Insaniyat N° 10 | Violence : contributions au débat | p.01-02 | Texte intégral
Ce numéro, le dixième d’Insaniyat devait pour sa partie thématique être coordonné par notre ami et collègue Faouzi ADEL. Il commençait à s’y atteler malgré les affres de la maladie. La mort ne lui laissa pas le temps de mener l’œuvre à son terme. La rédaction dont il faisait partie a tenu à réaliser le projet et présente donc ce volume qui est dédié à la mémoire du défunt ainsi qu’à celle de toutes et de tous ceux qui ont disparu dans la tourmente de ces dernières années, victimes notamment de meurtres et d’assassinats. Le résultat ne correspond sans doute pas tout à fait au projet initial, dont on lira l’argumentaire proposé par le défunt, ainsi que les premières pages d’un article qui devait s’intituler «la violence, les morts et les vivants», mais qu’il n’aura pas eu le temps d’achever. Nous avons tenu cependant, à présenter ces deux textes en demandant à ceux qui peuvent se sentir pris à partie, dans le projet d’argumentaire surtout, de ne pas trop s’en offusquer. L’horreur subie en Algérie depuis l’interruption du processus électoral en janvier 1992, selon les uns et la répression des émeutes d’Octobre 1988 et la légalisation du Mouvement islamiste selon les autres, ont certes suscité autour de tout ce qui touche à la question, un climat de passion particulièrement légitime pour ceux qui ont vécu la tempête, et qui ne pourra s’estomper qu’avec le temps et l’approfondissement du travail «pour comprendre».
Faouzi Adel voulait en fait provoquer un débat jusque-là larvé, ici même en Algérie, et le ton quelque peu polémique lui semblait approprié. Le grand nombre d’écrits produits cette dernière décennie sur la violence politique en Algérie, en France notamment, lui faisait réaliser le retard accumulé en Algérie même, et sans faire dans l’amalgame et la généralisation tout azimut, il lui arrivait de dire son inquiétude face au décalage existant, entre «le bavardage excessif», ailleurs, et le silence inquiet, voire «apeuré» ici. Bien entendu, il faisait encore, dans la provocation intellectuelle, parce que pas un nombre appréciable d’écrits ont malgré tout vu le jour en Algérie, mais plus que par l’université et les institutions de recherche, ils transitaient par la presse écrite (même lorsque leur origine était universitaire). Un grand nombre d’opinions, enquêtes et témoignages, ont en fait été publié en Algérie et pourront servir de matériaux à des approches de type socio-anthropologique, comme l’indiquent déjà des tentatives dont nous espérons nous faire l’écho dans de futures livraisons. En tous les cas, il ne s’agissait pas pour nous de faire double emploi avec le travail abondamment mené par les médias ni d’ailleurs de privilégier des approches théoriques parfois originales, mais dont l’hermétisme trop prononcé risquait de ne pas encourager suffisamment l’échange d’idées sur la question. Les contributions qui ont été retenues pour ce numéro peuvent cependant, donner à penser que nous nous sommes quelque peu éloignés de la problématique originellement présentée et qui ciblait essentiellement la violence politique. La nature des thèmes proposés par les contributeurs (articles, notes de lectures…), nous a amené à élargir la partie thématique de ce numéro, à des préoccupations de violence sociale et symbolique et dans une beaucoup moindre mesure à ne pas nous cantonner au cas algérien. Le lecteur n’aura cependant qu’à se référer au sommaire (et aux résumés des articles relevant de la partie thématique) ou encore mieux, aux diverses contributions pour constater que la violence politique y est représentée de façon privilégiée et se laisse détecter y compris dans des articles (en arabe ou en français) traitant du symbolique et du romanesque. Puisse ce numéro thématique intitulé «Violence : contributions au débat» contribuer à stimuler, la confrontation et le débat féconds, entre chercheurs de diverses origines (champs disciplinaires, nationalités…) et contribuer à encourager l’émergence de nouvelles recherches sur la question, en Algérie même.
Comme d’habitude, le numéro 10 d’Insaniyat vous présentera aussi, en Varia, des articles et comptes-rendus de lectures qui ne relèvent pas (ou pas directement) du domaine thématique proposé.
Le Comité de Rédaction