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Les limites du droit algérien dans la promotion de la qualité de l'environnement bâti

Insaniyat N°5 | 1998 | Villes Algériennes | p. 115-126 | Texte intégral


Wissam MEZIANE: Université de Constantine, 25 000, Constantine, Algérie


 1. Introduction

L'examen des textes juridiques constituant le Droit positif [1] algérien de l'urbanisme et de la construction, révèle une notion qui revient régulièrement la qualité de l'environnement bâti [2]

Certes, le législateur n'a pas défini clairement cette notion, il a même souvent choisi la voie de la généralité ou celle de l'ambiguïté, mais que comprendre quand la législation dispose que «la qualité des constructions leur insertion dans le milieu environnant, le respect du paysage naturel et urbain, la protection du patrimoine et de l'environnement sont d 'intérêt public». Ou encore que «la hauteur des constructions a l’extérieur des parties urbanisées doit être en harmonie avec l'environnement » pour ne citer que deux articles, le premier est issu de la loi sur l'architecture (décret législatif 94 - 07), le second de la loi sur l'urbanisme (loi 90-29). Or il existe un grand décalage en matière de qualité de la production de bâti et de la construction, entre les textes juridiques et la réalité sur le terrain, la qualité reste le grand absent de la construction algérienne.

 Ce grand décalage a principalement pour causes:

1- La méconnaissance des textes, du fait que l'essentiel des textes juridiques constituant le Droit positif de l'urbanisme et de la construction, qui compte principalement 10 textes législatifs et près de 30 textes réglementaires (décrets et arrêtés), a été renouvelé à partir de 1990. De plus, l'absence de codification (code de la construction ou code l'urbanisme) rend l'accès aux différentes règles particulièrement fastidieux.

2- L'inertie et les habitudes qui font que les nouvelles dispositions ne sont pas appliquées à cause de l'absence de formation spécifique et continue (en plus de la formation universitaire [3])

Ainsi, le travail se fait par «expérience» et se transmet par «comme on a l'habitude de faire».

3- La complaisance des maîtres d'ouvrages qui n'ont pas intérêt à appliquer les nouvelles dispositions du fait de leur incapacité chronique a respecter les délais, les plans et leurs engagements contractuels (notamment les promoteurs immobiliers privés). A ces causes, viennent s'ajouter l'insuffisance en matière de maîtrise d'œuvre et l'absence d'un désir de qualité chez les maîtres d'ouvrage, et ce, qu'ils soient publics ou privés (autoconstructeurs ou promoteurs immobiliers).

On peut se demander alors, dans le cadre des profondes mutations que connaît le secteur de la construction, Si la qualité aurait un avenir quelconque ou Si elle serait encore une fois ignorée. Il y a lieu donc de cerner le contexte de la production du bâti et de définir ou du moins de cerner la notion de qualité de l'environnement bâti; enfin, il s'agira de définir les moyens de cette qualité et de relever les lacunes du dispositif de promotion de la qualité architecturale et urbanistique.

2. Les Eléments de la qualité de l'environnement bâti

Il est particulièrement hasardeux de définir la qualité par rapport aux différentes doctrines de l'architecture et de l'urbanisme, et ce pour au moins deux raisons : d'abord du fait de la diversité des approches et de l'absence de consensus. Ensuite, du fait que le législateur a une conception de la qualité de la construction qui est le fondement des textes juridiques. A cause du caractère positiviste de cette étude, la définition (ou du moins les éléments de cette définition) sont extraits de la conception du législateur de la qualité. Ainsi, au terme de l'article 2 de la loi sur l'architecture de 1994 «L'architecture est un ensemble de connaissances et un savoir-faire réunis dans l'art de bâtir. Elle l'émanation, la traduction d'une culture ».

La qualité des constructions, leur insertion dans le milieu environnant, le respect du paysage culturel et urbain, la protection du patrimoine et de l'environnement sont d'intérêt public:

De cette conception, nous pouvons extraire les éléments constitutifs de la qualité de l'environnement bâti.

1-Les règles de l'art de bâtir : c'est l'aspect technique de la construction. Ainsi toute construction doit obligatoirement satisfaire aux normes et aux règles de l'art, ainsi qu'aux normes et aux règles de sécurité. On ne saurait parler de qualité sans une construction solide, confortable et sûre.

