprétations sur les séquelles de la pandémie et sur l’endurance psychologique de ces soignants seraient possibles, notamment après la finalisation de l'analyse des résultats de l'enquète.

Tableau3: Niveau d’endurance chez les soignants

Niveau de significativité

sig

Khi deux

Degré

Pourcentage

Répétition

Niveau d’endurance

calculé

Théorique

Non significatif

0.402

1.824

9.21

2

26.47

09

Niveau faible

44.11

15

Niveau moyen

29.41

10

Niveau élevé

 

Conclusion

À partir de ces résultats préliminaires, nous constatons la présence de la symptomatologie anxieuse, la symptomatologie dépressive et un niveau d’endurance moyen ou élevé chez les soignants ayant participé dans les services prenant en charge des patients atteints du Covid-19. Il est essentiel de souligner qu’une symptomatologie anxieuse ou dépressive, même modérée, constitue un problème de santé publique qui nécessite une prise en charge de manière précoce et efficace.

Le premier élément qui nous semble important à relever est en rapport avec l’importance de l’information reçue par les soignants sur la régulation de la peur et l’inquiétude chez eux. Cela renvoie à la nécessité d’une communication en situation de crise qui devrait obéir à certaines règles, selon les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Il est primordial, selon ces recommandations, de fournir aux professionnels de la santé (et aussi à la population) des informations adaptées et actualisées émanant d’une source fiable, impliquant des conseils pratiques sur les méthodes de protection individuelle. L’OMS souligne également l’importance de limiter le temps d’exposition aux informations, qui peuvent être source d’anxiété. Une stratégie d’information étudiée avec une explication claire et concise sur la situation peut contribuer à atténuer l'inquiétude et permettre aux individus de mieux appréhender la pandémie, de la comprendre et de s'y adapter.

Le deuxième élément important concerne le soutien apporté par les acteurs sociaux sous diverses formes. Cela inclut l’aide apportée aux soignants, notamment par les repas fournis et l’hébergement assuré lors de la mise en quarantaine des professionnels, ainsi que le soutien apporté à la population en temps de confinement à travers la distribution de denrées alimentaires pour répondre aux multiples besoins de la population. Cet élan de solidarité a favorisé l’émergence du sentiment de cohésion et de soutien fortement réconfortants en temps de solitude et d’anxiété. Il a permis de cultiver des émotions positives contribuant ainsi à la diminution de la charge mentale. Ceci nous renvoie à la nécessité d’encourager les actions visant le soutien social, pour ses effets certains sur la santé mentale des individus face à la crise, selon les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé.

À partir de la vignette clinique et des résultats préliminaires de l’étude quantitative, il a été observé que les soignants durant la pandémie ont éprouvé une anxiété liée à la crainte d’être contaminé ou de contaminer leurs proches avec une réactivation de l’angoisse de mort. Ce vécu peut être surmonté grâce à l’endurance psychologique qui représente une source de résistance et qui permet la mobilisation de stratégies d'adaptation efficaces. Il semblerait que la période post-pandémie soit marquée par une prépondérance de la symptomatologie dépressive en rapport avec l’accumulation des situations de décès fréquents et soudains, confrontant les soignants à l’inutilité de tous leurs efforts, ce qui pourrait altérer la perception de leur rôle.

Parmi les enseignements à tirer de cette pandémie, il est crucial de porter un intérêt à la santé mentale des soignants qui ont été en première ligne face à la pandémie du Covid-19 en procédant à un dépistage des vulnérabilités psychologiques qui peuvent avoir un impact durable sur le fonctionnement et la qualité de vie des soignants, ce qui pourrait impacter aussi la qualité des soins (Laly, 2020). Nous soulignons l’importance de la prévention de ces séquelles sur le fonctionnement individuel et des équipes en mettant en place une série de mesures à adopter en amont, visant le renforcement des stratégies d’adaptation au stress en réduisant la charge émotionnelle et renforçant les facteurs de résilience en période de crise. L'assistance fournie aux professionnels de santé, notamment par l'apprentissage de méthodes de gestion du stress et par la valorisation de l'engagement essentiel à la résilience psychologique, ainsi que le soutien offert aux équipes, en renforçant leur cohésion et en cultivant un esprit de solidarité collective, pourraient leur permettre de mieux gérer le stress. Cela favoriserait une amélioration de leur performance grâce à l'entraide et au soutien mutuel entre collègues, garantissant ainsi une qualité optimale des soins prodigués aux patients.

Bibliographie

Anzieu, D. (1984). Le Groupe et l’Inconscient. Edition : Bordas

Azoulay, E & al. (2020). Symptoms of Anxiety, Depression, and Peritraumatic Dissociation in Critical Care Clinicians Managing Patients with Covid-19, A Cross-Sectional Study. American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine , 10, (202).

Barus-Michel, J. (2004). Souffrance, sens et croyance. Toulouse : Érès.