2- Le caractère culturel spécifique : l'architecture étant l'émanation et la traduction d'une culture, la qualité reste liée à la culture spécifique à l'échelle de l'influence de la construction. Ainsi, pour un projet à une échelle locale, c'est par rapport à la culture locale que s'entend le caractère spécifique propre. Au contraire, pour un projet de dimension plus grande, la culture spécifique devrait embrasser un plus large éventail de cultures spécifiques, ainsi est le cas de constructions à caractère national tels que la grande bibliothèque ou les archives nationales.

3- L'insertion dans le milieu : est entendue comme une harmonisation avec le tissu urbain, la morphologie du site, les conditions climatologiques. C'est l'intégration au site proprement dite. Ainsi les plans type, les cités dortoirs et autres Z.R.U.N., les lotissements camps de concentration... qui se démarquent totalement de leur milieu environnant par leur volume, leur aspect, leurs réseaux et parfois même leurs couleurs ne s'insèrent pas dans leur milieu.

4- Le respect de paysage naturel et urbain : on entend par paysage la vision pittoresque d'ensemble qu'offre une agglomération ou partie d'agglomération. Elle est le résultat de l'assemblage harmonieux des différents éléments de l'agglomération, des constructions et du site. Tel est le cas du paysage urbain qu'offre la ville de Constantine par la route de Skikda, où se mêle le rocher, la forêt, le ravin du Rhumel, la médina de Constantine et bien sûr la cimenterie de Hamma et les tours bleues et orange de la Z.H.U.N. de Bekira. Le paysage autrefois pittoresque, est irréversiblement terni par la cimenterie et la Z.H. U.N

5- La protection du patrimoine : le patrimoine s'entend l'ensembles des immeubles ou sites présentant un intérêt national du point de vue de l'histoire, de l'art ou de l'archéologie, qu'ils soient classés ou non. Ainsi, la protection du patrimoine implique la mise en valeur, la conservation des monuments et sites et l'enrichissement par toute construction nouvelle.

6- La protection de l'environnement: est le respect des équilibres écologiques, la prévention des risques de pollution et de nuisance, notamment sonores en milieu urbain.

3. L'état et le privé dans la production de cadre bâti

La maîtrise d'ouvrage a été un domaine quasi-exclusif de la personne publique (l'Etat notamment). Elle n'était permise à la personne privée que dans le cadre de l'autoconstruction [4] jusqu'en 1986, date de la première loi sur la promotion immobilière (loi 86-07). En 1988, avec la loi d'orientation sur les entreprises publiques économiques (loi 88-01), certains maîtres d'ouvrages publics dont la C.N~E.P, les O.P.G.I et les agences foncières sont devenues des personnes de droit privé. La véritable réforme sera consécutive à la constitution de 1989 (amendée par la constitution de 1996 actuellement en vigueur) qui a d'une part consacré la fin du monopole de l'Etat, garanti la propriété prive et la liberté de commerce et d'industrie [5]. Ces mutations profondes doivent cependant être pondérées car Si l'Etat n'est plus seul, il demeure le plus important maître de l'ouvrage. Par ailleurs, le secteur privé n'a pas les capacités de faire face aux besoins et à la demande actuelle. Il est donc clair que les changements ne seront vraiment perceptibles que lorsque le niveau de compétence des intervenants privés seront au niveau de ceux de l'Etat, notamment en matière de financement et de mobilisation de ressources. On se retrouve dans une situation très ambiguë où l'Etat ne peut plus intervenir seul et où les intervenants ne peuvent intervenir sans le concours de l'Etat. Les intervenants sont:

  • La personne publique : L'Etat et d'une manière générale les personnes publiques ne doivent plus intervenir directement dans l'activité économique. De ce fait, l'Etat est progressivement appelé à se décharger de la maîtrise d'ouvrage au profit des personnes privées Par contre, il sera toujours investi des missions de service public liées à la construction et notamment:

1- La programmation et la planification des droits d'usage des sols,

2- La réalisation par la maîtrise d'ouvrage déléguée de programmes sociaux ou d'intérêt public. L'Etat conserve de facto un rôle encore très important.

  • La maîtrise d'ouvrage commerciale[6] : le privé sera, de plus en plus, engagé dans la construction, il est appelé à remplacer l'Etat, dans la maîtrise d'ouvrage immobilière et même foncière. L'exemple le plus significatif est sans doute l'appel aux investisseurs privés pour l'aménagement du Hamma à Alger, projet de prestige ayant mobilisé des moyens importants, dont de nombreuses expropriations, initialement financée par des fonds publics.

La question de la qualité de la production de bâti dans ce cadre semble être très pertinente et cela pour deux raisons essentiellement.

1- L'absence d'un marché concurrentiel réel, la maîtrise d'ouvrage privée commerciale est motivée par l'aspect lucratif de l'activité. Or, la qualité ne peut être un argument commercial que dans le cadre d'un marché concurrentiel, ce qui est loin d'être le cas en Algérie, l'offre étant très en deçà de la demande

2- Les coûts élevés de la construction. L'objectif actuel du marché immobilier est la baisse des coûts de la construction. Or, à défaut de réaliser des gains de coût par des systèmes et 'procédés constructifs innovants ou par des financements performants, c'est toujours une économie sur la qualité qui est réalisée.

Ces deux raisons conjuguées ne permettent pas de préjuger d'une éventuelle production de qualité (selon les critères définis précédemment) mais révèlent un véritable risque de voir ce qui fut fait par méconnaissance et négligence, le devenir désormais par malveillance.

On comprend alors que le Droit (ou l'outil juridique) reste un moyen efficace s'il est adapté aux exigences et aux moyens de l'administration.

4. Les moyens de la promotion de la qualité

La promotion de la qualité se fonde essentiellement sur le principe de la prescription des règles de constructions et le contrôle de la conformité de la construction avec ces règles. Elle nécessite aussi la mobilisation des prérogatives de la puissance publique et même des sanctions.

4.1. Les prescriptions

Le principe de la prescription est confirmé par différents articles des lois l'urbanisme et l'architecture. Ainsi «l'utilisation et la gestion des sols urbanisés, la formation et la transformation du cadre bâti s'effectuent dans le cadre des règles générales d'aménagements et d'urbanisme, et des instruments d'aménagement et d'urbanisme[7]» par ailleurs, «les collectivités locales dont le territoire renferme des particularités architecturales sont tenues d'établir des cahiers de prescriptions particulières »[8]. Mais les prescriptions ne sont pas d'égale valeur. On peut les classer en différentes catégories.

4.1.1. Les catégories de prescriptions

1- Les prescriptions générales d'aménagement et d'urbanisme: ce sont les règles contenues dans les différentes lois relatives à l'aménagement et à l'urbanisme. Il s'agit essentiellement de la loi sur l'aménagement du territoire de 1987, la loi sur l'aménagement et l'urbanisme de 1990, ainsi que les règlements pris pour leur application. Ces règles s'appliquent, en principe, à tout le territoire national dans les cas et conditions définis par la loi mais cesse d'être appliquées dès lors qu'un règlement particulier ou spécifique est en vigueur.

2- les prescriptions particulières d'aménagement et d'urbanisme: ce sont les différentes règles contenues dans les instruments d'urbanisme à savoir, le plan directeur d'aménagement et d'urbanisme (P.D.A.U.) et le plan d'occupation du sol (P.O.S.) Ces instruments, dont doit obligatoirement se doter toute commune, complètent ou affinent les règles générales.

3- Les prescriptions particulières architecturales : en plus des prescriptions dites d'urbanisme, il peut exister des prescriptions particulières relatives à l'architecture et prenant en considération les particularités, propres à une région ou site particulier. Cette catégorie de prescriptions est très importante pour la qualité. Seulement, mis à par cette obligation faite aux collectivités locale, rien n'a été dit sur la procédure d'élaboration, d'approbation et du contenu de ces cahiers de prescriptions particulières. Ce qui fait qu'actuellement cette catégorie de prescription n'existe pas.

A ces trois catégories on peut rajouter une quatrième catégorie particulière celle des prescriptions des sites, secteurs et zones protégés: il s'agit des prescriptions liées au classement d'un site soit par rapport un caractère particulier (les territoires à caractère naturel et culturel marqué, monuments ou site historiques ou naturels) ou d'une activité ou d'une ressource (les zones touristiques, les zones franches, le littoral...) évidemment dans le cadre d'une loi. Les prescriptions de cette catégories s’impose lit aux précédentes.

4.1.2. Les prescriptions et la qualité de l'environnement bâti

Il serait utile de se, demander Si l'on peut prescrire la qualité, il est évidemment que la loi ne peut créer que des interdits au contraire des contrats qui créent l'obligation de faire. C'est pour cela que les prescriptions n'ont qu'une portée limitée dans le cas de l'Algérie. La situation actuelle nécessite beaucoup plus d'imagination et d'initiative. Ainsi le coefficient d'occupation du sol (C.O.S) ne donnent que le seuil à ne pas dépasser niais ne dit pas de quelle manière il devrait être fait.