Beaucourt, C., Louart, P. (2011). Le besoin de santé organisationnelle dans les établissements de soins : l'impact du care collectif. Management & Avenir , 49. https://urlz.fr/m6fc

Bion, W. (2002). Recherches sur les petits groupes. PUF.

Dejours, C. (2012). Organisation du travail-clivage et aliénation. Dans Travailler- Dossier les ambigüités du care.28. https://urlz.fr/m6fm

Ducret, A. (2011). La contenance, histoire d'un concept. Dans Chapelier, J., Roffat, D. (dir.), Groupe, contenance et créativité.
(p. 13 -35). Érès. https://urlz.fr/sNv9

El-Hage, W. & al. (2020). Les professionnels de santé face à la pandémie de la maladie à coronavirus (Covid-19) : quels risques pour leur santé mentale? Dans L’Encéphale, (46), 3S, (p. 73-80). Doi : 10.1016/j.encep.2020.04.008

Freud, S. (1995). Traitement Psychique (1890). Dans Résultats, idées, problèmes. PUF.

Foucault, M. (1963/1990). Naissance de la clinique. PUF/ coll. Quadrige.

Goldenberg, E. (1982). Travail dans un groupe de soignants : formation, thérapie ou les deux ? Revue de médecine psychosomatique
et de psychologie médicale
, 2.

Jeammet, PH. ; Reynaud, M. & Consoli, S.-M. (1996). Psychologie médicale . Paris : Masson.

Kaës, R. (2010). Avant-propos à la deuxième édition. L'appareil psychique groupal - 3e édition. (p. 3-11). Dunod. https://urlz.fr/sNvp

Khemakhem, R., Dhouib, W., Hakim, S., Baffoun, A., Kammoun, S. (2022). Troubles anxio-dépressifs chez le personnel soignant au cours de la pandémie Covid-19 : particularités d’un hôpital de campagne. Revue des Maladies Respiratoires Actualités , 14(1), 108-109. https://urlz.fr/m6sM

Klein, M. (1978). Si j´étais vous. Dans L´identification- l´autre c´est moi . Les grandes découvertes de la psychanalyse. Paris : TCHOU.

Lan, R. et Baubeau, D. (2004). Les conditions de travail perçues par les professionnels des établissements de santé. Études et Résultats, (335).

Laly, P. (2020). Qualité des soins : la HAS intègre la qualité de vie au travail dans le référentiel de certification. Accompagnement des professionnels pour une meilleure qualité de vie au travail , (110).

Manoukian, A. et Massebeuf, A. (2001). La relation soignant-soigné . France : Éditions LAMARRE.

Mboua, C.-P ; Nguépy Keubo, F.-R. ; Ngueuteu Fouaka, S.-G. (2021). Anxiété et dépression associées à la prise en charge de la
Covid-19 chez les personnels de santé au Cameroun. Evol psychiatr, 1, (86). https://urlz.fr/m6tQ

Molinier, P. ; Laugier, S. ; Paperman, P. (2009). Qu’est-ce que le care ? Souci des autres, sensibilité, responsabilité . Suisse : Payot.

Morasz, L. (1999). Le soignant face à la souffrance. France : Dunod.

Olive, J.-L ; Mebtoul, M. (2010). Le soin sociomorphose.France : Presses Universitaires de Perpignan.

Remmas, N. (2016). Souffrance psychique et processus inconscients chez les professionnels paramédicaux- Etude clinique à la lumière de la théorie psychanalytique . [Thèse de Doctorat en Sciences- Psychologie clinique, Alger 2, Algérie].

Remmas, N. (2017). L’affect dans la relation de soin entre répression et isolation. Corps & Psychisme, 71, (1).

Ruiller, C. (2012). Le caractère socio-émotionnel des relations de soutien social à l'hôpital. Management & Avenir, 52(2), 15-34.

Schellenberg, D.-E. (2005). Coping and Psychological Hardiness and Their Relationship to Depression in Older Adults. PCOM Psychology Dissertations . (124).

Valabrega, J.-P (1962). La relation thérapeutique. Malade et médecin. Paris : Flammarion.

Vannotti, M. (2006). Le métier de médecin entre utopie et désenchantement. Suisse : Ed. Médecine et hygiène.

معمرية بشير، (2019). تقنين قائمة الصلابة النفسية في المجتمع الجزائري. المـــجــلة العربية لعلم النـفس، (7)، 46-66.

Notes :

3 Au moment de la publication de l'article, les résultats de l'enquête en question sont en cours de finalisation et feront l'objet d'une publication ultérieure.

4 Mai et juin 2020.

Appels à contribution

logo du crasc
insaniyat@ crasc.dz
C.R.A.S.C. B.P. 1955 El-M'Naouer Technopôle de l'USTO Bir El Djir 31000 Oran
+ 213 41 62 06 95
+ 213 41 62 07 03
+ 213 41 62 07 05
+ 213 41 62 07 11
+ 213 41 62 06 98
+ 213 41 62 07 04

Recherche