On ne peut considérer les prescriptions que comme des seuils minima de qualité. En vérité, il ne font pas de la promotion de la qualité mais de la prévention de la dégradation.

4.2. Le contrôle

Le contrôle est une des fonctions principales de l'Etat. En urbanisme et architecture le contrôle acquière une toute autre importance d'autant qu'«aucun usage du sol ou construction ne peut se faire on contradiction avec les règlements d 'urbanisme sous peine des sanctions prévues par la loi »[9]. On distingue deux types de contrôle : les contrôles préalables et les ultérieurs.

4.2. 1. Le contrôle préalable

Ce sont l'ensemble des permis nécessaires avant l'engagement de tout travaux de construction. Ce sont le permis de construire, le permis dé lotir, le permis de démolir.

  • Le Permis de construire [10]: il est «exigé pour l'édification de nouvelles constructions, l'extension de constructions existantes, la modification de constructions touchant aux gros œuvres ou aux façades donnant sur l'espace public, la réalisation de murs de soutènement et de clôture en dur [11] » C'est un instrument de contrôle très puissant par ces caractéristiques suivantes:

- Il est exigé pour toute construction sauf les modifications intérieures de moindre importance,

- Il est exigé à tous maître d'ouvrage sauf pour les projets relevant de la défense nationale,

- Le permis de construire est expresse et il n'existe plus de permis tacite,

- Il est précaire, c'est à dire qu'il n'est valable que pour une durée prédéterminée lors de son attribution par acte administratif,

- Le permis de construire est opposable au tiers.

  • Le permis de lotir : il est l'équivalent du permis de construire pour la réalisation de lotissements et tout aménagement foncier. Il est régi par les mêmes règles de forme et de procédure

 Les autorisations de construire peuvent être de véritables moyens de promotion de la qualité car à leurs échelles, elles ont un pouvoir d'orientation précis. Car agissant à l'échelle d'une construction ou d'un lotissement, il est possible de simuler la construction, il est possible d'orienter. Il est possible, en principe, de refuser les permis. Le refus doit être toutefois légalement motivé notamment.

- l'insalubrité et atteinte à l'hygiène publique,

- l'exposition au risque naturel et les nuisances graves

- atteintes à l'environnement.

- incompatibilité avec les instruments d'urbanisme,

- incompatibilité la conservation et la mise en valeur d'un monument ou site historique.

Ainsi les éléments de la qualité tels que définis précédemment peuvent être des motifs valables de refus de permis de construire. On se demande alors pourquoi et cela depuis 1991, aucune des constructions (ou alors très peu) ayant obtenu le permis de construire ne répond pas nécessairement aux critère de qualité de cadre bâti ?

4.2.2 Le contrôle ultérieur ou certificat de conformité

A l'achèvement des travaux tous bénéficiaire est tenu de se faire délivrer un certificat de conformité, qui atteste de la conformité des travaux ont avec le permis de construire[12] La grande faille de cette obligation (l'établissement d'un certificat de conformité) est qu'elle n'est pas accompagnée de sanction, ce qui fait que cette obligation n'est plus qu'une simple recommandation. Par ailleurs, s'il n'y pas conformité au plan, les mesures coercitives seraient comme nous le verrons assez compliquée à mettre en œuvre et en finalité très peu utile pour la société et pour I' individu. Comme en plus le certificat de conformité ne touche pas les véritables contrevenants qui sont généralement les autoconstructeurs (illicite) et que ces derniers n'achèvent les travaux que très longtemps après l'attribution du permis de construire...

4.3. La répression et les sanctions

Longtemps les infractions aux règles d'urbanisme sont restées sans sanctions particulières, et ce n'est qu'avec la loi sur l'architecture que le Droit de la construction s'est doté d'un dispositif répressif particulier. En réalité, la loi de 1990 avait prévu des dispositions particulières (chapitre VII articles 73 à 78) et la loi sur l'architecture a modifié et complété ces dispositions.

4.3.1. Des infractions à l'urbanisme:

Les infractions à l'urbanisme sont

1- L'usage des sols en infraction avec les règles d'urbanisme

2- L'exécution des travaux de construction en infraction avec les règles d'urbanisme

3- La construction sans l'autorisation légale préalable

4- La construction non conforme avec l'autorisation légale préalable

5- Défaut de procédure de déclaration et de publicité

Ces infractions sont lourdement sanctionnées par la loi sur l'urbanisme de 1990 et symboliquement par la loi sur l'architecture de 1994.

Ainsi, l'article 77 de la loi sur l'urbanisme (et qui n'a pas été abrogé au contraire des articles 76 et 78)[13] prévoit des sanctions importantes (comprenant des peines de prison allant jusqu'à une année et des amendes de 3.000,00 à 300.000,00 dinars pouvant être doublées en cas de récidives. Ce permet de qualifier l'infraction comme délit et peuvent être poursuivis, outre le maître de l'ouvrage, l'architecte et I 'entrepreneur.

Mors les infractions précitées sont sanctionnées spécifiquement par la loi sur l'architecture par des amendes très modestes (entre 200,00 et 2.000,00 dinars). Le caractère général de l'article 77 en plus du fait qu'il soit antérieur à la loi sur l'architecture, est abrogé ipso facto. En Droit pénal, il n'est pas possible d'appliquer deux sanctions, de plus le contrevenant bénéficie toujours de la loi la moins rigoureuse.

Ce qui fait, que le déclassement de l'infraction du délit à la contravention et la réduction des sanctions est complètement en contre sens de la promotion de la qualité.

4.3.2. la police d'urbanisme

La loi sur l'architecture, au terme de l'article 55, a institué une police d'urbanisme habilitée à rechercher et constater les infractions d'urbanisme. Cette police est constituée d'architectes, d'ingénieurs et de techniciens fonctionnaires de l'administration centrale du ministère et des services déconcentrés de wilaya chargé de l'architecture et de l'urbanisme.

5. La société civile et la promotion de la qualité de l'environnement bâti

Il est reconnu un rôle important à la société civile par le biais des associations et même aux individus dans l'élaboration des règles d'urbanisme et dans les actions en justice en cas d'infraction aux règles d'urbanisme et d'architecture.

5.1. Participation à l'élaboration des instruments d'urbanisme

L'élaboration des instruments d'urbanisme est prescrite par délibération des collectivités territoriales. Leur adoption obéit à certaines règles de procédures dont la participation des associations de citoyens et l'enquête publique.

  • Participation des associations de citoyens: aux termes de l'article 7 et 9 du décret exécutif 91-177 et l'article 7 et 9 du décret exécutif 91-178, «le président d'A.P.C... (fait) connaître. L'établissement de l'instrument d'urbanisme (P.D.A.U ou P.O.S. selon le cas). Les destinataires disposent de 15 jours pour faire connaître s'ils veulent être associés à l'élaboration ». Ensuite, le projet adopté en délibération est notifié aux associations qui disposent d'un délai de 60 jours pour faire connaître leurs avis ou observations.

En pratique cette procédure n'est jamais suivie, de plus aucune association n'a jamais fait valoir ce droit (du moins à notre connaissance du fait qu'aucune affaire en justice n'a été enregistrée dans ce sens). Pourtant cette règle de procédure peut annuler l'instrument d'urbanisme…

  • La participation des particuliers: l'approbation des instruments d'urbanisme est soumise à enquête publique pendant soixante jours, à cet effet.

- Il est fixé un lieu de consultation du projet et désigné le commissaire enquêteur.

- ouvert un registre des enquêtes.

Cette procédure est toujours suivie mais les requêtes des citoyens les sont moins.

En conclusion, les associations, comme un particulier, n'ont pas ou peu de recours contre un instrument d'urbanisme. De ce fait, la participation des citoyens est une simple formalité, dès lors qu'ils n'émettent que des avis. Ils ne peuvent théoriquement que contester les constructions qui sont en infraction avec les règles d'urbanisme au terme de l'article 74 de la loi sur l'urbanisme de 1990.

5.2. La participation dans la protection et la préservation de la qualité de l'environnement bâti

La loi SUT l'architecture a «créé dans chaque wilaya un organe consultatif dit comité d'architecture, d'urbanisme et d'environnement bâti» [14] celui-ci a pour missions: la protection du patrimoine architectural et la protection et la préservation de la. qualité de l'environnement bâti, notamment par les actions suivantes:

 - Identification et inventaire des bâtis du patrimoine architectural, promotion des caractéristiques locales.

- L'information et la sensibilisation des maîtres d'ouvrage et du public.

- Donner un avis lors de l'instruction des demandes de permis de construire.

La loi dispose que les Comités d'Architecture de l'Urbanisme et de l'Environnement Bâti sont composé au tiers de représentants ~ la société civile alors que le texte d'application de cette loi qui est le décret exécutif 96-370 fixe le nombre des représentants des associations à 2 [15] On voit tout le poids accordé à la société civile par ce texte!

On conçoit donc assez mal comment ce comité pourrait agir efficacement avec aussi peu de membres.

6. Conclusion

La qualité de la production de cadre bâti et de l'environnement reste toujours du point de vue du Droit une chimère. Le fait est que ni la loi, ni une quelconque autorité, ne peuvent contraindre un maître d'ouvrage, dès lors qu'il est autorisé par l'administration à construire, à réaliser une construction, notamment publique qui réponde aux impératifs de qualité reconnus et contenus dans les textes juridiques, en permettant de penser qu'un réel désir de qualité existe.

L'architecture même hissée au rang d'intérêt public ne peut être considérée réellement et valablement comme telle, dès lors qu'une loi pénale ne sanctionne la médiocrité

Il est espéré que la justice, si elle était saisie (et le juge peut s'autosaisir dans les cas où l'intérêt public est en jeu) puisse rétablir l’architecture en son bon droit.

La qualité de l'environnement bâti ne bénéficie même pas de la présomption d'innocence, elle est régulièrement condamnée sans jugement.

Bibliographie

1. Liet. G. Vaux. Thillier. A.- le droit de la construction édition ITEC.-Paris, 1994.

2. Huet, M..- le droit de l'architecture.- Paris, édition économica, 1990.

3. Beaugrand, G..- Eléments de législation du bâtiment.- Paris, édition Eyrolles, 1979.

 4. Jacquignon, L. et Dana, Y.M..- le droit de l'urbanisme.- Paris, éditions Eycrolles. 1978.

5. Malinvaud, P. Jestaz, P..- le droit de la promotion immobilière.- Paris éditions Dalloz, 1995.

6. Lanversin, J de .- la région et l'aménagement du territoire.- Paris, Ed. ITEC, 1979.

7. Trotabas, L. et Isoart, P..- droit public.- Paris. éditions LGDJ, 1996.


Notes

[1]- On entend par droit positif l'ensemble des règles en vigueur à une époque donnée dans un Etat. Le droit positif de l'urbanisme et de la construction comprend, donc, toutes les règles juridiques (législatives ou réglementaires) régissant la construction, qu'elles soient contenues dans des textes particuliers à la construction ou à l'urbanisme ou tout autre texte général ou particulier

[2]- L'expression environnement bâti est employée pour signifier tout ce qui n'est pas naturel. Elle a été utilisée dans le décret législatif 94-07 relatif à l'architecture. A notre sens, elle s'apparente à l'expression cadre bâti qui elle, englobe la production des trois disciplines urbanisme, architecture et construction.

[3]- Il faut remarquer que l'enseignement du droit n'est toujours pas inclus dans le cursus des architectes. Il a été proposé (et retenu dans le nouveau programme de 1997) mais n'a toujours pas été intégré. Or, l'essentiel des fonctionnaires chargés de l'instruction des demandes de permis de construire et les inspecteurs de l'urbanisme sont architectes de formation.

[4]- L'autoconstructeur est la personne qui construit pour ses besoins propres ou pour ceux de sa famille, aux termes la loi 95-07 relative aux assurances.

[5] Au terme de l'article 37 de la constitution de 1996, la liberté de commerce et d'industrie est garantie et s'exerce dans le cadre de la loi. Cette disposition a des conséquences importantes notamment la fin de toute forme de monopole et le respect donc règles de la concurrence. Ce qui met sur le même pied d'égalité les entreprises à capitaux publics et celles appartenant aux privés.

[6]- Il est entendu par commercial le fait d'être soumis aux règles du Droit Commercial dont l'obligation de réaliser des profits et être soumis aux règles de libre concurrence.

[7]- Loi 90-29 article 2.

[8] - Décret législatif 94-07 article 5.

[9]- Loi 90-29 article 10 alinéa 2.

[10]- Le permis de construire était régi jusqu'en 1990 par une loi particulière, la - loi 82-02 abrégée par la loi 90-29 article 80.

[11]- Loi 90-29 article 52

[12]- Loi 90-29 article 75.

[13]- Décret Législatif 94-07 article 59.

[14]- Décret législatif 94-07 article 35.

[15]- Décret législatif 94-07 article 35 et décret exécutif 96-370 article 2.

 

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